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20/01/2010 | FRANCE | N°09-10078

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 janvier 2010, 09-10078


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches ci-après annexé :

Attendu que la société italienne Laborvetro a été déclarée en état de cessation des paiements sur la base de comptes arrêtés le 22 juillet 1983 ; que le 13 octobre 1995, la société de droit britannique Lancaster a conclu avec le mandataire judiciaire, un acte de cession des créances éventuelles dues à cette société par diverses personnes ; que la société Lancaster invoque une créance contre David X... pour des transfe

rts illégaux de fonds à l'étranger ; que David X... étant décédé en 1998, la socié...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches ci-après annexé :

Attendu que la société italienne Laborvetro a été déclarée en état de cessation des paiements sur la base de comptes arrêtés le 22 juillet 1983 ; que le 13 octobre 1995, la société de droit britannique Lancaster a conclu avec le mandataire judiciaire, un acte de cession des créances éventuelles dues à cette société par diverses personnes ; que la société Lancaster invoque une créance contre David X... pour des transferts illégaux de fonds à l'étranger ; que David X... étant décédé en 1998, la société a agi en 2002 contre ses héritiers M. Eric X... et Mme Monique X..., épouse Y..., demeurant l'un et l'autre en France ;

Attendu que la société Lancaster fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 18 juin 2008) d'avoir déclaré irrecevable sa demande en paiement d'une créance à l'encontre des héritiers de David X... en considérant l'action prescrite ;

Attendu que la cour d'appel, par une interprétation souveraine de l'article 2947 du code civil italien, a retenu que l'action intentée pour des faits commis avant 1983 était prescrite selon l'alinéa 1 du texte qui prévoit une prescription de cinq ans, et que l'alinéa 3 n'était pas applicable à l'espèce ; que le moyen qui ne peut être accueilli dans ses première et troisième branches, est inopérant dans sa deuxième ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Lancaster Factoring company Limited aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Lancaster Factoring company Limited et la condamne à payer aux consorts X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux conseils pour la société Lancaster Factoring company Limited

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande en paiement de la cessionnaire d'une créance (la société LANCASTER, l'exposante) à l'encontre des héritiers (les consorts X...) du débiteur cédé et, pour ce faire, d'avoir considéré que l'action était prescrite ;

AUX MOTIFS QUE, par l'acte du 13 octobre 1993 (lire 1995), la société LANCASTER n'avait pu acquérir plus de droits que n'en avait la société LABORVETRO, ce que d'ailleurs elle ne prétendait pas ; que la créance invoquée n'était pas née des procédures pénale ou administrative italiennes dont la société LANCASTER faisait état ; que les faits considérés par l'instance pénale, dans laquelle ni la société LABORVETRO ni la société LANCASTER n'avaient été parties civiles, puis, après la dépénalisation de ces faits, par la procédure administrative, relevaient d'infractions sur les changes ; qu'ils avaient impliqué non seulement David X... mais encore M. Z..., administrateur unique de la société LABORVETRO ; que la créance dont la société LANCASTER aurait été cessionnaire avait pour objet les sommes qui appartenaient à la société LABORVETRO et qui avaient été détournées à son profit par David X... ; que la créance invoquée procédait en conséquence d'agissements distincts des faits pénalement puis administrativement poursuivis à la suite desquels ils auraient été commis ; que les faits qui auraient donné naissance à la créance invoquée n'avaient pu être commis qu'avant la clôture des comptes américains de la société LABORVETRO, s'étant révélés à elle au plus tard à cette occasion et en tout cas avant le 21 juillet 1983, date d'ouverture de sa liquidation judiciaire ; qu'il était acquis entre les parties que le droit italien était applicable ; qu'en application de l'article 2947 du code civil italien, le délai de prescription du droit à réparation d'un préjudice résultant d'un acte illicite était de cinq ans ; que la créance invoquée étant née de faits prétendument illicites commis avant 1983 au plus tard, l'action en paiement était déjà prescrite lors de la mise en demeure de payer adressée en juin 1997 par la société LANCASTER à David X... ; que la société LANCASTER invoquait vainement l'alinéa 3 de l'article 2947 du code civil italien, les poursuites pénales ayant porté sur d'autres faits que ceux qui auraient donné naissance à la créance alléguée ;

ALORS QUE, d'une part, il incombe au juge français qui reconnaît applicable un droit étranger, d'en rechercher la teneur soit d'office soit à la demande de celui qui l'invoque, avec le concours des parties et personnellement s'il y a lieu, ainsi que de donner à la question litigieuse une solution conforme au droit positif étranger ; que, après avoir relevé qu'en application de l'article 2947 du code civil italien, le délai de prescription du droit à réparation d'un préjudice résultant d'un acte illicite était de cinq ans, le juge ne pouvait en déduire que l'action de l'exposante était prescrite pour la raison que sa créance était née de faits prétendument illicites commis avant juillet 1983, sans rechercher quel était, au regard de la loi qu'il a déclarée applicable, le point de départ du délai de prescription, soit le jour de la commission des faits soit celui de leur constatation ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 3 du code civil ;

ALORS QUE, d'autre part, la connaissance par une personne morale de l'existence de faits illicites commis à son préjudice ne peut constituer le point de départ du délai de prescription de son action en réparation à partir du moment où ces faits ont été commis par ses dirigeants sociaux ou avec leur complicité ; que l'exposante faisait valoir (v. ses conclusions signifiées le 30 janvier 2008, p. 13) que les détournements commis par David X... l'avaient été avec la complicité des personnes qui avaient le pouvoir d'engager la société LABORVETRO, parmi lesquelles M. Z... dont l'arrêt attaqué a constaté lui-même qu'il était l'administrateur unique de la société LABORVETRO, également impliqué dans les poursuites pénales puis administratives ; qu'en retenant que les faits illicites fondant la créance de l'exposante s'étaient révélés à la société LABORVETRO avant le 21 juillet 1983, date de sa liquidation judiciaire, pour en inférer qu'ils étaient prescrits, sans répondre aux conclusions dont elle était saisie, relatives à la complicité du dirigeant social de la société victime des détournements, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, enfin, le juge qui déclare la loi étrangère applicable doit en rechercher et en préciser la teneur ; qu'en énonçant que c'était vainement que l'exposante invoquait l'article 2947, alinéa 3, du code civil italien pour la raison que les poursuites pénales avaient porté sur d'autres faits que ceux qui avaient donné naissance à la créance alléguée, sans préciser quel était le contenu de la disposition dont se prévalait l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 3 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 09-10078
Date de la décision : 20/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 jan. 2010, pourvoi n°09-10078


Composition du Tribunal
Président : M. Bargue (président)
Avocat(s) : Me Copper-Royer, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.10078
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