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24/06/2009 | FRANCE | N°07-41926

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 juin 2009, 07-41926


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 1er mars 2007), que Mme X... a été engagée le 28 février 2000, par la société Adrexo, en qualité de distributeur de documents publicitaires et journaux gratuits suivant contrat à durée indéterminée ne mentionnant pas s'il était conclu à temps plein ou à temps partiel et prévoyant une rémunération au rendement en fonction du nombre de documents distribués ; que licenciée pour faute grave le 10 mars 2005, elle a saisi la juridiction

prud'homale de demandes tendant notamment à la requalification de son contrat de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 1er mars 2007), que Mme X... a été engagée le 28 février 2000, par la société Adrexo, en qualité de distributeur de documents publicitaires et journaux gratuits suivant contrat à durée indéterminée ne mentionnant pas s'il était conclu à temps plein ou à temps partiel et prévoyant une rémunération au rendement en fonction du nombre de documents distribués ; que licenciée pour faute grave le 10 mars 2005, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment à la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein et au paiement de rappels de salaires et d'indemnités ;

Attendu que la société Adrexo fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à Mme X... diverses sommes à titre de rappels de salaires et d'indemnités, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il n'y a pas lieu à requalification en contrat à temps complet d'un contrat de travail à temps partiel lorsqu'il est établi que, les conditions d'exécution du contrat ne plaçant pas le salarié dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et ne l'obligeant pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur, l'intéressé a la possibilité d'exercer un autre emploi, s'il le souhaite ; que tel est le cas du salarié qui n'a à effectuer qu'une prestation hebdomadaire et peut, en pratique, connaître suffisamment à l'avance le jour de la semaine où il effectuera cette prestation, a fortiori quand il le détermine lui-même, et qui sait ainsi pouvoir disposer librement des autres jours de la semaine ; qu'en l'espèce, elle soulignait explicitement devant la cour d'appel que le distributeur, qui avait pour seule obligation de se rendre disponible au moins une fois par semaine pour sa tournée hebdomadaire, se présentait au dépôt pour effectuer cette tournée selon un jour de disponibilité qu'il déterminait lui-même d'une semaine sur l'autre à l'issue de sa précédente distribution, ce qui permettait parfaitement à l'intéressé de prévoir son rythme de travail et excluait qu'il fût à la disposition permanente de son employeur ; qu'elle ajoutait que l'intéressé, qui pouvait toujours effectuer sa tournée le jour même pour lequel il s'était déclaré disponible, avait, au surplus, toute latitude pour l'étaler ou la différer à son gré sur une période maximale, en principe de six jours ; en relevant, pour requalifier le contrat, que la latitude du distributeur pour différer ou étaler sa tournée par rapport à la date mentionnée dans la feuille de route, aurait été en réalité plus limitée que ce que n'indiquait l'employeur, sans expliquer en quoi cette circonstance, qui n'empêchait en rien le distributeur d'effectuer sa tournée le jour pour lequel il s'était déclaré disponible, ni l'obligeait en rien à devoir distribuer un autre jour, était de nature à contraindre le salarié à se tenir en permanence à la disposition de son employeur, la cour d'appel, qui s'est ainsi déterminée par des motifs insuffisants et inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail ;

2°/ qu'il n'y a pas lieu à requalification en contrat à temps complet d'un contrat de travail à temps partiel qui ne contient pas de stipulation relative à la répartition de l'horaire de travail sur les jours de la semaine ou les semaines du mois, lorsqu'il est acquis que les conditions d'exécution du contrat ne placent pas le salarié dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et ne l'obligent pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur, mais lui donnent au contraire la possibilité d'exercer un autre emploi, s'il le souhaite ; qu'à cet égard, seules doivent donc être prises en considération les prestations de travail impliquées de manière obligatoire par le contrat, et non celles, facultatives, que le salarié est libre d'effectuer ou au contraire de refuser, et qui ne peuvent en conséquence influer sur sa disponibilité obligatoire ; qu'en l'espèce, il était constant, et au demeurant non contesté par le distributeur, que son contrat ne prévoyait qu'une distribution hebdomadaire obligatoire, toute autre distribution étant facultative et donc réalisée à son gré, l'intéressé étant en particulier libre de refuser toute proposition de l'employeur en ce sens ; qu'en prenant cependant en considération le "nombre des tournées", c'est-à-dire indistinctement les tournées obligatoires et facultatives réalisées par le distributeur, pour inférer une prétendue obligation du distributeur de se tenir constamment à la disposition de l'employeur, la cour d'appel, qui s'est déterminée par un motif radicalement inopérant, a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail ;

Mais attendu que selon l'article L. 3123-14 du code du travail, le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit ; qu'il mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'en présence d'un contrat de travail écrit, il appartient à l'employeur qui conteste l'existence d'un contrat à temps plein de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte du travail convenu, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de son employeur ;

Et attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, d'abord, que le contrat ne mentionnait ni la durée du travail ni la répartition de cette durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois et ne précisait pas qu'il était conclu pour un horaire normal ou un horaire à temps partiel ; ensuite, que compte tenu de la clause de disponibilité figurant au contrat ainsi que des demandes de la clientèle, génératrices de contraintes pour le distributeur, celui-ci ne pouvait organiser ses tournées à sa convenance ; que la cour d'appel qui en a déduit que l'employeur n'établissait pas que la salariée, laissée dans l'ignorance du rythme auquel elle pourrait travailler chaque semaine et mise dans l'obligation de se tenir à la disposition permanente de l'employeur, effectuait un travail à temps partiel, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Adrexo aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Adrexo à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Adrexo.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné un employeur, la société Adrexo (exposante), à payer à son salarié à temps partiel, Mme X..., diverses sommes à titre de rappels de salaires et d'indemnités ;

AUX MOTIFS QUE Mme X... a été embauchée à compter du 28 février 2000 par la société Adrexo en qualité de distributrice de documents publicitaires et de journaux ; qu'il était indiqué au contrat de travail (article 3) que la disponibilité pour effectuer les distributions concernait les lundis - mardis - mercredis - jeudis – vendredis ; que la quantité minimale de boîtes aux lettres à servir était de 500 par période hebdomadaire dans le cadre des disponibilités de la salariée ; que, sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et quel que soit le mode de rémunération pratiqué, le salarié a droit à une rémunération au moins égale au salaire minimum de croissance pour le nombre d'heures qu'il a effectuées ; que la liberté laissée au salarié d'organiser son travail et de n'être soumis à aucun horaire déterminé n'est pas de nature à permettre à l'employeur de se soustraire à l'application des dispositions légales relatives au SMIC ; que la société Adrexo produit la liste détaillée des dates des tournées effectuées par Mme X..., les secteurs géographiques desservis, le nombre de documents distribués ; qu'il ressort des indications fournies par la société Adrexo que la vacation pouvait s'établir sur une période de un à six jours ; que compte tenu de la nature des documents distribués (journaux, documents publicitaires) il ne peut être sérieusement contesté que si aucun temps d'exécution n'était exigé aux distributeurs, pour autant la distribution ne pouvait être différée compte tenu de l'objet même des documents distribués ; qu'il n'est pas discuté par la société Adrexo que pour les documents publicitaires, il devait être nécessairement des demandes des clients, génératrices de contraintes pour le distributeur dont la latitude pour organiser son travail se trouvait, par suite, limitée ; qu'il doit être constaté que sur les documents intitulés feuilles de route et rapport journalier de distribution qui sont versés aux débats, figure la date de la distribution, en sorte qu'il ne peut être soutenu que la distribution pouvait être effectuée à la convenance du distributeur ; que les indications données par Mme X... sur les temps de trajet compte tenu des secteurs géographiques desservis en milieu rural ne sont pas infirmés par des éléments contraires probants, les calculs théoriques n'ayant aucune pertinence eu égard à la dispersion des boîtes aux lettres desservies ; qu'en conséquence, au vu du nombre des tournées effectuées par Mme X..., du nombre de documents distribués impliquant un temps de préparation, des temps de trajets en secteur rural, des impératifs de délais résultant des demandes des clients, il apparaît que la salariée a été dans l'obligation de se tenir à la disposition permanente de son employeur pour les jours fixés au contrat de travail ; que par voie de conséquence, les conditions de travail résultant de l'exécution du contrat conclu le 28 février 2000 conduisent à qualifier le contrat de travail à temps complet ;

1°- ALORS QU'il n'y a pas lieu à requalification en contrat à temps complet d'un contrat de travail à temps partiel lorsqu'il est établi que, les conditions d'exécution du contrat ne plaçant pas le salarié dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et ne l'obligeant pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur, l'intéressé a la possibilité d'exercer un autre emploi, s'il le souhaite ; que tel est le cas du salarié qui n'a à effectuer qu'une prestation hebdomadaire et peut, en pratique, connaître suffisamment à l'avance le jour de la semaine où il effectuera cette prestation, a fortiori quand il le détermine lui-même, et qui sait ainsi pouvoir disposer librement des autres jours de la semaine ; qu'en l'espèce, la société Adrexo soulignait explicitement devant la cour d'appel que le distributeur, qui avait pour seule obligation de se rendre disponible au moins une fois par semaine pour sa tournée hebdomadaire, se présentait au dépôt pour effectuer cette tournée selon un jour de disponibilité qu'il déterminait lui-même d'une semaine sur l'autre à l'issue de sa précédente distribution, ce qui permettait parfaitement à l'intéressé de prévoir son rythme de travail et excluait qu'il fût à la disposition permanente de son employeur ; qu'elle ajoutait que l'intéressé, qui pouvait toujours effectuer sa tournée le jour même pour lequel il s'était déclaré disponible, avait, au surplus, toute latitude pour l'étaler ou la différer à son gré sur une période maximale, en principe de six jours ; qu'en relevant, pour requalifier le contrat, que la latitude du distributeur pour différer ou étaler sa tournée par rapport à la date mentionnée dans la feuille de route, aurait été en réalité plus limitée que ce que n'indiquait l'exposante, sans expliquer en quoi cette circonstance, qui n'empêchait en rien le distributeur d'effectuer sa tournée le jour pour lequel il s'était déclaré disponible, ni l'obligeait en rien à devoir distribuer un autre jour, était de nature à contraindre le salarié à se tenir en permanence à la disposition de son employeur, la cour d'appel, qui s'est ainsi déterminée par des motifs insuffisants et inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail ;

2°- ALORS QU'il n'y a pas lieu à requalification en contrat à temps complet d'un contrat de travail à temps partiel qui ne contient pas de stipulation relative à la répartition de l'horaire de travail sur les jours de la semaine ou les semaines du mois, lorsqu'il est acquis que les conditions d'exécution du contrat ne placent pas le salarié dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et ne l'obligent pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur, mais lui donnent au contraire la possibilité d'exercer un autre emploi, s'il le souhaite ; qu'à cet égard, seules doivent donc être prises en considération les prestations de travail impliquées de manière obligatoire par le contrat, et non celles, facultatives, que le salarié est libre d'effectuer ou au contraire de refuser, et qui ne peuvent en conséquence influer sur sa disponibilité obligatoire ; qu'en l'espèce, il était constant, et au demeurant non contesté par le distributeur, que son contrat ne prévoyait qu'une distribution hebdomadaire obligatoire, toute autre distribution étant facultative et donc réalisée à son gré, l'intéressé étant en particulier libre de refuser toute proposition de l'employeur en ce sens ; qu'en prenant cependant en considération le « nombre des tournées », c'est-à-dire indistinctement les tournées obligatoires et facultatives réalisées par le distributeur, pour inférer une prétendue obligation du distributeur de se tenir constamment à la disposition de l'employeur, la cour d'appel, qui s'est déterminée par un motif radicalement inopérant, a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-41926
Date de la décision : 24/06/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 01 mars 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jui. 2009, pourvoi n°07-41926


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.41926
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