La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/11/2009 | FRANCE | N°08-18831

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 novembre 2009, 08-18831


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ya Oussalama, qui exploite une pharmacie sur l'île de Mayotte (la pharmacie), s'approvisionne auprès de la société Confraternelle d'exploitation de répartition pharmaceutique de Mayotte (la CERP) ; que cette dernière l'a assignée en paiement d'une certaine somme à titre de règlement de diverses factures demeurées impayées ; que la pharmacie a revendiqué le bénéfice de diverses ristournes et remises stipulées dans les conditions générales de vente, ai

nsi que l'octroi de dommages-intérêts, qui viendraient en diminution du mon...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ya Oussalama, qui exploite une pharmacie sur l'île de Mayotte (la pharmacie), s'approvisionne auprès de la société Confraternelle d'exploitation de répartition pharmaceutique de Mayotte (la CERP) ; que cette dernière l'a assignée en paiement d'une certaine somme à titre de règlement de diverses factures demeurées impayées ; que la pharmacie a revendiqué le bénéfice de diverses ristournes et remises stipulées dans les conditions générales de vente, ainsi que l'octroi de dommages-intérêts, qui viendraient en diminution du montant de sa dette ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la pharmacie visant à obtenir le bénéfice de remises financières, l'arrêt retient que des ristournes et remises ne peuvent s'appliquer que si les factures sont réglées dans les délais fixés et qu'en l'espèce le retard de la pharmacie dans les paiements se poursuit depuis des années ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la pharmacie n'avait pas réglé certaines factures dans des délais de nature à justifier l'octroi des remises considérées, le tribunal supérieur d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le moyen, pris en sa quatrième branche :
Vu les articles 12 et 232 du code de procédure civile, ensemble l'article 1315 du code civil ;
Attendu que, pour déterminer le montant de la créance de la CERP à partir du nouveau tableau de factures que celle-ci a établi, l'arrêt relève que, si la pharmacie produit de nombreux documents, elle ne produit aucun tableau récapitulatif faisant apparaître les débits et les crédits correspondants ; qu'il ajoute qu'il n'appartient pas à cette cour de procéder à des comptes d'apothicaires ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans confronter le tableau établi par la CERP aux documents produits par la pharmacie, le tribunal supérieur d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'appel formé par la société Ya Oussalama, l'arrêt rendu le 6 mai 2008, entre les parties, par le tribunal supérieur d'appel de Mamoudzou ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;
Condamne la société Confraternelle d'exploitation de répartition pharmaceutique de Mayotte aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Ya Oussalama la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils pour la société Ya Oussalama.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'EURL YA OUSSALAMA à payer à la société CERP Mayotte les sommes de 22.343,14 au titre des factures impayées entre le 1er juin et le 31 décembre 2001, de 44.407,39 au titre des factures impayées entre le 1er août et le 31 décembre 2004, de 57.582,96 au titre des factures impayées du 1er septembre 2004 au 15 mai 2005 et de 23.546,30 au titre des pénalités contractuelles et d'avoir débouté l'EURL YA OUSSALAMA de sa propre demande en dommages-intérêts dirigée contre la CERP Mayotte pour non-respect de ses conditions générales de vente ;
AUX MOTIFS adoptés QU'aucun contrat ne liait la Pharmacie YA OUSSALAMA exploitée par M. Y... et la CERP Mayotte la fournissant en médicaments, seules des commandes et des factures les mettant en relation ; qu'un document intitulé «conditions générales de vente EARP Mayotte» précise les conditions de remises commerciales, de remises de fidélité et de remises financières ; que la CERP réclame la somme de 28.076,73 pour la période du 1er juin au 31 décembre 2001 et celle de 51.943,07 pour la période du 1er août au 31 décembre 2004 ; que pourtant, les documents récapitulatifs qu'elle-même produit mentionnent, pour les mêmes périodes, les sommes de 22.243,14 et 44.407,39 , déductions faites des sommes réglées par le client ; que M. Y... soutient sans le prouver qu'il a déjà payé « plusieurs factures », sans définir lesquelles ni pour quel montant ; que les pièces n°15 et 16 auxquelles il se réfère portent sur des règlements dérisoires de 21,52 et 589,32 , qui plus est de mars 2005, période non incriminée par la demanderesse ; qu'il soutient qu'il était convenu que tout règlement au comptant bénéficie d'un escompte, mais que cet accord n'apparaît pas sur les conditions générales de vente et qu'il ne justifie pas qu'une somme lui soit due à ce titre ; qu'il soutient également, sans être contredit, qu'il verse 600 par mois à la CERP pour apurer sa dette, mais qu'il n'apporte aucune preuve de ces versements ; qu'en conséquence, la Pharmacie YA OUSSALAMA ne conteste pas utilement les sommes réclamées par la CERP Mayotte ; que celle-ci propose diverses remises commerciales à ses clients ; que M. Y... soutient qu'elles ne lui ont pas été appliquées, sans pour autant apporter d'exemples précis et argumentés ; qu'il se contente d'affirmer que des sommes, fixées sans qu'aucune base de calcul ne soit produite, doivent être déduites de sa créance ; que ces sommes ne peuvent être retenues en raison de leur caractère fantaisiste ; que M. Y... estime que la CERP lui a réservé un sort différent de celui promis et effectivement accordé aux autres pharmacies de l'île, qu'elle a ainsi pratiqué la discrimination et usé de sa position dominante, faussant la libre concurrence ; que ce grief n'est étayé d'aucun exemple ou démonstration et ne peut être examiné en l'absence de justification des faits allégués (p. 3/4);
Et AUX MOTIFS propres QUE l'EURL YA OUSSALAMA fait une lecture très partielle des conditions générales de vente qu'elle produit elle-même et qui s'appliquent entre les parties ; qu'en effet, des ristournes et remises ne peuvent s'appliquer que si les factures sont réglées dans les délais fixés ; qu'en l'espèce, le retard dans les paiements se poursuit depuis des années ; que si l'EURL YA OUSSALAMA produit de nombreux documents, elle ne produit aucun tableau récapitulatif faisant apparaître les débits et les crédits correspondants ; qu'il n'appartient pas à la Cour de procéder à des comptes d'apothicaires ; qu'il ressort du nouveau tableau produit par la CERP Mayotte que les factures dues au titre de l'année 2001 ont été réglées ainsi que celles du mois d'août 2004, mais que demeurent impayées celles du 1er septembre 2004 au 15 mai 2005, pour un montant de 57.582,96 en principal, et 23.546,30 en pénalités contractuelles ;
ALORS en premier lieu QUE selon les conditions générales de vente de la CERP Mayotte, l'octroi des « remises commerciales » était exclusivement subordonné, pour les spécialités remboursables autres que génériques, au montant des factures mensuelles, pour les médicaments génériques, à la signature d'un contrat, et pour les spécialités non remboursables et la parapharmacie, au montant du chiffre d'affaires en spécialités remboursables, sans la moindre référence aux conditions de règlement, lesquelles n'avaient d'incidence que sur les remises financières ; qu'en considérant cependant que les remises commerciales ne pouvaient s'appliquer que si les factures étaient réglées dans les délais fixés, et en conséquence, que les retards de paiement de l'EURL YA OUSSALAMA justifiaient que ces remises commerciales ne lui soient pas octroyées, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conditions générales de vente et ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS en deuxième lieu QUE s'agissant de la « remise de fidélité », les conditions générales de vente indiquaient uniquement qu'elle serait accordée « en fin d'année en fonction du résultat », sans la moindre référence aux conditions de paiement ; qu'en affirmant cependant que les remises de fidélité ne pouvaient s'appliquer que si les factures étaient réglées dans les délais fixés pour en déduire que ses retards de paiement justifiaient que cette remise n'ait pas été octroyée à l'EURL YA OUSSALAMA, la cour d'appel a encore dénaturé les termes clairs et précis des conditions générales de vente et ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS en troisième lieu QUE s'agissant des « remises financières », il ressortait des conditions générales de vente qu'elles s'appliquaient aux factures supérieures à 10.000 , tous achats confondus, et consistaient en un escompte de 1 % sur chaque facture bi-mensuelle réglée dans les dix jours ; qu'il n'a été ni constaté ni même allégué que pendant toute la période envisagée durant laquelle la CERP Mayotte a fourni la Pharmacie YA OUSSALAMA, celle-ci n'aurait jamais payé la moindre facture du grossiste dans les dix jours et en conséquence, qu'elle n'aurait jamais pu prétendre au bénéfice de l'escompte de 1% ; que dès lors, en se bornant à relever, pour rejeter les prétentions de l'appelante au titre des remises financières, que les conditions générales de vente ne prévoyaient l'application de ristournes et remises que si les factures sont réglées dans les délais fixés et qu'« en l'espèce, le retard dans les paiements se poursuit depuis des années », sans rechercher si pour une partie au moins des factures, les demandes de l'appelante n'étaient pas justifiées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
ALORS enfin QU'il incombe à la partie qui se prétend créancière d'établir le montant de l'obligation du défendeur, et qu'il appartient au juge, qui a la faculté d'ordonner une expertise, de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables sans pouvoir se décharger au prétexte que la solution exige des vérifications complexes, et que nul ne peut se procurer de titre à lui-même ; qu'en reprochant à l'EURL YA OUSSALAMA de produire de nombreux documents mais pas de tableau récapitulatif faisant apparaître les débits et les crédits correspondants et en se fondant exclusivement sur le tableau produit par la CERP Mayotte, sans confronter ce dernier aux nombreux documents produits par l'appelant pour déterminer le montant de la créance litigieuse, la cour d'appel a violé les articles 12 et 232 du code de procédure civile, ensemble l'article 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-18831
Date de la décision : 24/11/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Tribunal supérieur d'appel de Mamoudzou, 06 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 nov. 2009, pourvoi n°08-18831


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.18831
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award