LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que le 9 février 1999 la société Covefi a consenti à M. et Mme X... un crédit de 20 000 francs utilisable par fractions et remboursable par mensualités de 489,80 francs chacune ; qu'à défaut de paiement une ordonnance d'injonction de payer a été rendue le 10 décembre 2001 à l'encontre des emprunteurs et signifiée le 29 janvier 2002 ; que sur opposition de Mme Y... divorcée X..., les époux X... ont été condamnés à paiement et la société Covefi à des dommages-intérêts pour non-respect de son obligation de conseil ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Colmar, 21 mai 2007), d'avoir condamné Mme Y... solidairement avec M. X... à payer à la SA Covefi les sommes de 2 210,90 euros avec les intérêts au taux contractuel de 11,16 % à compter du 28 février 2002 sur la somme de 1 609,28 euros et 128,74 euros avec les intérêts au taux légal à compter du jugement, alors, que les actions en paiement engagées devant le tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent l'être dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion ; que la fin de non-recevoir tirée de la forclusion édictée par ce texte doit être relevée d'office par le juge, au besoin après avoir suscité les observations des parties ; qu'il en résulte qu'en se bornant, pour condamner Mme Y..., à relever que la créance de la SA Covefi s'élève aux sommes de 2 210,96 euros représentant les mensualités impayées ainsi que le capital restant du et de 128,74 euros au titre de la pénalité conventionnelle de 8 %, sans constater le moment à partir duquel les échéances ont été impayées et le sont demeurées, ne permettant pas de s'assurer que l'action de la société Covefi a bien été engagée avant l'expiration du délai de forclusion de deux ans prévu à l'article L. 311-37 du code de la consommation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé, ensemble l'article 125 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a relevé que les mensualités du prêt avaient été honorées jusqu'au mois d'octobre 2000 et que le jugement déféré avait été rendu le 24 juillet 2002, a légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen du pourvoi principal :
Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel d'avoir condamné solidairement Mme Y... avec M. X..., alors, qu'aux termes de l'article 220, alinéas 1er et 3, du code civil, toute dette contractée par l'un des époux pour l'entretien du ménage oblige l'autre solidairement, mais la solidarité n'a pas lieu pour les emprunts qui n'auraient pas été conclus du consentement des deux époux à moins qu'ils ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante ; qu'il s'ensuit qu'en se bornant, pour condamner Mme Y..., à relever que la somme de 20 000 francs empruntée constitue, eu égard aux ressources mensuelles du couple (12 000 francs) "une somme modeste, nécessaire aux besoins de la famille" au sens de l'article 220 du code civil et que le caractère "ménager" de l'emprunt est corroboré par le fait que la somme prêtée a été versée sur le compte courant du couple et a permis d'assurer les besoins de trésorerie du couple, sans expliquer en quoi les sommes empruntées étaient nécessaires aux besoins de la vie courante alors pourtant que l'objet ménager de l'emprunt était contesté par Mme Y..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a relevé que la somme empruntée était modeste eu égard aux ressources mensuelles du couple, qu'elle avait été versée sur le compte courant de ce dernier et avait permis d'assurer les besoins de trésorerie du couple, de sorte que l'emprunt portait sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante du ménage, a légalement justifié sa décision ;
Sur le pourvoi incident de la société Covefi :
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné la SA Covefi à payer à Mme Agnès Y..., divorcée X... la somme de 1 458,05 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement, alors, selon le moyen :
1°/ que le devoir de mise en garde du prêteur de deniers à l'égard d'un emprunteur profane ne s'impose qu'au cas où le crédit proposé excède les capacités financières de l'emprunteur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le prêt contracté par Mme X... portait sur une somme modérée, nécessaire aux besoins de la famille ; qu'en conséquence, en condamnant la SA Covefi pour manquement à son devoir de conseil et de mise en garde, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1147 du code civil ;
2°/ qu'en énonçant que le crédit consenti par Covefi portait sur des sommes modérées nécessaires aux besoins de la famille, tout en constatant que le crédit entraînait un taux d'endettement excessif pour les emprunteurs, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a relevé que le contrat de crédit qui constituait une dette solidaire au sens de l'article 220 du code civil eu égard aux ressources mensuelles du couple, augmentait également le taux d'endettement du couple et rendait la charge de remboursement manifestement excessive au regard de ces ressources, en a justement déduit que la société de crédit qui aurait du mettre en garde les emprunteurs non avertis sur les risques de souscription d'un nouveau crédit, avait manqué à son devoir de mise en garde ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal et le pourvoi incident ;
Laisse à Mme Y... et à la société Covefi la charge des dépens afférents à leur pourvoi respectif ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat aux Conseils pour Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné Mme Y... solidairement avec M. X... à payer à la SA COVEFI les sommes de 2.210,90 euros avec les intérêts au taux contractuels de 11,16 % à compter du 28 février 2002 sur la somme de 1.609,28 euros et 128,74 euros avec les intérêts au taux légal à compter du jugement ;
AUX MOTIFS QUE il résulte des décomptes produits aux débats que la créance de la SA COVEFI s'élève aux sommes de 2.210,96 euros représentant les mensualités impayées ainsi que le capital restant dû et de 128,74 euros au titre de la pénalité conventionnelle de 8% ;
Que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a condamné solidairement les époux X... au paiement des dites sommes, augmentées des intérêts au taux de 11,16% sur la somme de 2.210,96 euros à compter du 28 février 2002 et des intérêts au taux légal sur la somme de 128,74 euros à compter du jugement ;
ALORS QUE les actions en paiement engagées devant le Tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent l'être dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion ; que la fin de non-recevoir tirée de la forclusion édictée par ce texte doit être relevée d'office par le juge, au besoin après avoir suscité les observations des parties ;
D'où il résulte qu'en se bornant, pour condamner Mme Y..., à relever que la créance de la SA COVEFI s'élève aux sommes de 2.210,96 euros représentant les mensualités impayées ainsi que le capital restant dû et de 128,74 euros au titre de la pénalité conventionnelle de 8%, sans constater le moment à partir duquel les échéances ont été impayées et le sont demeurées, ne permettant pas de s'assurer que l'action de la société COVEFI a bien été engagée avant l'expiration du délai de forclusion de deux ans prévu à l'article L 311-37 du code de la consommation, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé, ensemble l'article 125 du Code de procédure civile ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné Mme Y... solidairement avec M. X... à payer à la SA COVEFI les sommes de 2.210,90 euros avec les intérêts au taux contractuels de 11,16 % à compter du 28 février 2002 sur la somme de 1.609,28 euros et 128,74 euros avec les intérêts au taux légal à compter du jugement ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... affirme n'avoir pas signé l'offre de prêt, et pour preuve de ce que sa signature diffère de celle apposée sur le contrat, elle verse aux débats différents éléments de comparaison ;
Que le rapprochement entre la signature attribuée au « co-emprunteur » et celle de Mme X... telle qu'elle ressort des documents de comparaison (carte nationale d'identité, permis de conduire et acte notarié) fait apparaître de multiples différences dans le lettrage du « m » et du « t », dans le graphisme général (le nom est toujours souligné dans la signature de Mme X... en prolongation du « L » alors qu'il ne l'est pas dans la signature apposée sur l'acte), et en ce que l'écriture est légèrement « penchée » vers la droite dans l'acte litigieux, alors qu'elle l'est vers la gauche dans la signature de Mme X... ;
Qu'en revanche, la signature indiquée comme étant celle du co-emprunteur correspond strictement à l'écriture manuscrite du nom « X... » par l'emprunteur principal sous la rubrique « acceptation de l'offre préalable » ;
Qu'ainsi, il n'est pas établi que la signature du co-emprunteur apposée sur l'offre de prêt soit celle de Mme X... ;
Que pour autant, la somme de 20.000 francs empruntée constitue, eu égard aux ressources mensuelles du couple (12.000 francs) « une somme modeste, nécessaire aux besoins de la famille » au sens de l'article 220 du Code civil ;
Que le caractère « ménager » de l'emprunt est corroboré par le fait que la somme prêtée a été versée sur le compte courant du couple et a permis d'assurer les besoins de trésorerie du couple ;
Qu'ainsi, la société Covefi bénéfice de l'engagement solidaire des époux X... en application de l'article 220 du Code civil ;
ALORS QUE aux termes de l'article 220, alinéas 1er et 3, du Code civil, toute dette contractée par l'un des époux pour l'entretien du ménage oblige l'autre solidairement, mais la solidarité n'a pas lieu pour les emprunts qui n'auraient pas été conclus du consentement des deux époux à moins qu'ils ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante ;
Qu'il s'ensuit qu'en se bornant, pour condamner Mme Y..., à relever que la somme de 20.000 francs empruntée constitue, eu égard aux ressources mensuelles du couple (12.000 francs) « une somme modeste, nécessaire aux besoins de la famille » au sens de l'article 220 du Code civil et que le caractère « ménager » de l'emprunt est corroboré par le fait que la somme prêtée a été versée sur le compte courant du couple et a permis d'assurer les besoins de trésorerie du couple, sans expliquer en quoi les sommes empruntées étaient nécessaires aux besoins de la vie courante alors pourtant que l'objet ménager de l'emprunt qui était contesté par Mme Y..., la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Covefi.
Il est reproché à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la S.A. COVEFI à payer à Madame Agnès X... la somme de 1458,05 , assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement ;
AUX MOTIFS QU' « en adhérant à l'offre de crédit, les époux X... ont indiqué l'ensemble de leurs prêts en cours, dont les mensualités cumulées s'élevaient à 5.649 F, ce qui représentait un taux d'endettement de 47 % ; que la souscription de ce nouveau crédit, remboursable par mensualités de 600 F augmentait le taux d'endettement du couple de 47 à 52 % ; que la charge de remboursement de 6.249 F, pour un revenu de 12.000 F, perçu par un couple était manifestement excessive, et que le taux d'endettement excédait la limite usuellement admise par les organismes de crédit ; que ce taux d'endettement raisonnable doit être apprécié au moment de la souscription du prêt, et qu'il est sans emport que les mensualités aient pu être honorées du mois de janvier au mois d'octobre 2000 ; que, de surcroît, ce prêt, consenti sur la base d'un simple formulaire adressé à l'emprunteur, offrait un choix entre différents montants de crédit et différentes durées de remboursement, sans qu'à aucune moment, l'organisme prêteur ne dispense le moindre conseil sur la formule la plus appropriée compte tenu de la situation du candidat emprunteur, ni ne le mette en garde au regard des limites d'un endettement raisonnable ; que l'obligation de conseil reposant sur l'organisme prêteur est bien plus exigeante que la seule information de l'emprunteur sur le montant des échéances du prêt souscrit, et qu'il ne peut davantage considérer son obligation comme remplie du fait que l'emprunteur connaît sa situation économique personnelle ; qu'en sa qualité de professionnelle face à des emprunteurs non avertis, supportant de surcroît un taux d'endettement très conséquent, il appartenait à la SA COVEFI de mettre en garde les époux X... sur les risques de souscription d'un nouveau crédit, voire même de refuser de consentir le prêt ; qu'ayant manqué à son devoir de conseil, la SA COVEFI engage sa responsabilité, et doit être condamnée à indemniser Madame X... pour le préjudice qu'elle subit, préjudice que le premier juge a, à juste titre, chiffré au montant cumulé des intérêts décomptés depuis la souscription du prêt et de l'indemnité de résiliation, soit la somme de 1.458, 05 » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le devoir de mise en garde du prêteur de deniers à l'égard d'un emprunteur profane ne s'impose qu'au cas où le crédit proposé excède les capacités financières de l'emprunteur ; qu'en l'espèce, la Cour a relevé que le prêt contracté par Madame X... portait sur une somme modérée, nécessaire aux besoins de la famille ; qu'en conséquence, en condamnant la SA COVEFI pour manquement à son devoir de conseil et de mise en garde, la Cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1147 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en énonçant que le crédit consenti par COVEFI portait sur des sommes modérées nécessaires aux besoins de la famille », tout en constatant que le crédit entraînait un taux d'endettement excessif pour les emprunteurs, la Cour a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.