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06/01/2010 | FRANCE | N°08-12684

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 janvier 2010, 08-12684


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que le 13 février 1998, Mme X..., épouse Y... a souscrit auprès de la Poste, aux droits de laquelle se trouve la Banque Postale (la Banque), trois contrats de plan épargne logement (PEL) aux noms de ses trois petits enfants, Vincent, Sébastien et Caroline Z... (les consorts Z...), alors mineurs, en versant, pour chacun d'eux, un capital initial et en s'engageant à réaliser des versements trimestriels ; que Mme Y... a souhaité procéder à la fermeture des PEL et a demandé la restitution des somm

es versées par elle ; que, devant le refus opposé par la Banque, M...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que le 13 février 1998, Mme X..., épouse Y... a souscrit auprès de la Poste, aux droits de laquelle se trouve la Banque Postale (la Banque), trois contrats de plan épargne logement (PEL) aux noms de ses trois petits enfants, Vincent, Sébastien et Caroline Z... (les consorts Z...), alors mineurs, en versant, pour chacun d'eux, un capital initial et en s'engageant à réaliser des versements trimestriels ; que Mme Y... a souhaité procéder à la fermeture des PEL et a demandé la restitution des sommes versées par elle ; que, devant le refus opposé par la Banque, Mme Y... l'a fait assigner en paiement d'une certaine somme à titre de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen, pris en ses cinq branches, ci-après annexé :
Attendu que les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 29 novembre 2007), de l'avoir déboutée de sa demande tendant à la condamnation de la Banque au paiement des sommes de 6 031,20 euros et 1 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que :
1°/ d'une part, qu' un établissement d'épargne, au titre de son devoir de renseignement et de conseil, doit mettre en garde son client contre les risques de l'opération qu'il s'apprête à réaliser, spécialement lorsque cette opération est atypique, telle la souscription de plusieurs plans d'épargne-logement par un même souscripteur ; que dès lors, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée (dernières écritures de Mme Y..., p.6 et s.), et comme l'avaient retenu les premiers juges, si la Banque Postale n'était pas tenue, eu égard à la particularité de l'opération projetée, de mettre en garde Mme Y... sur l'irrévocabilité (à la supposer avérée) des versements opérés et sur les pouvoirs dont les titulaires du compte auraient l'exclusivité, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;
2°/ d'autre part et en tout état de cause, la cour prétend déduire l'exonération de la Banque Postale de toute responsabilité de la seule qualification de don manuel et de «l'intention libérale irrévocable» qu'elle prête à Mme Y... ; qu'il s'ensuit que la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, l'annulation du chef ayant repoussé les demandes de dommages et intérêts de Mme Y..., en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, qu'après avoir relevé, d'une part, que la réglementation ne permettait d'être titulaire que d'un seul plan épargne-logement compte tenu des avantages attachés à ce placement et, d'autre part, que Mme Y... avait reconnu avoir pris connaissance et accepté les conditions générales de fonctionnement du plan et que les fonds versés constituaient des dons manuels au profit de ses petits-enfants, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ; ensuite, que le pourvoi formé contre le premier moyen ayant été rejeté, le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence est inopérant ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... et la condamne à payer à la Banque Postale la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... épouse Y... de sa demande tendant au déblocage à son profit des fonds inscrits sur les plans d'épargne logement par elle souscrits au nom de chacun de ses trois petits-enfants ;
AUX MOTIFS QUE sur les conventions d'ouverture des trois comptes épargne logement, Mme X... épouse Y... figurait en qualité de souscripteur des plans dont les titulaires étaient ses trois petits-enfants ; qu'il ressort des circonstances de l'espèce qu'en ouvrant ces comptes, puis en les alimentant, Mme X... épouse Y... était animée d'une intention libérale irrévocable au profit de ses petits-enfants, les versements par elle effectués devant être qualifiés de dons manuels ; qu'il convient d'observer que si, dans ses écritures, Mme X... épouse Y... conteste que les fonds se trouvant sur les comptes appartiennent à ses petits-enfants, elle ne précise pas à quel titre elle avait ouvert ces plans et les avait alimentés alors que la réglementation ne permet d'être titulaire que d'un seul plan d'épargne-logement, compte tenu des avantages attachés à ce placement ;qu'elle ajoute que c'est à la suite d'une brouille familiale survenue plusieurs années après l'ouverture des comptes qu'elle a voulu récupérer pour elle-même les fonds ; qu'en ouvrant les plans, la souscriptrice a reconnu avoir pris connaissance et accepter les conditions générales de fonctionnement du plan ; que l'article 4 de ces conditions prévoit qu'à l'échéance du contrat, le titulaire pourra proroger son plan d'épargne-logement ou le clôturer ; que s'agissant d'un don manuel par virements de fonds, aucune acceptation formelle n'était requise de Vincent, Sébastien et Caroline Z..., d'une part, parce qu'ils étaient les titulaires des contrats et, d'autre part, par application des articles 931 et 935 du code civil, la souscriptrice étant leur grand-mère ; que le fait que les relevés des comptes étaient, pendant quelques années, adressés au nom des titulaires, mais chez leur grand-mère, est sans portée ; que les fonds versés par Mme X... épouse Y... sur les plans litigieux constituant des dons manuels au profit de ses petits-enfants, elle ne peut en obtenir la restitution, le jugement devant être infirmé en ce qu'il a ordonné à La Poste de les débloquer à son profit ;
ALORS DE PREMIERE PART QUE la qualification de don manuel présuppose une dépossession irrévocable du donateur ; qu'en déduisant au contraire le caractère irrévocable des versements opérés par Mme Y... de la qualification préalable de don manuel, la cour viole les articles 894 et 931 du code civil ;
ALORS DE DEUXIEME PART QUE les règles d'ordre public qui régissent l'ouverture et le fonctionnement des plans d'épargne-logement n'opèrent aucune distinction entre le souscripteur et le titulaire et font du seul souscripteur la personne ayant vocation à la restitution du capital versé, ce quel que soit le cas de figure envisagé – résiliation avant terme du plan, plan parvenu à son échéance, ou sanction du souscripteur qui, en violation de la loi, ouvre plusieurs plans d'épargne-logement – ; qu'il s'ensuit que les versements effectués par le souscripteur d'un plan d'épargne-logement n'opèrent pas dépossession définitive et irrévocable de celui-ci ; qu'en qualifiant néanmoins l'opération de don manuel, la cour viole de nouveau les articles 894 et 931du code civil ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE le don manuel postule une tradition réelle, laquelle ne peut être caractérisée en l'absence de mise en possession du donataire ; que la possession doit être continue et non ininterrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si la circonstance que les petits-enfants prétendument gratifiés par Mme Y..., ainsi que leurs représentants légaux, aient été maintenus dans l'ignorance, jusqu'à la naissance de la procédure engagée contre La Poste, de l'existence des plans d'épargne-logement ouverts à leur nom et des versements qui y étaient opérés n'excluait pas l'animus domini caractéristique de la possession, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles 931 et 2229 du code civil ;
ALORS DE QUATRIEME PART QUE si les ascendants d'un enfant mineur, même du vivant de ses père et mère, ont qualité pour accepter pour lui une donation, la cour ne constate nullement qu'en versant les fonds sur les plans d'épargne-logement litigieux, Mme Y... avait agi, non seulement en qualité de donatrice, mais également en représentation des enfants mineurs qu'elle entendait gratifier ; qu'à cet égard, la cour prive sa décision de toute base légale au regard des articles 894, 931 et 935 du code civil ;
ET ALORS DE CINQUIEME PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE qu'en déduisant l'intention libérale, et qui plus est «l'intention libérale irrévocable» de Mme X... épouse Y... des «circonstances de l'espèce», sans nullement préciser les éléments sur lesquels elle entendait ainsi se fonder ni faire ressortir en quoi ils étaient susceptibles de faire conclure à l'intention libérale et à la volonté de la prétendue donatrice de se dessaisir irrévocablement, la cour entache sa décision d'une insuffisance de motifs, violant l'article 455 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme Y... de sa demande tendant à la condamnation de la Banque Postale au paiement des sommes de 6.031,20 € et 1.000 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE la qualification retenue des opérations litigieuses exclut que La Poste ait pu manquer à ses obligations professionnelles d'information ou de conseil ; que les versements effectués par Mme X... épouse Y..., animée d'une intention libérale irrévocable, l'ayant été à titre de dons manuels, il s'ensuit que seuls les titulaires des comptes et non la souscriptrice pouvait les récupérer ; que le jugement sera donc également réformé en ce qu'il a condamné La Poste au versements de dommages-intérêts ;
ALORS D'UNE PART QU'un établissement d'épargne, au titre de son devoir de renseignement et de conseil, doit mettre en garde son client contre les risques de l'opération qu'il s'apprête à réaliser, spécialement lorsque cette opération est atypique, telle la souscription de plusieurs plans d'épargne-logement par un même souscripteur ; que dès lors, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée (dernières écritures de Mme Y..., p.6 et s.), et comme l'avaient retenu les premiers juges, si la Banque Postale n'était pas tenue, eu égard à la particularité de l'opération projetée, de mettre en garde Mme Y... sur l'irrévocabilité (à la supposer avérée) des versements opérés et sur les pouvoirs dont les titulaires du compte auraient l'exclusivité, la cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE la cour prétend déduire l'exonération de la Banque Postale de toute responsabilité de la seule qualification de don manuel et de «l'intention libérale irrévocable» qu'elle prête à Mme Y... ; qu'il s'ensuit que la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, l'annulation du chef ayant repoussé les demandes de dommages et intérêts de Mme Y..., en application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-12684
Date de la décision : 06/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 jan. 2010, pourvoi n°08-12684


Composition du Tribunal
Président : M. Bargue (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Defrenois et Levis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.12684
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