Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Amg2r que sur le pourvoi incident relevé par la société Marini Silvano :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le contrat d'agence commerciale qui la liait à la société Marini Silvano ayant pris fin, la société Amg2r l'a assignée en paiement de commissions et d'indemnités de préavis et de cessation de contrat ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 134-11, L. 134-12 et L. 134-13 du code de commerce ;
Attendu que pour rejeter les demandes d'indemnités de préavis et de cessation de contrat de la société Amg2r l'arrêt, après avoir constaté que la société Marini Silvano avait rappelé à l'agent, quelques jours avant la rupture, qu'un an auparavant elle l'avait informé à plusieurs reprises de son intention de ne plus continuer leurs relations compte tenu du chiffre d'affaires qu'il avait réalisé au cours des dernières saisons et lors de la rupture, qu'elle pensait que son activité avait été insuffisante durant les deux dernières années parce qu'il aurait été l'agent d'une entreprise concurrente, retient que la cessation du contrat a été provoquée par la faute grave de la société Amg2r qui a manqué à son obligation de loyauté en dissimulant à sa mandante, l'exercice d'une activité parallèle avec un concurrent ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Marini Silvano qui avait indiqué penser que les manquements de la société Amg2R duraient depuis deux ans, n'avait pas toléré ce comportement en sorte qu'elle ne pouvait plus s'en prévaloir pour refuser d'indemniser son agent, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l'article L. 134-6 du code de commerce ;
Attendu, selon l'article L. 134-6 du code de commerce, que l'agent commercial, qui est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé, a droit à une commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe ;
Attendu que pour condamner la société Marini Silvano à payer à la société Amg2r la somme globale de 13 965, 04 euros, outre les intérêts, à titre de rappel de commissions, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi que la mandante aurait entendu limiter le secteur d'activité de l'agent, cette activité s'étant étendue sur tout le territoire français ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel qui avait constaté que la société Amg2r n'avait été chargée d'aucun secteur géographique déterminé, a violé par fausse application, le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Marini Silvano ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Bachellier et Potier de La Varde, avocat aux Conseils pour la société Amg2r
La société AMG2R fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes tendant au versement d'une indemnité compensatrice du préjudice subi du fait de la rupture ainsi que d'une indemnité de préavis ;
AUX MOTIFS QUE par courrier électronique du 19 juillet 2004, la société Marini Silvano rappelait à son mandataire que le 29 juillet 2003 elle lui avait envoyé un fax et plusieurs e-mails par lesquels elle l'informait que du fait du chiffre d'affaire réalisé au cours des dernières saisons, elle n'avait pas l'intention de continuer leur collaboration ; que par courrier du 28 juillet 2004, la société AMG2R considérait que notamment ce courrier consommait la rupture immédiate de leurs relations et elle sollicitait le paiement de ses commissions, d'une indemnité minimum de 40. 000 euros et la remise de documents comptables ; que le 28 juillet 2004 la société Marini Silvano contestait la qualité d'agent commercial de la société AMG2R, prétendait que toutes les commissions avaient été payées, rappelait que depuis le 12 janvier 2004 elle n'avait reçu aucune commande de sa part et qu'elle a ainsi confirmé son intention de rompre le contrat et qu'elle pensait que le travail des deux dernières années avait été insuffisant parce qu'elle était agent d'une maison concurrente qui vend des produits identiques ; qu'il résulte de l'attestation de monsieur X..., directeur des ventes de la société AMG2R jusqu'au 31 mai 2003, qu'en cette qualité il a représenté notamment la société Marini Silvano, la société Cabot et cie et la société Il Cappello, ces trois sociétés étant concurrentes et les consignes de la direction étant de ne pas parler de Cabot chez Il Cappello et chez Marini Silvano et vice-versa ; que la qualité d'ancien salarié de la société Marini Silvano et le fait que monsieur X... serait désormais l'agent commercial de la société Marini Silvano est insuffisant pour écarter cette attestation ; qu'il résulte du catalogue de la société Marini Silvano qu'elle commercialise des bonnets et chapeaux de tous modèles pour enfants et adultes, des écharpes et des gants ; que la société Cabot et cie propose à la vente des bonnets, des chapeaux, des casquettes et des gants pour enfants et adultes ; que ces sociétés produisent des produits concurrents ; que la faute grave de l'agent commercial peut être invoquée par le mandant même postérieurement à la constatation de la rupture par le mandataire et que son absence de mention dans une lettre de rupture ne peut, en soi, lui interdire de s'en prévaloir lors d'une instance postérieure ; que la société Marini Silvano fait état des manquements de la société AMG2R dans son courrier du 28 juillet 2004 ; que si la société Marini Silvano a manqué à ses obligations en ne réglant à la société AMG2R que le 12 janvier 2004 les commissions du dernier semestre 2003, le manquement par la société intimée à son obligation de loyauté, essentielle au mandat d'intérêt commun, caractérisé par le fait d'avoir caché une activité parallèle avec un concurrent constitue une faute grave privative de l'indemnité prévue à l'article L. 134-3 du code de commerce ; que le jugement sera réformé en ce qu'il a condamné la société Marini Silvano à payer à la société AMG2R la somme de 42. 057 euros à titre de dommages et intérêts ; que compte tenu de la cause de la rupture, la société AMG2R ne peut prétendre à un préavis ;
ALORS QUE le mandant qui a laissé perdurer la relation avec son mandataire bien qu'il ait eu connaissance d'un manquement aux obligations de ce dernier ne peut plus l'invoquer postérieurement à la rupture pour le priver d'indemnité ; que dès lors, en se bornant à retenir que la société Marini Silvano faisait état des manquements qu'elle reprochait à la société AMG2R dans un courrier du 28 juillet 2004, sans rechercher si cette société, qui indiquait dans ce courrier qu'elle pensait que ces manquements duraient depuis deux ans, n'avait pas accepté cette situation, en sorte qu'elle ne pouvait plus s'en prévaloir pour refuser d'indemniser son mandataire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-11, L. 134-12 et L. 134-13 du code de commerce ;
ALORS QUE, en tout état de cause, le mandant qui ne met pas l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat peut se voir opposer par celui-ci une exception d'inexécution ; que dès lors, en se bornant à retenir que la société AMG2R avait manqué à ses obligations, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Marini Silvano n'avait pas mis son agent dans l'impossibilité d'exercer son mandat en ne lui communiquant ni les informations et documentations utiles, ni les relevés de commissions et de chiffre d'affaires, en sorte qu'elle ne pouvait lui reprocher ses manquements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 134-4 du code de commerce ;
ALORS QUE la rupture doit être prononcée aux torts partagés du mandant et du mandataire lorsque tous deux ont manqué à leurs obligations ; que dès lors, la cour qui, après avoir relevé que la société Marini Silvano avait manqué à ses obligations en ne réglant pas certaines commissions à la société AMG2R, a néanmoins décidé de la priver de toute indemnité sans tirer aucune conséquence des manquements de la société Marini Silvano, a violé l'article L. 134-12 du code de commerce.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Marini Silvano
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la Société MARINI SILVANO à payer à la Société AMG2R la somme globale de 13. 965, 04 €, outre les intérêts, à titre de rappel de commissions ;
AUX MOTIFS QUE « sur la demande relative au paiement de commissions, qu'il résulte des pièces produites et notamment des relevés de paiement de commissions, que l'activité de la Sté A. M. G. 2R s'est étendue sur tout le territoire français et que la sté MARINI SILVANO ne démontre pas, en donnant mandat à celle – ci de négocier des contrats de vente, qu'elle a entendu limiter son secteur géographique d'activité ; qu'il convient dès lors de retenir que la Sté A. M. G. 2R était chargée d'un secteur géographique déterminé au sens de l'article L 134-6 du Code de commerce et qu'elle a droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat avec une personne appartenant à ce secteur ; que dans sa lettre de rupture du 26 juillet 2004, la Sté A. M. G. 2R a demande à la Sté MARINI SILVANO qu'elle lui fasse parvenir le double des commandes, le double des factures, son journal des ventes et le grand livre des comptes clients, conformément aux dispositions de l'article R 134-3 du Code de commerce ; que la Sté MARINI SILVANO a produit aux débats, en octobre 2007, des extraits de ses comptes pour l'année 2003 et l'année 2004, représentant, selon son chef comptable, l'intégralité des ventes pour les clientes indiqués, lesquels n'ont pas effectué d'autres commandes directement ; que ces documents ne concernent que les ventes pour lesquelles la Sté A. M. G. 2R a été commissionnée selon relevés des 12 janvier et 19 juillet 2004 et non l'ensemble des ventes de la Sté MARINI SILVANO qui permettrait de définir celles émanant de clients ayant leur activité sur le territoire français ; qu'ils ne comportent pas le nom de clients mentionnés par la Sté A. M. G. 2R (ORCA, AUBER PRICE, MODE COMPANY …), qui avaient passé des commandes en 2001 et 2002 ; que compte tenu de ces éléments, il convient de déterminer le montant des commissions dues à la Sté A. M. G. 2R en tenant compte du dernier état accepté le 5 avril 2003 par la société intimée, portant sur le premier trimestre 2003 ; que compte tenu de ce montant (1 555, 62 euros) et du montant des commissions du deuxième trimestre 2003 qui n'ont fait l'objet d'aucune contestation de la part de la Sté A. M. G. 2R (3 592, 97 euros) et des sommes versées par la Sté MARINI SILVANO en 2003, il convient de fixer à la somme de 4 695, 13 euros le solde de commissions dû pour l'année 2003 et à celle de 5 837, 51 euros les commissions dues jusqu'au 28 juillet 2004 (5 148, 59 + 800, 89 – 111, 97), sommes qui porteront intérêt au taux légal à compter du 15 décembre 2004 ; que sur le fondement de l'article L 134-7 du Code de commerce, il convient de fixer à la somme de 3 432, 40 euros le montant des commissions dues pendant quatre mois pour les opérations nées de l'activité antérieure du mandataire » ;
ALORS QUE seul l'agent commercial chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé a droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe ; que la Cour d'appel, pour dire applicable l'article L. 134-6 alinéa 2 du code de commerce, retient qu'il n'est pas établi que la société MARINI SILVANO aurait entendu limiter le secteur géographique d'activité de la société AMG2R, laquelle activité s'était étendue, dans les faits, « sur tout le territoire français » ; qu'en se déterminant par de tels motifs, d'où il résulte que la société AMG2R n'avait été chargée d'aucun secteur géographique déterminé, la Cour d'appel a violé par fausse application le texte susvisé.