LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Angers, 29 avril 2008) et les productions, que M. X..., engagé en qualité de voyageur représentant placier le 24 juin 1990 par la société Dasras et fils et promu directeur commercial le 1er mars 2000, a été licencié pour motif économique le 3 juin 2006 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire son licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse de nature économique et de le débouter de ses demandes d'indemnités en réparation de son préjudice, alors, selon le moyen :
1°/ que les difficultés économiques doivent être distinguées des fluctuations normales du marché ; que ni la réalisation d'un chiffre d'affaires moindre, ni la baisse des bénéfices ne suffit à établir la réalité des difficultés économiques ; qu'en affirmant que le licenciement du salarié était justifié par des difficultés économiques aux motifs que la société avait connu une simple baisse du chiffre d'affaires l'année 2005, une baisse de ses commandes en 2006 ainsi qu'une simple baisse du chiffre d'affaires pour cette même année, la cour d'appel n'a pas donné base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
2°/ qu'en ne caractérisant pas en quoi la baisse du chiffre d'affaires et des commandes était de nature à mettre péril la pérennité de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
3°/ que n'a pas de cause économique réelle et sérieuse le licenciement justifié par le simple fait de procéder à des économies par la suppression d'un salaire trop important ; qu'en affirmant que le licenciement du salarié était justifié par le fait que la charge salariale globale annuelle que représentait le salarié devait nécessairement être supprimée (et non simplement réduite), sans expliquer en quoi cette suppression était justifiée par les situation économique en cause et en quoi elle devait permettre de préserver la pérennité de l'entreprise, la cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale et violé lesdites dispositions ;
4°/ que le licenciement économique d'un salarié ne peut intervenir que si le reclassement du salarié est impossible ; que dans le cadre de l'obligation de reclassement, l'employeur a l'obligation de rechercher et de proposer au salarié les emplois disponibles dans l'entreprise avant la notification de son licenciement économique ; qu'en affirmant que la société avait respecté son obligation de reclassement aux motifs qu'aucun texte n'impose à l'employeur de créer de nouveau poste afin de reclasser le salarié ou de l'affecter à un poste déjà pourvu, sans rechercher si des recherches de reclassement avaient été faites, alors surtout qu'elle constatait que des postes avaient été envisagés par l'employeur et non proposés au salarié, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles L. 1233-3 et L. 1233-4 du code du travail ;
5°/ qu'en affirmant que de toute manière il ressortait de la lettre de licenciement que la société avait "envisagé de lui proposer un poste en qualité de VRP", alors que la proposition de reclassement doit nécessairement intervenir avant la notification du licenciement, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1233-3 et L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que les difficultés économiques invoquées dans la lettre de licenciement étaient réelles et justifiaient la suppression du poste de l'intéréssé et retenu qu'il n'y avait pas de possibilité de reclassement au sein de l'entreprise, a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué dit le licenciement de M. X... justifié par une cause réelle et sérieuse, et de l'avoir en conséquence de ses demandes d'indemnités en réparation des préjudices causé par ce licenciement et les conditions dans lesquelles il a été prononcé
AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'article L 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents a la personne du salarie résultant d'une suppression ou d'une transformation d'emploi consécutives notamment a des difficultés économiques ou a des mutations technologiques ; En outre s'il résulte de l'article L 1233-4 du même code qu'un tel licenciement ne peut intervenir qu'après une ou plusieurs tentatives de reclassement du salarié concerne au sein de son entreprise et que les offres de reclassement correspondantes proposées a ce salarie doivent être écrites et précises, il n'en reste pas moins, d'une part, que l'employeur a toujours la faculté de démontrer qu'un tel reclassement était impossible et, de l'autre, qu'en ce cas, le même employeur ne peut être tenu de faire a son salarie des "offres précises et d'emploi" .... qui n'existent pas ; Or, tout d'abord, quoiqu'en dise Fabrice X..., il est parfaitement établi en l'espèce, a l'examen des divers documents comptables produits aux débats par la société DASRAS (cf au besoin sur ce point les pièces 13 et suivantes de cette société) qu'a la date du licenciement de Fabrice X..., elle était confrontée a des difficultés économiques de nature a mettre en cause sa pérennité même, comme en font foi en particulier : - Le fait qu'au 31 décembre 2005, elle avait subi une baisse de chiffre d'affaires, calculée sur douze mois (pour être en cohérence avec l'exercice précédent clôture au 31 mars précédent), de près de 9% (avec un résultat déficitaire de près de 56.000 euros, résultat a nouveau déficitaire au 31 mars suivant a hauteur cette fois-ci de près de 78.000 euros) ; - Le fait qu'au 31 mars 2006, sa "production" avait chuté de plus de 7% ; - Le fait qu'au cours de l'année 2006, et si l'on fait abstraction du mois de janvier (dont le chiffre d'affaires a été "gonflé" par les commandes prises au salon du meuble de Paris, salon dont il va être reparlé), la baisse mensuelle de ces commandes par rapport a l'année 1985 a été quasi systématique, soit de 5 a 12% avant le licenciement de Fabrice X..., puis de 8 a 19% par la suite ; - Le fait qu'en dépit du licenciement de Fabrice X... ayant généré, au 31 octobre 2006, une baisse des charges salariales et sociales de la société DASRAS de l'ordre de 57.000 euros (cf la pièce 17 de l'appelante), le résultat d'exploitation de cette société était cette fois-ci toujours négatif a hauteur de plus de 126.000 euros, avec, notamment, une nouvelle baisse, certes minime, de son chiffre d'affaires (cf la même pièce) et une augmentation importante de ses charges financières ; - Le fait que ce n'est pas un hasard si le banquier et le commissaire aux comptes de la société DASRAS ont exigé, à compter (au mieux) du mois d'octobre 2005, la production par celle-ci de diverses "situations intermédiaires", ce qui veut dire en clair, pour quiconque connait a peu près le monde des affaires, que l'un et l'autre n'entendaient pas attendre la date normale de la clôture des comptes de la société DASRAS, la première pour maintenir ses concours financiers a cette société, et le second pour "vivement recommander aux dirigeants (de la société DASRAS) de prendre rapidement des mesures pour réaliser des économies" (cf la pièce 29 de l'appelante) ; - Le fait que le 14 février 2007 encore (et "suite divers entretiens"), ce banquier "attir(ait) l'attention (de la société DASRAS) sur (son) évolution relativement préoccupante", des lors que "le dernier bilan fai(sait) état d'une (nouvelle) baisse sensible du chiffre d'affaires et surtout d'une chute inquiétante de la capacité d'autofinancement", l'informait que "cette forte baisse de la CAF, si elle (n'était) pas jugulée des cette année, entraînerait obligation des tensions de trésorerie préjudiciables au bon fonctionnement de son affaire" et l'invitait en conséquence a "bien vouloir tout mettre en oeuvre afin de redresser ce point essentiel a la pérennité de (sa) société" et a "bien vouloir (lui) transmettre, par écrit, les mesures (qu'elle avait) prises ou (qu'elle envisageait) de prendre, ce qui caractérise a l'évidence l'attitude d'un banquier tout prêt de dénoncer ses concours financiers a l'un de ses clients .... ; En bref, et abstraction faite des simples arguments tires par l'intimé, soit des "investissements" réalisés par la société DASRAS (cf la page 6 de ses écritures d'appel), investissements datant pour certains de plus de deux ans avant son licenciement (cf en particulier la pièce n° 11 de la société DASRAS), en tout état de cause indispensables a la sauvegarde de la compétitivité de cette société - ce que Fabrice X... peut d'autant moins contester que c'est lui-même qui, par exemple et dans son acceptation de principe, en 1999, de son nouvel emploi de directeur commercial de la société DASRAS; mettait l'accent sur la nécessité, pour cette société, d'être présente sur certains salons - et qui n'avaient aucun caractère "somptuaire", comme le démontre la même société, soit de simples articles de presse qui relèvent de la simple "communication" de la société DASRAS, mais qui ne reflètent en rien la véritable situation économique et comptable de l'époque de celle-ci, d'autant que ces articles ne faisaient en réalité état que de l'évolution du chiffre d'affaires de la société DASRAS entre 1990 et 2003, Fabrice X..., qui, dans tous les cas de figue, représentait pour son ancien employeur une charge salariale globale annuelle de 160.000 euros qui devait, dans ces conditions, être nécessairement supprimée (et non seulement réduite), ne peut utilement contester la réalité du motif économique de son licenciement, surtout après avoir "pronostique", toujours en 1999 (cf supra) un chiffre d'affaires de "40 M.F. (soit plus de6 millions d'euros)", voire "50 M.F. (soit plus de 7.600.000 euros), tous chiffres a comparer avec le chiffre d'affaires annuel effectivement réalisé par la société DASRAS au 31 octobre 2005, soit un peu plus de 3.600.000 euros; En second lieu que la société DASRAS démontre (cf les page 3 et 5 de ses écritures d'appel et les documents correspondants, soit en particulier son registre d'entrée et de sortie du personnel) que tous ses emplois, et notamment se postes de commerciaux, étaient a l'époque pourvus, ce que Fabrice X... ne conteste même pas et ne pouvait d'autant moins ignorer que, la encore en 1999, il ava cédé sa carte de V.R.P. multicartes au service de la société DASRAS à son épouse, carte ultérieurement vendue par celle-ci, un peu moins de trois ans plus tard, a un certain Henry, qui est toujours V.R.P. de la société DASRAS pour la région Ile de France moyennant – tout de même – une somme supérieure a 36.000 euros (cf la pièce n°19 de l'appelante) ; aucun texte ou principe n'imposant a un employeur, soit de créer un poste nouveau afin de reclasser "un de ses salaries, soit d'affecter ce salarie a un poste déjà occupé par un autre de ces salaries, il convient en conséquence d'infirmer la décision déférée, peu important a cet égard que la société DASRAS "(n'ait pas) présent (à Fabrice X...) la moindre proposition de reclassement après avoir mené une réflexion sérieuse et complète", ce qui peut d'ailleurs se discuter lorsque l'on constate que, dans la lettre de licenciement de Fabrice X..., lettre qui n'a pas été conteste "en temps réel" par celui-ci, la société DASRAS écrivait textuellement a son ancien salarié "(qu'elle) avait envisagé de (lui) proposer un reclassement en qualité de V.R.P. (mais que) tous les secteurs (étaient) actuellement pourvus, et notamment son ancien secteur (région parisienne)" et que "par ailleurs, (elle) n'a(vait) aucun poste disponible tant administratif qu'a la production", ce qui est encore une fois établi ».
ALORS QUE, les difficultés économiques doivent être distinguées des fluctuations normales du marché ; que ni la réalisation d'un chiffre d'affaire moindre, ni la baisse des bénéfices ne suffit à établir la réalité des difficultés économiques ; qu'en affirmant que le licenciement du salarié était justifié par des difficultés économiques aux motifs que la Société avait connu une simple baisse du chiffre d'affaires l'année 2005, une baisse de ses commandes en 2006 ainsi qu'une simple baisse du chiffre d'affaires pour cette même année, la Cour d'appel n'a pas donné base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article L. 1233-3 du Code du travail.
ALORS surtout QU'en ne caractérisant pas en quoi la baisse du chiffre d'affaires et des commandes sur la pérennité de l'entreprise était de nature à mettre péril la pérennité de l'entreprise, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 1233-4 du Code du travail.
ALORS ENSUITE QUE n'a pas de cause économique réelle et sérieuse le licenciement justifié par le simple fait de procéder à des économies par la suppression d'un salaire trop important ; qu'en affirmant que le licenciement du salarié était justifié par le fait que la charge salariale globale annuelle que représentait le salarié devait nécessairement être supprimée (et non simplement réduite), sans expliquer en quoi cette suppression était justifiée par les situation économique en cause et en quoi elle devait permettre de préserver la pérennité de l'entreprise, la Cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale et violé lesdites dispositions ;
ALORS SURTOUT QUE le licenciement économique d'un salarié ne peut intervenir que si le reclassement du salarié est impossible ; que dans le cadre de l'obligation de reclassement, l'employeur a l'obligation de rechercher et de proposer au salarié les emplois disponibles dans l'entreprise avant la notification de son licenciement économique ; qu'en affirmant que la Société avait respecté son obligation de reclassement aux motifs qu'aucun texte n'impose à l'employeur de créer de nouveau poste afin de reclasser le salarié ou de l'affecter à un poste déjà pourvu, sans rechercher si des recherches de reclassement avaient été faites, alors surtout qu'elle constatait que des postes avaient été envisagés par l'employeur et non proposés au salarié, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles L. 1233-3 et 1233-4 du Code du travail
QU'EN TOUT HYPOTHESE, en affirmant que de toute manière il ressortait de la lettre de licenciement que la Société avait « envisagé de lui proposer un poste en qualité de VRP », alors que la proposition de reclassement doit nécessairement intervenir avant la notification du licenciement, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1233-3 et 1233-4 du Code du travail.