Joint le pourvoi n° D 08 16. 135 et la requête de rabat de la décision de non admission du pourvoi n° A 07 18. 520 du 5 juin 2009 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 27 juin 2006) que, par acte du 15 mars 2002, M. Jean Lucien X..., propriétaire de locaux à usage commercial pris à bail par les époux Y..., a fait délivrer à ces derniers un congé sans offre de renouvellement et de paiement d'une indemnité d'éviction pour motifs graves et légitimes ; que les époux Y..., aux droits desquels se trouvent les consorts Y..., ont assigné M. Jean Lucien X... aux fins de voir annuler le congé et, subsidiairement, obtenir paiement d'une indemnité d'éviction ;
Sur la demande de rabat de la décision de non admission :
Attendu que, par décision du 30 septembre 2008, la 3e chambre civile de la Cour de cassation a déclaré non admis le pourvoi formé par M. Jean Lucien X... " ayant été domicilié..., ... Paris cedex 15, décédé en cours d'instance ", au visa des articles 612 et 1014 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il résulte des pièces produites par Mme Elisabeth et Geneviève X... (Mmes X...), venues aux droits de M. Jean Lucien X..., que ce dernier est décédé le 10 avril 2007, que son conseil, désigné après une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 28 juin 2007, n'avait pas été informé de ce décès lorsqu'il a déposé le pourvoi le 27 août 2007 ; qu'il s'ensuit que le pourvoi formé au nom d'une personne décédée avant l'introduction de l'instance, et non en cours d'instance, doit être déclaré non avenu et qu'il y a lieu de faire droit à la requête ;
Sur la recevabilité du pourvoi formé par Mmes X... :
Attendu que Mmes X..., venues aux droits de M. Jean Lucien X..., se sont pourvues en cassation le 13 juin 2008 contre le même arrêt de la cour d'appel du 27 juin 2006 ;
Attendu que cet arrêt a été signifié de son vivant à M. Jean Lucien X... le 24 octobre 2006 dans les formes de l'article 659 du code de procédure civile ; qu'un courrier du médiateur national de la Poste du 28 mai 2008 atteste que la lettre recommandée avec avis de réception et la lettre simple requises par cet article ne sont pas parvenues à leur destinataire et ont été retournées à l'envoyeur en raison d'un libellé incomplet de l'adresse mentionnée dans ces courriers par l'officier ministériel chargé de la signification ; qu'il s'ensuit que celle ci n'a pas été valablement effectué et que le pourvoi formé par Mmes X... est recevable ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 145 17 du code de commerce, ensemble l'article L. 145 14, alinéa 1, du même code ;
Attendu que le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant ; que toutefois, s'il s'agit soit de l'inexécution d'une obligation, soit de la cessation sans raison sérieuse et légitime de l'exploitation des fonds, compte tenu des dispositions de l'article L. 145 8, l'infraction commise par le preneur ne pourra être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser ;
Attendu que, pour dire que le bail se trouve renouvelé pour une durée de neuf ans qui a pris effet le 1er mai 2002, l'arrêt retient que le bailleur ne précise pas dans la mise en demeure les remises en état dont il demande l'exécution, que les preneurs ne sont pas en mesure de connaître qu'elle est la faute ou la violation aux clauses du bail qu'il leur est demandé de réparer dans le délai imparti et que le refus de renouvellement de bail sans offre d'indemnité d'éviction n'étant pas motivé, le bail se trouve renouvelé ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'absence ou l'insuffisance de motivation d'un congé avec refus de renouvellement pour motifs graves et légitimes sans offre d'indemnité d'éviction laisse subsister le congé et le droit pour le preneur de prétendre au paiement d'une indemnité d'éviction, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
Rabat la décision du 30 septembre 2008 déclarant non admis le pourvoi formé par M. Jean Lucien X... et dit ce pourvoi non avenu en raison du décès de celui ci intervenu avant l'introduction de l'instance ;
Dit recevable le pourvoi formé par Mmes Elisabeth et Geneviève X... le 13 juin 2008 ;
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 juin 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne les consorts Y...
Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts Y...
Z... ;
Dit que sur les diligences du directeur de greffe près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la décision rapportée ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit octobre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour Mmes Elisabeth et Geneviève X...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le refus de renouvellement de bail commercial sans indemnité d'éviction n'était pas motivé et que le bail considéré s'était en conséquence trouvé renouvelé pour neuf ans à compter du 1er mai 2002 ;
aux motifs que le bailleur qui refuse le renouvellement du bail sans indemnité d'éviction doit justifier à l'encontre du locataire sortant d'un motif grave et légitime ; que l'article L. 145-17 oblige le bailleur, avant d'invoquer un motif de refus de renouvellement fondé sur l'inexécution d'une obligation du preneur, à mettre celui-ci en demeure de faire cesser l'infraction dans le délai d'un mois ; qu'en l'espèce, en réponse à une demande de renouvellement du bail qui lui a été notifiée le 21 décembre 2001, Monsieur X... a informé les preneurs par acte extrajudiciaire du 15 mars 2002 qu'il s'opposait au renouvellement et les a mis en demeure dans le délai d'un mois de reprendre l'exploitation de l'hôtel restaurant – pension de famille prévue dans le bail ; qu'il résulte des échanges de correspondances entre les parties, qu'en cours de bail, les preneurs ont réalisé, avec l'accord des bailleurs, divers travaux et ont apporté certaines modifications dans les lieux ; que les bailleurs ne précisent pas dans la mise en demeure quelles sont les remises en état dont ils demandent l'exécution ; que les preneurs ne sont donc pas en mesure de connaître quelle est la faute ou la violation aux clauses du bail qui leur est demandée de réparer dans le délai imparti ; que le droit pour les bailleurs de réclamer en fin de bail le rétablissement des lieux dans leur état primitif est expressément prévu dans le contrat initial ; que Monsieur X... ne démontre pas l'existence de causes graves et légitimes susceptibles de justifier une remise en état immédiate ; que par ailleurs les preneurs ne sont pas tenus d'exercer toutes les activités autorisées par le bail ; que les locaux loués sont actuellement uniquement exploités à l'usage d'hôtel, les consorts Y... ayant délaissé l'activité restaurant pour laquelle les lieux ne répondaient pas aux normes exigées par l'administration ; que le deuxième grief n'est pas fondé ; que Monsieur X... invoque dans ses conclusions toute une série d'autres griefs dont certains remontent à plus de dix ans et qui sont en tout état de cause antérieurs à la mise en demeure ; que n'ayant pas cru bon de les viser dans la mise en demeure préalable, il ne peut les invoquer aujourd'hui comme des motifs graves de nature à justifier le refus du renouvellement du bail ; que le litige était limité en première instance au refus du renouvellement du bail et à ses éventuelles conséquences ; que Monsieur X... présente en cause d'appel, diverses demandes complémentaires tendant notamment à la révision des loyers et au paiement de dommages et intérêts ; que ces réclamations sont sans lien avec les prétentions initiales et constituent donc des demandes nouvelles irrecevables devant la cour ; que l'abus du recours en justice de la part de Monsieur X... n'est pas caractérisé ; que les consorts Y... seront déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts à ce titre : qu'il leur sera seulement alloué la somme de 2. 000 en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile en sus de l'indemnité de 1 300 déjà accordée à ce titre par le tribunal dans le jugement dont appel ;
1°) alors que, d'une part, le refus du bail sans indemnité d'éviction est subordonné par l'article 145. 17 du code des baux à l'existence d'un motif grave et légitime ; que la demande du bailleur tendant à la remise des lieux en leur état d'origine et à la reprise de l'exploitation de l'hôtel-restaurant-pension de famille telle que prévue dans le bail était, en elle-même suffisamment précise, puisqu'elle se référait aux mentions formelles dudit bail ; que sous couvert d'un prétendu constat d'imprécision sur les conséquences tirées d'obligations elles-mêmes précises du bail, dont la violation entre dans la catégorie des motifs graves et légitimes, la cour a méconnu les exigences du texte précité ;
2°) alors que, d'autre part, aux termes de l'article 566 du nouveau code de procédure civile, les parties peuvent former devant la cour d'appel toutes les demandes qui sont l'accessoire, la conséquence ou le complément de leurs demandes initiales ; qu'en rejetant dès lors les demandes complémentaires du requérant sur la révision du loyer et le paiement des dommages et intérêts en se bornant à observer que ces demandes n'avaient pas été présentées en première instance, sans autrement rechercher si précisément elles n'étaient pas liées à ces dernières par un lien accessoire susceptible de les faire regarder comme recevables, la cour a derechef violé les dispositions de l'article 566 du nouveau code de procédure civile ;
3°) alors enfin, qu'en attachant directement au rejet du refus de renouvellement litigieux, la sanction d'un renouvellement d'office du bail pour neuf ans, sans autrement s'exprimer sur le service éventuel d'une indemnité d'éviction, la cour a porté atteinte aux droits du bailleur de s'opposer au renouvellement du bail en violation des articles 145-17 et 145-18 du code des baux et de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.