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16/09/2009 | FRANCE | N°08-42794

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 septembre 2009, 08-42794


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique : Vu les articles L. 3242-3 du code du travail et 1315 du code civil ;

Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que l'employeur doit prouver le paiement effectif du salaire ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été employé, en qualité de cuisinier, entre le 29 avril 1987 et le 30 avril 2004, par M. et Mme Y... qui exploitent un hôtel restaurant ; que soutenant qu'il n'avait pas été payé de ses salaires pour la période du 1er octobre 1987 au 30 avril 2004, il

a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique : Vu les articles L. 3242-3 du code du travail et 1315 du code civil ;

Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que l'employeur doit prouver le paiement effectif du salaire ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été employé, en qualité de cuisinier, entre le 29 avril 1987 et le 30 avril 2004, par M. et Mme Y... qui exploitent un hôtel restaurant ; que soutenant qu'il n'avait pas été payé de ses salaires pour la période du 1er octobre 1987 au 30 avril 2004, il a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de son employeur au paiement d'un arriéré de salaires portant sur cinq années et de congés payés afférents et de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande d'arriéré de salaires, la cour d'appel énonce que l'employeur verse aux débats des extraits du journal de paie ainsi que du grand livre général sur lesquels sont effectivement portés les salaires de M. X..., que l'URSSAF a effectué un contrôle des documents comptables de l'hôtel pour la période litigieuse et n'a décelé aucune anomalie, que des salariés ayant travaillé avec l'intéressé et de nombreux clients attestent qu'il ne s'est jamais plaint du fait qu'il ne percevait pas son salaire, que le salarié a été affilié à tous les organismes sociaux, que les déclarations annuelles de salaire ont été régulièrement faites et les charges sociales payées, que les experts comptables de l'employeur ont attesté que le salarié était payé en espèces " comme le confirment les mouvements du livre de caisse " et qu'ainsi, au vu de l'examen des pièces comptables, l'employeur établit le paiement du salaire à son salarié par versement d'espèces pour la période de 1999 à 2004 ;
Qu'en statuant ainsi alors que s'il était démontré que les comptes de l'entreprise avaient été débités, il ne ressort pas de l'arrêt que les sommes correspondantes avaient été effectivement perçues par le salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande d'arriéré de salaire et de congés payés afférents ainsi que des dommages-intérêts pour préjudice moral, l'arrêt rendu le 8 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne les époux Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. X... ;
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Philippe X... de sa demande en rappel de salaires pour la période du 1er décembre 1999 au 30 avril 2004, et de congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QU'« il revient à l'employeur débiteur de l'obligation de rapporter la preuve du paiement des salaires afférents au travail effectivement accompli, et en cas de contestation de produire les pièces comptables ; que la délivrance de bulletins de paie n'emporte pas la présomption de paiement des sommes mentionnées ; que la seule mention sur les bulletins de paie d'un règlement en espèces ne permet pas à l'employeur de se libérer de son obligation de paiement du salaire ; qu'en l'espèce, Madame Y... verse aux débats des extraits du journal de paie pour les années 1999 à 2004 (période non couverte par la prescription) sur lesquelles sont effectivement portés les montants des salaires de Monsieur X... ; qu'elle produit également des extraits du grand livre général sur lesquels apparaissent très précisément les salaires figurant sur les bulletins de paie de ce salarié ; que l'URSSAF a effectué un contrôle des documents comptables de l'hôtel du Vivarais pour la période du 1er janvier 2001 au 30 avril 2004 et n'a décelé aucune anomalie ; que des salariés ayant travaillé avec Monsieur X... et de nombreux clients attestent que ce salarié ne s'est jamais plaint du fait qu'il ne percevait pas son salaire ; que Monsieur X... a été affilié par son employeur à tous les organismes sociaux ; que les déclarations annuelles de salaire ont été régulièrement faites et les charges sociales payées ; que Messieurs Lionel et César Z..., experts comptables, attestent dans un courrier adressé à Madame Y... le 2 février 2005 que bien que ses bulletins de salaire indiquaient le règlement par chèque, Monsieur X... était payé en espèces « comme le confirment les mouvements du livre de caisse » ; qu'ainsi, au vu de l'examen des pièces comptables, l'employeur établit le paiement du salaire à son salarié par versement d'espèces pour la période de 1999 à 2004 » ;
ALORS 1°) QUE : l'acceptation sans protestation ni réserve d'un bulletin de paie par le travailleur ne pouvant valoir de sa part renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en application de la loi, du règlement, d'une convention, d'un accord collectif de travail ou d'un contrat, il appartient à l'employeur qui soutient avoir réglé le salaire d'en rapporter la preuve ; qu'en cas de paiement en espèces, cette preuve n'est valablement rapportée que par la production d'un reçu ou d'une quittance signés par le salarié, pour chaque paiement effectué, à charge éventuellement pour le salarié qui conteste avoir reçu ces paiements, d'en apporter la preuve ; qu'en l'espèce, en déclarant que les employeurs de Monsieur X... rapportaient la preuve qu'ils lui avaient versé ses salaires, cependant qu'ils ne versaient aux débats ni reçus ni quittances afférents à ces règlements, la Cour d'appel a fait peser la charge de la preuve du règlement des salaires sur le salarié en violation des articles L. 3243-3 du code du travail et 1315 du code civil ;
ALORS 2°) QUE : l'inscription des salaires sur le livre de paie, le journal de caisse ou tout autre grand livre général (arrêt, p. 3, dernier al., p. 4, al. 1er et 6), a pour seule conséquence d'établir que les salaires ont été passés au débit de la société, ce qui ne permet pas de faire présumer leur remise au salarié ; qu'en se fondant sur de tels éléments pour estimer rapportée la preuve de ce que l'employeur se serait acquitté des salaires entre les mains de Monsieur X..., la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 3243-3 du code du travail et 1315 du code civil ;
ALORS 3°) QUE : la circonstance que l'URSSAF n'ait décelé aucune anomalie dans les documents comptables (arrêt, p. 4, al. 2), que le salarié ait été affilié à tous les organismes sociaux (al. 4) et que l'employeur ait procédé aux déclarations sociales et se soit acquitté des charges sociales correspondant au salaire dû (al. 5), a pour seule conséquence d'établir que l'employeur est en règle vis-à-vis des organismes sociaux, mais nullement qu'il s'est effectivement acquitté des salaires ayant servi de base à ces déclarations et règlements ; qu'en se fondant sur de tels éléments pour estimer rapportée la preuve de ce que l'employeur se serait acquitté des salaires entre les mains de Monsieur X..., la Cour d'appel a de plus fort privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 3243-3 du code du travail et 1315 du code civil ;
ALORS 4°) QUE : Monsieur X... versait aux débats ses avis d'imposition et ses déclarations de revenus pour les années 2001 à 2004 (pièces n° 41 à 47) d'où il résultait qu'il n'avait perçu aucun salaire au cours de ces années ; qu'en s'abstenant d'examiner ces éléments de preuve déterminants, la Cour d'appel a derechef privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 3243-3 du code du travail et 1315 du code civil ;
ALORS 5°) QUE : pour justifier de ce qu'il n'avait pas formulé de réclamation relativement à ses salaires durant plusieurs années, l'exposant faisait valoir qu'il était nourri, logé, blanchi par son employeur de sorte qu'il n'éprouvait aucun préjudice immédiat du fait de l'absence de paiement de ses salaires (conclusions, p. 3, al. 9) ; qu'en se déterminant, pour débouter Monsieur X... de sa demande de rappel de salaires, par la considération selon laquelle « des salariés ayant travaillé avec Monsieur X... et de nombreux clients attestent que ce salarié ne s'est jamais plaint du fait qu'il ne percevait pas son salaire » (arrêt, p. 4, al. 3), sans s'expliquer sur ce chef péremptoire de ses conclusions, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 2277 du code civil et L. 3245-1 (anc. L. 143-14) du code du travail ;
ALORS 6°) ET SUBSIDIAIREMENT QUE : celui qui s'est mal acquitté d'une dette, notamment sans pouvoir en apporter la preuve, s'oblige à la payer à nouveau ; que l'employeur qui verse à son salarié des salaires en espèces sans exiger en contrepartie la remise d'un reçu correspondant à ces versements, et qui se prive ainsi de la possibilité de rapporter la preuve qu'il s'est acquitté du montant des salaires entre les mains dudit salarié, s'expose à devoir les payer une seconde fois ; qu'en refusant à tout le moins de faire application de ce principe, la Cour d'appel a méconnu l'adage « qui paie mal, paie deux fois » et violé les articles L. 3243-3 du code du travail et 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-42794
Date de la décision : 16/09/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 08 avril 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 sep. 2009, pourvoi n°08-42794


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Monod et Colin, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.42794
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