LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Benoît,
- Y... Chantal, épouse X...,
- X... Cédric,
- X... Jacques,
- X... Karine,
parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de CAEN, chambre correctionnelle, en date du 23 janvier 2009, qui a prononcé sur une requête en rectification d'erreur matérielle ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 15 décembre 2009 où étaient présents : M. Pelletier président, Mme Radenne conseiller rapporteur, MM. Blondet, Palisse, Mme Ferrari conseillers de la chambre, M. Chaumont, Mme Harel-Dutirou conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Davenas ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
Sur le rapport de Mme le conseiller RADENNE, les observations de Me BLONDEL, de la société civile professionnelle VINCENT
et OHL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS, l'avocat des demandeurs ayant eu la parole en dernier ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire, commun aux demandeurs, le mémoire en défense et les observations complémentaires produits ;
I - Sur les pourvois de Chantal X..., Cédric X..., Jacques X... et Karine X... :
Attendu que ces demandeurs, que l'arrêt attaqué a, par des motifs qu'ils ne critiquent pas, déclarés irrecevables à demander la réparation d'erreurs ou d'omissions matérielles qui, à les supposer démontrées, n'auraient préjudicié qu'à Benoît X..., sont sans intérêt à critiquer une décision qui ne leur fait pas grief ;
Que leurs pourvois sont irrecevables ;
II - Sur le pourvoi de Benoît X... ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation du principe selon lequel le juge a toujours la faculté de réparer une omission de statuer, violation du principe selon lequel à partir du moment où le prévenu et son assureur admettent que le juge a omis de statuer et reconnaissent le bien fondé de la demande de la partie civile victime de cette omission le juge ne peut qu'en donner acte, violation des exigences d'un procès équitable au sens de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, violation du principe dispositif en ce sens que lorsque la matière est disponible, les parties ont la maîtrise de leur demande et lorsqu'elles sont d'accord sur le principe et le montant le juge de l'action civile fût-il saisi par le canal d'une omission de statuer ne peut que donner acte à cet accord ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté une demande fondée sur une omission de statuer au regard d'un préjudice fonctionnel permanent ;
"au motif qu'il est rappelé que la juridiction pénale, alors même qu'elle statue en matière d'intérêts civils, ne peut faire application des dispositions de l'article 463 du code de procédure civile, pour réparer des omissions sur un chef de préjudice ;
"alors que, d'une part, il résulte des principes de procédure que le juge qui omet de statuer sur un aspect des demandes tire de son office l'obligation de réparer cette omission lorsqu'il est saisi par une partie de la difficulté ; qu'en jugeant le contraire la Cour viole le principe général sus-évoqué, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et les textes et principes cités au moyen ;
"alors que, d'autre part et en toute hypothèse, le prévenu et son assureur s'agissant de l'omission de statuer au regard de la demande de 292 500 euros au titre du déficit fonctionnel permanent admettaient bien que sur ce point la Cour avait omis de se prononcer, le prévenu et sa compagnie d'assurance reprirent par des conclusions écrites les termes d'une précédente offre en acceptant une évaluation de ce poste de préjudice purement physiologique, hors préjudice professionnel à la somme de 195 000 euros et qu'à hauteur du moins de cette somme la cour ne pouvait que donner acte au prévenu et à son assureur de cet engagement ; qu'en ne le faisant pas la cour méconnaît son office et viole les textes et principes cités au moyen" ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article préliminaire du code de procédure pénale, violation de l'article 2 du même code et de l'article 593, violation du principe dispositif, violation de l'article 710 du code de procédure pénale et méconnaissance des exigences de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de rétractation relative au poste de préjudice « aide d'une tierce personne» ;
"au motif qu'il est rappelé que le juge pénal a toute latitude pour apprécier le montant de la réparation d'un chef de préjudice, sans être lié par la demande d'une partie et l'offre de l'autre partie en sorte que la cour a pu fixer le montant de l'aide à la tierce personne en fonction des périodes et des taux horaires fixés dans l'arrêt ;
"alors que par son jugement du 21 novembre 2006 le tribunal de grande instance de Lisieux statuant en matière correctionnelle a condamné le prévenu à verser à la victime au titre de la tierce personne avant consolidation la somme de 46 638,24 euros ; que par conclusions écrites réitérées oralement, la victime sollicitait en cause d'appel l'infirmation du jugement sur ce point en sollicitant devant la cour la somme de 74 063,50 euros, que le prévenu et son assureur sollicitaient, par conclusions du 25 mars 2008 et encore lors de l'audience du 26 mars 2008, la confirmation du jugement de première instance si bien qu'ils admettaient que la somme de 46 638,24 euros constituait dès lors un minimum en deçà duquel la cour ne pouvait descendre sans excéder ses pouvoirs ; que cependant, par son arrêt du 11 juin 2008 la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Caen a en violation des textes et principes cités au moyen infirmé sur ce point le jugement de première instance et fixé le poste de la tierce personne avant consolidation à la somme de 41 758,04 euros" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour rejeter la requête en omission de statuer et en rétractation formulée par les consorts X... en raison d'un défaut de réponse à conclusions, l'arrêt attaqué retient, notamment, que les dispositions du code de procédure civile invoquées par les requérants ne trouvent pas à s'appliquer devant le juge répressif, y compris lorsqu'il statue en matière d'intérêts civils ;
Attendu qu'en l'état de ce seul motif, la cour d'appel a justifié sa décision, sans violer le texte conventionnel visé au moyen, dès lors que, d'une part, l'omission de statuer constitue un cas d'ouverture à cassation et que, d'autre part, si les juridictions répressives peuvent, par application de l'article 710 du code de procédure pénale, procéder à la rectification des erreurs purement matérielles contenues dans leurs décisions, ce pouvoir trouve sa limite dans la défense de modifier la chose jugée, de restreindre ou d'accroître les droits consacrés par une précédente décision, même lorsque celle-ci a statué hors la limite des conclusions des parties ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs :
I - Sur les pourvois de Chantal X..., Cédric X..., Jacques X... et Karine X... :
Les DÉCLARE IRRECEVABLES ;
II - Sur le pourvoi de Benoît X... ;
Le REJETTE ;
DIT n'y avoir lieu à application, au profit de Benoît X..., de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze janvier deux mille dix ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;