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07/07/2009 | FRANCE | N°08-17404

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 juillet 2009, 08-17404


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 mai 2008), que par décision du 24 mai 2007, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (l'AMF) a retenu que la société Rhodia avait manqué aux obligations d'information du public et a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Rhodia fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours contre cette décision alors, selon le moyen, que la sanction de l'article L. 621 15 du

code monétaire et financier dans sa rédaction applicable à la cause ne peut être pr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 mai 2008), que par décision du 24 mai 2007, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (l'AMF) a retenu que la société Rhodia avait manqué aux obligations d'information du public et a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Rhodia fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours contre cette décision alors, selon le moyen, que la sanction de l'article L. 621 15 du code monétaire et financier dans sa rédaction applicable à la cause ne peut être prononcée qu'à l'auteur de pratiques qui ont pour effet de fausser le fonctionnement du marché, de procurer aux intéressés un avantage injustifié qu'ils n'auraient pas obtenu dans le cadre normal du marché, de porter atteinte à l'égalité d'information ou de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ou de faire bénéficier les émetteurs ou les investisseurs des agissements d'intermédiaires contraires à leurs obligations professionnelles ; que cet effet doit être réel et concret et ne peut être déduit de la seule insuffisance de l'information critiquée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si la chute sensible et régulière du cours du titre Rhodia qui cotait 8,98 euros à la fin de l'année 2001 et qui est passé à 2,92 euros le 19 décembre 2003, ne démontrait pas l'absence de confiance du marché et des investisseurs dans le titre Rhodia, quel que fût le contenu exact de la communication de la société, et n'était pas exclusive des effets exigés pour la mise en oeuvre d'une sanction à l'encontre de l'auteur d'une communication prétendument inexacte ou imprécise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 621 14 et L. 621 15 dans leur rédaction antérieure à la loi du 25 juillet 2005 ;

Mais attendu que l'arrêt relève, s'agissant de la situation de la société Chirex, qu'il importait pour le marché de connaître la valeur et les prévisions d'activité de cette société, intégrée dans les comptes consolidés de la société Rhodia, que celle ci a communiqué sur ce point une information inexacte et qu'elle soutient vainement qu'une telle communication n'a pu induire en erreur les investisseurs ; que l'arrêt relève encore, s'agissant de la comptabilisation des actifs d'impôts différés, que l'information ainsi communiquée n'était ni précise, ni complète ni sincère et qu'ayant eu pour effet de présenter une image fallacieuse de la situation de la société Rhodia, cette communication a nécessairement faussé le fonctionnement du marché et nui aux intérêts des investisseurs ; que l'arrêt relève enfin, s'agissant de l'information relative à l'endettement du groupe, que la communication de la société était affectée à cet égard d'une carence et qu'à la suite de celle ci, les investisseurs, dont les intérêts ont ainsi été lésés, n'ont eu qu'une vision incomplète de la situation financière et patrimoniale de la société ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations établissant que les manquements retenus avaient porté atteinte aux intérêts des investisseurs, la cour d'appel, qui n'avait pas à faire la recherche dès lors inopérante visée par le moyen, a légalement justifié sa décision ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société Rhodia fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1°/ que le manquement aux obligations d'information n'est constitué que si la personne qui a diffusé des informations inexactes, imprécises ou trompeuses savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient inexactes ou trompeuses ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si l'information échangée lors de la réunion du 16 octobre 2003 avec la société Astra Zeneca était suffisamment précise pour permettre à la société Rhodia de tirer dès le 30 octobre 2003, soit quinze jours plus tard, des conséquences décisives et chiffrées quant aux prévisions d'activité de la société Chirex, et si, à cette date, il lui aurait d'ores et déjà été possible de revoir le "business plan" qui a été corrigé trois mois plus tard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 632 1 du règlement de l'AMF ;

2°/ que la société Rhodia faisait valoir qu'elle avait effectivement révélé la dégradation de la relation avec Astra Zeneca à l'occasion de son communiqué du 23 décembre 2003 et que cette révélation n'a pas eu d'incidence à la baisse sur le marché du titre, lequel avait plutôt bien réagi à cette annonce, ce qui démontrait que l'information sur les hésitations et les retards d'Astra Zeneca n'était pas sensible pour le marché et que son omission lors de la communication antérieure du 30 octobre 2003 n'avait pas pu provoquer les effets exigés par l'article L. 621 14 du code monétaire et financier ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que la fragilité du plan d'affaires de la société Chirex, qui reposait essentiellement sur la réalisation de projets dont celui de la production d'une molécule entrant dans la composition d'un médicament pour la société Astra Zeneca, imposait que tout événement défavorable soit porté à la connaissance du public de manière exacte, précise et sincère, l'arrêt reproduit les termes du communiqué du 30 octobre 2003, relatif à la situation de l'ensemble réunissant les différentes activités pharmaceutiques de la société Rhodia dont la société Chirex, et relève que ce communiqué comportait une affirmation optimiste qu'aucune circonstance ne justifiait, alors au contraire qu'au plus tard au cours de la réunion qui s'était tenue le 16 octobre 2003 avec des représentants de la société Chirex, la société Astra Zeneca avait refusé de s'engager sur les volumes et demandé que les prix soient diminués de moitié par rapport à ceux pratiqués durant le pré lancement du médicament ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations desquelles elle a déduit que la société Rhodia avait communiqué délibérément, le 30 octobre 2003, une information inexacte quant aux prévisions d'activité de la société Chirex, la cour d'appel, qui n'avait pas à faire la recherche dès lors inopérante visée par la première branche, a légalement justifié sa décision ;
Et attendu, d'autre part, qu'en retenant que la société Rhodia soutenait vainement qu'une telle communication n'avait pu induire en erreur les investisseurs dès lors que si le communiqué du 30 octobre 2003 était globalement pessimiste comme les précédents, l'information en cause était le seul élément nouveau qu'il contenait et qu'étant favorable, il avait nécessairement pour effet de présenter comme moins imminente la menace de rupture des concours bancaires, la cour d'appel a répondu au moyen visé par la seconde branche ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société Rhodia fait encore le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1°/ que le manquement aux obligations d'information n'est constitué que si la personne qui a diffusé des informations inexactes, imprécises ou trompeuses savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient inexactes ou trompeuses ; que la seule constatation que la décision de maintenir des actifs d'impôts différés "n'était pas appropriée", ne caractérise pas la connaissance par la société Rhodia du caractère prétendument imprécis ou trompeur de l'information à la date où elle a été donnée ; qu'en effet, une erreur d'appréciation sur le maintien d'un tel actif n'emporte pas nécessairement la connaissance de ce que cet actif aurait dû à la date donnée être d'ores et déjà déprécié ; que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 632 1 du règlement de l'AMF ;

2°/ qu'en affirmant que la société Rhodia aurait dû savoir que l'information était erronée ou trompeuse, tout en relevant que les commissaires aux comptes avaient validé le maintien des actifs au bilan, la cour d'appel a violé le même texte ;

3°/ qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, également poursuivis pour ces manquements, les commissaires aux comptes n'ont pas été sanctionnés ; qu'il a été constaté qu'ils n'avaient manqué à aucune obligation de diligence, qu'ils n'ont jamais prétendu être trompés et que, selon la cour d'appel, ils avaient exprimé simplement une opinion "réservée" sur cette option ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'information diffusée le 30 juin 2003 ne pouvait être réputée fallacieuse, dès lors qu'elle ne l'était pas à l'égard des commissaires aux comptes, totalement absous de ce même chef, reproché à la société Rhodia ; qu'en affirmant que l'opinion des commissaires aux comptes "n'importait pas", sans s'expliquer sur les conséquences à tirer de leur mise hors de cause, et de leur intervention auprès de la société Rhodia, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale, au regard des articles L. 621 14 et L.. 621 15 du code monétaire et financier ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que le maintien des actifs d'impôts différés n'était pas approprié, de sorte que l'information communiquée sur les comptes semestriels au 30 juin 2003 n'était ni précise, ni complète, ni sincère, ce que la société Rhodia savait ou aurait dû savoir, peu important à cet égard l'opinion exprimée par les commissaires aux comptes, du reste plutôt réservée sur cette option ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur la connaissance effective, par la société Rhodia, du caractère inexact ou trompeur de l'information et n'avait pas à s'expliquer sur les circonstances invoquées par la troisième branche, lesquelles n'étaient pas de nature à influer sur le caractère fallacieux de l'information, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu, en second lieu, que la cour d'appel n'a pas dit que les commissaires aux comptes avaient validé le maintien des actifs au bilan ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa deuxième branche, est inopérant en sa première branche et n'est pas fondé en sa troisième branche ;

Et sur le quatrième moyen :

Attendu que la société Rhodia fait toujours le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1°/ que selon l'article 632 1 du règlement de l'AMF le manquement aux obligations d'information suppose la communication ou la diffusion délibérée d'informations qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications inexactes, imprécises ou trompeuses sur des instruments financiers émis par voie d'appel public à l'épargne au sens de l'article L. 411 1 du code monétaire et financier ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que la société Rhodia n'avait jamais dissimulé que les chiffres faisant l'objet de ses communiqués ne concernaient que l'endettement net à l'exclusion des engagements hors bilan, ce dont il résulte que l'information n'était ni inexacte, ni imprécise ni trompeuse, la cour d'appel a violé les articles 632 1 précité, L. 621 14 et L. 621 15 du code monétaire et financier ;

2°/ que lorsqu'une partie a la charge de la preuve, celle ci ne peut se déduire du silence opposé à sa demande par la partie adverse ; qu'en se fondant pour écarter toute portée à la diffusion de l'information sur l'endettement hors bilan de la société Rhodia sur son site Internet au moins à partir de 2002, sur le silence opposé par la société Rhodia aux allégations de l'AMF selon lesquelles les données figurant dans la présentation des comptes au 31 décembre 2002 ne permettraient pas de retrouver le chiffre de 1 076 millions d'euros avancé par la requérante elle même, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir retenu qu'une bonne et loyale information du marché requérait que les différentes composantes de la dette totale, laquelle inclut les engagements hors bilan, fussent portés à la connaissance du public dans des conditions permettant d'apprécier la situation financière et patrimoniale de la société, l'arrêt relève que la communication de la société Rhodia était à cet égard affectée d'une carence et retient qu'il n'importe pour la caractérisation du manquement que la société n'ait jamais dissimulé que les chiffres qu'elle communiquait ne concernaient que l'endettement net, dès lors que les investisseurs n'ont eu qu'une vision incomplète de la situation financière et patrimoniale de la société ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations desquelles il résulte que l'information communiquée était rendue trompeuse par son caractère incomplet, et abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche, la cour d'appel a retenu à bon droit que la société Rhodia avait enfreint les dispositions de l'article 632 1 du règlement général de l'AMF ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Rhodia aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer la somme de 2 500 euros à l'Autorité des marchés financiers ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par Mme le conseiller doyen faisant fonction de président en son audience publique du sept juillet deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Rhodia

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours formé par la société Rhodia contre la décision de la commission des sanctions de l'Autorité des Marchés Financiers du 24 mai 2007 qui a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 750.000 euros ;

Aux motifs que la société Rhodia a communiqué délibérément le 30 octobre 2003, une information inexacte quant aux prévisions d'activité de la société Chirex ; que c'est sans fondement qu'elle prétend qu'une telle communication n'a pas pu induire en erreur les investisseurs déjà avertis de sa situation passablement dégradée et du risque de rupture de ses concours bancaires, alors que si le communiqué du 30 octobre 2003 était globalement pessimiste comme les précédents l'information en cause était le seul élément nouveau qu'il contenait, et étant favorable, avait nécessairement pour effet de présenter comme moins imminente la menace de rupture des concours bancaires ; que l'information communiquée sur les comptes semestriels au 30 juin 2003 n'était en raison du maintien des actifs d'impôts différés, ni précise, ni complète, ni sincère ; qu'ayant eu pour effet de présenter une image fallacieuse de la situation de la société Rhodia, cette communication a nécessairement faussé le fonctionnement du marché et nui aux intérêts des investisseurs ; qu'en l'absence de communication sur l'endettement net, les investisseurs dont les intérêts ont été lésés n'ont eu qu'une vision incomplète de la situation financière et patrimoniale de la société ;

Alors que la sanction de l'article L 621-15 du Code monétaire et financier dans sa rédaction applicable à la cause ne peut être prononcée qu'à l'auteur de pratiques qui ont pour effet de fausser le fonctionnement du marché, de procurer aux intéressés un avantage injustifié qu'ils n'auraient pas obtenu dans le cadre normal du marché, de porter atteinte à l'égalité d'information ou de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ou de faire bénéficier les émetteurs ou les investisseurs des agissements d'intermédiaires contraires à leurs obligations professionnelles ; que cet effet doit être réel et concret, et ne peut être déduit de la seule insuffisance de l'information critiquée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si la chute sensible et régulière du cours du titre Rhodia qui cotait 8,98 euros à la fin de l'année 2001 et qui est passé à 2,92 euros le 19 décembre 2003, ne démontrait pas l'absence de confiance du marché et des investisseurs dans le titre Rhodia, quel que fût le contenu exact de la communication de la société, et n'était pas exclusive des effets exigés pour la mise en oeuvre d'une sanction à l'encontre de l'auteur d'une communication prétendument inexacte ou imprécise, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 621-14 et L 621-15 dans leur rédaction antérieure à la loi du 25 juillet 2005.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours formé par la société Rhodia contre la décision de la commission des sanctions de l'Autorité des Marchés Financiers du 24 mai 2007 qui a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 750.000 euros ;

Aux motifs que, s'agissant de la communication la société Rhodia, le 30 octobre 2003, sur l'évolution au second semestre 2003, du chiffre d'affaires de sa filiale, la société Chirex et ses conséquences, que Rhodia a su dès le 16 octobre 2003 à la suite d'une réunion entre les représentants de la société Chirex et ceux de la société Astra Zeneca, que cette dernière avait annoncé un nouveau report du lancement d'un de ses médicaments (le Crestor) de sorte que la réalisation du plan d'affaires de Chirex qui reposait essentiellement sur certains projets liés à ce médicament, connaîtrait un décalage d'un an dans ses prévisions de chiffres d'affaires ; qu'il importait pour le marché de connaître la valeur de la société Chirex, intégrée dans les comptes consolidés de Rhodia et partant ses prévisions d'activité ; qu'il résulte de l'enquête que le plan d'affaires de la société Chirex avait dû être revu au moment de l'arrêté de comptes du 31 décembre 2002 eu égard à la dégradation de son activité due à des retards d'homologation par la Food and Drug Administration (FDA) aux Etats Unis ; que le nouveau plan reposait essentiellement sur la réalisation de projets dont celui de la production d'une molécule (BEM) entrant dans la composition du Crestor pour Astra Zeneca ; que si le nouveau plan a été jugé « plausible et réalisable » par le cabinet de conseil en stratégie à qui il a été soumis, c'était sous réserve que ne se produisent pas de « mauvaises surprises supplémentaires » et que le nouveau « management » se montre compétent ; qu'ainsi, la fragilité du plan imposait que la survenance de tout événement défavorable soit portée à la connaissance du public de façon exacte, précise et sincère ; qu'or, si les reports d'homologation par la FDA avaient déjà été annoncés en 2002, le communiqué du 30 octobre 2003 relatif à la situation de « Rhodia Pharma Solutions », appellation du nouvel ensemble réunissant les différentes activités pharmaceutiques de Rhodia dont Chirex, était formulé ainsi : « Rhodia Pharma Solutions a souffert, comme prévu l'année dernière, des effets négatifs des reports d'homologation de la FDA (Food et Drug Administration). Toutefois, la nouvelle organisation de l'entreprise, mise en place au début de cette année, a permis d'élargir sa base clients et permet d'envisager de nouveaux potentiels de développements significatifs à l'horizon 2004/2005 sur les segments liés au Custom Manufacturing » ; qu'il est constant cependant qu'aucune circonstance ne justifiait cette affirmation optimiste alors au contraire, qu'il résulte du dossier qu'au plus tard au cours de la réunion qui s'était tenue le 16 octobre 2003 avec des représentants de la société Chirex, la société Astra Zeneca avait refusé de s'engager sur les volumes pour la molécule BEM et demandé que les prix soient diminués de moitié par rapport aux prix pratiqués durant le pré-lancement du médicament ; que ce n'est que le 31 décembre 2003 que la société Rhodia a exclu du nouveau « business plan » les ventes attendues de ce produit, M. X... ayant du reste indiqué aux enquêteurs que le « business plan a de nouveau été décalé d'un an du fait du nouveau report annoncé par Astra Zeneca fin octobre » qu'enfin dans son rapport annuel pour 2003, la société Rhodia a justifié la dévalorisation de l'écart d'acquisition de la société Chirex passé de 354 millions d'euros en 2002 à 74 millions en 2003, non seulement par « le rebond plus lent que prévu pour l'ensemble de l'industrie pharmaceutique » mais aussi par « l'impossibilité de signer de façon certaine et rapide un contrat clé pour le développement de l'activité », ce qui atteste de l'importance de ce contrat pour la société ; qu'en cet état, c'est en vain que la société Rhodia qui a communiqué délibérément le 30 octobre 2003 une information inexacte quant aux prévisions d'activité de la société de la société Chirex, conteste le manquement qui lui est imputé ; que c'est sans fondement également qu'elle prétend que cette communication n'a pas pu induire en erreur les investisseurs déjà avertis de sa situation passablement dégradée et du risque de rupture de ses concours bancaires, alors que si le communiqué du 30 octobre 2003 était globalement pessimiste comme les précédents, l'information en cause était le seul élément nouveau qu'il contenait, et étant favorable, avait nécessairement pour effet de présenter comme moins imminente la menace de rupture des concours bancaires ;

Alors, d'une part, que le manquement aux obligations d'information n'est constitué que si la personne qui a diffusé des informations inexactes, imprécises ou trompeuses savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient inexactes ou trompeuses ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si l'information échangée lors de la réunion du 16 octobre 2003 avec la société Astra Zeneca était suffisamment précise pour permettre à la société Rhodia de tirer dès le 30 octobre 2003, soit 15 jours plus tard, des conséquences décisives et chiffrées quant aux prévisions d'activité de la société Chirex, et si, à cette date, il lui aurait d'ores et déjà été possible de revoir le « business plan » qui a été corrigé 3 mois plus tard, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 632-1 du règlement de l'AMF ;

Alors d'autre part, que la société Rhodia faisait valoir qu'elle avait effectivement révélé la dégradation de la relation avec Astra Zeneca à l'occasion de son communiqué du 23 décembre 2003 et que cette révélation n'a pas eu d'incidence à la baisse sur le marché du titre, lequel avait plutôt bien réagi à cette annonce, ce qui démontrait que l'information sur les hésitations et les retards d'Astra Zeneca n'était pas sensible pour le marché et que son omission lors de la communication antérieure du 30 octobre 2003 n'avait pas pu provoquer les effets exigés par l'article L 621-14 du Code monétaire et financier ; qu'en ne répondant pas à ce moyen déterminant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours formé par la société Rhodia contre la décision de la commission des sanctions de l'Autorité des Marchés Financiers du 24 mai 2007 qui a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 750.000 euros ;

Aux motifs que, s'agissant des informations relatives aux actifs d'impôts différés, la Société Rhodia n'a pas neutralisé ses actifs d'impôts dans ses comptes au 30 juin 2003 alors qu'ayant dégagé des déficits au titre de ses comptes consolidés en France en 2001 et 2002, elle était présumée ne pas pouvoir récupérer les actifs d'impôts différés grâce à un bénéfice imposable ; qu'elle ne démontre pas que ces pertes résultaient de circonstances exceptionnelles qui ne devraient pas se renouveler dans un avenir prévisible ou que des bénéfices exceptionnels étaient attendus ; que le maintien des actifs d'impôts différés au 30 juin 2003 n'était pas approprié de sorte que l'information communiquée sur les comptes semestriels au 30 juin 2003 n'était ni précise, ni complète, ni sincère ce que tant la société Rhodia que son dirigeant auraient dû savoir, peu important à cet égard, l'opinion exprimée par les commissaires aux comptes, au reste plutôt réservée sur cette option ; qu'ayant eu pour effet de présenter une image fallacieuse de la situation de la société Rhodia, cette communication a nécessairement faussé le fonctionnement du marché et nui aux intérêts des investisseurs ;

Alors, d'une part, que le manquement aux obligations d'information n'est constitué que si la personne qui a diffusé des informations inexactes, imprécises ou trompeuses savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient inexactes ou trompeuses ; que la seule constatation que la décision de maintenir des actifs d'impôts différés « n'était pas appropriée », ne caractérise pas la connaissance par la société Rhodia du caractère prétendument imprécis ou trompeur de l'information à la date où elle a été donnée ; qu'en effet, une erreur d'appréciation sur le maintien d'un tel actif n'emporte pas nécessairement la connaissance de ce que cet actif aurait dû à la date donnée être d'ores et déjà déprécié ; que la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 632-1 du règlement de l'AMF ;

Alors, d'autre part, qu'en affirmant que la société Rhodia aurait dû savoir que l'information était erronée ou trompeuse, tout en relevant que les commissaires aux comptes avaient validé le maintien des actifs au bilan, la Cour d'appel a violé le même texte ;

Alors, enfin, qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, également poursuivis pour ces manquements, les commissaires aux comptes n'ont pas été sanctionnés , qu'il a été constaté qu'ils n'avaient manqué à aucune obligation de diligence, qu'ils n'ont jamais prétendu être trompés et que, selon la Cour d'appel, ils avaient exprimé simplement une opinion « réservée » sur cette option ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'information diffusée le 30 juin 2003 ne pouvait être réputée fallacieuse, dès lors qu'elle ne l'était pas à l'égard des commissaires aux comptes, totalement absous de ce même chef, reproché à la société Rhodia ; qu'en affirmant que l'opinion des commissaires aux comptes « n'importait pas », sans s'expliquer sur les conséquences à tirer de leur mise hors de cause, et de leur intervention auprès de la société Rhodia, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale, au regard des articles L. 612-14 et L. 621-15 du Code monétaire et financier ;

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours formé par la société Rhodia contre la décision de la commission des sanctions de l'Autorité des Marchés Financiers du 24 mai 2007 qui a prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 750.000 euros ;

Aux motifs que, s'agissant de la communication en 2001, 2002, 2003, à propos de la dette nette totale de la société Rhodia, faute de faire état des engagements hors bilan significatifs tant dans les communiqués de la société que dans les documents de référence, la société Rhodia a eu recours à des opérations financières et comptables licites permettant de réduire l'endettement financier, tout en entraînant corrélativement une augmentation des engagements inscrits hors bilan ; que c'est à juste titre que la décision retient qu'une bonne et loyale information du marché requérait que les différents composants de la dette totale laquelle inclut les éléments hors bilan fussent portés à la connaissance du public dans des conditions permettant d'apprécier, dans sa continuité, la situation financière et patrimoniale de la société ; qu'aucun des communiqués publiés en 2001, 2002 et 2003 ne fait état de la dette nette totale ; que de même les rapports annuels, s'ils mentionnent l'endettement financier net à la clôture, ne chiffrent pas la dette globale ; qu'il ne peut être soutenu que cette donnée pouvait être reconstituée à partir des informations figurant en annexe, d'une part parce que les informations étant dispersées ne sont pas aisément accessibles, et d'autre part parce qu'elles ne permettent qu'une reconstitution approximative des engagements hors bilan ; que ces engagements hors bilan étaient une composante significative de la dette globale de Rhodia ; que cette carence dans la communication ne pouvait être compensée par des présentations trimestrielles destinées à des analystes et journalistes spécialisés, auraient-elles été mises en ligne sur son site Internet, lesquelles en tout état de cause ne sont invoquées qu'à partir de 2002 et ce d'autant que l'AMF objecte sans être contredite, que les données figurant dans la présentation des comptes au 31 décembre 2002 ne permettent pas de retrouver le chiffre de 1.076 millions d'euros avancé par la requérante elle-même ; qu'il n'importe que la société Rhodia n'ait jamais dissimulé que les chiffres communiqués ne concernaient que l'endettement net dès lors que les investisseurs dont les intérêts ont été lésés n'ont eu qu'une vision incomplète de la situation financière et patrimoniale de la société ce que tant son dirigeant que la société savaient ou auraient dû savoir ;

Alors d'une part, que selon l'article 632-1 du règlement de l'AMF le manquement aux obligations d'information suppose la communication ou la diffusion délibérée d'informations qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications inexactes, imprécises ou trompeuses sur des instruments financiers émis par voie d'appel public à l'épargne au sens de l'article L 411-1 du Code monétaire et financier ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que la société Rhodia n'avait jamais dissimulé que les chiffres faisant l'objet de ses communiqués ne concernaient que l'endettement net à l'exclusion des engagements hors bilan, ce dont il résulte que l'information n'était ni inexacte, ni imprécise ni trompeuse, la Cour d'appel a violé les articles 632-1 précité, L 621-14 et L 621-15 du Code monétaire et financier ;

Alors d'autre part, que lorsqu'une partie a la charge de la preuve, celle-ci ne peut se déduire du silence opposé à sa demande par la partie adverse ; qu'en se fondant pour écarter toute portée à la diffusion de l'information sur l'endettement hors bilan de la société Rhodia sur son site Internet au moins à partir de 2002, sur le silence opposé par la société Rhodia aux allégations de l'AMF selon lesquelles les données figurant dans la présentation des comptes au 31 décembre 2002 ne permettraient pas de retrouver le chiffre de 1.076 millions d'euros avancé par la requérante elle-même, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-17404
Date de la décision : 07/07/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 jui. 2009, pourvoi n°08-17404


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Vincent et Ohl, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.17404
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