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19/01/2010 | FRANCE | N°07-19704;07-19707

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 janvier 2010, 07-19704 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° N 07-19.704 et n° R 07-19.707, qui attaquent le même arrêt ;
Sur le moyen unique des pourvois rédigés en termes identiques, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 3 juillet 2007), que, par délibération du 28 juin 1996, le conseil municipal de Chamonix a accordé à l'Association sportive automobile des 24 heures sur glace de Chamonix (l'Association) une exonération totale de l'impôt sur les spectacles ; qu'estimant que celle-ci ne valait que pour l'année 1997, l

'administration des douanes et droits indirects a exigé le paiement de cet im...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° N 07-19.704 et n° R 07-19.707, qui attaquent le même arrêt ;
Sur le moyen unique des pourvois rédigés en termes identiques, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 3 juillet 2007), que, par délibération du 28 juin 1996, le conseil municipal de Chamonix a accordé à l'Association sportive automobile des 24 heures sur glace de Chamonix (l'Association) une exonération totale de l'impôt sur les spectacles ; qu'estimant que celle-ci ne valait que pour l'année 1997, l'administration des douanes et droits indirects a exigé le paiement de cet impôt au titre de l'année 2002 ; que l'Association a saisi le tribunal de grande instance afin d'en obtenir la décharge ;
Attendu que le directeur régional des douanes et droits indirects de Chambéry et le directeur général des douanes et droits indirects font grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que, si même, depuis l'intervention de la loi n° 95-885 du 4 août 1995, les conseils municipaux sont en droit de prévoir une exemption de la taxe sur les spectacles sans limitation de durée, il demeure en leur pouvoir, s'ils l'estiment opportun, de cantonner l'exemption au seul exercice suivant ; qu'en l'espèce, les motifs de la délibération du 28 juin 1996 indiquaient : "Il est proposé d'exonérer, d'une manière générale, tous les spectacles à caractère sportif et culturel, organisés par les associations locales au cours de l'année 1997", et le dispositif de la délibération était ainsi conçu : "Le conseil municipal (…) donne son accord à l'exonération, d'une manière générale, de tous les spectacles à caractère sportif et culturel organisés par les associations locales au cours de l'année 1997" ; qu'en refusant de considérer que l'exemption ne concernait que l'année 1997, les juges du fond ont violé les articles 1559, 1561, 1639 A et 1639 A bis du code général des impôts, ensemble l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
2°/ que, si l'article 1561 renvoie à l'article 1639 A bis, lequel renvoie lui-même à l'article 1639 A, et si l'article 1639 A III prévoit qu'à défaut de notification d'une décision du conseil municipal d'une nouvelle délibération, "les impositions peuvent être recouvrées selon les décisions de l'année précédente", cette disposition ne concerne, par hypothèse, que les délibérations dont l'intervention est nécessaire pour que l'imposition soit mise en recouvrement ; qu'elles sont étrangères, en revanche, aux délibérations relatives aux exemptions dont l'absence laisse subsister le principe de l'impôt ; que pour avoir décidé le contraire, les juges du fond ont violé les articles 1559, 1561, 1639 A et 1639 A bis du code général des impôts, ensemble l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
3°/ que l'instruction du 25 mai 1996 évoque seulement une délibération instituant une exonération totale de l'impôt sur les spectacles, sans précision quant à l'exercice concerné ; qu'en se fondant sur l'instruction du 25 mai 1996, les juges du fond ont violé l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les articles 1559, 1561, 1639 A et 1639 A bis du code général des impôts, ensemble l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
4°/ qu'en tout cas, dès lors que le conseil municipal a seul compétence pour décider d'une exemption, la portée de l'exemption ne peut être déterminée qu'au regard des termes de la délibération et des effets qui lui sont attachés par la loi, sans que la commune puisse être liée par une instruction émanant d'une autorité étatique ; que, de ce point de vue également, l'arrêt a été rendu en violation de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des articles 1559, 1561, 1639 A et 1639 A bis du code général des impôts, ensemble l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Mais attendu que l'arrêt constate, par motifs propres et adoptés, que la délibération du conseil municipal du 28 juin 1996 s'inscrit dans une pratique générale d'exonération totale depuis 1974 ; qu'il retient que la loi de finances rectificative du 4 août 1995, modifiant l'article 1561 3° b du code général des impôts, permet aux communes d'exempter totalement de la taxe sur les spectacles certaines catégories de compétitions par délibération notifiée au service chargé du recouvrement conformément aux dispositions de l'article 1639 A du même code et, qu'à défaut de notification, les impositions peuvent être recouvrées selon les décisions de l'année précédente ; que de ces constatations et énonciations, abstraction faite du motif surabondant critiqué par les troisième et quatrième branches, la cour d'appel a exactement déduit que la décision d'exonération de la taxe restait valable tant qu'une nouvelle délibération en retirant le bénéfice n'était pas intervenue ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne le directeur régional des douanes et droits indirects de Chambéry et le directeur général des douanes et droits indirects aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé et signé par Mme Tric, conseiller doyen, en l'audience publique du dix-neuf janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen identique produit aux pourvois n° N 07-19.704 et n° R 07-19.707 par Me Foussard, avocat aux Conseils pour le directeur régional des douanes et droits indirects de Chambéry et le directeur général des douanes et droits indirects.
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a prononcé la décharge de la taxe sur les spectacles pour l'année 2001 payée par l'ASA et ordonné la restitution par l'administration du montant acquitté par l'ASA entre les mains de cette dernière ;
AUX MOTIFS QU'« il est constant qu'antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative du 4 août 1995, les délibérations des conseils municipaux en matière de taxe sur les spectacles avaient une portée annuelle et qu'elles devaient en conséquence être renouvelées chaque année ; que la loi de finances rectificative du 4 août 1995 a modifié l'article 1561-3°-b du Code général des impôts permettant aux communes d'exempter totalement de la taxe sur les spectacles certaines catégories de compétitions en prévoyant que cette décision devait désormais être prise sous la forme d'une délibération respectant les dispositions de l'article 1639-A-bis du même Code duquel il résulte que la délibération doit être votée avant une certaine date et notifiée au service chargé du recouvrement conformément aux dispositions de l'article 1639-A, à savoir par l'intermédiaire de la préfecture dans un délai de quinzaine, ce afin que l'exonération puisse produire ses effets au 1er janvier de l'année suivante, le dernier alinéa de l'article 1639-A précisant qu'à défaut de notification d'une nouvelle décision, les impositions peuvent être recouvrées selon les décisions de l'année précédente ; qu'en soumettant la taxe sur les spectacles, contribution indirecte, aux règles de la fiscalité directe locale en la matière, le législateur a substitué à un système d'exonération au coup par coup, impliquant le renouvellement annuel des formalités d'exonération, un système de tacite reconduction de l'exonération ; que retenir, ainsi que le prétend l'administration des douanes, qu'il conviendrait au cas par cas de rechercher la durée pour laquelle l'exonération a été prononcée reviendrait à mettre à néant l'objectif de simplification poursuivi en la circonstance par le législateur ; que c'est dès lors par une exacte analyse que les premiers juges ont considéré que la décision d'exonération de la taxe, quels qu'en soient les termes, restait valable tant qu'une nouvelle délibération retirant le bénéfice de l'exonération n'était pas intervenue, cette analyse étant confirmée par les termes de l'instruction de la Direction générale des douanes et droits indirects en date du 25 mai 1996, laquelle indique que les délibérations prises en application de l'article 1561-3°-b, 2ème alinéa, n'ont plus de portée annuelle ; que l'administration des douanes est en conséquence tenue par les termes de la dernière délibération adoptée et régulièrement notifiée, d'exonération de l'ASA de la taxe sur les spectacles (…) » (arrêt, p. 3) ;
ALORS QUE, premièrement, si même, depuis l'intervention de la loi n° 95-885 du 4 août 1995, les conseils municipaux sont en droit de prévoir une exemption de la taxe sur les spectacles sans limitation de durée, il demeure en leur pouvoir, s'ils l'estiment opportun, de cantonner l'exemption au seul exercice suivant ; qu'en l'espèce, les motifs de la délibération du 28 juin 1996 indiquaient : « Il est proposé d'exonérer, d'une manière générale, tous les spectacles à caractère sportif et culturel, organisés par les associations locales au cours de l'année 1997 » , et le dispositif de la délibération était ainsi conçu : « Le conseil municipal (…) donne son accord à l'exonération, d'une manière générale, de tous les spectacles à caractère sportif et culturel organisés par les associations locales au cours de l'année 1997 » ; qu'en refusant de considérer que l'exemption ne concernait que l'année 1997, les juges du fond ont violé les articles 1559, 1561, 1639-A et 1639-A bis du Code général des impôts, ensemble l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
ALORS QUE, deuxièmement, si l'article 1561 renvoie à l'article 1639-A bis, lequel renvoie lui-même à l'article 1639-A, et si l'article 1639-A-III prévoit qu'à défaut de notification d'une décision du conseil municipal d'une nouvelle délibération, « les impositions peuvent être recouvrées selon les décisions de l'année précédente », cette disposition ne concerne, par hypothèse, que les délibérations dont l'intervention est nécessaire pour que l'imposition soit mise en recouvrement ; qu'elles sont étrangères, en revanche, aux délibérations relatives aux exemptions dont l'absence laisse subsister le principe de l'impôt ; que pour avoir décidé le contraire, les juges du fond ont violé les articles 1559, 1561, 1639-A et 1639-A bis du Code général des impôts, ensemble l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
ALORS QUE, troisièmement, l'instruction du 25 mai 1996 évoque seulement une délibération instituant une exonération totale de l'impôt sur les spectacles, sans précision quant à l'exercice concerné ; qu'en se fondant sur l'instruction du 25 mai 1996, les juges du fond ont violé l'article L.80A du Livre des procédures fiscales, les articles 1559, 1561, 1639-A et 1639-A bis du Code général des impôts, ensemble l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Et ALORS QUE, quatrièmement et en tout cas, dès lors que le conseil municipal a seul compétence pour décider d'une exemption, la portée de l'exemption ne peut être déterminée qu'au regard des termes de la délibération et des effets qui lui sont attachés par la loi, sans que la commune puisse être liée par une instruction émanant d'une autorité étatique ; que, de ce point de vue également, l'arrêt a été rendu en violation de l'article L.80A du Livre des procédures fiscales, des articles 1559, 1561, 1639-A et 1639-A bis du Code général des impôts, ensemble l'article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 07-19704;07-19707
Date de la décision : 19/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Contributions indirectes - Impôts sur les spectacles, jeux et divertissements - Exonération de certaines catégories de compétitions - Conditions - Délibération du conseil municipal - Portée

La loi de finances rectificative du 4 août 1995, modifiant l'article 1561 3° b du code général des impôts, permet aux communes d'exempter totalement de la taxe sur les spectacles certaines catégories de compétitions par délibération notifiée au service chargé du recouvrement conformément aux dispositions de l'article 1639 A du même code ; à défaut de notification, les impositions peuvent être recouvrées selon les décisions de l'année précédente. Une cour d'appel déduit exactement de ces dispositions qu'une délibération d'un conseil municipal accordant à une association une exonération totale de l'impôt sur les spectacles reste valable tant qu'une nouvelle délibération en retirant le bénéfice n'est pas intervenue


Références :

articles 1561 3° b et 1639 A III du code général des impôts

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 03 juillet 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 jan. 2010, pourvoi n°07-19704;07-19707, Bull. civ. 2010, IV, n° 9
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 9

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : Mme Petit (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Bregeon
Avocat(s) : Me Foussard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:07.19704
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