LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970, ensemble l'article 1147 du code civil ;
Attendu que, lorsque le mandant a donné à un mandataire le mandat non exclusif de rechercher un bien, il n'est tenu de payer une rémunération qu'à l'agent immobilier par l'entremise duquel l'opération a été effectivement conclue, au sens de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970, et cela, même si le bien lui avait été précédemment présenté par le mandataire initial, sauf à ce dernier à prétendre à l'attribution de dommages-intérêts en prouvant une faute du mandant qui, par abus de sa part et compte tenu des diligences accomplies, l'aurait privé de la réalisation de l'acquisition ; Attendu que M. X... a, le 14 janvier 2004, confié à la société Cabinet Hermès (le Cabinet Hermès) un mandat non exclusif de recherche de fonds de commerce, d'une durée de douze mois ; que, le 23 septembre 2004, M. X... a signé, sans l'intervention de cet agent immobilier, une promesse synallagmatique de vente portant sur un fonds de commerce que celui-ci lui avait présenté ; que le cabinet Hermès l'a fait assigner en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que, pour condamner M. X... à payer au cabinet Hermès une indemnité, l'arrêt attaqué, après avoir constaté que cet agent immobilier lui avait fait visiter le fonds de commerce exploité par la société La Rotonde, retient, d'abord, qu'en concluant soit directement, soit par l'intermédiaire d'une autre agence immobilière, l'achat du fonds de commerce de cette société alors que le mandat était encore en vigueur, M. X... a failli à son engagement et volontairement privé le cabinet Hermès de la réalisation de la vente et de la perception de la rémunération contractuellement fixée, ensuite, que le mandataire exécutait ses obligations puisqu'il justifie avoir proposé plusieurs fonds de commerce en rapport avec la demande formulée dans le mandat du 14 janvier 2004 au cours des deux premiers trimestres de l'année 2004 ;
Qu'en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser l'abus qu'aurait commis M. X... et les diligences qu'aurait accomplies la société Cabinet Hermès pour parvenir à la vente du fonds de commerce en cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur ces autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Cabinet Hermès aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur Laurent X... à payer à la société CABINET HERMES la somme de 18.000 à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QU'après avoir donné un mandat de rechercher au cabinet HERMES pour une durée de douze mois, Monsieur X... en signant le 12 janvier 2004, un bon de visite comportant une liste d'adresse dont celle de la SARL « LA ROTONDE » s'est engagé à ne traiter l'achat des affaires indiquées que par l'intermédiaire du CABINET HERMES ; qu'il a d'ailleurs chargé ce cabinet de transmettre le 27 janvier 2004 son offre d'acquisition à la Sarl « LA ROTONDE » ; que la caducité de cette offre, finalement non acceptée, avant le terme fixé, n'a pas modifié les obligations respectives des parties nées du mandat ; que dans ces conditions en concluant ensuite soit directement, soit par l'intermédiaire du CABINET EOS CONSEIL comme il le prétend, l'achat du fonds de commerce de la société « LA ROTONDE » en septembre 2004, alors que le mandat était encore en vigueur, Monsieur X... a failli à son engagement et a volontairement privé le CABINET HERMES de la réalisation de la vente et de la perception de la rémunération contractuellement fixée ; qu'en effet le mandataire exécutait ses obligations puisqu'il justifie avoir proposé plusieurs fonds de commerce en rapport avec la demande formulée dans le mandat du 1er (lire 14) janvier 2004 au cours des deux premiers trimestres de l'année 2004 ; que le tribunal a dit à bon droit que Monsieur X... avait commis une faute préjudiciable au CABINET HERMES ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en élevant toutefois les dommages-intérêts à la somme de 18.000 euros compte tenu du montant de la transaction et du pourcentage de rémunération initialement fixée dont le mandataire a été abusivement privé » ;
ALORS QUE D'UNE PART, après avoir constaté que « Monsieur Laurent X... a le 14 janvier 2004 donné au cabinet HERMES un mandat de recherche » (p. 2 al. 1er de la motivation), la Cour d'appel ne pouvait énoncer « qu'après avoir donné un mandat de recherche (...), Monsieur X... en signant le 12 janvier 2004 un bon de visite… » sans se contredire en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE D'AUTRE PART en fondant sa décision sur l'engagement conclu dans le bon de visite, quand l'agent ne peut demander ou recevoir, directement ou indirectement, aucune autre somme, à titre de rémunération ou de réparation, que celle dont les conditions sont déterminées par le mandat, la Cour d'appel a violé les articles 1 et 6 de la loi du 2 janvier 1970 ;
ALORS QU'EN OUTRE si le mandat non exclusif de recherche d'un bien à acheter interdit au mandant d'adresser directement une offre à un vendeur présenté par l'agent, il ne lui interdit pas, après qu'une offre formulée par l'intermédiaire de cet agent eût été refusée, de traiter avec le même vendeur à des conditions différentes proposées par un autre agent investi d'un mandat par le vendeur ; qu'en déclarant Monsieur X... fautif du seul fait qu'il avait, huit mois après le refus de son offre formulée par l'entremise du Cabinet HERMES, traité avec le même vendeur, en refusant de rechercher les conditions de l'acquisition, réalisée différemment sur proposition d'un autre agent mandaté par le vendeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1er et suivants de la loi du 2 janvier 1970 et 1147 du Code civil ;
ALORS QU'ENFIN le mandant non exclusif qui traite par l'intermédiaire d'un autre que le mandataire ne peut être condamné à des dommages et intérêts qu'en cas d'abus de sa part et compte tenu des diligences accomplies par le mandataire ; que Monsieur X... faisait valoir que le cabinet HERMES n'avait effectué « aucune démarche en vue de rapprocher le vendeur et l'acheteur » et qu'ainsi son inertie justifiait qu'après le rejet de l'offre présentée par son entremise, lui-même ait pu sans faute accepter la proposition conforme à ses intérêts effectuée pour le même vendeur par un autre agent ; qu'en condamnant Monsieur X... sans caractériser ni l'abus de sa part ni les diligences qu'aurait accomplies le cabinet HERMES, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil et 1er et suivants de la loi du 2 janvier 1970.