La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/02/2010 | FRANCE | N°08-44632

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 février 2010, 08-44632


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 2 septembre 2008), que M. X... engagé le 7 octobre 1994 par la société Victoria multimédia, aux droits de laquelle se substitue la société de presse Le Républicain lorrain, a été licencié pour faute grave le 11 juin 2002 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes relatives à son licenciement fondé sur une faute grave alors, selon le moyen :
1° / que nul ne peut se créer de preuve à soi-même ; que pour d

écider que le grief reproché à M. X... dans la lettre de licenciement, selon lequ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 2 septembre 2008), que M. X... engagé le 7 octobre 1994 par la société Victoria multimédia, aux droits de laquelle se substitue la société de presse Le Républicain lorrain, a été licencié pour faute grave le 11 juin 2002 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes relatives à son licenciement fondé sur une faute grave alors, selon le moyen :
1° / que nul ne peut se créer de preuve à soi-même ; que pour décider que le grief reproché à M. X... dans la lettre de licenciement, selon lequel il aurait invité Mme Y... à visionner des images pornographiques, était établi, la cour d'appel s'est fondée sur le rapport du 24 mai 2002 établi par M. Z..., directeur des services publicités, et signataire de la lettre de licenciement ainsi que sur l'attestation établie par le même M. Z..., le 14 mai 2004, pour confirmer l'authenticité des faits qu'il avait énoncés lui-même dans son rapport du 24 mai 2002 ; qu'elle a violé l'article 1315 du code civil ;
2° / si le harcèlement sexuel constitue une faute grave, tel n'est pas le cas d'un simple comportement déplacé ou grossier à l'égard de collègues de travail ; que la cour d'appel, qui a constaté que son comportement n'était pas constitutif de harcèlement comme indiqué dans la lettre de licenciement, mais qui a cependant décidé que le comportement et les propos déplacés qui lui étaient reprochés à l'égard de ses collègues constituaient une faute grave, a violé les articles L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
3° / qu'en toute hypothèse la gravité de la faute du salarié est appréciée compte tenu de l'atmosphère de l'entreprise et du comportement professionnel du salarié dans le milieu du travail ainsi que de son ancienneté ; que la cour d'appel a constaté qu'il avait été embauché dans l'entreprise en 1994 et qu'il ressortait des 13 attestations produites par le salarié qu'il était un homme travailleur, compétent et serviable ; qu'elle a cependant considéré que ces éléments ne pouvaient remettre en cause la qualification des faits dénoncés ; qu'en refusant de prendre en considération le comportement exemplaire tant sur le plan personnel que professionnel du salarié pendant huit ans dans l'appréciation de la gravité de la faute, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui ne s'est pas exclusivement fondée sur le rapport et l'attestation de M. Z..., a, par une appréciation souveraine des autres éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, retenu que le salarié avait choqué la pudeur de plusieurs collègues de sexe féminin et d'une stagiaire en leur tenant des propos ou leur adressant des messages électroniques inconvenants, en les invitant à regarder sur son ordinateur des films ou images à caractère pornographique et en ayant des gestes déplacés, a pu décider que ce comportement du salarié rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me de Nervo, avocat aux Conseils pour M. X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit et jugé que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une faute grave et de l'avoir en conséquence débouté de ses demandes
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... a été embauché comme graphiste à compter du octobre 1994, suivant contrat à durée indéterminée du 22 septembre 1994 par la société Victoria Multi Media laquelle appartenant au groupe de presse le Républicain Lorrain exerce une activité d'étude de conception et de réalisation d'outils multi médiatiques et de publicité à partir de son siège en Moselle ; que par lettre remise en main propre du 27 mai 2002, Monsieur X... a été convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé au 3 juin 2002 ; que par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 juin 2002 il a été licencié pour faute grave au motif suivant : « en date du 24 mai 2002, vous avez été directement mis en cause par une stagiaire, vous reprochant votre comportement immoral envers sa personne l'ayant invitée à visionner sur votre poste de travail des images fixes ou animées à caractère pornographique ; ces faits confirmés par écrit par cette stagiaire ont été corroborés par vos collègues féminins, se plaignant d'invitations semblables ; vous avez également tenu des propos licencieux au sein de la société et plus précisément à cette stagiaire et vous vous êtes rendu coupable d'attitudes obscènes envers vos collègues du sexe féminin ; par vos agissements vous avez bafoué les règles essentielles de moralité et vous avez porté atteinte à la dignité de ces personnes ; nous ne pouvons tolérer un tel comportement qui est réprimé par l'article L 122-47 du code du travail ; (…) que du rapport daté du 24 mai 2002 adressé par Monsieur Jean Luc Z..., directeur des services de publicité à la direction des ressources humaines, il ressort que ce dernier, lors d'un entretien ayant eu lieu le même jour a été informé par Mademoiselle Fanny Y... qui terminait un stage de 4 semaines (22 avril au 25 mai 2002) dans l'entreprise de ce que Monsieur Patrice X..., le responsable de son stage lui avait fait « des propositions équivoques qui ne laissaient aucun doute de ses intentions » ; que plus précisément Monsieur Z... indiquait que Mademoiselle Y... lui avait rapporté que le vendredi 10 mai alors que beaucoup d'employés faisaient le pont et que l'environnement était plus calme, Monsieur X... lui avait demander de se rapprocher de son ordinateur pour lui montrer « quelque chose » qui devait s'avérer être des images (un film) à caractère pornographique ; qu'elle précisait également que Monsieur X... lui avait envoyé des lettres électroniques faisant état de ses rêves nocturnes et de l'interprétation de ceux-ci ; que Monsieur Z... indiquait dans son rapport que Madame Djamila B... à laquelle s'était confiée Fanny Y... et qui lui avait conseillé de venir rapporter les faits et Madame Corinne C..., collègues de travail de Monsieur X... interrogées sur l'attitude de ce dernier dénonçaient de sa part un comportement malsain qui mettait une tension permanente sur le lieu de travail ; que par attestation du 14 mai 2004, Monsieur jean Luc Z... confirmait l'authenticité des faits énoncés dans son rapport du 24 mai 2002 ; que le courrier du 29 mai 2002, signé Y... portant en entête l'identité de Fanny Y... suivie de son adresse dénonce le comportement irrespectueux de Monsieur Patrice X... à l'égard de Mademoiselle Y... durant son stage et plus précisément indique que celui-ci a dépassé les limites de la relation formateur stagiaire en lui demandant de venir visionner sur son poste de travail un film pornographique alors qu'ils étaient seuls au 4ème étage et qu'un des mails non professionnels qu'il lui envoyait était à connotation sexuelle et érotique impliquant directement Mademoiselle Y... ; que du compte rendu de l'entretien préalable il ressort que Monsieur X... a nié les faits qui lui étaient imputés par Mademoiselle Y... précisant n'avoir jamais visionné de film pornographique à son travail ; que du compte rendu de la confrontation ayant eu lieu avec Madame C... et Madame B..., le 5 juin 2002 et avec l'accord de Monsieur X..., il ressort que ce dernier a reconnu avoir visionné avec Madame C... des images à caractère pornographique à son travail mais pas avec Mademoiselle Y... ; que Madame Colette D...
E... responsable des relations sociales et juridiques a le 14 mai 2004 attesté de l'authenticité des propos rapportés dans les comptes-rendus dactylographiés des entretien et confrontation ayant eu lieu respectivement les 3 juin et 5 juin 2002 ; qu'il ressort du compte rendu de la confrontation du 5 juin 2002 que Madame Djamila B... a indiqué que Mademoiselle Y... à son retour de vacances le 21 mai, s'était confiée à elle concernant le comportement de Patrice X... en ce qu'il avait « outrepassé ses droits » ; que lorsqu'elle a été entendue le 17 mars 2008 devant la chambre sociale de la Cour, elle a précisé que Mademoiselle Y... stagiaire lui avait confié qu'elle avait peur de son référant, lequel lui adressait des mails à connotation sexuelle l'invitait à regarder des films pornographiques ; que lors de la confrontation du 5 juin 2002, Madame B... chef de publicité junior dans l'entreprise a indiqué à Patrice X... qu'elle l'avait souvent mis en garde ; que dans l'attestation établie le 4 mars 2004, elle indique que le comportement de Monsieur X... était incorrect en ce qu'il employait une terminologie déplacée avec les femmes ; qu'il émettait oralement des envies déplacées à propos des femmes de Victoria Multimedia ; qu'il avait des gestes déplacés à l'égard des femmes ; qu'il simulait l'acte sexuel avec Madame C... qui n'appréciait pas du tout et qu'il évoquait sa vie intime au sein de la société ; que lorsqu'elle a été entendue devant la cour Madame B... a confirmé les termes de son attestation précisant que lorsque Monsieur X... trouvait une femme de Victoria Multimedia à son goût, il lui faisait comprendre qu'il aurait bien un rapport sexuel avec elle ; qu'il lui avait dit une fois de « ramener son cul » mais après sa réaction cinglante n'avait plus jamais recommencé ; qu'il mimait l'acte sexuel en se plaçant derrière Madame C... lorsque cette dernière se trouvait penchée en avant, laquelle le remettait gentiment à sa place en lui demandant d'avoir un comportement plus élégant ; qu'il parlait fréquemment de sa vie sexuelle sur le lieu de travail indiquant notamment s'il était satisfait sur ce plan et ce de manière régulière ; que de la confrontation du 5 juin 2002, il ressort que Madame Corinne C... assistance commerciale et marketing a reproché à Monsieur Patrice X... ses attitudes non professionnelles vis-à-vis de femmes en mimant avec Djamila B... des attitudes obscènes ; qu'elle a précisé qu'il traitait les gens de « pétasse » et « poufiasse » et qu'elle l'avait prévenu que cela lui porterait préjudice ; que dans l'attestation qu'elle a établie le 4 mars 2004, Madame C... a indiqué avoir vu Monsieur Patrice X... regarder à plusieurs reprises sur son ordinateur professionnel des images des vidéos à caractère pornographique, l'avoir entendu commenter ces images et appeler ponctuellement d'autres personnes pour les montrer dont elle-même ; avoir personnellement fait l'objet plusieurs fois de simulations d'un acte sexuel sur le lieu de travail devant ses collègues dont Madame B... et Monsieur F... ; avoir entendu Monsieur X... émettre des appréciations sur les physiques et certaines fois, une envie à l'égard du personnel féminin de la société ; avoir entendu Monsieur X... parler de sa vie intime ; que lorsqu'elle a été entendue devant la cour le 17 mars 2008, Madame C... a confirmé les termes de son attestation précisant que Monsieur X... dont le poste de travail se trouvait à proximité de son bureau, l'appelait pendant les heures de travail pour pensait-elle les besoins de leur activité professionnelle alors qu'en réalité c'était pour lui montrer des images pornographiques ; qu'elle a indiqué qu'il procédait de cette manière à l'égard de femmes qui travaillaient à l'étage et pas particulièrement avec Mademoiselle Y... ou elle-même ; qu'il lui arrivait quelquefois alors qu'elle était penchée en avant de se mettre derrière elle pour mimer l'acte sexuel ; qu'elle lui avait dit une fois que cela lui attirerait des problèmes et qu'elle n'appréciait pas ; que Monsieur X... employait des mots déplacés pour parler des femmes comme pétasses ; qu'il parlait de l'intimité de sa vie sexuelle ; qu'abstraction faite de la lettre du 29 mai 2002 qu'il convient d'écarter des débats dès lors qu'elle se trouve contestée dans son authenticité qu'aucun document comparatif produit ne permet de vérifier, il s'évince des précédentes énonciations que les faits circonstanciés invoqués dans la lettre de licenciement se trouvent suffisamment démontrés notamment en ce qu'ils concernent la stagiaire, Mademoiselle Y... ; qu'en effet si des attestations produites (13) par le salarié en cause il ressort que ce dernier était un homme travailleur professionnellement compétent serviable disponible et si certains auteurs indiquent n'avoir jamais eu à connaître ou à pâtir d'une attitude incorrecte de sa part ces témoignages ne sauraient pour autant remettre en cause les faits circonstanciés dénoncés avec précision notamment par Madame B... et C..., ce d'autant qu'au nombre de ces attestations figure celle de Monsieur Lionel F... dont les témoignages successifs sont variables puisque ce dernier indique dans l'attestation qu'il a établie n'avoir jamais constaté d'attitude déplacée de la part de Monsieur X... alors que du compte rendu de la confrontation du 5 juin 2002 il ressort qu'il a indiqué avoir vu mais aussi d'autres personnes avoir des gestes déplacés vis-à-vis de Madame C... et que lors de son audition par la cour le 17 mars 2008 il a indiqué avoir vu Monsieur X... mimer l'acte sexuel en se collant contre Madame C... lorsqu'il se trouvait derrière elle ; que l'on ne saurait non plus invoquer le comportement ambigu de Madame C... ; qu'il y a lieu de relever que la cour a pu constater lors de l'audience du 17 mars 2008 à laquelle les témoins ont été entendus que Madame C... se présentait comme une personne douve timide et réservée ; que même si les faits invoqués à l'encontre de Monsieur X... ne constituent pas un harcèlement sexuel, ils caractérisent une faute grave justifiant le licenciement litigieux ; que la seule référence inexacte à l'article L 122-47 du code du travail par l'employeur dans la lettre de licenciement ne saurait priver le licenciement de cause réelle et sérieuse alors que les faits constitutifs des griefs caractérisant le motif du licenciement y sont énoncés de manière claire et précise indépendamment de cette référence légale erronée ; que la gravité de la faute se trouve également caractérisée par le comportement de Monsieur X... attentatoire à la dignité humaine des collègues féminines pour certaines encore dans l'entreprise caractérisant une violation des obligations résultant de son contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de celui-ci dans l'entreprise ;
1) ALORS QUE nul ne peut se créer de preuve à soi-même ; que pour décider que le grief reproché à Monsieur X... dans la lettre de licenciement, selon lequel il aurait invité Mademoiselle Y... à visionner une images pornographiques, était établi, la cour d'appel s'est fondée sur le rapport du 24 mai 2002 établi par Monsieur Z..., directeur des services publicités, et signataire de la lettre de licenciement ainsi que sur l'attestation établie par le même Monsieur Z..., le 14 mai 2004 pour confirmer l'authenticité des faits qu'il avait énoncés lui-même dans son rapport du 24 mai 2002 ; qu'elle a violé l'article 1315 du code civil
2) ALORS QUE si le harcèlement sexuel constitue une faute grave, tel n'est pas le cas d'un simple comportement déplacé ou grossier à l'égard de collègues de travail ; que la cour d'appel qui constaté que le comportement de Monsieur X... n'était pas constitutif de harcèlement comme indiqué dans la lettre de licenciement, mais qui a cependant décidé que le comportement et les propos déplacés qui lui étaient reprochés à l'égard de ses collègues constituaient une faute grave, a violé les articles L 1234-5 et L 1234-9 du code du travail
3) ALORS QU'en toute hypothèse la gravité de la faute du salarié est appréciée compte tenu de l'atmosphère de l'entreprise et du comportement professionnel du salarié dans le milieu du travail ainsi que de son ancienneté ; que la cour d'appel a constaté que Monsieur X... avait été embauché dans l'entreprise en 1994 et qu'il ressortait des 13 attestations produites par le salarié qu'il était un homme travailleur compétent et serviable ; qu'elle a cependant considéré que ces éléments ne pouvaient remettre en cause la qualification des faits dénoncés ; qu'en refusant de prendre en considération le comportement exemplaire tant sur le plan personnel que professionnel du salarié pendant 8 ans dans l'appréciation de la gravité de la faute, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L 1234-5 et L 1234-9 du code du travail


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44632
Date de la décision : 09/02/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 02 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 fév. 2010, pourvoi n°08-44632


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44632
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award