Sur le premier moyen :
Vu l'article 695 du code civil ;
Attendu que le titre constitutif de la servitude, à l'égard de celles qui ne peuvent s'acquérir par la prescription, ne peut être remplacé que par un titre récognitif de la servitude et émané du propriétaire du fonds asservi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 11 septembre 2008), que Mme X..., propriétaire de la parcelle AD n° 497 bénéficiant, aux termes de l'acte de vente qui lui a été consenti le 11 octobre 1991, d'un droit de passage sur la parcelle AD n° 498, a assigné les époux Y..., propriétaires de cette parcelle, en remise en état du passage qu'ils ont obstrué par une clôture et des plantations ;
Attendu que pour accueillir la demande et fixer l'assiette de la servitude, l'arrêt qui relève que l'acte par lequel les époux Y... ont acquis la parcelle AD n° 498, le 3 janvier 1995, ne fait aucune mention d'un droit de passage au profit du fonds cadastré AD n° 497, retient que le titre de propriété de leurs auteurs, en date du 8 décembre 1955, mentionne que la parcelle n° AD 498 confine au nord un passage commun avec Z..., que selon le plan cadastral, la parcelle AD n° 498 est limitée au nord par la parcelle AD n° 499 dont il n'a jamais été prétendu ni a fortiori démontré qu'elle ait, à une époque ou à une autre, appartenu à M. Z... et en déduit que le passage commun visé dans l'acte du 8 décembre 1955 se situe à la limite nord de la parcelle AD n° 498, sur la parcelle actuellement en nature de jardin d'agrément sur laquelle Mme X... revendique un droit de passage ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à établir l'existence d'une servitude de passage, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y a ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 septembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer aux époux Y... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille neuf.
Le conseiller rapporteur le president
Le greffier de chambre
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour pour les époux Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté dit que la parcelle cadastrée section AD n° 497, sise lieu-dit « Ramecourt Village » à SAINT-ERME, section RAMECOURT (Aisne), ..., bénéficiait d'un droit de passage sur la parcelle cadastrée section AD n° 498, s'exerçant sur une bande de terrain rectangulaire d'une largeur de trois mètres, confinant : au nord, la parcelle AD n° 499, au sud, le surplus de la parcelle AD n° 498 en nature de jardin d'agrément, à l'est, la parcelle AD n° 497, à l'ouest, la ruelle de SISSONNE ; et ordonné aux époux Y..., actuels propriétaires du fonds servant cadastré AD n° 498, de procéder à l'enlèvement des plantations et obstacles de toute nature qu'ils ont implantés sur l'assiette du droit de passage bénéficiant au fonds dominant cadastré AD n° 497, afin de permettre le libre exercice dudit droit de passage, notamment au moyen d'un véhicule automobile ;
AUX MOTIFS QUE l'acte du 11 octobre 1991 contenant vente par les consorts A... à Mme Martine X... de la parcelle cadastrée section AD n° 497 stipule que ledit fonds bénéficie « d'un droit de passage sur la parcelle section AD n° 498 appartenant aux consorts B... pour accéder à la ruelle de Sissonne » ; que l'acte dressé le 20 août 1964 par Maître Henri C..., notaire à SISSONNE, contenant vente par M. Raymond Z... aux époux A... de ladite parcelle cadastrée section AD n° 497 stipule que ledit fonds bénéficie d'un « droit de passage pour accéder à la ruelle de SISSONNE s'exerçant sur la propriété cadastrée AD n° 498 appartenant aux consorts B... » ; qu'il est donc ainsi établi par titre que le fonds cadastré AD n° 497 est titulaire d'une servitude de passage sur le fonds servant cadastré section AD n° 498 ;
QUE les époux Y... font, à juste titre, observer que l'acte constatant la servitude n'est opposable au propriétaire du fonds servant que si son auteur y a été partie ; que, dans la mesure où l'acte du 3 janvier 1995 par lequel ils ont acquis la parcelle litigieuse cadastrée section AD n° 498 des consorts B... ne fait aucune mention d'un droit de passage au profit du fonds cadastré section AD n° 497, il convient donc de rechercher si les actes translatifs de propriété antérieurs afférents aux auteurs des époux Y... contiennent la mention d'une telle servitude ; que les consorts B... (c'est-à-dire Mme Irène D... veuve de Victor B... et leurs quatre enfants communs, à la suite du décès de Victor B... survenu le 23 81247 BP / BV septembre 1958), auteurs des époux Y..., viennent aux droits de la communauté ayant existé entre feu Victor B... et Mme Irène D..., son épouse, qui a acquis ladite parcelle cadastrée section AD n° 498 le 8 décembre 1955 ; que, selon l'acte de Maître Henri C... du 8 décembre 1955, contenant vente par Mme Jeanne E... veuve d'Ernest F... à M. Victor B..., époux de Mme Irène D... de ladite parcelle alors cadastrée AD n° 1950, dont il n'est pas contesté qu'elle est à présent la parcelle AD n° 498, ladite parcelle est confinée :- au midi, par la rue (des Marronniers),- au nord, par un passage commun avec Z...,- à l'est, par le même (parcelle n° 497),- à l'ouest, par la ruelle de Sissonne ; qu'il résulte ainsi du titre de propriété des auteurs des époux Y... que la parcelle cadastrée section AD n° 498 « confine au nord un passage commun avec Z... » ; que, selon le plan cadastral produit aux débats, la parcelle cadastrée section AD n° 498 est limitée au nord par la parcelle AD n° 499, dont il n'a jamais été prétendu ni a fortiori démontré qu'elle ait, à une époque ou à une autre, appartenu à M. Raymond Z... ;
QU'il s'ensuit que le passage commun visé à l'acte du 8 décembre 1955 se situe le long de la limite nord de la parcelle AD n° 498, sur la partie actuellement en nature de jardin d'agrément sur laquelle Mme Martine X... revendique un droit de passage ; qu'en conséquence, Mme Martine X..., qui ne demande pas la reconnaissance d'un passage commun, c'est-à-dire un passage indivis, mais seulement un droit de passage sur la parcelle AD n° 498, est fondée en sa demande ; que ledit passage s'exercera sur une bande de terrain rectangulaire confinée :- au nord, par la parcelle cadastrée section AD n° 499,- au sud, par le surplus de la parcelle cadastrée section AD n° 498 en nature de jardin d'agrément,- à l'est, par la parcelle cadastrée section AD n° 497, appartenant présentement à Mme Martine X...,- à l'ouest, par la ruelle de Sissonne ; qu'il résulte de l'état des lieux que ledit passage ayant pour but de permettre l'accès avec un véhicule à l'arrière de la parcelle AD n° 497 entièrement bâtie sur l'avant, l'assiette sur laquelle s'exerce ledit droit de passage doit être constituée par une bande de 3 mètres de largeur ; qu'il convient donc d'ordonner aux époux Y... de procéder à l'enlèvement des plantations et obstacles de toute nature qu'ils ont implantés sur l'assiette du droit de passage bénéficiant au fonds AD n° 497, sans qu'il soit nécessaire, en l'état, de prévoir une astreinte provisoire ;
1 / ALORS QUE, faute d'avoir relevé, dans le titre du fonds servant, la mention de la servitude de passage alléguée, la Cour d'appel, qui n'a pas davantage constaté le moindre acte extérieur susceptible de déterminer qu'une telle servitude, au demeurant non contenue dans les précédents titres translatifs de propriété du fonds Y... ni citée dans un quelconque acte récognitif, – et dont il n'est de surcroît pas contesté que les modalités d'exercice n'ont, en tout état de cause, jamais été déterminées – ne pouvait affirmer l'existence de cette servitude pour ensuite en déterminer les modalités d'exercice ; qu'en se déterminant de la sorte, la juridiction du second degré a violé les articles 688, 691 et 695 du Code civil ;
2 / ALORS en tout état de cause QUE dans leurs écritures d'appel dûment motivées, les époux Y..., propriétaires du fonds prétendument dominant, avaient fait valoir, au sujet du passage commun, au nord, mentionné dans l'acte translatif de propriété de leurs fonds établi en 1955, que « il ne s'agit pas d'un accès à la ruelle de Sissonne » (conclusions, p. 9, in fine), de sorte qu'il ne pouvait en être déduit aucune conséquence de droit au regard des mentions de l'acte d'acquisition de Mme X... indiquant que son fonds « bénéficie d'un droit de passage sur la parcelle AD n° 498 appartenant aux Consorts B... auteurs des époux Y... pour accéder à la ruelle de Sissonne » ; qu'en laissant sans réponse ce moyen, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motif, et ainsi violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3 / ALORS QUE, aux termes de l'acte translatif de propriété établi le 8 décembre 1955 entre Mme E... et les époux B..., aux droits desquels ont succédé par la suite les époux Y..., le fonds prétendument servant est présenté comme « confinant au midi la rue au fond, au nord à un passage commun avec Z..., à l'est le même, à l'ouest la ruelle de Sissonne », élément attestant que l'assiette de ce passage n'est pas sur le fonds, le notaire instrumentaire ayant par ailleurs pris soin de préciser que « la venderesse déclare que, personnellement, elle n'a créé ni laissé acquérir aucune servitude sur l'immeuble vendu et qu'à sa connaissance il n'en existe pas » ; que dès lors, en indiquant que l'acte litigieux mentionne que le fonds Y... confine « au nord, par un passage commun avec Z... », pour en déduire que ledit fonds supportait le passage et se trouvait ainsi grevé d'un droit réel, la cour d'appel a dénaturé l'acte susvisé, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
4 / ALORS QU'en reconnaissant au profit du fonds X... une servitude de passage dont elle a cru devoir fixer l'assiette, dans le petit jardin d'agrément des époux Y..., sur une largeur de 3 mètres, compte tenu de ce « qu'il résulte de l'état des lieux que ledit passage ayant pour but de permettre l'accès avec un véhicule à l'arrière de la parcelle AD n° 497 entièrement bâtie sur l'avant, l'assiette sur laquelle s'exerce ledit droit de passage doit être constituée par une bande de 3 mètres de largeur » (arrêt, p. 5, § 5), sans rechercher si l'état d'enclave témérairement invoqué ne résultait pas du propre fait de Mme X..., dont l'action était diligentée aux seules fins de commodité personnelle, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 682 du Code civil et n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
5 / ALORS en tout état de cause, QU'en fixant au travers du jardin des exposants, sur une largeur de trois mètres, le passage selon elle nécessaire pour assurer la desserte du fonds X..., au profit duquel elle a estimé qu'existait une servitude constituée sur le fonds Y..., sans condamner la propriétaire du fonds dominant à verser à ces derniers une indemnité proportionnée au dommage en résultant pour eux, la Cour d'appel a violé par refus d'application l'article 682 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le présent arrêt sera publié au bureau des hypothèques de LAON aux frais des époux Y... ;
1 / ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'occurrence, Madame X... s'était contentée de demander à la juridiction d'appel d'« ordonner en outre la publication de l'arrêt à intervenir à la Conservation des Hypothèques de LAON » (conclusions, p. 9, avant-dernier §), sans aucunement réclamer que les frais y afférents soient supportés exclusivement par les intimés, défendeurs à la procédure ; qu'en ordonnant la publication aux frais des époux Y..., sans inviter préalablement les parties à s'expliquer sur ce point, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
2 / ALORS de surcroît et en tout état de cause, QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera, par voie de conséquence et en application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile, la censure du chef du dispositif attaqué.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamnés les époux Y... à payer à Madame X... la somme de 5. 000 € à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE ne pouvant exercer son droit de passage depuis plusieurs années du fait de l'obstruction injustifiée des époux Y..., il convient de réparer le préjudice de jouissance subi par Mme Martine X... en condamnant ces derniers à lui payer la somme de 5. 000 € à titre de dommages-intérêts ;
1 / ALORS QUE il résultait des circonstances procédurales que Madame X... avait, après avoir succombé selon jugement du 17 juillet 2000 dans une instance par elle engagée devant le Tribunal d'instance de LAON pour trouble de jouissance, été déboutée par le jugement entrepris rendu le 27 juin 2005 sur assignation par elle délivrée aux exposants le 27 juin 2005 ; que dès lors, la Cour d'appel ne pouvait allouer à l'appelante des dommages-intérêts en considération « de l'obstruction injustifiée » des époux Y... à l'exercice de « son droit de passage depuis plusieurs années », sans s'expliquer sur le caractère déterminant de ces décisions de justice dans « l'obstruction » alléguée, laquelle procédait, pendant toute cette période, d'une exécution conforme de ces décisions ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la Cour d'AMIENS a violé l'article 1382 du Code civil ;
2 / ALORS en tout état de cause QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera, en application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile, celle du chef du dispositif de l'arrêt, en lien de dépendance nécessaire, allouant à l'appelante des dommages intérêts.