LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi :
Vu l'article 13 de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 modifiée, relative aux principes généraux du droit du travail, à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française ;
Attendu, selon ce texte, que le champ d'application professionnel ou interprofessionnel des conventions et accords collectifs de travail est défini en termes d'activités économiques ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 20 décembre 2005, un accord collectif interprofessionnel relatif à une "prime à l'emploi" versée par l'employeur à chaque salarié à titre de complément de salaire a été conclu en Polynésie française ; que cet accord a été étendu le 11 janvier 2006 par un arrêté du Président de la Polynésie française ; que la société Agritech et la Fédération générale du commerce ayant saisi le tribunal administratif de Papeete d'une requête en annulation de cet arrêté, ce tribunal a sursis à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la validité de l'accord ;
Attendu que l'arrêt déclare nul l'accord interprofessionnel du 20 décembre 2005 relatif à la prime à l'emploi au motif que son champ d'application professionnel n'est pas défini en termes d'activités économiques ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résulte pas de l'article 13 de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 modifiée qu'un accord interprofessionnel doit énumérer les branches d'activité auxquelles il s'applique et qu'en visant dans son article premier l'ensemble des activités de la Polynésie française, l'accord a défini son champ d'application professionnel en termes d'activités économiques, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mars 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que l'accord collectif interprofessionnel du 20 décembre 2005 relatif à une "prime à l'emploi", en ce qu'il se déclare applicable à l'ensemble des activités du la Polynésie française, est licite ;
Condamne la société Agritech aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils pour la Polynésie française
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'accord interprofessionnel relatif à la prime à l'emploi, en date du 20 décembre 2005, était illégal ;
AUX MOTIFS QU'en vertu de l'article 13 alinéa 1 de la loi numéro 86-845 du 17 juillet 1986, les conventions et accords collectifs de travail ont pour but de définir les règles suivant lesquelles s'exerce le droit des salariés à la négociation collective, ainsi que l'ensemble de leurs conditions d'emploi et de travail et de leurs garanties sociales dans le cadre d'un champ d'application qui est, et territorial ou local, et professionnel ou interprofessionnel. Le champ d'application est défini en termes d'activités économiques ; qu'aux termes de l'article 1 de l'accord interprofessionnel relatif à la prime à l'emploi, le présent accord est un accord interprofessionnel couvrant l'ensemble des activités de la Polynésie française, tel que prévu par les dispositions de l'article 13 de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 ; que le champ d'application de cet accord n'est pas défini en termes d'activités économiques et qu'en visant, sans restriction, l'ensemble des activités de la Polynésie française, il est entaché d'irrégularité ; que par suite, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens, l'accord interprofessionnel du 20 décembre 2005 relatif à la prime à l'emploi est illégal ;
ALORS QUE selon l'article 13 de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 modifiée, le champ d'application d'un accord collectif de travail est territorial ou local et professionnel ou interprofessionnel ; qu'est donc valable un accord interprofessionnel, prévoyant comme l'accord interprofessionnel du 20 décembre 2005 relatif à la prime à l'emploi, qu'il couvre l'ensemble des activités professionnelles de la POLYNESIE FRANÇAISE, un accord interprofessionnel pouvant parfaitement embrasser toutes les activités professionnelles et aucun texte n'exigeant à peine de nullité leur énumération ; que dès lors en l'espèce, en considérant, pour retenir que l'accord interprofessionnel du 20 décembre 2005 était entaché d'illégalité, que le champ d'application de cet accord n'était pas défini en termes d'activités économiques, et qu'il visait, sans restriction l'ensemble des activités de la POLYNESIE FRANÇAISE, la Cour d'appel a violé le texte susvisé.