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05/01/2010 | FRANCE | N°09-11313

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 05 janvier 2010, 09-11313


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, d'une part, que de grandes enseignes y compris du commerce de luxe s'étaient installées dans le secteur au cours du bail écoulé, qu'un nouveau parc de stationnement avait été ouvert et que l'accroissement de la population active du secteur tertiaire et le développement considérable du tourisme d'affaires, caractérisé notamment par un doublement du nombre des congressistes, généraient un potent

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, d'une part, que de grandes enseignes y compris du commerce de luxe s'étaient installées dans le secteur au cours du bail écoulé, qu'un nouveau parc de stationnement avait été ouvert et que l'accroissement de la population active du secteur tertiaire et le développement considérable du tourisme d'affaires, caractérisé notamment par un doublement du nombre des congressistes, généraient un potentiel de clientèle plus aisée, d'autre part, que l'éventail des produits offerts à la vente par la société Augis 1830 permettait d'attirer une large clientèle puisque les prix variaient entre 20 euros et 51 000 euros, que sa notoriété dépassait la place de Lyon, que les produits qu'elle commercialisait lui permettaient de cibler une clientèle élargie, que le chiffre d'affaires des commerces du secteur provenait à 81 % de la clientèle non résidente et que ses locaux étaient situés sur la partie piétonne de la rue au centre du circuit habituel des touristes et des congressistes avec une situation d'angle particulièrement attractive, la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé le rapport d'expertise et a souverainement retenu, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que la société Augis 1830 bénéficiait de la hausse de population active, du développement important du tourisme d'agrément et d'affaires et de l'implantation dans le secteur de grandes enseignes de sorte que la modification notable des facteurs locaux de commercialité au cours du bail à renouveler avait présenté un intérêt pour son commerce de bijouterie-joaillerie, en a exactement déduit que le nouveau loyer devait être fixé selon les règles du déplafonnement ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Augis 1830 aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Augis 1830 à payer à la société ANF la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Augis 1830 ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Augis 1830

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait fixé à la somme de 134.400 euros le montant du loyer du bail renouvelé à compter du 25 août 2006, avec intérêts au taux légal sur l'arriéré à compter de chaque échéance de loyer depuis cette date, capitalisés selon les modalités de l'article 1154 du Code civil ;

Aux motifs propres que le taux de variation applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler ne peut excéder la variation de l'indice du coût de la construction, à moins d'une modification notable des caractéristiques du local considéré, de la destination des lieux, des obligations respectives des parties, ou des facteurs locaux de commercialité ; que l'expert judiciaire a constaté, durant la période du bail expiré, un développement du dynamisme commercial du deuxième arrondissement avec l'arrivée de grandes enseignes, dont deux d'entre elles à proximité immédiate du local considéré, un accroissement de la population active, le développement du tourisme et la création de 710 places de stationnement ; que l'expert mandaté par la société AUGIS 1830 a confirmé ces éléments et précisé que l'augmentation du tourisme concernait tant la clientèle d'affaires que celle d'agrément ; que selon ces deux experts, cette modification notable des facteurs locaux de commercialité ne présentait pas un intérêt direct pour le commerce considéré, dès lors que le magasin AUGIS 1830 exerce une activité de luxe, qui concerne une clientèle très aisée, fidélisée pour l'essentiel par des traditions familiales, que les enseignes faisant figure de « locomotives » sont destinées au grand public, et non au commerce de luxe, que les magasins de luxe installés dans le secteur ont privilégié la rue Président Edouard Herriot, et que les utilisateurs des transports en commun fréquentant la rue de la République ne constituent en aucun cas la clientèle visée et appréhendée ; que cependant l'expert judiciaire a indiqué que tout commerce n'a pu que bénéficier du développement de l'attractivité commerciale de la presqu'île, et notamment tout commerce du secteur où se situe le local considéré ; qu'une enquête sur la consommation des ménages fait apparaître une croissance du marché, une forte reprise d'activité et l'implantation de nouvelles «locomotives» ; que si la société AUGIS 1830 exerce une activité de luxe, le catalogue de sa collection «Automne-Hiver 2006-2007» établit que l'éventail des produits qu'elle offre à la vente permet d'attirer une large clientèle, puisque les prix varient entre 20 et 51.000 euros ; qu'il n'est pas démontré que sa clientèle se limite à la bourgeoisie traditionnelle lyonnaise, alors que l'expert indique que sa notoriété dépasse la place de LYON ; que les produits qu'elle commercialise lui permettant de cibler une clientèle élargie, elle a nécessairement bénéficié de la hausse de la population active et du développement important du tourisme d'agrément et d'affaires, d'autant que l'emplacement des locaux se trouve au centre du circuit habituel des touristes, avec une situation d'angle particulièrement attractive ; qu'elle a également profité de l'implantation dans le secteur de grandes enseignes, y compris du commerce de luxe ; qu'il est ainsi établi que la modification des facteurs locaux de commercialité au cours du bail à renouveler a présenté un intérêt pour le commerce de bijouterie joaillerie de la société Augis 1830, ce qui justifie le déplafonnement du loyer» ;

Aux motifs adoptés qu'il résulte des constatations effectuées par l'expert judiciaire et non contestées par les parties qu'une modification notable des facteurs de commercialité est intervenue pendant la durée du bail expiré du fait d'un accroissement important de la population active du deuxième arrondissement, principalement dans le secteur tertiaire, et de la création de nombreuses enseignes nouvelles, le deuxième arrondissement étant devenu le pôle majeur de l'agglomération ; que si les implantations récentes telles que Virgin, Planète Saturn, Tati ou Hippopotamus n'ont pas nécessairement d'impact sur l'activité de bijouterie joaillerie exercée par la société AUGIS 1980, qui draine une clientèle plus fortunée, il est en revanche constant que des enseignes de luxe telles que Mont Blanc ou Lancel se sont également installées dans le secteur au cours du bail écoulé ; que surtout l'accroissement de la population active du secteur tertiaire comme le développement considérable du tourisme d'affaires, caractérisé notamment par un doublement du nombre de congressistes, génèrent un potentiel de clientèle plus aisée dont la défenderesse bénéficie d'autant plus que non seulement le chiffre d'affaires des commerces du secteur provient à 81% de la clientèle non résidente mais l'emplacement des locaux sur la partie piétonne de la rue de la République se trouve également au centre du circuit habituel des touristes et des congressistes avec un situation d'angle particulièrement attractive ; qu'en conséquence l'évolution notable des facteurs locaux de commercialité constatée pendant la durée du bail a une incidence favorable sur l'activité exercée dans les lieux loués et justifie le déplafonnement du loyer» ;

Alors, en premier lieu, que l'intérêt d'une modification des facteurs locaux de commercialité doit s'apprécier «in concreto», au regard du commerce effectivement exercé par le preneur; que le juge ne peut se fonder sur des éléments généraux insusceptibles de caractériser l'intérêt concret qui en résulte pour le commerce considéré ; qu'en statuant en l'espèce par des motifs inopérants pris du bénéfice potentiel résultant, pour tous les commerces du secteur considéré, du développement de son attractivité commerciale, la Cour d'appel a violé les articles L.145-33, L.145-34 et R.145-6 du Code de commerce ;

Alors, en deuxième lieu, que le juge doit rechercher, au besoin d'office, si la modification des facteurs locaux de commercialité présente un intérêt pour le commerce considéré; que, dans cette recherche, le commerce considéré doit s'apprécier de manière subjective au regard de la clientèle effectivement visée et appréhendée par le preneur ; qu'en se bornant à retenir que la société AUGIS 1830 pouvait potentiellement attirer une clientèle élargie, sans rechercher si cette clientèle était effectivement celle visée et appréhendée par le commerce de luxe exercé dans les lieux loués, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.145-33, L.145-34 et R.145-6 du Code de commerce ;

Alors, en troisième lieu, que le juge ne peut dénaturer le sens clair et précis des écrits sur lesquels il fonde sa décision; que, selon l'expert judiciaire, la notoriété de la société AUGIS 1830 résultait du renouvellement de génération en génération d'une clientèle locale très aisée, fidélisée par des traditions familiales ; qu'en se fondant sur les termes du rapport d'expertise selon lesquels la notoriété de la société AUGIS 1830 dépassait la place de Lyon, pour en déduire que sa clientèle ne se limitait pas à la bourgeoisie traditionnelle lyonnaise, la Cour d'Appel en a dénaturé le sens clair et précis, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;

Alors, en quatrième lieu, que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; que dans ses conclusions d'appel, la société AUGIS 1830 faisait expressément valoir que l'implantation d'enseignes de la grande distribution et du luxe n'avait eu aucune incidence sur l'activité de luxe qu'elle exerce ; qu'en se bornant à énoncer que la société AUGIS 1830 «a également profité de l'implantation dans le secteur de grandes enseignes, y compris du luxe», sans répondre aux moyens pertinents selon lesquels la clientèle ainsi générée ne présentait pour elle aucun intérêt, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

Alors, en cinquième lieu, que l'intérêt d'une modification des facteurs locaux de commercialité doit s'apprécier «in concreto», au regard du commerce effectivement exercé par le preneur; qu'en se bornant à énoncer que la société AUGIS 1830 avait nécessairement bénéficié de la hausse de la population active, sans rechercher si cet accroissement s'était accompagné d'une augmentation de son pouvoir d'achat, seule susceptible de présenter un intérêt pour le commerce de luxe exercé, la Cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard des articles L145-33, L.145-34 et R.145-6 du Code de commerce ;

Alors, en dernier lieu, que l'intérêt d'une modification des facteurs locaux de commercialité doit s'apprécier «in concreto», au regard du commerce effectivement exercé par le preneur; qu'en se fondant sur le motif inopérant tiré de la localisation et de la configuration d'angle des locaux pris à bail, la Cour d'appel a de nouveau violé les articles L145-33, L.145-34 et R.145-6 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-11313
Date de la décision : 05/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 09 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 05 jan. 2010, pourvoi n°09-11313


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.11313
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