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20/10/2009 | FRANCE | N°08-44132

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 octobre 2009, 08-44132


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 122 49 du code du travail et 4 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé comme conducteur typographe par la Société régionale graphique à compter du 1er décembre 2000 après reprise de son contrat de travail, a été licencié pour inaptitude le 12 décembre 2003 ; qu'invoquant des faits de harcèlement moral antérieurs à novembre 2001, il a saisi la juridiction prud'homale pour conte

ster son licenciement et demander des dommages intérêts ;

Attendu que la cour d'ap...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 122 49 du code du travail et 4 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé comme conducteur typographe par la Société régionale graphique à compter du 1er décembre 2000 après reprise de son contrat de travail, a été licencié pour inaptitude le 12 décembre 2003 ; qu'invoquant des faits de harcèlement moral antérieurs à novembre 2001, il a saisi la juridiction prud'homale pour contester son licenciement et demander des dommages intérêts ;

Attendu que la cour d'appel prononce la nullité du licenciement sur le fondement de l'article L. 122 49 du code du travail en retenant que la rupture du contrat de travail trouve son origine dans le comportement fautif de l'employeur ;

Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que le salarié se bornait à réclamer le paiement de dommages intérêts, et alors, d'autre part, qu'à la date des agissements fautifs reprochés à l'employeur, l'article L. 122 49 du code du travail n'était pas applicable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils pour la Société régionale graphique (SRG).

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit nul le licenciement de Monsieur X... et condamné la SOCIETE REGIONALE GRAPHIQUE à payer à Monsieur X... la somme de 40. 000 de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE * Monsieur X... produit ensuite une lettre présentée comme émanant de son médecin psychiatre traitant, le docteur Z..., et adressée le 25 juin 2003 au médecin du travail, dans laquelle il est écrit « J'ai vu en consultation Monsieur X... (...). Il est en arrêt de travail depuis novembre 2001 pour un syndrome anxiodépressif (…). Selon Monsieur X..., ce syndrome anxiodépressif est en rapport avec une souffrance au travail. Cette souffrance est apparue suite à la reprise de l'entreprise par nouveaux directeurs. Il décrit que le management et les conditions de travail sont alors nettement changées. Ainsi il rapporte que les techniques de management utilisent la pression, l'agressivité, la menace (des baisses de salaire, des licenciements..). (...). Il me semble que la souffrance de Monsieur X... est authentique et qu'elle peut être en rapport avec des difficultés importantes au travail. Tout retour dans l'entreprise serait néfaste pour l'état psychique de Monsieur X... qui à côté de cette symptomatologie psychiatrique souffre d'autres problèmes de santé. En conclusion je propose une inaptitude médicale à tout poste dans l'entreprise ». * Monsieur X... produit également trois attestations dans lesquelles il est écrit : « J'atteste avoir personnellement assisté à des attitudes injurieuses de la part de Monsieur Richard A... envers ses subordonnés. Il a à plusieurs reprises proféré des propos humiliants audibles de tous les employés de la société dans laquelle je travaillais à l'attention de certains de ses collaborateurs jusqu'à ce que ceux-ci quittent l'entreprise » (attestation B...). « J'atteste avoir personnellement constaté du 1er décembre 2000 au 31 mars 2001 les faits suivants : harcèlement moral répété envers certains employés de l'imprimerie ESPIC dont moi-même et Claude X... entre autre. Ce dernier en janvier 2001 mis au courant de l'intention de Monsieur A... directeur de la société SRG de changer nos horaires de travail et de baisser nos salaires a téléphoné à l'inspection du travail pour savoir si ce procédé était légal. Moins de 24 heures plus tard, Monsieur A... informé par un contact a l'inspection du travail a déboulé dans l'atelier où travaillait Monsieur X..., il l'a traité de tous les noms, l'a menacé de licenciement et lui a dit « je vais vous casser ». (…). En novembre 2001 Monsieur X... m'a téléphoné pour me raconter que Monsieur A... leur avait dit à lui et à ma collègue que les Espic c'est à dire les anciens employés de l'imprimerie travaillaient comme des arabes. Pour avoir vécu pendant quatre mois cet enfer je pourrais en raconter d'autres car le harcèlement oral était journalier. Sans arrêt les phrases et les mots blessants fusaient, par exemple : « pour ce que vous faites vous êtes trop payés mais je vais revoir tout ça » (…). Il nous rabaissait verbalement et devant bien sûr « ses » employés » (attestation C...). « J'atteste les faits suivants : harcèlement moral répété envers Monsieur X... Claude, Madame C... et moi-même au mois de janvier 2001, Monsieur X... a été interpellé agressivement par Monsieur A... directeur de la société qui l'a menacé de licenciement et de cassation pour avoir téléphoné à l'inspection du travail, ce dernier voulait nous baisser les horaires de travail (...) avec perte de salaire. Un jour Monsieur A... nous a déclaré qu'une fois son bureau terminé dans ce local, on allait savoir ce qu'était le bagne (…). Le 13 novembre 2001, Monsieur A... nous a dit ouvertement à Monsieur X... et à moi même qu'on commençait à le faire « chier » et que l'on travaillait comme des arabes. A plusieurs reprises au cours de l'année 2001, Monsieur A... nous a reproché systématiquement nos salaires qui selon lui étaient trop chers » (attestation Y...). Par ailleurs, les attestations produites par l'employeur font état de la part de celui-ci de « colères noires », « d'engueulades », d'un caractère « particulièrement virulent ». Le certificat médical et ces attestations suffisent à démontrer que dans les mois qui ont précédé la suspension de son contrat de travail pour maladie, Monsieur X... a été victime, de la part du responsable de l'entreprise, d'une succession d'agressions verbales, injustifiées dans le cadre d'une relation de travail, et qui ont été à l'origine de la dégradation de son état de santé. Et le fait que d'autres salariés aient témoigné n'avoir pas été victimes de harcèlement de la part de Monsieur A... ne peut suffire pour conclure que ce dernier a nécessairement eu un comportement correct avec la totalité du personnel. Dès lors, l'inaptitude retenue comme motif de rupture du contrat de travail ayant son origine dans le comportement fautif de l'employeur, le licenciement doit être considéré comme nul. Monsieur X... qui avait une très grande ancienneté dans l'entreprise, et qui a été licencié dans des conditions humiliantes, recevra 40. 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ;

1) ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel reprises oralement à l'audience, Monsieur X... ne demandait pas que soit prononcée la nullité de son licenciement mais seulement l'allocation de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ; que dès lors, en disant que le licenciement pour inaptitude physique du salarié était nul et en lui allouant, en conséquence des dommagesintérêts à ce titre, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

2) ALORS QU'en tout état de cause, les dispositions de l'article L. 122-49 du Code du travail, prévoyant qu'est nulle de plein droit toute rupture du contrat de travail résultant du harcèlement moral du salarié, ne s'appliquent pas à des faits antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 ayant institué ce texte ; qu'en l'espèce, pour prononcer la nullité du licenciement du salarié, la Cour d'appel a considéré que l'inaptitude retenue comme motif de rupture du contrat de travail avait son origine dans le comportement fautif de l'employeur, consistant dans des agressions verbales dont aurait été victime Monsieur X... « dans les mois qui ont précédé la suspension de son contrat de travail pour maladie » ; qu'en se fondant ainsi sur des faits commis avant novembre 2001, soit sur des faits antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi du 17 janvier 2002, pour dire que le licenciement du salarié était nul, la Cour d'appel a violé l'article 2 du Code civil ;

3) ALORS QUE des agissements de harcèlement moral ne sauraient être retenus à l'encontre d'un employeur qui a seulement un tempérament colérique ; qu'en l'espèce, pour retenir que Monsieur X... avait été victime de harcèlement moral consistant en « une succession d'agressions verbales », la Cour d'appel s'est fondée sur les attestations produites par l'employeur faisant état de la part de celui-ci de « colères noires », « d'engueulades », et un caractère « particulièrement virulent » ; qu'en se déterminant de la sorte, la Cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'un harcèlement moral, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;

4) ALORS QU'en se fondant sur les attestations produites par l'employeur faisant état de la part de celui-ci de « colères noires », « d'engueulades » et d'un caractère « particulièrement virulent », pour retenir que Monsieur X... avait été victime d'« une succession d'agressions valables injustifiées », sans analyser, même de façon sommaire, ces attestations, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile, violant ainsi ledit article ;

5) ALORS QU'en se fondant sur l'attestation de Madame E..., épouse B..., pour retenir que dans les mois ayant précédé la suspension de son contrat de travail pour maladie en novembre 2001, Monsieur X... avait été victime de la part du responsable de l'entreprise d'une succession d'agressions verbales injustifiées, sans répondre aux conclusions d'appel de la SOCIETE REGIONALE GRAPHIQUE faisant valoir que Madame E... n'était pas présente dans l'entreprise pendant que Monsieur X... exerçait ses fonctions, étant employée dans la Société GARONNE COMPO (ses dates d'emploi et son lieu de travail ne coïncidant en rien avec ceux de Monsieur X...), la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44132
Date de la décision : 20/10/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 18 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 oct. 2009, pourvoi n°08-44132


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.44132
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