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24/11/2009 | FRANCE | N°08-14739

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 novembre 2009, 08-14739


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 615 8 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que la société Van der Lely, titulaire d'une demande de brevet européen n° 238078, déposée le 7 mars 1988, désignant la France, et la société Lely Industrie, licenciée, ont, après avoir fait procéder le 27 février 1997 à une saisie contrefaçon, assigné par acte du 13 mars 1997 la société Kverneland , afin de voir juger que les hers

es rotatives fabriquées et commercialisées par cette dernière, et comportant des disposi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 615 8 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que la société Van der Lely, titulaire d'une demande de brevet européen n° 238078, déposée le 7 mars 1988, désignant la France, et la société Lely Industrie, licenciée, ont, après avoir fait procéder le 27 février 1997 à une saisie contrefaçon, assigné par acte du 13 mars 1997 la société Kverneland , afin de voir juger que les herses rotatives fabriquées et commercialisées par cette dernière, et comportant des dispositions telles que celles décrites au procès verbal de saisie ou des dispositions comparables ou analogues, constituent la contrefaçon de ce brevet; que le brevet a été délivré le 14 mai 1997 après que les revendications aient été modifiées; que le tribunal de grande instance a rejeté leur demande en contrefaçon ;

Attendu que pour dire que la société Kverneland a commis des actes de contrefaçon des revendications 1 et 2 de ce brevet, l'arrêt retient que les conclusions des appelantes du 10 septembre 2004, fondées sur des pièces nouvelles, ne constituent pas des demandes nouvelles mais viennent apporter des précisions complémentaires pour caractériser la contrefaçon alléguée, et que l'action en contrefaçon, régulièrement engagée par l'acte du 13 mars 1997 qui a interrompu la prescription, s'étend à l'ensemble des faits de contrefaçon présents et à venir relatifs à la commercialisation de herses rotatives présentant une structure identique ou similaire à celles décrites ou photographiées au procès verbal de saisie, qui fait partie des éléments probatoires susceptibles de caractériser des actes de contrefaçon dans la mesure où il n'est pas contesté que les machines qu'il décrit étaient toujours commercialisées après la délivrance du brevet ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le brevet européen n'était opposable à la société Kverneland qu'à compter de la publication de sa délivrance, le 14 mai 1997, de sorte qu'aucun acte de contrefaçon n'ayant été commis avant cette date, l'assignation délivrée le 13 mars 1997 n'avait pu interrompre la prescription, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils ont dit qu'en poursuivant la commercialisation des herses rotatives postérieurement au 14 mai 1997, la société Kverneland avait commis des actes de contrefaçon, interdit sous astreinte la poursuite de ces actes, autorisé la publication du dispositif, ordonné une mesure d'instruction, et condamné la société Kverneland au paiement d'une provision, l'arrêt rendu le 19 octobre 2007, rectifié par arrêt du 8 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne les sociétés Maasland, Lely et Van der Lely aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés Maasland, Lely Industries et Van der Lely à payer à la société Kverneland Group France la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société Kverneland Group France

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'en poursuivant la commercialisation des herses rotatives de référence PHB 11, 13, 18, 25, 1HB 18 S, 25 S, FOLD 400, 450, 500, 600, NG 12, 14,18 et 25 postérieurement au 14 mai 1997, la société KVERNELAND a commis des actes de contrefaçon des revendications n°1 et 2 du brevet européen n° 283.078 et d'avoir en conséquence ordonné avant-dire droit, une mesure d'instruction sur la fixation de la réparation du préjudice ;

AUX MOTIFS QUE «les appelantes estiment apporter la preuve de la contrefaçon des revendications 1 et 2 du brevet, par la production du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 27 février 1997 sur le stand de la société KVERNELAND au salon de la machine agricole de VILLEPINTE, ainsi que par la production d'un tarif KVERNELAND du 1er décembre 1998, d'un extrait du tarif KVERNELAND au 1er juillet 1998 du prospectus KVERNELAND « des combinaisons de semis repliables pour des rendements de chantier élevés » et de la brochure KVERNELAND «Bien préparer pour semer mieux» ; que la société KERNELAND leur oppose en substance que les faits de contrefaçon allégués figurant dans l'assignation du 13 mars 1997 et reprenant ceux énoncés dans le procès verbal de saisie-contrefaçon du 27 février 1997 ne peuvent constituer des actes de contrefaçon car ils sont antérieurs à la publication des nouvelles revendications et que les demandes formées le 10 septembre 2004, se fondant sur le tarif du 1er décembre 1998 ne pouvaient pas être visées par l'assignation et constituent dès lors des demandes incidentes, prescrites par application de l'article L 615-8 du Code de la propriété intellectuelle, car les demanderesses n'étaient pas investies de l'action en contrefaçon en 1997 ; qu'à cette argumentation, les appelantes opposent que l'assignation englobe bien l'ensemble des faits de contrefaçon constatés et à venir, et que leurs écritures du 10 septembre 2004 n'avaient pour objet que de répondre à celles de la société KVERNELAND en date du 1er mars 2000 par lesquelles celle-ci contestait que la preuve de la contrefaçon fût rapportée pour des actes postérieurs au 14 mai 1997 ; a) sur les opérations de saisie-contrefaçon et sur la validité de l'assignation, que l'article L 614-9 du CPI, relatif à l'effet en France des brevets européens énonce que le droit de faire procéder à des opérations de saisie-contrefaçon comme celui d'agir en contrefaçon peut être exercé par le titulaire d'une demande de brevet dûment publiée ; que l'article L 614-5 du même Code précise toutefois que le tribunal saisi d'une action en contrefaçon sur le fondement d'une demande de brevet doit surseoir à statuer jusqu'à la délivrance du brevet ; qu'il suit que la société C VAND DER LELY était en droit de faire procéder à des opérations de saisie comme elle le fit le 27 février 1997 et que la modification de la rédaction des revendications intervenue au cours de la procédure d'examen n'a pas eu pour effet d'invalider les opérations considérées ; que de même, l'action en contrefaçon des revendications a été régulièrement engagée par l'acte du 13 mars 1997 ; que cet acte vise aussi bien les faits prétendument commis au jour de la saisie que ceux commis postérieurement à l'introduction de l'instance ; que la demande est ainsi rédigée : «dire et juger que les herses rotatives fabriquées et commercialisées par la société KVERNELAND comportant des dispositions telles que celles décrites au procès-verbal de saisie contrefaçon du 27 février 1997 ou des dispositions comparables ou analogues, constituent la contrefaçon……des revendications n°1 et 2 du brevet européen n° 283.078» ; que la demande de dommages et intérêts couvre «les faits de contrefaçon commis depuis un temps non prescrit jusqu'à la date du rapport d'expertise» et préconise encore que pour la détermination de l'entier préjudice, il soit «tenu compte des faits commis jusqu'à la date de la décision définitive à intervenir» ; qu'en conséquence, les conclusions des appelantes du 10 septembre 2004, fondées sur des pièces nouvelles (tarif KVERNELAND du 1er décembre 1998) ne constituent pas des demandes nouvelles mais viennent apporter des précisions complémentaires pour caractériser la contrefaçon alléguée ; que l'action en contrefaçon, régulièrement engagée par l'acte du 13 mars 1997 qui a interrompu la prescription, s'étend ainsi à l'ensemble des faits de contrefaçon présents et à venir, relatifs à la commercialisation de herses rotatives présentant une structure identique ou similaire à celles décrites et photographiées au procès-verbal de saisie ; celui-ci fait partie des éléments probatoires susceptibles de caractériser des actes de contrefaçon, dans la mesure où il n'est pas contesté que les machines qu'il décrit étaient toujours commercialisées après la délivrance du brevet ;

ALORS QUE D'UNE PART la contrefaçon de brevet est un délit instantané ; que chaque atteinte au droit du breveté constitue un acte de contrefaçon distinct soumis à sa propre prescription ; que cette prescription ne court ainsi distributivement, pour chaque fait, que du jour de sa commission et ne peut donc, par hypothèse, être interrompue pour des faits futurs non encore commis, avant même d'avoir commencé à courir ; qu'en retenant cependant en l'espèce que l'assignation délivrée le 13 mars 1997, visant aussi bien les faits prétendument commis au jour de la saisie-contrefaçon que ceux commis postérieurement à l'introduction de l'instance, avait valablement interrompu la prescription à l'égard de faits de contrefaçon à venir, non encore commis, la Cour d'appel a violé l'article L 615-8 du Code de la propriété intellectuelle ;

ALORS QUE D'AUTRE PART l'assignation délivrée le 13 mars 1997 pouvait d'autant moins interrompre la prescription qu'aucun acte de contrefaçon ne pouvait être poursuivi avant la date d'opposabilité du brevet aux tiers – soit comme le constate elle-même la Cour d'appel avant sa délivrance le 14 mai 1997 ; qu'en retenant cependant que l'assignation délivrée antérieurement à cette date, le 13 mars 1997, avait interrompu la prescription des faits commis entre le 14 mai 1997, date d'opposabilité du brevet et le 10 septembre 2004, cependant qu'une telle assignation, dénonçant des faits non fautifs à sa date de délivrance, ne pouvait avoir d'effet interruptif à l'égard de faits futurs de contrefaçon non encore commis, la Cour d'appel a derechef violé l'article L 615-8 du Code de la propriété intellectuelle.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-14739
Date de la décision : 24/11/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 octobre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 nov. 2009, pourvoi n°08-14739


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.14739
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