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16/12/2009 | FRANCE | N°08-44575

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 décembre 2009, 08-44575


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 23 mars 2001 en qualité de maître d'hôtel par la Société avignonnaise d'hôtellerie "La Mirande", a démissionné par lettre du 13 août 2003, invoquant divers manquements de l'employeur et un harcèlement moral, puis a saisi la juridiction prud'homale le 18 août 2003 ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'une somme en remboursement d'un prélèvement indu au titre d

e la part salariale sur les cotisations à la caisse des cadres alors, selon le moyen :...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 23 mars 2001 en qualité de maître d'hôtel par la Société avignonnaise d'hôtellerie "La Mirande", a démissionné par lettre du 13 août 2003, invoquant divers manquements de l'employeur et un harcèlement moral, puis a saisi la juridiction prud'homale le 18 août 2003 ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'une somme en remboursement d'un prélèvement indu au titre de la part salariale sur les cotisations à la caisse des cadres alors, selon le moyen :

1°/ que dans ses conclusions d'appel délaissées, M. X... sollicitait l'infirmation du jugement en faisant valoir que l'employeur avait indûment prélevé, au titre de la part salariale sur les cotisations à la caisse des cadres, la somme de 2 100 euros, dont il demandait le remboursement ; qu'en ne répondant pas à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur cette demande de remboursement d'un prélèvement indu, a violé ensemble les articles 4 et 5 du code de procédure civile et R 1452-6 du code du travail ;

Mais attendu que l'arrêt, en dépit de la formule générale de son dispositif, n'a pas statué sur ce chef de demande dès lors qu'il ne résulte pas des motifs de la décision que la cour d'appel l'ait examinée ; que sous couvert de défaut de réponse à conclusions, le moyen critique une omission de statuer sur un chef de demande ;

Que l'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Attendu que pour limiter à la somme de 4 862 euros le montant de la condamnation au titre des heures supplémentaires de travail, la cour d'appel, après avoir constaté que l'employeur ne communiquait aucun élément en réponse aux justifications du salarié, retient que les précisions apportées par les témoins et les autres explications des parties permettent de retenir cette créance, étant observé que le repos compensateur non pris n'ouvre pas droit à un rappel d'heures supplémentaires mais à des dommages-intérêts ;

Qu'en statuant ainsi, sans préciser et justifier le nombre d'heures supplémentaires qu'elle retenait, la cour d'appel a violé le texte sus-visé ;

Et sur le premier moyen :

Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande relative au harcèlement moral et limiter à 22 000 euros l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que si le salarié a fait l'objet de remarques incessantes d'une responsable, le comportement de cette dernière s'adressait non seulement à lui mais aussi à plusieurs salariés, et que ces agissements n'avaient pas pour but de porter atteinte aux droits ou à la dignité des salariés ;

Qu'en statuant ainsi alors, d'une part, que l'existence de plusieurs victimes des faits de harcèlement commis par un supérieur hiérarchique n'exonère pas l'employeur des conséquences de tels agissements à l'égard de l'un des salariés qui les a subis et alors, d'autre part, qu'un harcèlement moral peut être constitué indépendamment de l'intention de son auteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a limité le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et débouté M. X... de ses demandes relatives au harcèlement moral et en ce qu'il a limité à la somme de 4 862 euros le montant de la condamnation au titre des heures supplémentaires de travail, l'arrêt rendu le 22 juillet 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la Société avignonnaise d'hôtellerie La Mirande aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Société avignonnaise d'hôtellerie La Mirande à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR limité à la somme de 22 000 euros le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et débouté Monsieur X... de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour rupture abusive et du surplus de ses demandes ;

AUX MOTIFS QU'a en l'état de l'ancienneté de Monsieur X... dans l'entreprise, de son salaire moyen au moment de la rupture, de son âge pour être né le 10 avril 1971, de sa spécialité et de l'évolution de sa situation professionnelle prévisible, il convient de lui allouer la somme de 22 000 euros en réparation de son préjudice en application de l'article L 122-14-4 devenu L 1235-2 du Code du travail ; qu'il n'est pas démontré l'existence d'un préjudice distinct en sorte que le surplus des dommages-intérêts n'est pas justifié ; qu'en effet s 'il a fait l'objet de remarques incessantes d'une responsable, le comportement de cette dernière s'adressait non seulement à lui mais aussi à plusieurs salariés, et les agissements n'avaient pas pour but de porter atteinte aux droits ou à la dignité des salariés » ;

1./ ALORS QUE, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou effet une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de compromettre son avenir professionnel ; qu'après avoir constaté que Monsieur X... produisait des attestations faisant état d'une dégradation rapide de ses relations avec une responsable de l'établissement, laquelle ne cachait même pas sa volonté de le voir partir comme les précédents directeurs, et dit que la rupture a pour origine la méconnaissance par l'employeur de ses obligations (arrêt, p. 4, in fine), la cour d'appel, qui n'a pas réparé le préjudice subi par le salarié du fait de ce harcèlement moral, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L 1152-1 et suivants et L 1154-1 du Code du travail ;

2./ ALORS QUE peuvent constituer un harcèlement moral, des agissements ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en l'espèce, pour débouter le salarié de sa demande en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral, la cour d'appel, après avoir constaté que Monsieur X... avait fait l'objet de remarques incessantes de la part d'une responsable (arrêt, p. 4, in fine), s'est bornée à énoncer que le comportement de cette dernière s'adressait également à plusieurs salariés et que « les agissements n'avaient pas pour but de porter atteinte aux droits et à la dignité des salariés » ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, quand le salarié invoquait un comportement insultant et dégradant, des humiliations, une volonté d'épier, de commenter tous ses faits et gestes et d'entretenir la terreur qui l'ont conduit à la démission, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si de tels faits étaient de nature à compromettre l'avenir professionnel du salarié, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L 1152-1 et suivants et L 1154-1 du Code du travail ;

3./ ALORS QUE, l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité et de résultat envers ses salariés, doit réparation du préjudice qu'ils ont subi en raison des faits de harcèlement moral commis par un de ses préparés sur ses subordonnés ; qu'en l'espèce, en refusant expressement de tenir compte, dans l'appréciation de la réparation du préjudice consécutif à la rupture du contrat de travail, le préjudice résultant des faits de harcèlement dont Monsieur X... avait été victime, la cour d'appel a violé ensemble les articles L 1152-2, L 1152-3, L 1154-1, L 1235-1 et L 1235-3 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR limité à la somme de 4 862 euros, et aux congés payés y afférents, le montant de la condamnation de la SAH LA MIRANDE au paiement d'heures supplémentaires à Monsieur X... et D'AVOIR débouté celui-ci du surplus de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE « que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que les heures supplémentaires effectuées et constatées sont importantes ; qu'en effet selon les attestations produites Monsieur X... s'occupait de l'ensemble des services de la restauration à savoir le restaurant, le bar, le salon de thé, le banqueting, les petits déjeuners, le service traiteur et le room service ; que le salarié verse aux débats un état circonstancié des heures travaillées de nature à étayer sa demande; que l'employeur ne fournit aucun élément notamment en application des dispositions de l'article D 212-21, devenu D 3171-8, du Code du travail ; qu'en l'état des précisions apportées par les témoins et les autres explications fournies par les parties, la cour est en mesure de chiffrer les heures supplémentaires, après vérifications, à la somme de 4 862 euros, étant observé que le repos compensateur non pris n'ouvre pas droit à un rappel d'heures supplémentaires mais à des dommages-intérêts non réclamés ; qu'il sera alloué également en sus des congés payés y afférents, le tout assorti des intérêts au taux légal non pas à compter de la date de la rupture du contrat le 13 août 2003, mais à celle du 25 août 2003, date de la réception de la demande de convocation devant le bureau de conciliation valant mise en demeure » ;

1./ ALORS QUE la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge ne peut rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires, tout en constatant que l'état circonstancié des heures travaillées qui étaye la demande du salarié n'est pas contesté par l'employeur, sans violer les articles L 3121-22 et suivants et L 3171-4 du Code du travail ;

2./ ALORS QU'en tout état de cause, la cour d'appel, qui a constaté que le salarié « verse aux débats un état circonstancié des heures travaillées de nature à étayer sa demande », sans que l'employeur ne fournisse aucun élément, ne pouvait débouter partiellement le salarié de ses demandes en se bornant à affirmer « qu'en l'état des précisions apportées par les témoins et les autres explications fournies par les parties, la cour est en mesure de chiffrer les heures supplémentaires, après vérifications, à la somme de 4 862 euros », sans s'expliquer sur les éléments qu'elle retenait ; qu'ainsi, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard les articles L 3121-22 et suivants et L 3171-4 du Code du travail ;

3./ ALORS QUE, le juge prud'homal est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en l'espèce, Monsieur X... ayant sollicité la condamnation de la SAH LA MIRANDE au paiement de la somme de 89 407,23 euros correspondant aux heures supplémentaires, repos compensateur et congés payés, la cour d'appel ne pouvait le débouter de sa demande au titre du repos compensateur, en se bornant à affirmer qu'il n'ouvre pas droit à un rappel d'heures supplémentaires mais à des dommages et intérêts non réclamés, sans violer ensemble les articles 4 et 12 du Code de procédure civile et R 1452-6 du Code du travail ;

4./ ALORS QUE le juge ne peut soulever d'office un moyen, sans inviter les parties à en débattre préalablement contradictoirement ; qu'en soulevant d'office le moyen tiré de ce que la demande de repos compensateur non pris n'ouvre pas droit à un rappel d'heures supplémentaires mais à des dommages et intérêts non réclamés, sans inviter les parties à se prononcer sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile, l'article R 1452-6 du Code du travail et 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44575
Date de la décision : 16/12/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 22 juillet 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 déc. 2009, pourvoi n°08-44575


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.44575
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