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03/02/2010 | FRANCE | N°09-12359

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 03 février 2010, 09-12359


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 2 décembre 2008), qu'aux termes d'un acte d'échange reçu le 14 mars 2001, la commune de Gèdre (la commune) et Mme X... ont constitué au profit de parcelles appartenant à celle-ci des servitudes sur différentes parcelles appartenant à la commune destinées à être intégrées dans son domaine public ; que Mme X... a fait donation de ses parcelles à M. Y... lequel y a construit un immeuble d'habitation doté d'une ouverture sur sa partie Nord

; que la commune ayant construit sur la parcelle A2009 un immeuble confr...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 2 décembre 2008), qu'aux termes d'un acte d'échange reçu le 14 mars 2001, la commune de Gèdre (la commune) et Mme X... ont constitué au profit de parcelles appartenant à celle-ci des servitudes sur différentes parcelles appartenant à la commune destinées à être intégrées dans son domaine public ; que Mme X... a fait donation de ses parcelles à M. Y... lequel y a construit un immeuble d'habitation doté d'une ouverture sur sa partie Nord ; que la commune ayant construit sur la parcelle A2009 un immeuble confrontant la limite Nord de son fonds, M. Y... l'a assignée en démolition de cette construction ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de le débouter de cette demande, alors, selon le moyen :
1° / que le principe d'inaliénabilité du domaine public ne s'applique pas aux biens dépendant du domaine privé communal lesquels peuvent être frappés de servitude conventionnelle de droit privé ; que pour faire partie du domaine public, un bien appartenant à une personne publique doit être affecté soit à l'usage direct du public, soit à un service public et faire l'objet, dans ce cas, d'un aménagement certain, effectif et indispensable à l'exécution de cette mission de service public, que la cour d'appel a considéré que la clause constitutive de servitudes de vue grevant les parcelles acquises par la commune de Gèdre au profit du fonds appartenant à M. Y... avait un objet illicite au seul motif que " les parcelles acquises par la commune de Gèdre au titre de l'acte d'échange passé avec Mme X... étaient expressément destinées à être intégrées dans le domaine public de la commune " ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si les parcelles acquises par la commune de Gèdre aux termes de l'acte authentique du 14 mars 2001 n'appartenaient pas à son domaine privé faute d'un aménagement certain, effectif et indispensable à l'exécution d'une mission de service public, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1311-1 du code général des collectivités territoriales, de l'article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, ensemble de l'article 1134 du code civil ;
2°) subsidiairement, que les immeubles du domaine public peuvent être grevés de servitudes conventionnelles dès lors que leur existence est compatible avec l'affectation desdits immeubles ; qu'en considérant dès lors que la clause constitutive de servitudes de vue grevant les parcelles acquises par la commune de Gèdre au profit du fonds appartenant à M. Y... avait un objet illicite au seul motif que " les parcelles acquises par la commune de Gèdre au titre de l'acte d'échange passé avec Mme X... étaient expressément destinées à être intégrées dans le domaine public de la commune " sans s'expliquer aucunement sur la prétendue incompatibilité entre les servitudes de vue grevant les parcelles acquises par la commune et la construction sur celles-ci d'une " Maison de cirques ", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1311-1, alinéa 1, du code général des collectivités territoriales, et des articles L. 2111-1 et L. 2122-4 du code généal de la propriété des personnes publiques ;
3° / qu'aux termes de l'acte authentique d'échange entre la commune de Gèdre et Mme X... du 14 mars 2001 tel que reproduits littéralement dans l'acte de donation du 24 avril 2001, " les parties conviennent expressément de constituer sur les parcelles A n° 1748, 1749, 1925, 1927, 1754, 2008, 2009 et 2013 au profit du fonds dominant une servitude de vue à titre réel et perpétuel la plus large (vues droites et obliques) (...) comme conséquence du droit de vue ainsi conféré, le représentant de la commune es qualités grève la parcelle A n° 1754 et une partie de la parcelle A n° 2009 (...), lesdites parcelles formant partie du fonds servant, d'une servitude non aedificandi au profit du fonds dominant et ce sur une largeur de huit mètres depuis la propriété de Mme X.... Pour le surplus de la parcelle n° 2009, la commune s'oblige, ès qualités son représentant, pour le cas où elle déciderait de construire, à ne pas édifier une construction d'une hauteur au faîtage supérieure à 5, 60 mètres " ; qu'en considérant dès lors que l'interdiction ainsi stipulée d'édifier une construction d'une hauteur au faîtage supérieure à 5, 60 mètres ne concernait pas la partie de la parcelle cadastrée A 2009 confrontant la limite nord de l'immeuble de M. Y..., la cour d'appel a dénaturé les termes de l'acte authentique des 14 mars et 24 avril 2001 en méconnaissance des dispositions de l'article 701 et 1134 du code civil ;
4° / qu'il n'est permis de bâtir contre un mur de séparation que s'il s'agit d'un mur mitoyen ; qu'ainsi que le faisait notamment valoir M. Y... dans ses conclusions d'appel " le procès verbal de constat dressé le 24 septembre 2007 démontre que la construction édifiée par la commune de Gèdre prend appui directement sur le mur privatif de l'immeuble de M. Y... ; qu'ainsi, on peut parfaitement constater qu'à partir du sol, la construction de la commune de Gèdre prend appui sur le mur de l'immeuble de M. Y..., qu'il y a ensuite un toit toujours accolé contre l'immeuble de M. Y..., puis la construction du mur est poursuivie en hauteur, laissant un espace entre ce mur litigieux et l'immeuble de M. Y... et vient obstruer la servitude de vue dont bénéficie le concluant " ; qu'en considérant dès lors que M. Y... était mal fondé à se prévaloir d'une violation de ses engagements par la commune motifs pris de ce que " le procès verbal de constat dressé le 18 octobre 2007 à la requête de la commune de Gèdre fait ressortir que la partie haute de la structure en bois servant d'entrée à la salle d'escalade de la maison des cirques repose, du côté du mur pignon de l'immeuble de M. Y... sur un mur qui est indépendant de celui-ci, en sorte que la preuve d'un appui illicite n'est pas rapportée ", sans rechercher si la partie basse de la construction édifiée par la commune ne prenait pas directement appui sur le mur privatif de l'immeuble de M. Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 657 et suivant du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que l'interdiction d'édifier une construction d'une hauteur au faîtage supérieure à 5, 60 mètres ne concernait pas la partie de la parcelle A 2009 confrontant la limite Nord de ce bien, à l'endroit de laquelle la servitude de vue consentie se limitait à l'autorisation accordée à Mme X... de créer des ouvertures entre le niveau du toit du bâtiment édifié sur sa parcelle et le niveau du toit de l'immeuble que la commune se réservait le droit de construire, la cour d'appel, qui a souverainement retenu, procédant à la recherche, que la preuve d'un appui illicite n'était pas rapportée, a pu, sans dénaturation, en déduire que la commune n'avait pas violé ses engagements ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à la commune de Gèdre la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de M. Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils pour M. Y....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Y... de ses demandes tendant à la démolition de la construction édifiée par la Commune de GEDRE en violation de la servitude de vue grevée au profit de son fonds et du caractère privatif de son mur ;
AUX MOTIFS QU'« en vertu de l'article L 1311-1 du Code Général des Collectivités Territoriales, les propriétés qui relèvent du domaine public des collectivités territoriales sont inaliénables et imprescriptibles ; qu'en découle le principe d'ordre public de l'interdiction de constituer des droits réels sur ce domaine et qu'il est ainsi constant qu'aucune servitude ne peut y être valablement instituée ;
(…) que dès lors que les parcelles acquises par la commune de GEDRE au titre de l'acte d'échange passé avec Mademoiselle X... étaient expressément destinées à être intégrées dans le domaine public de la commune, la clause constitutive de servitudes de vues et grevant en conséquence ces parcelles de servitudes non aedificandi et non altius tollendi avaient un objet illicite, d'où sa nullité en application de l'article 1108 du Code « Civil ;
(…) que surabondamment, la Cour observe à la lecture de la clause litigieuse et au vu du plan dressé par Monsieur A... et annexé à l'acte du 14 mars 2001 ainsi que du profil transversal signé par Mademoiselle X... que l'interdiction stipulée d'édifier une construction d'une hauteur au faîtage supérieure à 5, 60 mètres était, de fait, accessoire à l'instauration de la zone non aedificandi située à l'ouest du bien immobilier de Mademoiselle X... et qu'elle ne concernait pas la partie de la parcelle cadastrée A 2009 9 « confrontant la limite nord de ce bien, à l'endroit de laquelle la servitude de vue consentie se limitait à l'autorisation accordée à Mademoiselle X... de créer des ouvertures entre le niveau du toit du bâtiment édifié sur sa parcelle et le niveau du toit de l'immeuble que la commune de GEDRE se réservait le droit de construire sur le fonds lui appartenant ;
Que de plus la convention, à la supposer valable et s'il eût encore fallu l'interpréter, aurait dû l'être en faveur du propriétaire du fonds servant en application de l'article 1165 du Code Civil ;
(… que), par ailleurs, (…) selon le rapport de l'expert judiciaire établi en date du 8 juin 2007, aucun appui direct du bâtiment communal, alors en construction, contre le mur de l'immeuble de Monsieur Y... ne pouvait être constaté puisque ce bâtiment en était séparé par du carton d'environ 5 centimètres de large ;
(…) que le procès-verbal de constat dressé le 24 septembre 2007 à la requête de Monsieur Y... n'apporte aucun élément supplémentaire sur ce point ;
(…) que le procès-verbal de constat dressé le 18 octobre 2007 à la requête de la commune de GEDRE fait ressortir que la partie haute de la structure en bois servant d'entrée à la salle d'escalade de la maison des cirques repose, du côté du mur pignon de l'immeuble de Monsieur Y..., sur un mur qui est indépendant de celui-ci, en sorte que la preuve d'un appui illicite n'est pas rapportée ;
(…) que dès lors, Monsieur Y..., qui en tout état de cause n'eût pu se prévaloir avec succès d'une violation des engagements pris par la commune, est mal fondé en toutes ses demandes, y compris de dommages et intérêts, et qu'il y a lieu de l'en débouter en infirmant en conséquence le jugement entrepris » (arrêt attaqué p. 4, deux derniers § et p. 5, § 1 à 6).
ALORS, DUNE PART, QUE le principe d'inaliénabilité du domaine public ne s'applique pas aux biens dépendant du domaine privé communal lesquels peuvent être frappés de servitude conventionnelle de droit privé ; que pour faire partie du domaine public, un bien appartenant à une personne publique doit être affecté soit à l'usage direct du public, soit à un service public et faire l'objet, dans ce cas, d'un aménagement certain, effectif et indispensable à l'exécution de cette mission de service public ; que la Cour d'Appel a considéré que la clause constitutive de servitudes de vue grevant les parcelles acquises par la Commune de GEDRE au profit du fonds appartenant à Monsieur Y... avait un objet illicite au seul motif que « les parcelles acquises par la commune de GEDRE au titre de « l'acte d'échange passé avec Mademoiselle X... étaient « expressément destinées à être intégrées dans le domaine public de la commune » (arrêt attaqué p. 4, dernier §) ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si les parcelles acquises par la Commune de GEDRE aux termes de l'acte authentique du 14 mars 2001 n'appartenaient pas à son domaine privé faute d'un aménagement certain, effectif et indispensable à l'exécution d'une mission de service public, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1311-1 du Code général des collectivités territoriales, de l'article L. 2111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques, ensemble de l'article 1134 du Code civil.
ALORS, DEUXIEMEMENT ET SUBSIDIAIREMENT, QUE les immeubles du domaine public peuvent être grevés de servitudes conventionnelles dès lors que leur existence est compatible avec l'affectation desdits immeubles ; qu'en considérant dès lors que la clause constitutive de servitudes de vue grevant les parcelles acquises par la Commune de GEDRE au profit du fonds appartenant à Monsieur Y... avait un objet illicite au seul motif que « les parcelles acquises par la commune de GEDRE au titre de l'acte d'échange passé avec Mademoiselle X... étaient « expressément destinées à être intégrées dans le domaine public de « la commune » (arrêt attaqué p. 4, dernier §) sans s'expliquer aucunement sur la prétendue incompatibilité entre les servitudes de vue grevant les parcelles acquises par la Commune et la construction sur celles-ci d'une « Maison de cirques », la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1311-1 alinéa 1er du Code général des collectivités territoriales, et des articles L. 2111-1 et L. 2122-4 du Code général de la propriété des personnes publiques ;
ALORS, ENCORE QU'Aux termes de l'acte authentique d'échange entre la Commune de GEDRE et Mademoiselle X... du 14 mars 2001 tel que reproduits littéralement dans l'acte de donation du 24 avril 2001, « Les parties conviennent « expressément de constituer sur les parcelles A N° 1748, 1749, 1925, « 1927, 1754, 2008, 2009 et 2013 au profit du fonds dominant une « servitude de vue à titre réel et perpétuel la plus large (vues droites « et obliques) (…) Comme conséquence du droit de vue ainsi « conféré, le représentant de la commune es qualités grève la « parcelle A n° 1754 et une partie de la parcelle A n° 2009 (…), « lesdites parcelles formant partie du fonds servant, d'une servitude « non aedificandi au profit du fonds dominant et ce sur une largeur « de huit mètres depuis la propriété de Mademoiselle X.... « Pour le surplus de la parcelle numéro 2009, la commune s'oblige, « ès qualités son représentant, pour le cas où elle déciderait de « construire, à ne pas édifier une construction d'une hauteur au « faîtage supérieure à 5, 60 mètres » ; qu'en considérant dès lors que l'interdiction ainsi stipulée d'édifier une construction d'une hauteur au faîtage supérieure à 5, 60 mètres ne concernait pas la partie de la parcelle cadastrée A 2009 confrontant la limite nord de l'immeuble de l'exposant, la Cour d'Appel a dénaturé les termes de l'acte authentique des 14 mars et 24 avril 2001 en méconnaissance des dispositions de l'article 701 et 1134 du Code civil.
ALORS, ENFIN, QU'il n'est permis de bâtir contre un mur de séparation que s'il s'agit d'un mur mitoyen ; qu'ainsi que le faisait notamment valoir Monsieur Y..., dans ses conclusions d'appel (p. 5, § 3 et 4, p. 10, dernier § et p. 11, § 1er), « le procès verbal de « constat dressé le 24 septembre 2007 démontre que la construction édifiée par la Commune de GEDRE prend appui directement sur le mur privatif de l'immeuble de Monsieur Y... ; Qu'ainsi, on peut parfaitement constater qu'à partir du sol, la construction de la Commune de GEDRE prend appui sur le mur de l'immeuble de Monsieur Y..., qu'il y a ensuite un toit toujours accolé contre l'immeuble de Monsieur Y..., puis la construction du mur est poursuivie en hauteur, laissant un espace entre ce mur litigieux et l'immeuble de Monsieur Y... et vient obstruer la servitude de vue dont bénéficie le concluant » ; qu'en considérant dès lors que Monsieur Y... était mal fondé à se prévaloir d'une violation de ses engagements par la Commune motifs pris de ce que « le procès- « verbal de constat dressé le 18 octobre 2007 à la requête de la commune de GEDRE fait ressortir que la partie haute de la structure en bois servant d'entrée à la salle d'escalade de la maison des cirques repose, du côté du mur pignon de l'immeuble de Monsieur Y..., sur un mur qui est indépendant de celui-ci, en sorte que la preuve d'un appui illicite n'est pas rapportée » (arrêt attaqué p. 5, § 5) sans rechercher si la partie basse de la construction édifiée par la Commune ne prenait pas directement appui sur le mur privatif de l'immeuble de Monsieur Y..., la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 657 et suivant du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-12359
Date de la décision : 03/02/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 02 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 03 fév. 2010, pourvoi n°09-12359


Composition du Tribunal
Président : M. Philippot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Copper-Royer, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.12359
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