LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 25 avril 2008), que suivant promesse du 3 septembre 2004, Mme X... a promis de vendre une parcelle constructible à MM. Y... et Z... sous plusieurs conditions suspensives et notamment celle d'obtention d'un permis de construire ; que l'acte précisait que pour se prévaloir de cette condition suspensive les acquéreurs devraient justifier du dépôt de la demande de permis de construire dans le délai de deux mois à compter de la promesse ;que Mme X..., invoquant l'absence de justification des démarches entreprises, a refusé de réitérer l'acte chez le notaire ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant souverainement retenu qu'il résultait des termes clairs de la promesse que la condition suspensive portait sur l'obtention par l'acquéreur d'un permis de construire et que si celui-ci ne procédait pas au dépôt de demande d'un tel permis, il ne pouvait se prévaloir d'un défaut d'obtention de ce permis qu'il sera réputé avoir obtenu, pour ne pas régulariser l'acte, le vendeur pouvant reprendre sa liberté avec application de la clause pénale, qu'il s'agissait d'une clause libellée dans le seul intérêt de l'acquéreur et lui seul étant privé, dans l'hypothèse visée d'une absence de demande de permis de construire, du droit d'invoquer son bénéfice pour ne pas régulariser l'acte authentique, la cour d'appel en a exactement déduit que les consorts Y... et Z... pouvaient renoncer au bénéfice de cette condition dont la non-réalisation ne pouvait rendre caduque la promesse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1153, alinéa 3, du code civil ;
Attendu que la partie qui doit restituer une somme qu'elle détenait en vertu d'une décision de justice exécutoire n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution ;
Attendu que pour condamner les consorts Y... et Z... au paiement des intérêts au taux légal sur la somme de 20 600 euros, à compter de son paiement l'arrêt retient qu'ils sont tenus à restitution de la somme allouée par le jugement infirmé ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure en cassant de faire application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné Mme X... à payer aux consorts Y... et Z... la somme de 20 600 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de son versement, l'arrêt rendu le 25 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que les intérêts courront à compter de la notification de l'arrêt du 25 avril 2008 ;
Maintient la condamnation aux dépens prononcée par les juges du fond ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens exposés devant la Cour de cassation, ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir enjoint à Mme Thérèse X... de réitérer en la forme authentique le compromis de vente signé le 3 septembre 2004, précisé qu'à défaut d'une telle régularisation dans le délai de 2 mois, sa décision vaudrait acte authentique de vente pour être publié à la Conservation des Hypothèques, ensemble condamné Mme X... à restituer la somme de 20.600 € versée, au titre de la clause pénale, en exécution du jugement entrepris ;
AUX MOTIFS QU'aux termes du compromis, il est expressément prévu s'agissant de l'obtention d'un permis de construire au titre des règles générales : « La réalisation des présentes est soumise à l'obtention par l'acquéreur d'un permis de construire pour la réalisation sur le bien objet de la convention d'une opération de réalisation de 16 logements. Il est précisé que l'acquéreur devra, pour se prévaloir de la présente condition suspensive, justifier auprès de ce dernier du dépôt de la demande de permis de construire et ce dans le délai de deux mois à compter de ce jour, au moyen d'un récépissé délivré par l'autorité compétente. A défaut, la condition sera réputée réalisée pour l'application de la clause pénale ci-après, et le vendeur pourra reprendre sa pleine et entière liberté » ; qu'il est ensuite précisé au titre de la mise en oeuvre que « dans la mesure d'un dépôt de la demande dans le délai sus-indiqué, il convient d'envisager les hypothèses suivantes, savoir : si la demande de permis ne reçoit aucune réponse avant le (date non précisée), la condition suspensive sera considérée comme n'étant pas réalisée et les présentes comme nulles et non avenues sauf si l'acquéreur décidait de renoncer au bénéfice de ladite condition, si le permis est accordé avant le 3 février 2005, l'acquéreur s'oblige dans les huit jours de la réception du permis par lettre recommandée et de l'affichage … par constat d'huissier, si ce permis a fait l'objet d'un recours contentieux ou d'un retrait la condition suspensive sera réputée comme n'étant pas réalisée et les présentes considérées comme nulles et non avenues sauf si l'acquéreur décidait de renoncer au bénéfice de la condition, faisant alors son affaire personnelle des dits recours, si ce permis n'a pas fait l'objet d'un recours ni d'un retrait dans les délais indiqués la condition suspensive sera réputée comme étant réalisée » ; qu'il est également prévu au compris s'agissant de la clause pénale qu'au cas « où toutes les conditions relatives à l'exécution des présentes étant remplies, l'une des parties après avoir été mise en demeure ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles elle devra verser à l'autre partie une somme de 20.600 € à titre de clause pénale conformément aux dispositions des articles 1152 et 1225 du code civil indépendamment de tous dommages et intérêts, la présente clause pénale ne pouvant priver dans la même hypothèse chacune des parties de la possibilité de poursuivre l'autre en exécution de la vente » ; qu'il résulte ainsi clairement des termes du compromis que, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, la condition suspensive porte sur l'obtention par l'acquéreur d'un permis de construire et que, si celui-ci ne procède pas au dépôt de demande d'un tel permis, il ne pourra alors se prévaloir d'un défaut d'obtention de ce permis qu'il sera réputé avoir obtenu, pour ne pas régulariser l'acte authentique ; qu'alors le vendeur pourra reprendre sa liberté et qu'il y aura lieu à application de la clause pénale ; qu'il s'agit bien ainsi d'une clause libellée dans le seul intérêt de l'acquéreur, lui seul étant privé, dans l'hypothèse visée d'une absence de demande de permis de construire, du droit d'invoquer son bénéfice pour ne pas régulariser l'acte authentique ; qu'il s'ensuit que les consorts B...
Z... et Mourad Y... pouvaient parfaitement renoncer au bénéfice de cette condition ainsi qu'ils l'ont fait, condition dont la non réalisation ne pouvait rendre caduc le compromis et que dès lors la vente est parfaite ;
ALORS QUE, D'UNE PART, comme la cour elle-même le relève, la clause du compromis de vente obligeant l'acquéreur à déposer une demande de permis de construire dans un certain délai, sous peine de perdre le bénéfice de la condition suspensive relative à l'obtention dudit permis, avait pour effet d'empêcher l'acquéreur de se prévaloir de la défaillance de cette condition et de conférer au vendeur la faculté de reprendre sa liberté et d'obtenir paiement de la pénalité contractuelle ; qu'il s'en évince nécessairement que cette clause était stipulée dans l'intérêt du vendeur, et non dans l'intérêt de l'acquéreur, peu important à cet égard que la condition suspensive elle-même fût stipulée dans le seul intérêt de ce dernier, à le supposé établi ; qu'en estimant au contraire que cette même clause avait été stipulée dans le seul intérêt de l'acquéreur « lui seul étant privé, dans l'hypothèse visée d'une absence de demande de permis de construire, du droit d'invoquer son bénéfice pour ne pas réaliser l'acte authentique », la cour ne tire pas les conséquences de ses propres constatations, violant l'article 1134 du code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, il résulte des constatations mêmes de la cour, ensemble de la clause claire et précise qui lui était soumise, qu'en cas de défaillance de l'acquéreur dans l'exécution de son obligation de déposer une demande de permis de construire, « le vendeur pourra reprendre sa liberté et il y aura lieu à application de la clause pénale » (cf. arrêt p.6, § 2) ; qu'en considérant au contraire, dans l'hypothèse même visée par cette clause, que la renonciation des acquéreurs au bénéfice de la condition suspensive faisait obstacle à ce que le vendeur reprenne sa liberté et obtienne paiement de la pénalité contractuelle, la cour refuse d'appliquer la convention qui fait la loi des parties, violant de nouveau l'article 1134 du code civil ;
ET ALORS QUE, ENFIN ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, en ne précisant pas si la renonciation des acquéreurs au bénéfice de la condition suspensive relative à l'obtention d'un permis de construire avait été exprimée avant ou après l'expiration du délai de deux mois qui leur était imparti pour déposer leur demande de permis, sachant qu'une renonciation exprimée postérieurement à l'exercice par le vendeur de sa faculté de reprendre sa liberté et de faire jouer la clause pénale ne pouvait qu'être regardée comme inopérante, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1134 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir assorti la condamnation à la restitution de la somme de 20.600 €, versée au titre de l'exécution provisoire du jugement entrepris, des intérêts au taux légal à compter du paiement de cette somme ;
AUX MOTIFS QUE Mme Thérèse X... devra restituer aux consorts B...
Z... et Mourad Y... la somme de 20.600 € payée par eux augmentée des intérêts au taux légal à compter de son paiement ;
ALORS QUE la partie qui doit restituer une somme qu'elle détient en vertu d'une décision de justice exécutoire n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution, d'où il suit qu'en fixant le point de départ des intérêts à la date du paiement de la somme versée au titre de l'exécution provisoire du jugement infirmé, la cour viole l'article 1153, alinéa 3, du code civil.