LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le porvoi formé par :
- X... Clovis,
contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBÉRY, chambre correctionnelle, en date du 5 février 2009, qui, pour détérioration ou dégradation légère d'un bien appartenant à autrui, l'a condamné à 1500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles R. 635-1, alinéas 1 et 2, du code pénal, préliminaire, 591 à 593 du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, violation de la présomption d'innocence, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Clovis X... du chef de dégradation ou détérioration volontaire du bien d'autrui causant un dommage léger ;
" aux motifs propres que, bien que Clovis X... conteste les faits, « il est établi que, le 10 juin 2007, un liquide dégageant une forte odeur d'urine, a été déversé à nouveau devant le garage d'Yvon Y... ; que, contrairement à ce que soutient le prévenu, le fait de déverser devant l'immeuble de son voisin un liquide à l'odeur nauséabonde et persistante constitue une dégradation de ce bien et cause évidemment un dommage qui peut être, à tout le moins, qualifié de léger ; que les nombreux antécédents commis par le prévenu, le même type opératoire employé et le même type d'infraction en l'espèce, jet d'un liquide mêlé d'urine, à l'odeur pestilentielle et persistante, constituent des éléments suffisants, ainsi que l'a retenu le premier juge, pour établir la réalité des faits reprochés au prévenu et qui constituent l'infraction visée en la prévention ;
" aux motifs adoptés qu'Yvon Y... « a déposé plainte le dimanche 10 juin 2007, pour dégradations légères indiquant qu'un produit liquide présentant une forte hauteur d'urine avait été déversé devant la porte de son garage le 9 juin 2007 ; qu'il précisait … que ce n'était pas la première fois qu'il était victime de tels agissements de la part de son voisin, Clovis X... ; que, lors de son audition, Clovis X... a nié les faits et a déclaré être lui-même victime de multiples dégradations commises dans son jardin ; qu'il a précisé qu'il n'était pas présent à la date des faits puisqu'il était hospitalisé du 14 mai au 6 juin 2007... les certificats d'hospitalisation produits démontrent au contraire que Clovis X... n'était plus hospitalisé à la date des faits » ; qu'il « a été condamné à deux reprises, les 15 septembre 2005 et 19 juillet 2007, par la cour d'appel de Chambéry pour des faits similaires ; que la cour d'appel, dans son arrêt du 19 juillet 2007, relève que, par lettre du 11 juin 2007, Yvon Y... a écrit à la cour pour faire état de la réitération des faits par le prévenu et du dépôt d'une nouvelle plainte pour le déversement d'un liquide malodorant devant la porte de son garage le 9 juin 2007 ; que la cour relève que « comme par hasard » (sic) ces actes (aujourd'hui poursuivis) ont été perpétrés cinq jours avant le passage de l'affaire devant la chambre des appels correctionnels ; qu'en l'espèce, force est de constater qu'à son retour d'hospitalisation, les dégradations par le jet de liquide malodorant ont repris de plus belle et ce, à l'approche de l'audience devant la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Chambéry ; qu'il ne fait aucun doute que ces dégradations sont l'oeuvre de Clovis X... qui n'a de cesse d'importuner ses voisins mais qui, faisant preuve d'un très grand courage, nie l'évidence et n'assume nullement ses actes ; que, malgré ses vaines dénégations, il convient de déclarer Clovis X... coupable des faits qui lui sont reprochés » ;
" alors que, d'une part, la contravention réprimée par l'article R. 635-1 du code pénal suppose la constatation d'un fait matériel de destruction, de dégradation ou de détérioration volontaire d'un bien appartenant à autrui ; que le simple fait de déverser devant l'immeuble de son voisin un liquide à l'odeur nauséabonde et persistante ne constitue pas une dégradation de ce bien en l'absence de toute dégradation ou détérioration du garage, de sa porte, ou du sol ; que l'arrêt attaqué ne relevant pas de tache ni de détérioration quelconque du revêtement du sol ou de la porte dudit garage, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
" alors que, d'autre part, la contravention visée exige également la constatation d'un fait matériel de destruction, de dégradation ou de détérioration d'un bien appartenant à autrui ; que le bien visé par les poursuites était, selon les propres énonciations de l'arrêt attaqué, le sol situé devant l'immeuble d'Yvon Y..., le devant de sa porte de garage donnant directement sur la voie publique ; qu'il ne résulte pas de ces constatations que le produit litigieux a été déversé dans la propriété de la partie civile et non sur la voie publique, de sorte que la cour d'appel a encore violé l'article R. 635-1 du code pénal ;
" alors qu'en outre, Clovis X..., atteint de cécité et placé sous curatelle d'Etat renforcée de ce fait, produisait un certificat médical attestant qu'en raison d'une hospitalisation du 22 mai au 6 juin 2007 lors de laquelle il a subi une amputation des orteils du pied droit, il avait été immobilisé durant un mois à compter du 6 juin 2007, avant de subir une nouvelle amputation le 17 juillet 2007 ; qu'en relevant qu'il n'était plus hospitalisé à la date du 9 juin 2007 pour le déclarer coupable des faits reprochés en s'abstenant de répondre au moyen péremptoire selon lequel Clovis X... était dans l'impossibilité de se déplacer le 9 juin 2007 pour déverser quoi que ce soit chez qui que ce soit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" alors qu'enfin, les juges du fond ne peuvent se prononcer par simple référence à une décision antérieure ni par voie de disposition générale et réglementaire sur les causes qui leur sont soumises ; qu'en déclarant Clovis X... coupable de la contravention reprochée parce qu'il avait été condamné pour des faits similaires les 15 septembre 2005 et 19 juillet 2007 par la cour d'appel de Chambéry, la cour d'appel a encore privé sa décision de toute base légale " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, la contravention dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié, au profit de la partie civile, l'allocation de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et des circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme que Clovis X... devra payer à Yvon Y... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme Chanet conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Lazerges conseiller rapporteur, Mme Ponroy conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;