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04/11/2009 | FRANCE | N°09-85487

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 novembre 2009, 09-85487


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-

X... Mohamed,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DOUAI, en date du 16 juillet 2009, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, de blanchiment aggravé, association de malfaiteurs, a confirmé partiellement l'ordonnance du juge d'instruction le plaçant sous contrôle judiciaire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5, 6 de la Conve

ntion européenne des droits de l'homme, 137, 137-2, 139, 591 à 593 du code de procédure pén...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-

X... Mohamed,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DOUAI, en date du 16 juillet 2009, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, de blanchiment aggravé, association de malfaiteurs, a confirmé partiellement l'ordonnance du juge d'instruction le plaçant sous contrôle judiciaire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 137, 137-2, 139, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir, détournement de procédure, violation de l'autorité de la chose jugée ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de placement sous contrôle judiciaire de Mohamed X... avec comme obligation de verser un cautionnement de 150 000 euros en un seul versement avant le 15 novembre 2009 ;

"aux motifs que les dispositions de l'article 139 du code de procédure pénale n'imposent pas la survenance d'un fait nouveau pour décider le placement sous contrôle judiciaire d'un mis en examen en liberté, décision qui peut être prise en tout état de la procédure ; dès lors, faisant une juste application de ces dispositions, c'est à bon droit que le magistrat instructeur a estimé, après avoir recueilli les réquisitions du parquet conformément à l'article 137-2, en l'état où se trouvait la procédure, que la liberté de Mohamed X..., qui est en soi un élément nouveau, est susceptible de remettre en cause le bon déroulement de l'information dont il a la charge, justifiant des garanties particulières au regard des nécessités de l'instruction ou à titre de mesure de sûreté rendant nécessaire le placement de l'intéressé sous les modalités d'un contrôle judiciaire, en application de l'article 137 ; au titre des nécessités de l'instruction, des interpellations sont en cours, des investigations internationales sont de retour apportant des éléments nouveaux sur la participation de Mohamed X... aux faits reprochés justifiant de s'assurer de sa personne à des actes à venir essentiels à la manifestation de la vérité (nouvelles auditions, confrontations avec d'autres personnes récemment mises en examen etc) ; à titre de mesure de sûreté, le mis en examen, dans la dénégation des faits reprochés, a déjà acquis sa liberté par voie d'évasion, a fait usage à plusieurs reprises de faux papiers pour se rendre dans des pays d'Afrique du nord où il a des intérêts financiers suspects et y entretient des relations douteuses (famille Y..., Salah Z...) ; il a en outre participé à l'organisation et l'obtention de faux documents pour l'accès à une libération conditionnelle de certains de ses frères, en sorte qu'il n'a pas su donner des gages de confiance suffisants dans le passé pour qu'il soit misé sur une présentation spontanée de l'intéressé aux actes de procédure à venir et sur une absence de concertation ou de pressions sur les différents protagonistes ;

"alors, d'une part, que lorsqu'une personne est remise en liberté, le juge d'instruction doit justifier de circonstances nouvelles postérieures à cette remise en liberté, pour ordonner des mesures restrictives de liberté ; qu'en affirmant, pour refuser d'annuler le placement sous contrôle judiciaire de Mohammed X... après sa remise en liberté par la chambre de l'instruction que les dispositions de l'article 139 du code de procédure pénale n'imposent pas la survenance d'un fait nouveau pour décider le placement sous contrôle judiciaire d'un mis en examen qui vient d'être mis en liberté, la chambre de l'instruction a violé les textes et le principe susvisés ;

"alors, d'autre part, qu'en se bornant à relever comme circonstance nouvelle justifiant le placement sous contrôle judiciaire, la remise en liberté du mis en examen, qui n'était que la conséquence de l'annulation de la décision de prolongation de sa détention, la chambre de l'instruction, qui n'a relevé l'existence d'aucune autre circonstance nouvelle, a privé sa décision de base légale ;

"alors, enfin, qu'en imposant à Mohamed X... à la suite de sa remise en liberté, un contrôle judiciaire avec l'obligation de verser un cautionnement de 150 000 euros en un seul versement avant le 15 novembre 2009, ce qui permettait sa réincarcération, en raison du montant exorbitant exigé dans un délai restreint, sans qu'il soit besoin de justifier d'aucun élément nouveau, au demeurant inexistant, la chambre de l'instruction a violé l'autorité de la chose jugée ainsi que les textes et le principe susvisés" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 137, 138, 142, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et de réponse à conclusions, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de placement sous contrôle judiciaire de Mohamed X..., avec notamment l'obligation de verser un cautionnement de 150 000 euros en un seul versement avant le 15 novembre 2009 ;

"aux motifs qu'il n'est pas établi au dossier que Mohamed X... soit dessaisi de l'administration de ses biens ; il est donc toujours en capacité juridique de répondre à ses obligations financières ; il ressort du dossier pénal un ensemble d'éléments objectifs relevés par les enquêteurs et évoqués en détail dans le corps de l'arrêt permettant d'affirmer l'existence d'un train de vie élevé de la part de Mohamed X... qui ne se prive de rien et satisfait sans peine ses besoins et désirs ; que ce train de vie a un coût que Mohamed X... assume nécessairement ; les ressources de la personne mise en examen s'entendent non seulement des gains, revenus et salaires de celle-ci mais encore de tous les fonds dont elle dispose quel qu'en soit l'origine ; si Mohamed X... se met sciemment en situation de ne pouvoir présenter de ressources sincères et régulières, se targuant de revenus occultes, elles ne sont pas pour autant inexistantes puisqu'elles permettent à l'intéressé de s'assurer un train de vie admis par tous ses proches et relations comme élevé voire luxueux ; or attendu qu'au travers des multiples déclarations de l'intéressé, qui dit « ne rien déclarer au fisc car il ne perçoit rien », il en ressort cependant qu'il avoue des revenus dans une fourchette de 20 000 euros à 70 000 euros pour chacune de ses activités d'intermédiaire dans la vente de voitures et dans l'immobilier ; c'est sans compter avec les commissions acquises ponctuellement sur la vente d'un bateau avec son ami De Keyser, sans compter avec les produits de ses affaires avec la famille Y... avec laquelle il détient en commun « une cagnotte conséquente » qu'ils cherchent à faire fructifier ; il n'est donc pas démuni contrairement à ce qu'il entend faire croire ; si Mohamed X... organise son apparente insolvabilité démentie par l'importance même de son train de vie et ses propres déclarations sur des revenus acquis "au noir", il ressort des éléments du dossier qu'il se sert de tout (villa, voitures, appartement) et paye pour tout (sorties, amis, voyages, travaux) mais jamais à son nom (Bentley à Y..., Porsche Cayenne à De Keyser, Villa de St Raphael à la SCI St Vincent, appartement au Maroc à Sylvie A...) ; dans ces conditions, seraient-elles occultes, les ressources de Mohamed X... sont très largement suffisantes pour subvenir à ses besoins quotidiens, entretenir un équipage coûteux et lui donner l'aisance nécessaire au rôle et à l'apparence qu'il entend tenir ; il n'est dès lors pas démuni pour supporter le poids d'un cautionnement justifié tant par la nature des infractions reprochées (notamment blanchiment) que pour assurer les garanties de représentation de l'intéressé, la réparation des dommages nées de l'infraction et des restitutions et le paiement des amendes ;

"alors, d'une part, que le montant du cautionnement dont peut être assorti le contrôle judiciaire de la personne mise en examen, doit être fixé, notamment, en considération des ressources et des charges du mis en examen ; qu'en imposant à Mohamed X... un cautionnement de 150 000 euros, sans justifier l'existence de revenus ou d'un patrimoine qui lui soit propre, la chambre de l'instruction a privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que la chambre de l'instruction, qui s'est bornée à relever que les ressources de Mohamed X... sont très largement suffisantes pour subvenir à ses besoins quotidiens, entretenir un équipage coûteux, et lui donner l'aisance nécessaire au rôle et à l'apparence qu'il entend tenir tant par le lieu choisi que par l'accès aux moyens de locomotion régulièrement utilisés, ce qui faisait ressortir essentiellement des charges et non des ressources, dont il n'était au demeurant pas démontré qu'elles étaient personnellement assurées par Mohammed X..., la chambre de l'instruction a de nouveau privé sa décision de base légale au regard des textes et principes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Mohamed X..., placé sous mandat de dépôt, a été remis en liberté par arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 12 juin 2009, qui a annulé l'ordonnance prolongeant la détention provisoire au motif que le délai légal de convocation au débat contradictoire ayant précédé cette décision n'avait pas été respecté ; que le même jour, le juge d'instruction a ordonné le placement sous contrôle judiciaire de l'intéressé avec l'obligation, notamment, de verser un cautionnement de 150 000 euros avant le 15 novembre 2009 ;

Attendu que, pour confirmer partiellement cette ordonnance et écarter le moyen qui soutenait que Mohamed X... ne pouvait être placé sous contrôle judiciaire en l'absence d'un fait nouveau survenu après sa mise en liberté sans condition, l'arrêt, après avoir relevé que la décision de placer sous contrôle judiciaire un mis en examen en liberté peut être prise en tout état de la procédure, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 137, 138, 142, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de placement sous contrôle judiciaire de Mohamed X..., avec un cautionnement de 150 000 euros garantissant : 1) la représentation du mis en examen à concurrence de 100 000 euros à tous les actes de la procédure et pour l'exécution du jugement ainsi que, le cas échéant, l'exécution des autres obligations qui lui ont été imposées, 2) le paiement, à concurrence de 50 000 euros et à part égale de 25 000 euros, dans l'ordre suivant a) de la réparation des dommages causés par les infractions et des restitutions, b) des amendes ;

"aux motifs que la ventilation de cette somme issue de l'ordonnance déférée sera confirmée en son montant à hauteur de 100 000 euros pour les garanties de représentation et de 50 000 euros pour le paiement dans l'ordre suivant, chacun par moitié a) de la réparation des dommages causés par les infractions et des restitutions, (25 000 euros ) b) des amendes, l'ordonnance dont appel devant être complétée en ce sens (25 000 euros) ;

"alors que la chambre de l'instruction ne pouvait, sans entacher sa décision de contradiction, décider dans son dispositif que le cautionnement garantira à concurrence de 100 000 euros la représentation du mis en examen à tous les actes de la procédure et pour l'exécution du jugement ainsi que, le cas échéant, l'exécution des autres obligations qui lui ont été imposées, tout en constatant dans ses motifs que la somme de 100 000 euros ne concernera que les garanties de représentation ; que dès lors, l'arrêt attaqué est nécessairement entaché de nullité" ;

Attendu que, la chambre de l'instruction ayant fait l'exacte application des dispositions de l'article 142-1 du code de procédure pénale, le moyen manque en fait ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Bloch conseiller rapporteur, M. Rognon conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-85487
Date de la décision : 04/11/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, 16 juillet 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 nov. 2009, pourvoi n°09-85487


Composition du Tribunal
Président : M. Dulin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:09.85487
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