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02/12/2009 | FRANCE | N°07-44548

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 décembre 2009, 07-44548


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en 1986 par la société Orly restauration en qualité de chef de cuisine par contrat de travail transféré le 1er mars 1998 à la société Avenance Entreprise, et qu'il a occupé à compter du 1er mai 2001 les fonctions de directeur de site ; qu'il a été placé en arrêt de travail pour maladie à compter du 20 mars 2002 ; que par avis du 4 juin 2003 visant expressément l'article R. 241 51 1 du code du travail, le médecin du travail l'a déclaré "Inap

te définitif à la reprise de son poste et à tout poste de l'entreprise. Danger...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en 1986 par la société Orly restauration en qualité de chef de cuisine par contrat de travail transféré le 1er mars 1998 à la société Avenance Entreprise, et qu'il a occupé à compter du 1er mai 2001 les fonctions de directeur de site ; qu'il a été placé en arrêt de travail pour maladie à compter du 20 mars 2002 ; que par avis du 4 juin 2003 visant expressément l'article R. 241 51 1 du code du travail, le médecin du travail l'a déclaré "Inapte définitif à la reprise de son poste et à tout poste de l'entreprise. Danger immédiat en cas de reprise". ; qu'après avoir été licencié le 21 juin 2003 pour inaptitude physique, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le second moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de requalification de la rupture de son contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse et ses demandes afférentes, alors, selon le moyen, que l'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout poste dans l'entreprise, fût-ce par la procédure de "danger immédiat", et concluant à l'impossibilité de son reclassement ne dispense pas l'employeur de rechercher une telle possibilité de reclassement au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail ; qu'en dispensant la SAS Avenance Entreprises de toute obligation de reclassement interne au seul motif que, sur sa demande, le médecin du travail, réitérant son avis d'inaptitude totale initial, avait "confirm(é) que l'état de santé actuel du salarié ne permet(tait) pas d'envisager un reclassement au sein de l'entreprise" la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 122 24 4 et L. 241 10 1 du code du travail ;

Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments produits, la cour d'appel, qui a retenu par motifs propres et adoptés que l'employeur avait effectivement recherché tant au sein de l'entreprise que par consultation de l'ensemble des établissements du groupe une nouvelle affectation pour le salarié sur des postes déjà vacants ou susceptibles de lui convenir, a pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, qu'il avait exécuté loyalement son obligation de reclassement ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 3171 4 du code du travail ;

Attendu que pour rejeter les demandes du salarié en paiement d'heures supplémentaires, de repos compensateurs, de congés payés et de dommages intérêts pour travail dissimulé, l'arrêt retient que le salarié produit une attestation collective de salariés sous sa subordination indiquant qu'il "n'a pas hésité à doubler ses heures légales de travail", ainsi que celle d'un ancien salarié attestant que le M. X... était amené à faire de nombreuses heures supplémentaires ; que ces documents ne comportent aucune date ni chiffrage, que de son côté, l'employeur produit un accord d'entreprise du 25 septembre 2000 indiquant que les agents de maîtrise responsables de restaurant relèvent d'une convention de forfait, cet accord étant de fait applicable à la qualification du salarié et enfin que le salarié, qui avait la responsabilité de saisir les heures de travail de son équipe, a systématiquement renseigné ses propres horaires par son horaire journalier contractuel, sans jamais faire mention d'heures supplémentaires ce dont il se déduit que les éléments probants préalables au soutien de la demande de paiement d'heures supplémentaires sont quasi inexistants ;

Attendu cependant qu'il résulte de l'article L. 3171 4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que lorsque le salarié fournit au juge des éléments de nature à étayer sa demande, il appartient à l'employeur d'apporter des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés ;

Qu'en statuant comme elle a fait, au motif erroné tiré d'une convention de forfait prévue par accord d'entreprise sans accord individuel du salarié à l'application de ce forfait et en retenant, en outre, que les éléments probants préalables au soutien de la demande de paiement d'heures supplémentaires étaient quasi inexistants, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE et ANNULE mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes en paiement, par la société Avenance Entreprises, de sommes à titre d'heures supplémentaires, à titre de repos compensateurs, outre les congés payés y afférents, et à titre de dommages intérêts pour travail dissimulé, l'arrêt rendu, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier le 20 décembre 2006 ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 37, alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Boré et Salve de Bruneton ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande en paiement, par la SAS AVENANCE ENTREPRISES, des sommes de 12 222,80 à titre d'heures supplémentaires, 4 280,47 à titre de repos compensateurs, outre les congés payés y afférents et 23 818,92 à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;

AUX MOTIFS adoptés QUE "le salarié affirme avoir effectué près de 12 h 15 de travail par jour du fait de la complexité de sa tâche ; qu'il produit à cette fin une attestation collective de salariés sous sa subordination indiquant qu'il "n'a pas hésité à doubler ses heures légales de travail", ainsi que celle d'un ancien salarié, Monsieur Y..., attestant que le salarié était amené à faire de nombreuses heures supplémentaires ; que ces documents ne comportent aucune date ni chiffrage ;

QUE de son côté, l'employeur produit un accord d'entreprise en date du 25 septembre 2000 indiquant que les agents de maîtrise responsables de restaurant relèvent d'une convention de forfait en heures correspondant à 1 642 heures de travail effectif avec 18 jours de repos RTT par an, cet accord étant de fait applicable à la qualification du salarié ;

QUE d'autre part le salarié, qui avait la responsabilité de saisir les heures de travail de son équipe, a systématiquement renseigné ses propres horaires par son horaire journalier contractuel, sans jamais faire mention d'heures supplémentaires ;

QU'en conséquence, le conseil constate que les éléments probants préalables au soutien de la demande de paiement d'heures supplémentaires sont quasi inexistants et que le salarié sera débouté" ;

1°) ALORS QUE même si le principe en est posé par la convention collective, le paiement des heures supplémentaires selon un forfait ne peut résulter que d'un accord particulier entre l'employeur et le salarié ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires au motif qu'un accord d'entreprise prévoyant, pour les agents de maîtrise responsables de restaurant, une convention de forfait en heures serait "de fait applicable à la qualification du salarié", la Cour d'appel, qui n'a pas constaté l'existence d'une convention de forfait entre l'employeur et le salarié a privé sa décision de base légale au regard des articles L.212-5 du Code du travail et 1134 du Code civil ;

2°) ALORS en toute hypothèse QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que Monsieur X... produisait, à l'appui de sa demande, une attestation collective de ses subordonnés faisant état du doublement de ses heures légales de travail et celle d'un ancien collègue de travail attestant de la réalisation de nombreuses heures supplémentaires ; qu'en le déboutant de sa demande aux motifs que "ces éléments, ne comportant aucune date ni chiffrage (… étaient) quasi inexistants", la Cour d'appel, qui a fait peser sur le salarié exclusivement la charge de la preuve des heures de travail accomplies, a violé l'article L. 212-1-1 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande tendant à la requalification de la rupture de son contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse et à la condamnation de la SAS AVENANCE ENTREPRISES au paiement des sommes de 66 037,34 à titre de dommages et intérêts et 8 254,62 à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE "le salarié soutient que son employeur n'a eu aucune intention de le reclasser et qu'il ne justifie d'aucune intention sérieuse de reclassement ;

QU'en cas d'inaptitude du salarié constatée par la médecine du travail, même à tout poste dans l'entreprise, il appartient à l'employeur de procéder néanmoins à une recherche de reclassement, au besoin en sollicitant l'avis du médecin du travail ;

QU'en l'espèce, l'avis de reprise de la médecine du travail en date du 21 mai 2003 indique "article R.241-51-1 du Code du travail. Inapte définitif à la reprise de son poste et à tout poste dans l'entreprise. Danger immédiat en cas de reprise" ; que dès le 23 mai 2003, l'employeur adresse à tous les établissements du groupe un courrier en vue de rechercher une nouvelle affectation au salarié pour des postes déjà vacants ou susceptibles de lui convenir (postes administratifs ou fonctionnels), auquel il n'obtiendra que des réponses négatives ; que parallèlement, l'employeur prend avis du médecin du travail, lequel répond par courrier en date du 6 juin 2003 : "je fais suite à votre fax du 6 juin 2003 concernant la visite de reprise de Monsieur X... et vous confirme mon avis médical du 21 mai 2003 (…) ; je vous confirme que l'état de santé actuel de Monsieur Alexis X... ne permet pas d'envisager un reclassement au sein de l'entreprise" ; qu'il en ressort que l'employeur a procédé loyalement à une recherche de reclassement, au-delà de laquelle il ne pouvait aller compte tenu de son obligation de s'en tenir aux conclusions écrites impératives du médecin du travail" ;

ALORS QUE l'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout poste dans l'entreprise, fût-ce par la procédure de "danger immédiat", et concluant à l'impossibilité de son reclassement ne dispense pas l'employeur de rechercher une telle possibilité de reclassement au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail ; qu'en dispensant la SAS AVENANCE ENTREPRISES de toute obligation de reclassement interne au seul motif que, sur sa demande, le médecin du travail, réitérant son avis d'inaptitude totale initial, avait "confirm(é) que l'état de santé actuel du salarié ne permet(tait) pas d'envisager un reclassement au sein de l'entreprise" la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L.122-24-4 et L.241-10-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-44548
Date de la décision : 02/12/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 20 décembre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 déc. 2009, pourvoi n°07-44548


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.44548
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