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23/06/2009 | FRANCE | N°08-17092

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 juin 2009, 08-17092


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 mai 2008), que la société Altran technologies (la société Altran), dont les titres ont été admis aux négociations sur le premier marché d'Euronext Paris en 1998, avait pour dirigeants, en 2001 et 2002, M. A..., président du conseil d'administration, et MM. X..., Y... et Z..., directeurs généraux délégués et administrateurs ; qu'après ouverture d'une enquête sur l'information financière et le marché du titre Altran à compter du 31 décembre 2001, la commis

sion spécialisée du collège de l'Autorité des marchés financiers (l'AMF) a a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 mai 2008), que la société Altran technologies (la société Altran), dont les titres ont été admis aux négociations sur le premier marché d'Euronext Paris en 1998, avait pour dirigeants, en 2001 et 2002, M. A..., président du conseil d'administration, et MM. X..., Y... et Z..., directeurs généraux délégués et administrateurs ; qu'après ouverture d'une enquête sur l'information financière et le marché du titre Altran à compter du 31 décembre 2001, la commission spécialisée du collège de l'Autorité des marchés financiers (l'AMF) a adressé des notifications de griefs, sur le fondement des articles L. 621-14 et L. 621-15 du code monétaire et financier et des articles 1 à 4 du règlement n° 98-07 de la Commission des opérations de bourse (la COB), à la société Altran et à ses dirigeants ainsi qu'aux commissaires aux comptes ; que par décision du 29 mars 2007, la commission des sanctions de l'AMF a prononcé une sanction pécuniaire à l'encontre de la société Altran ainsi que des dirigeants et des commissaires aux comptes ; que la cour d'appel a réformé cette décision en ce qu'elle avait sanctionné les commissaires aux comptes mais a rejeté les recours formés par la société Altran et par MM. A..., X..., Z... et Y... ;

Sur le premier moyen et le deuxième moyen, pris en sa première branche, réunis :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours contre la décision de l'AMF prononçant contre lui une sanction pécuniaire de 500 000 euros, alors, selon le moyen :

1° / qu'en se fondant pour prononcer une sanction contre M. Y... dirigeant personne physique, sur les dispositions de l'article 1er du règlement n° 98-07 de la COB concernant l'information réglementée et dont les mentions prévoyant leur application aux dirigeants de l'émetteur avaient été abrogées par le règlement AMF dans sa rédaction issue de l'arrêté du 4 janvier 2007, la cour d'appel a violé les articles 221-1 et suivants du règlement AMF dans leur rédaction issue de l'arrêté du 4 janvier 2007 et 112-1 du code pénal ;

2° / que l'article 221-1 du règlement de l'AMF tel que résultant de l'arrêté du 4 janvier 2007 avait supprimé l'imputabilité de manquements au devoir d'information aux dirigeants de la personne morale concernée, cette imputabilité n'ayant été rétablie que par arrêté du 26 février 2007, plus sévère et donc applicable à des faits antérieurs ; qu'en faisant expressément référence à la rédaction antérieure de l'article 222-1 du règlement, prévoyant l'imputabilité aux dirigeants, et depuis remplacée par l'article 221-1 dans sa rédaction du 4 janvier 2007, la cour d'appel a violé le double principe de la non rétroactivité de la loi pénale plus sévère et de la rétroactivité de la loi pénale plus douce, ainsi que l'article 112-1 du code pénal ;

3° / que la loi spéciale déroge à la loi générale et abroge celle-ci ; que l'article 221-1 du règlement AMF, dans sa rédaction applicable du 4 janvier 2007 avait, en tant que disposition spéciale, abrogé la disposition générale de l'article 632-1 du même règlement ; qu'en se fondant sur ce dernier texte et sur l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, texte d'ordre général, pour entrer en voie de sanction à l'encontre de M. Y..., la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble le principe specialia generalibus derogant ;

4° / qu'en se fondant pour prononcer une sanction contre M. Y... dirigeant personne physique, sur un manquement par ce dernier à une obligation de veiller au respect des dispositions du code monétaire et financier et du règlement COB n° 98-07 sur la qualité de l'information communiquée au public, alors que dans sa rédaction issue de l'arrêté du 4 janvier 2007, le règlement AMF plus doux, avait abrogé les dispositions qui prévoyaient l'obligation pour les dirigeants de l'émetteur, de respecter les règles applicables en matière d'information réglementée, la cour d'appel a violé les articles 221-1 et suivants du règlement AMF dans leur rédaction issue de l'arrêté du 4 janvier 2007 et 112-1 du code pénal ;

Mais attendu qu'ayant exactement énoncé qu'il résulte de la combinaison des articles L. 621-14 et L. 621-15 du code monétaire et financier, dans leur rédaction applicable à l'époque des faits, de l'article 632-1 du règlement général de l'AMF et de l'article 1er du règlement n° 98-07 de la COB, alors applicable, qu'une sanction pécuniaire peut être prononcée à l'encontre de toute personne, physique ou morale, ayant manqué aux obligations d'information du public définies par ce règlement, la cour d'appel a retenu à bon droit, sans méconnaître les textes et principes invoqués par le moyen, que M. Y... pouvait être sanctionné au titre des manquements commis par lui, en sa qualité de dirigeant de la société Altran, aux obligations d'information imposées à celle-ci ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses quatre dernières branches :

Attendu que M. Y... fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1° / que la diffusion d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse sur des instruments financiers n'est imputable à un dirigeant personne physique que s'il savait ou aurait dû savoir que l'information était inexacte ; que la procédure n'est régulière à son encontre que dans la mesure où cette circonstance relative à la connaissance a fait l'objet des griefs notifiés à l'origine par l'AMF ; qu'en l'espèce, aucun grief de cette nature n'a été notifié à M. Y... qui n'a reçu notification que du grief d'informations inexactes ; que la commission des sanctions s'est fondée d'office sur les dispositions de l'article 632-1 du règlement général de l'AMF, en dehors de tout débat contradictoire, comme M. Y... le soulignait dans ses conclusions d'appel ; qu'en s'abstenant d'annuler la décision de la commission des sanctions, la cour d'appel a débordé du cadre de sa saisine, excédé ses pouvoirs et violé les droits de la défense ;

2° / que la diffusion d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse sur des instruments financiers ne peut être sanctionnée que si l'AMF sur laquelle pèse la charge de la preuve, démontre que le dirigeant personne physique qui a communiqué l'information savait ou aurait dû savoir qu'elle était inexacte ou trompeuse ; que ne peut être sanctionnée que la personne à l'encontre de qui est établie une faute certaine consistant soit à avoir sciemment délivré une information qu'elle savait erronée, soit à avoir sciemment omis de vérifier une information dont elle aurait nécessairement dû connaître l'inexactitude ; qu'en retenant la simple ignorance, par M. Y..., de l'inexactitude des informations délivrées au seul motif qu'en vertu de ses fonctions, il devait " normalement " les connaître, sans caractériser que ce défaut de connaissance serait lui-même fautif, la cour d'appel a violé l'article 632-1 du règlement de l'AMF ;

3° / qu'il appartient à l'AMF, partie poursuivante, de démontrer que le dirigeant a commis une faute, et de démontrer, soit que la personne poursuivie avait une connaissance effective de l'information délivrée, soit que c'est à raison de sa carence fautive de sa part qu'elle a ignoré cette inexactitude ; qu'en statuant sur le fondement d'une présomption tirée des fonctions de M. Y..., et en faisant peser sur lui le fardeau de démontrer quelles circonstances auraient pu justifier son ignorance, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et encore violé l'article 632-1 du règlement de l'AMF, ainsi que le principe de la présomption d'innocence ;

4° / qu'en omettant de s'expliquer sur la circonstance pourtant expressément retenue par elle, que la société avait eu recours " à des dissimulations et des manipulations comptables ", et sur le fait, rappelé par M. Y..., que les enquêteurs de l'AMF avaient d'emblée souligné que celui-ci n'avait eu aucune connaissance de ces fraudes, que ces fraudes étaient l'unique cause de l'inexactitude de l'information, ceci expliquant que M. Y... avait pu lui-même être légitimement trompé comme l'avaient été les commissaires aux comptes que l'arrêt exonère de toute responsabilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 632-1 du règlement précité ;

Mais attendu, en premier lieu, que M. Y..., auquel avaient été notifiés des griefs pris de manquements susceptibles de lui être imputés à titre personnel, sur le fondement des articles 1 à 4 du règlement COB n° 98-07, alors applicable, ne peut faire grief à la commission des sanctions, puis à la cour d'appel, d'avoir, en application des dispositions nouvelles et plus douces de l'article 632-1 du règlement général de l'AMF, vérifié qu'il savait ou aurait dû savoir que les informations communiquées étaient inexactes ou trompeuses ;

Et attendu, en second lieu, que l'arrêt relève que M. Y..., directeur général délégué de la société Altran, participait, avec les autres dirigeants, aux réunions hebdomadaires du comité de direction, que ce comité prenait collégialement les décisions pour le groupe et qu'il avait pour objet d'examiner les questions relatives au groupe et à sa gestion, dont le développement, le chiffre d'affaires, les comptes et la communication ; qu'après avoir retenu que M. Y... était dans l'obligation, relevant de ses fonctions, de veiller au respect des dispositions du code monétaire et financier et du règlement n° 98-07 de la COB sur la qualité de l'information délivrée au public par la société, l'arrêt relève encore qu'il n'allègue pas que des circonstances particulières l'auraient privé de l'exercice total ou partiel de ces fonctions, justifiant qu'il ait légitimement ignoré le caractère fallacieux des informations délivrées, et retient qu'il en résulte que M. Y... devait normalement savoir que le chiffre d'affaires avait été artificiellement majoré et que l'information délivrée au public était inexacte ; qu'ayant ainsi relevé, sans inverser la charge de la preuve, que M. Y... aurait dû savoir que les informations communiquées présentaient un caractère inexact ou trompeur, la cour d'appel, qui n'avait pas à faire la recherche dès lors inopérante visée par la dernière branche, a statué à bon droit et légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le troisième moyen :

Attendu que M. Y... fait encore le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1° / qu'aux termes des articles L. 621-14 et L. 621-15 du code monétaire et financier, dans une rédaction applicable aux faits, une sanction ne peut être prononcée que si la pratique incriminée a eu pour effet de fausser le fonctionnement du marché ; qu'en se fondant, pour prononcer une sanction, sur la seule circonstance que l'information aurait été " de nature à tromper le marché ", sans constater que tel aurait été effectivement le cas, la cour d'appel a violé les textes précités ;

2° / qu'en se bornant à déduire une prétendue atteinte effective à l'égalité d'information et de traitement des investisseurs de la simple éventualité d'une atteinte du marché, sans constater précisément une telle atteinte effective, ni, de façon concrète et effective, une quelconque rupture d'égalité entre les investisseurs, tous concernés par la même information erronée, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence des conditions d'une sanction et a privé sa décision de base légale au regard des textes précités ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'information délivrée était de nature à tromper le marché par son caractère inexact en faussant la connaissance qu'il pouvait avoir de l'état de la société et qu'elle avait ainsi porté atteinte à l'égalité d'information et de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts, la cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir l'existence d'une atteinte aux intérêts des investisseurs, a statué à bon droit et légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à l'Autorité des marchés financiers la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour M. Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours de M. Y... contre la décision de la commission des sanctions qui a prononcé une sanction pécuniaire de 500. 000 euros à son encontre ;

Aux motifs qu'il résulte de la combinaison des articles L 621-14 et L 621-15 du Code monétaire et financier, de l'article 632-1 du règlement général de l'AMF et de l'article 1er du règlement n° 98-07 de la COB alors applicable, qu'une sanction pécuniaire peut être prononcée à l'encontre de toute personne physique ou morale, ayant manqué aux obligations d'information du public définies par ce règlement ; que dès lors il importe peu au cas d'espèce, que le règlement général de l'AMF homologué par l'arrêté ministériel du 4 janvier 2007 ait omis de mentionner que les obligations mises à la charge de l'émetteur s'imposent également aux dirigeants de l'émetteur, de l'entité ou de la personne morale concernée ;

Alors d'une part, qu'en se fondant pour prononcer une sanction contre M. Y... dirigeant personne physique, sur les dispositions de l'article 1er du règlement n° 98-07 de la COB concernant l'information réglementée et dont les mentions prévoyant leur application aux dirigeants de l'émetteur avaient été abrogées par le règlement AMF dans sa rédaction issue de l'arrêté du 4 janvier 2007, la Cour d'appel a violé les articles 221-1 et suivants du règlement AMF dans leur rédaction issue de l'arrêté du 4 janvier 2007 et L 112-1 du Code pénal ;

Alors d'autre part, que l'article 221-1 du règlement de l'AMF tel que résultant de l'arrêté du 4 janvier 2007 avait supprimé l'imputabilité de manquements au devoir d'information aux dirigeants de la personne morale concernée, cette imputabilité n'ayant été rétablie que par arrêté du 26 février 2007, plus sévère et donc applicable à des faits antérieurs ; qu'en faisant expressément référence à la rédaction antérieure de l'article 222-1 du règlement, prévoyant l'imputabilité aux dirigeants, et depuis remplacée par l'article 221-1 dans sa rédaction du 4 janvier 2007, la Cour d'appel a violé le double principe de la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère et de la rétroactivité de la loi pénale plus douce, ainsi que l'article 112-1 du Code pénal ;

Alors, enfin, que la loi spéciale déroge à la loi générale et abroge celle-ci ; que l'article 221-1 du règlement AMF, dans sa rédaction applicable du 4 janvier 2007 avait, en tant que disposition spéciale, abrogé la disposition générale de l'article 632-1 du même règlement ; qu'en se fondant sur ce dernier texte et sur l'article L. 621-15 du Code monétaire et financier, texte d'ordre général, pour entrer en voie de sanction à l'encontre de Monsieur Y..., la Cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble le principe specialia generalibus derogant.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours de M. Y... contre la décision de la commission des sanctions qui a prononcé une sanction pécuniaire de 500. 000 euros à son encontre ;

Aux motifs qu'il est établi qu'il a été communiqué au public une information non conforme aux exigences d'exactitude, de précision et de sincérité fixées par les textes ; que s'il est vrai que le principe de l'application immédiate de la loi pénale plus douce commande de vérifier si, conformément à l'article 632-1 du règlement général de l'AMF moins sévère sur ce point, ces dirigeants savaient ou auraient dû savoir que les informations communiquées étaient inexactes, imprécises ou trompeuses, il n'en demeure pas moins que M. A... président directeur général, d'une part, M. Y..., M. X..., M. Z..., directeurs généraux délégués et administrateurs, d'autre part, étaient tous dans l'obligation, relevant nécessairement de leurs fonctions, de veiller au respect des dispositions du Code monétaire et financier et du règlement COB 98-07 sur la qualité de l'information communiquée au public par la société ; qu'il suit de là que lorsque comme en l'espèce, des informations inexactes, imprécises ou trompeuses sont communiquées au public, ils doivent en répondre à moins que des circonstances particulières, qui ne sont pas alléguées ici, ne les aient privés de l'exercice total ou partiel de ces fonctions, justifiant qu'ils aient légitimement ignoré le caractère fallacieux de ces informations ; que les objections concernant le rôle particulier qui aurait été joué par M. Z... sont vaines, puisque l'organisation de la direction du groupe Altran reposait sur un comité de direction (CODIR) se réunissant chaque semaine qui était présidé par MM. A... et X... et qui associait MM. Y... et Z... ; que ce comité avait pour objet d'examiner les questions relatives au groupe et à sa gestion, dont le développement, le chiffre d'affaires, les comptes et la communication et que la réunion hebdomadaire était suivie de « boards » auxquels participaient non seulement les directeurs opérationnels du groupe mais encore M. A... et M. X... et que M. Z... dont les déclarations n'ont pas été démenties par les autres requérants, a précisé aux enquêteurs : « Les aspects financiers et le contrôle de gestion relevaient de M. Alain B... qui était, avec Monsieur X..., l'homme des chiffres. Monsieur X... faisant un point hebdomadaire avec les deux trésoriers successifs du groupe sur les aspects financiers, cash, et chèques. M. B... faisait le point journalier, avec le PDG, M. A... et rendait compte au comité de direction, qui prenait collégialement les décisions pour le groupe » ; qu'il résulte de ce qui précède que M. A..., M. X..., M. Z... mais aussi M. Y..., quelles que soient, en ce qui concerne ce dernier, les appréciations de la commission des sanctions, devaient normalement savoir, d'une part que le chiffre d'affaires au 31 décembre 2001 et au 30 juin 2002 avait été artificiellement majoré du fait d'enregistrements de factures à établir, fictives et de divers enregistrements comptables irréguliers, et également d'autre part, que l'information communiquée au public, relative au taux d'activité des consultants, au taux de croissance du chiffre d'affaires et du résultat, aux cessions de créances professionnelles et aux « earn out » relatifs à des rachats de société, était inexacte ;

Alors, d'une part, qu'en se fondant pour prononcer une sanction contre M. Y... dirigeant personne physique, sur un manquement par ce dernier à une obligation de veiller au respect des dispositions du Code monétaire et financier et du règlement COB 98-07 sur la qualité de l'information communiquée au public, alors que dans sa rédaction issue de l'arrêté du 4 janvier 2007, le règlement AMF plus doux, avait abrogé les dispositions qui prévoyaient l'obligation pour les dirigeants de l'émetteur, de respecter les règles applicables en matière d'information réglementée, la Cour d'appel a violé les articles 221-1 et suivants du règlement AMF dans leur rédaction issue de l'arrêté du 4 janvier 2007 et 112-1 du Code pénal ;

Alors, d'autre part, que la diffusion d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse sur des instruments financiers n'est imputable à un dirigeant personne physique que s'il savait ou aurait dû savoir que l'information était inexacte ; que la procédure n'est régulière à son encontre que dans la mesure où cette circonstance relative à la connaissance a fait l'objet des griefs notifiés à l'origine par l'autorité des marchés financiers ; qu'en l'espèce, aucun grief de cette nature n'a été notifié à M. Y... qui n'a reçu notification que du grief d'informations inexactes ; que la commission des sanctions s'est fondée d'office sur les dispositions de l'article 632-1 du règlement général de l'AMF, en-dehors de tout débat contradictoire, comme le soulignait M. Y... dans ses conclusions d'appel (page 2) ; qu'en s'abstenant d'annuler la décision de la commission des sanctions, la Cour d'appel a débordé du cadre de sa saisine, excédé ses pouvoirs, et violé les droits de la défense ;

Alors, de surcroît, que la diffusion d'une information inexacte, imprécise ou trompeuse sur des instruments financiers ne peut être sanctionnée que si l'AMF sur laquelle pèse la charge de la preuve, démontre que le dirigeant personne physique, qui a communiqué l'information savait ou aurait dû savoir qu'elle était inexacte ou trompeuse ; que ne peut être sanctionnée que la personne à l'encontre de qui est établie une faute certaine consistant soit à avoir sciemment délivré une information qu'elle savait erronée, soit à avoir sciemment omis de vérifier une information dont elle aurait nécessairement dû connaître l'inexactitude ; qu'en retenant la simple ignorance, par Monsieur Y..., de l'inexactitude des informations délivrées au seul motif qu'en vertu de ses fonctions, il devait « normalement » les connaître, sans caractériser que ce défaut de connaissance serait lui-même fautif, la Cour d'appel a violé l'article 632-1 du règlement de l'Autorité des marchés financiers ;

Alors, en toute hypothèse, qu'il appartient à l'AMF, partie poursuivante, de démontrer que le dirigeant a commis une faute, et de démontrer, soit que la personne poursuivie avait une connaissance effective de l'inexactitude de l'information délivrée, soit que c'est à raison de sa carence fautive de sa part qu'elle a ignoré cette inexactitude ; qu'en statuant sur le fondement d'une présomption tirée des fonctions de Monsieur Y..., et en faisant peser sur lui le fardeau de démontrer quelles circonstances auraient pu justifier son ignorance, la Cour d'appel a renversé la charge de la preuve et encore violé l'article 632-1 du règlement de l'Autorité des marchés financiers, ainsi que le principe de la présomption d'innocence ;

Alors, enfin, qu'en omettant de s'expliquer sur la circonstance pourtant expressément retenue par elle, que la société avait eu recours « à des dissimulations et des manipulations comptables », et sur le fait, rappelé par Monsieur Y..., que les enquêteurs de l'AMF avaient d'emblée souligné que celui-ci n'avait eu aucune connaissance de ces fraudes, que ces fraudes étaient l'unique cause de l'inexactitude de l'information, ceci expliquant que Monsieur Y... avait pu lui-même être légitimement trompé comme l'avaient été les Commissaires aux comptes que l'arrêt exonère de toute responsabilité, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 632-1 du règlement précité.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours de M. Y... à l'encontre la décision de la commission des sanctions l'ayant condamné au paiement d'une sanction pécuniaire de 500 000 euros.

Aux motifs que, quelle qu'ait été l'évolution du cours de bourse, l'information délivrée était de nature à tromper le marché par son caractère inexact en faussant la connaissance qu'il savait avoir de l'état de la société et a ainsi porté atteinte à l'égalité d'information et de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ;

Alors, d'une part, qu'aux termes des articles L. 621-14 et L. 621-15 du Code monétaire et financier, dans une rédaction applicable aux faits, une sanction ne peut être prononcée que si la pratique incriminée a eu pour effet de fausser le fonctionnement du marché ; qu'en se fondant, pour prononcer une sanction, sur la seule circonstance que l'information aurait été « de nature à tromper le marché », sans constater que tel aurait été effectivement le cas, la Cour d'appel a violé les textes précités ;

Alors, d'autre part, qu'en se bornant à déduire une prétendue atteinte effective à l'égalité d'information ou de traitement des investisseurs de la simple éventualité d'une atteinte du marché, sans constater précisément une telle atteinte effective, ni, de façon concrète et effective, une quelconque rupture d'égalité entre les investisseurs, tous concernés par la même information erronée, la Cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence des conditions d'une sanction et a privé sa décision de base légale au regard des textes précités.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-17092
Date de la décision : 23/06/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 jui. 2009, pourvoi n°08-17092


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Hémery, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Piwnica et Molinié, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, SCP Vincent et Ohl, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.17092
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