LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu selon l'arrêt attaqué, que la Compagnie linière, actionnaire de la Société française du lin et du chanvre (la société) s'est portée caution solidaire de celle-ci pour le remboursement d'un prêt consenti par la Société de développement régional du Nord Pas de Calais, devenue Batinorest puis Bati Lease (Bati Lease) ; que les sociétés coopératives agricoles linières de la région d'Abbeville et celle de Goderville, devenue Agy lin, ont acquis les actions de la société détenues par la Compagnie linière et se sont engagées à substituer en totalité la société cédante dans son engagement de caution ; que la société ayant été mise en règlement puis liquidation judiciaires, Bati Lease a assigné la Compagnie linière en exécution de son engagement, laquelle a assigné en garantie la société coopérative Agy lin et la société Teillage six, à laquelle la société Agy lin avait cédé ses parts dans la société ; que Bati Lease s'est désistée de sa demande contre la Compagnie linière et l'a étendue aux sociétés appelées en garantie, qui ont invoqué l'inopposabilité de l'engagement de caution en l'absence d'autorisation préalable du conseil d'administration ;
Attendu que pour condamner les sociétés Agy lin et Teillage six à payer à Bati Lease une certaine somme, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la première, en signant la convention de cession d'actions du 21 février 2002, s'est portée caution vis à vis de Bati Lease ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des sociétés Agy Lin et Teillage six, qui soutenaient que l'engagement de substitution de caution prévu à la convention leur était inopposable faute d'autorisation de leur propre conseil d'administration de se porter caution, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne la société Bati Lease aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Agy lin et à la société Teillage six la somme globale de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Tiffreau, avocat aux Conseils pour les sociétés Agy lin et Teillage six
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné solidairement les sociétés AGYLIN et TEILLAGE SIX à payer à la société BATINOREST une somme de 39.960,45 avec intérêts,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « (…) sur le droit propre de BATINOREST :
« attendu que l'article 4 de la Convention du 21 février 2002 établit un lien contractuel direct entre GODERVILLE et CALIRA d'une part, et la société devenue BATINOREST, d'autre part ;
« que cette substitution de garant a pour objet, en général et dans le cas particulier, d'épargner au créancier garanti les exceptions, incidents, avatars et difficultés concernant le cautionnement initial ;
« qu'en l'espèce et par conséquent, la prétendue nullité – en réalité inopposabilité – du cautionnement donné par la COMPAGNIE LINIERE à la société FRANCAISE DU LIN, ne pourrait être invoquée par les nouvelles cautions qu'au nom de l'ordre public, lequel n'est évidemment pas intéressé ici ;
« que l'argument des appelantes, selon lequel l'inopposabilité d'un acte le rend inexistant à l'égard des tiers, est pertinent s'il s'agit de tiers, ce que CALIRA et GODERVILLE ne sont plus dès lors qu'elles reprennent les engagements de la COMPAGNIE LINIERE en faveur de BATINOREST (…) ».
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « (…) la société GODERVILLE (AGYLIN), en signant la convention de cession d'actions du 21 février 2002, s'est portée caution vis-à-vis de la société SDR BATINOREST, article 4 de la Convention (…) »,
ALORS QUE 1°), si l'article 4 de la « convention de cession d'actions » du 21 février 2002 prévoyait que « (…) les cessionnaires s'engagent à se substituer en totalité à la COMPAGNIE LINIERE dans son engagement de caution donné à la SDR DU NORD ET DU PAS DE CALAIS (…) », cette dernière société (aux droits de laquelle est venue la société BATINOREST) n'était pas partie à ladite convention ; que ni la SDR DU NORD ET DU PAS DE CALAIS, ni la société BATINOREST ne l'avait signée ; qu'en affirmant néanmoins que cette convention « établit un lien contractuel direct entre GODERVILLE et CALIRA d'une part, et la société devenue BATINOREST, d'autre part », et qu'en la signant, « la société GODERVILLE (…) s'est portée caution vis-à-vis de la société SDR BATINOREST », la Cour d'appel a dénaturé la convention susvisée, en violation de l'article 1134 du Code civil,
ALORS QUE 2°), subsidiairement, les sociétés AGYLIN et TEILLAGE SIX faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel (p. 7), que l'engagement de substitution de caution litigieux prévu à la convention de cession d'actions du 21 février 2002 était « inopposable aux cessionnaires faute d'autorisation de leur propre conseil d'administration de se porter caution » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile.