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10/09/2009 | FRANCE | N°08-15510

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 septembre 2009, 08-15510


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 6 mars 2008), que les conséquences d'un accident mortel du travail s'étant produit le 21 mai 1997 au sein de la société Niro Kestner dans un de ses établissements en Allemagne, ont été imputées par la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-France (la caisse) sur le compte employeur de la société GEA Process Engineering (la société GEA

Process) au titre de la fixation du taux de cotisations pour les accidents du...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 6 mars 2008), que les conséquences d'un accident mortel du travail s'étant produit le 21 mai 1997 au sein de la société Niro Kestner dans un de ses établissements en Allemagne, ont été imputées par la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile-de-France (la caisse) sur le compte employeur de la société GEA Process Engineering (la société GEA Process) au titre de la fixation du taux de cotisations pour les accidents du travail, cette société étant considérée comme ayant repris à sa charge, à la suite de fusions et de scissions, les actifs, la production et une majorité des personnels de la sociétéNiro Kestner ; que la société GEA Process contestant qu'il puisse y avoir à son encontre continuité du risque, et faisant notamment valoir que l'activité en cause avait été reprise par la société GEA Kestner, a saisi la juridiction du contentieux de la tarification de l'assurance des accidents du travail ; que la société GEA Kestner est intervenue à l'instance pour dire qu'elle acceptait d'être considérée comme assurant la continuité du risque ; que son intervention a été jugée irrecevable ;

Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt d'avoir dit fondé le recours de la société GEA Process et d'avoir fait droit à ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en cas de scission d'une société, le risque accident du travail est transmis à celle des sociétés qui poursuit l'activité principale de la société scindée, avec les mêmes moyens de production et au moins la moitié du personnel ; qu'en l'espèce, la société Niro France, devenue GEA Process Engineering, provenant de la scission de la société Niro Kestner, a poursuivi l'activité principale de la société Niro Kestner, dont elle a repris la majorité du personnel ; qu'en jugeant néanmoins que le taux de cotisation de la société GEA Process Engineering devait se calculer sans tenir compte des éléments statistiques antérieurs de la société Niro Kestner dont elle était la repreneuse principale, la CNITAAT a violé l'article D. 242- 6-13 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que les trois critères posés par l'article D. 242-6-13 du code de la sécurité sociale activité similaire, mêmes moyens de production et reprise de la moitié au moins du personnel sont cumulatifs, de sorte que la CNITAAT devait examiner la situation de la société GEA Kestner au regard de ces trois critères ; qu'en considérant que la société GEA Kestner n'était pas un établissement nouvellement créé et que le risque lié à l'activité cédée à la société GEA Kestner ne pouvait être supporté par la société GEA Process Engineering mais devait l'être par la société GEA Kestner, sans rechercher si cette dernière avait repris la moitié au moins des salariés de la société Niro Kestner, la CNITAAT a privé sa décision de base légale au regard de l'article D. 242-6-13 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que si aux termes du 3e alinéa de l'article D 242 6 3 du code de la sécurité sociale, ne peut être considéré comme un établissement nouvellement créé, celui issu d'un précédent établissement dans lequel a été exercée une activité similaire, avec les mêmes moyens de production et ayant repris au moins la moitié du personnel, cette disposition, destinée à empêcher qu'aucune structure ne reprenne le risque, n'interdit pas au juge de la tarification, en présence d'une scission d'entreprise, de rechercher par une appréciation souveraine des faits et des éléments de preuve, la société ou l'établissement issus de cette scission ayant repris le risque qui avait été aggravé par l'accident du travail ou la maladie professionnelle ;

Et attendu qu'ayant constaté qu'en l'espèce le risque avait été repris par la société GEA Kestner qui était de surcroît intervenue pour le reconnaître, la cour nationale en a exactement déduit que l'aggravation du risque ne pouvait pas être mise à la charge de la société GEA Process ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile de France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile de France, la condamne la caisse à payer aux sociétés GEA Process Engineering et GEA Kestner, la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat au Conseils, pour la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile de France

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevable le recours formé par la société GEA PROCESS ENGINEERING contre la décision de la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile de France, en date du 17 janvier 2005, lui notifiant son taux de cotisation pour l'année 2005 et, le déclarant bien fondé, d'AVOIR ordonné à la caisse régionale d'assurance maladie de procéder au retrait du compte employeur de la société GEA PROCESS ENGINEERING des dépenses consécutives à l'accident du travail mortel de monsieur Y... et de réviser le taux de cotisation 2005 en conséquence ;

AUX MOTIFS QUE des déclarations des parties, du projet de contrat de travail établi entre la société GEA WIEGAND KESTNER et monsieur Y... le 29 septembre 1992, de l'extrait k-bis de la société GEA WIEGAND KESTNER, du registre du personnel de la société KESTNER avant la fusion de 1996, de l'acte de scission de la société NIRO KESTNER, des extraits k-bis des sociétés GEA PROCESS ENGINEERING (la société requérante) et GEA KESTNER SAS, des bulletins de paie de monsieur Y... et de sa déclaration d'accident de travail établie le 22 mai 1997, il ressort :

- qu'en 1992, monsieur Y... a été embauché par la société GEA WIEGAND KESTNER, dont l'activité consistait en la fabrication et le commerce du matériel utilisé par les industries chimiques et des appareils d'évaporation,

- que le 30 décembre 1996, la société GEA WIEGAND KESTNER et la société NIRO France ont fusionné pour donner naissance à une nouvelle entité, la société NIRO KESTNER, qui a repris tous les éléments d'actifs compris dans les branches d'activité des deux entreprises fusionnées ainsi que le contrat de travail de monsieur Y...,

- que le 21 mai 1997, monsieur Y... alors employé par la société NIRO KESTNER a été victime d'un accident du travail,

- qu'en novembre 1998, la société NIRO KESTNER a été scindée en 4 entités juridiquement distinctes :

- la société NIRO France, chargée de l'exploitation des procédés NIRO,

- la société GEA JET PUMPS, spécialisée dans le transport, le mélange et la compression de fluide,
- la société GEA WIEGAND France, chargée de l'exploitation des procédés WIEGAND,

- la société GEA KESTNER, spécialisée dans l'exploitation de procédés KESTNER - qu'il n'est pas contesté que la société GEA KESTNER, issue de la scission de 1998, a repris l'activité et les moyens de production liés à l'exploitation des procédés KESTNER, activité à l'occasion de laquelle monsieur Y... est décédé le 21 mai 1997 ainsi que l'ensemble du personnel embauché par la société GEA WIEGAND KESTNER qui était toujours présent à la date de la scission,

- que la société NIRO France est devenue la société GEA PROCESS ENGINEERING.

La société requérante fait valoir que la société GEA KESTNER n'a nullement constitué depuis sa création un établissement nouvellement créé au sens des dispositions de l'article D.241-6-13 du code de la sécurité sociale aux motifs qu'elle exerce uniquement avec les mêmes moyens de production et le même personnel une partie de l'activité de la société NIRO KESTNER, qu'assurait plus antérieurement la société GEA WIEGAND KESTNER ; qu'au vu du rapport de l'enquête effectuée le 23 juin 1999 par un inspecteur de tarification de la Caisse régionale d'assurance maladie d'Ile de France (fourni par la partie défenderesse) la caisse considère l'établissement de NIRO France, devenu GEA PROCESS ENGINEERING, comme le successeur de la société NIRO KESTNER car il a repris le 30 avril 1999, avec effet rétroactif au 1er janvier 1999, une partie des activités et 80 salariés de la société NIRO KESTNER ; qu'en effet, en application des dispositions de l'article D.242-6-13 alinéa 3, du code de la sécurité sociale, « ne peut être considéré comme un établissement nouvellement crée celui issu d'un précédent établissement dans lequel a été exercée une activité similaire, avec les mêmes moyens de production et ayant repris au moins la moitié du personnel ».

Toutefois en cas de scission d'un établissement en plusieurs entités distinctes, il n'est nullement indiqué que les établissements qui ne sont pas considérés comme successeurs de l'activité principale doivent être automatiquement considérés comme nouvellement créés ; que par conséquent, si l'application dudit article interdit à l'établissement de GEA PROCESS ENGINEERING d'être qualifié d'établissement nouveau, cette dernière qualité ne doit pas, de ce fait, être automatiquement attribuée aux établissements des autres sociétés issues de la scission ; que pour justifier l'imputation de la totalité des dépenses à l'une des sociétés issues de la scission, et la qualifier de « repreneuse » par opposition aux sociétés exploitant des « établissements nouveaux », la caisse se fonde sur une notion d'activité principale poursuivie par ladite société repreneuse. Or la notion d'activité principale sur laquelle s'appuie le Caisse régionale d'assurance maladie est issue des dispositions de l'arrêté du 17 octobre 1995, lequel concerne exclusivement le classement des entreprises dans les différentes catégories de code risque, et ne saurait dès lors concerner les dépenses prises en charge au titre des accidents de travail – maladies professionnelles imputées aux entreprises soumises à la tarification mixte ou réelle ; qu'en effet dans l'article D.242-6-13 susvisé, la reprise d'une activité similaire ne signifie pas la reprise de l'activité principale et peut ainsi concerner une des activités secondaires de l'établissement objet de la scission ; qu'enfin il n'est pas contesté, suite à la scission survenue en 1998, que la société GEA KESTNER a repris l'activité liée à l'exploitation des procédés KESTNER, incluant les moyens qui y sont attachés, ainsi que l'ensemble du personnel, anciennement employé par la société GEA WIEGAND KESTNER et encore présent au moment de la scission ; que par une application combinée des dispositions de articles D.242-6-1 et D.242-6-3 du code de la sécurité sociale, le taux de cotisation fondé sur la notion d'activité, est déterminé par établissement et « calculé d'après la valeur du risque propre à l'établissement » ; que dès lors la valeur du risque propre à l'établissement GEA PROCESS ENGINEERING ne saurait inclure le risque lié à une activité cédée depuis 1998 à la société GEA KESTNER ; que monsieur Y... était initialement employé par la société GEA WIENGAND KESTNER, puis par NIRO KESTNER, laquelle a transféré tous les éléments liés à l'exploitation des procédés KESTNER à la société GEA KESTNER ; qu'en application des dispositions sus visées, les dépenses relatives à l'accident du travail mortel dont il a été victime ne peuvent figurer sur le compte employeur de la société GEA PROCESS ENGINEERING ; que par conséquent, il y a lieu de déclarer le recours de la société GEA PROCESS ENGINEERING et de faire procéder au retrait du compte employeur de la requérante des frais relatifs à l'accident du travail de monsieur Y... ;

1. - ALORS QU'en cas de scission d'une société, le risque accident du travail est transmis à celle des sociétés qui poursuit l'activité principale de la société scindée, avec les mêmes moyens de production et au moins la moitié du personnel ; qu'en l'espèce, la société NIRO France, devenue GEA PROCESS ENGINEERING, provenant de la scission de la société NIRO KESTNER, a poursuivi l'activité principale de la société NIRO KESTNER, dont elle a repris la majorité du personnel ; qu'en jugeant néanmoins que le taux de cotisation de la Société GEA PROCESS ENGINEERING devait se calculer sans tenir compte des éléments statistiques antérieurs de la Société NIRO KESTNER dont elle était la repreneuse principale, la CNITAAT a violé l'article D.242-6-13 du code de la sécurité sociale ;

2. – ALORS en tout état de cause QUE les trois critères posés par l'article D.242-6-13 du code de la sécurité sociale – activité similaire, mêmes moyens de production et reprise de la moitié au moins du personnel - sont cumulatifs, de sorte que la CNITAAT devait examiner la situation de la société GEA KESTNER au regard de ces trois critères ; qu'en considérant que la société GEA KESTNER n'était pas un établissement nouvellement créé et que le risque lié à l'activité cédée à la société GEA KESTNER ne pouvait être supporté par la société GEA PROCESS ENGINEERING mais devait l'être par la société GEA KESTNER, sans rechercher si cette dernière avait repris la moitié au moins des salariés de la société NIRO KESTNER, la CNITAAT a privé sa décision de base légale au regard de l'article D.242-6-13 du code de la sécurité sociale ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 08-15510
Date de la décision : 10/09/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Cotisations - Taux - Fixation - Cadre de la fixation - Etablissement - Scission - Reprise du risque - Appréciation souveraine - Portée

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Cotisations - Taux - Fixation - Cadre de la fixation - Etablissement - Article D. 242-6-13, alinéa 3, du code de la sécurité sociale - Défaut d'influence - Scission - Reprise du risque par la société ou l'établissement issus de cette scission - Appréciation souveraine

Si aux termes du 3ème alinéa de l'article D. 242-6-13 du code de la sécurité sociale, ne peut être considéré comme un établissement nouvellement créé, celui issu d'un précédent établissement dans lequel a été exercée une activité similaire, avec les mêmes moyens de production et ayant repris au moins la moitié du personnel, cette disposition, destinée à empêcher qu'aucune structure ne reprenne le risque, n'interdit pas au juge de la tarification, en présence d'une scission d'entreprise, de rechercher, par une appréciation souveraine des faits et des éléments de preuve, la société ou l'établissement issus de cette scission ayant repris le risque qui avait été aggravé par l'accident du travail ou la maladie professionnelle. La Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ayant constaté que le risque aggravé avait été repris par une société qui le reconnaissait, en a exactement déduit que l'aggravation du risque ne pouvait pas être mise à la charge de la société que désignait le 3ème alinéa de l'article D. 242-6-13 du code de la sécurité sociale


Références :

article D. 242-6-13 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour nationale de l'incapacité et de la tarification, 06 mars 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 sep. 2009, pourvoi n°08-15510, Bull. civ. 2009, II, n° 213
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, II, n° 213

Composition du Tribunal
Président : M. Gillet
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: M. Barthélemy
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.15510
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