LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte aux époux X... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est formé contre les époux Y..., la société Loficoop et la société MMA ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 février 2008), qu'en 1986-1987, la société Pierre de Comal a réalisé un lotissement, dont elle a vendu des parcelles à la société Loficoop ; qu'après avoir conclu le 1er décembre 1987 un contrat de construction de maison individuelle avec la société Loficoop, les époux Y... ont acquis une parcelle par acte du 18 août 1988 ; que la société Loficoop a fait construire la maison ; que la réception a eu lieu le 3 mars 1989 ; que les époux Y... ont occupé les lieux jusqu'en 1993, date à partir de laquelle ils ont loué leur maison à Electricité de France ; que, par un acte du 26 octobre 2000, les époux Y... ont vendu la maison aux époux X..., lesquels, après avoir délivré congé aux locataires, ont occupé les locaux ; qu'ayant constaté l'existence d'une déclivité du plancher du premier étage de la maison, les époux X... ont, après expertise, assigné les époux Y..., la société Pierre de Comal, la société Loficoop et son assureur la société Mutuelles du Mans assurances (MMA) ; que la société Pierre de Comal a appelé en garantie son assureur la société GAN Eurocourtage et que la société Loficoop a appelé en garantie la société MMA ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que le moyen se borne à critiquer les motifs de l'arrêt attaqué ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article 2270-1 du code civil, applicable à la cause ;
Attendu que, pour dire prescrite l'action des époux X... à l'encontre de la société Pierre de Comal, l'arrêt retient que cette société a commis une faute à l'égard de la société Loficoop en omettant de l'informer précisément sur les qualités du terrain qu'elle lui vendait, que les époux X... peuvent se prévaloir, sur un fondement quasi délictuel de la faute commise par le vendeur du terrain à l'égard de ce dernier, quand bien même cette faute est de nature contractuelle entre les parties à l'acte de vente, que cependant la responsabilité de la société Pierre de Comal à l'égard des époux X..., de nature délictuelle, se prescrit par dix ans à compter de la survenance du dommage et que ce dernier délai s'entend à compter de la survenance initiale et non pas de la date à laquelle les époux X... en ont eu connaissance ;
Qu'en statuant ainsi sans préciser la date de la manifestation du dommage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté les époux X... de leurs demandes à l'encontre de la société Pierre de Comal et en ce qu'il a dit les appels en garantie de la société Pierre de Comal sans objet, l'arrêt rendu le 25 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne, ensemble, la société Pierre de Comal et la société GAN Eurocourtage IARD aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société GAN Eurocourtage IARD à payer aux époux X... la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils pour les époux X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que l'action des époux X... à l'encontre de la société PIERRE DE COMAL était prescrite et de les avoir en conséquence déboutés de leurs demandes à l'encontre de celle-ci ;
AUX MOTIFS QUE « les époux X... invoquent la responsabilité pour faute, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du Code civil de la société PIERRE DE COMAL pour avoir omis de mentionner dans l'acte de vente à la société LOFICOOP le fait que les terrains dont elle connaissait la destination était inconstructibles non plus que les réserves émises par la société BOTTE quant au mode de fondations nécessaires ; que les époux X... ajoutent que la société PIERRE DE COMAL engage sa responsabilité solidairement avec la société LOFICOOP dès lors que les désordres affectant leur pavillon trouve leur cause dans les fautes conjuguées des sociétés LOFICOOP et PIERRE DE COMAL ; que la société PIERRE DE COMAL soulève le moyen tiré de l'inopposabilité des opérations d'expertise à son égard ; que la société LOFICOOP demande la garantie de la société PIERRE DE COMAL ; qu'en premier lieu si la société PIERRE DE COMAL n'a en effet pas été partie aux opérations d'expertise, la Cour dispose des éléments suffisants pour trancher la question de sa responsabilité à l'égard des époux X... en dehors du rapport d'expertise ; qu'en tout état de cause, le rapport d'expertise, contradictoirement débattu par les parties en première instance et devant la Cour, peut être pris en considération à titre d'élément de renseignement ; qu'en second lieu les époux X... invoquent les conclusions du rapport de la société BOTTE pour soutenir que la société PIERRE DE COMAL savait que selon les conclusions de ce dernier, les terrains étaient inconstructibles et qu'elle a dissimulé cette information pourtant fondamentale alors qu'elle connaissait la destination des terrains ; que le rapport BOTTE du 6 juillet 1987 indique, sous le titre « RESULTATS OBTENUS » : « l'épaisseur des remblais varie entre 6 et 8 mètres. L'exploitation a en effet concerné la totalité de l'épaisseur des argiles à meulières de MONTMORENCY. Ces remblais, hétérogènes, présentent de très faibles caractéristiques mécaniques. Ils sont tout à fait inconstructibles » ; que le même rapport conclut : « l'épaisseur de ces remblais (6 à 8 m) et leurs très médiocres caractéristiques mécaniques n'autorisent en aucun cas un mode de fondations superficielles classiques, y compris type radier » ; que les terrains n'étaient donc pas inconstructibles à proprement parler, ne serait-ce que parce que la société BOTTE spécifiait qu'ils nécessitaient des fondations particulières ; qu'en outre et comme l'ont retenu les premiers juges, la société LOFICOOP a obtenu une permis de construire les concernant ; que la société PIERRE DE COMAL connaissait le rapport BOTTE pour l'avoir elle-même sollicité et, en sa qualité de lotisseur, ne pouvait ignorer les contraintes particulières qui résultaient de la qualité du terrain qu'elle vendait ; qu'elle s'est cependant bornée à transmettre le rapport à l'agent immobilier chargé de la vente des terrains et à mentionner la présence de remblais dans l'acte de vente conclu avec LOFICOOP ; que l'agent immobilier n'était pas nécessairement à même d'apprécier l'importance des conclusions du rapport d'étude du sol et qu'il n'est pas établi qu'il lui a été demandé de transmettre le rapport de sol à l'acquéreur ou de lui en faire connaître les conclusions ; que la société PIERRE DE COMAL a ainsi commis une faute à l'égard de la société LOFICOOP en omettant de l'informer précisément sur les qualités du terrain qu'elle lui vendait ; que les époux X... peuvent se prévaloir, sur un fondement quasi délictuel de la faute commise par le vendeur du terrain à l'égard de l'acquéreur de ce dernier, quand bien même cette faute est de nature contractuelle entre les parties à l'acte de vente ; que cependant la responsabilité de la société PIERRE DE COMAL à l'égard des époux X..., de nature délictuelle, se prescrit par dix ans à compter de la survenance du dommage ; que ce dernier délai s'entend à compter de la survenance initiale et non pas de la date à laquelle les époux X... en ont eu connaissance ; que l'action à l'encontre de la société PIERRE DE COMAL est également prescrite » ;
ALORS D'UNE PART QUE les actions en responsabilité civile extracontractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ; qu'en retenant, pour juger prescrite l'action des époux X... contre la société PIERRE DE COMAL, que l'action se prescrivait par dix ans à compter de la « survenance initiale » du dommage, sans s'attacher à la date de sa manifestation dont il résulte pourtant de ses propres constatations que, s'agissant d'un phénomène évolutif, elle ne pouvait être antérieure à avril 1993, la cour d'appel a violé l'article 2270-1 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE les juges du fond ne peuvent juger une action prescrite sans déterminer avec précision le point de départ de la prescription ; qu'en se bornant, pour juger prescrite l'action des époux X... à l'encontre de la société PIERRE DE COMAL, à affirmer que l'action se prescrit par dix ans à compter de la « survenance initiale » du dommage sans préciser à quelle date se situerait cette « survenance initiale », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2270-1 du Code civil.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils pour la société GAN Eurocourtage IARD.
La société GAN EUROCOURTAGE fait grief à la cour d'appel d'avoir retenu dans ses motifs que la société PIERRE DE COMAL avait commis une faute à l'égard de la société LOFICOOP en omettant de l'informer précisément sur les qualités du terrain vendu et engagé ainsi sa responsabilité délictuelle à l'égard des époux X...,
AUX MOTIFS QUE « les terrains n'étaient donc pas inconstructibles à proprement parler, ne serait-ce que parce que la société BOTTE spécifiait qu'ils nécessitaient des fondations particulières ; qu'en outre et comme Pont retenu /es premiers juges, /a société LOFICOOP a obtenu un permis de construire les concernant; que la société PIERRE DE COMAL connaissait le rapport BOTTE pour l'avoir elle-même sollicité et, en sa qualité de lotisseur, ne pouvait ignorer /es contraintes particulières qui résultaient de la qualité du terrain qu'elle vendait ; qu'elle s'est cependant bornée à transmettre le rapport à l'agent immobilier chargé de la vente des terrains et à mentionner la présence de remblais dans l'acte de vente conclu avec LOFICOOP ; que l'agent immobilier n'était pas nécessairement à même d'apprécier l'importance des conclusions du rapport d'étude du sol et qu'il n'est pas établi qu'il lui a été demandé de transmettre le rapport de sol à l'acquéreur ou de lui en faire connaître les conclusions ; que la société PIERRE DE COMAL a ainsi commis une faute à l'égard de la société LOFICOOP en omettant de l'informer précisément sur les qualités du terrain qu'elle lui vendait ; que les époux X... peuvent se prévaloir, sur un fondement quasi délictuel de la faute commise par le vendeur du terrain à l'égard de l'acquéreur de ce dernier, quand bien même cette faute est de nature contractuelle entre les parties à l'acte de vente ; que cependant la responsabilité de la société PIERRE DE COMAL à l'égard des époux X..., de nature délictuelle, se prescrit par dix ans à compter de la survenance du dommage ; que ce dernier délai s'entend à compter de la survenance initiale et non pas de la date à laquelle les époux X... en ont eu connaissance ; que l'action à l'encontre de la société PIERRE DE COMAL est également prescrite »,
ALORS QU'EN, retenant la responsabilité de la société PIERRE DE COMAL, quoique pour la déclarer prescrite, sans caractériser le lien de causalité entre la faute et le dommage, la cour d'appel a privé sa décision de base létale au regard de l'article 1382 du code civil.