LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° F 07-20.411 et K 08-16.118 ;
Sur la déchéance du pourvoi n° K 08-16.118, en ce qu'il porte sur l'arrêt du 9 février 2005 :
Attendu qu'aucun grief n'est dirigé contre l'arrêt rendu le 9 février 2005 par la cour d'appel de Paris et qu'il convient de constater la déchéance du pourvoi n° K 08-16.118, en ce qu'il porte sur cet arrêt ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° F 07-20.411, pris en sa deuxième branche et le moyen unique du pourvoi n° K 08-16.118, pris en sa première branche, réunis :
Vu l'article 1998 du code civil, ensemble le principe selon lequel la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant, sans équivoque, la volonté de renoncer ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (1re chambre civile, 16 oct. 2001, pourvoi n° 00-10.036, bull. civ. I, n° 261 et 29 janvier 2002, pourvoi n° 00-10.874), que la société Régie 1 et la société IP-RTV, aux droits de laquelle se trouve la société IP France, concessionnaires exclusifs de la publicité effectuée sur les ondes des radios Europe 1, pour la première, et RTL, pour la seconde, ont été chargées par la société FCM et associés (la société FCM) agissant au nom de la Direction départementale de l'équipement de la Seine-Saint-Denis (la DDE) d'organiser au profit de celle-ci une campagne de communication concernant la fermeture des autoroutes A1 et A6 ; que les prestations assurées par ces sociétés et consistant en la diffusion de messages, au cours des mois de juillet et août 1995, n'ayant pas été réglées, elles ont poursuivi la DDE en paiement ;
Attendu que pour rejeter les demandes des sociétés Régie 1 et IP France, l'arrêt retient qu'en sollicitant et en obtenant du juge commissaire de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société FCM paiement partiel de leurs créances, inscrites pour la totalité, les sociétés demanderesses à l'action, ignorant la DDE et le mandat donné à FCM, ont délibérément choisi d'être exclusivement régies par les règles de droit commun applicables au cas de liquidation judiciaire du débiteur ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la renonciation au droit au paiement détenu par un tiers au mandat contre le mandant ne se déduit pas de l'action en paiement engagée par ce tiers contre le mandataire, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois :
CONSTATE la déchéance du pourvoi n° K 08-16.118, en ce qu'il porte sur l'arrêt rendu le 9 février 2005 par la cour d'appel de Paris ;
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 février 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne l'agent judiciaire du Trésor public aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'agent judiciaire du Trésor public à payer à la société Régie 1 la somme de 2 500 euros ainsi que la même somme à la société IP France et rejette ses demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi n° F 07-20.411 par Me X..., avocat aux Conseils pour la société Régie 1.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société REGIE 1 de sa demande en paiement de la somme de 13.487,98 euros, outre les pénalités pour intérêt de retard contre Monsieur Y... judiciaire du trésor public,
AUX MOTIFS QUE
« Considérant que les sociétés IP RTV et Régie 1, appelantes, invoquent, au soutien de leurs demandes en paiement, formées à hauteur de 35 515,23
pour la 1ère et de 13 487,98 pour la seconde, outre les pénalités de retard au taux majoré de 50%, les dispositions de l'article 20 de la loi "Sapin" du 29 janvier 1993, aux termes duquel tout achat d'espace publicitaire ne peut être réalisé par un intermédiaire que pour le compte d'un annonceur dam le cadre d'un mandat écrit, que par l'effet de ce mandat, le contrat est réputé avoir été conclu entre le tiers et le mandant, tenu d'exécuter les obligations nées du contrat conclu par le mandataire, la DDE, par application de l'article 1998 du Code civil ;
Considérant que pour écarter l'application de la loi "Sapin", l'agent judiciaire du Trésor fait valoir que le contrat litigieux demeure de nature administrative, puisqu'il concerne non pas une activité commerciale, avec distribution ou utilisation d'imprimés, ou de promotion d'un produit, d'un service ou d'une prestation, mais qu'il s'agit d'informer une catégorie de public, les usagers d'autoroutes péri-urbaines afin d'éviter la formation d'embouteillages;
Considérant cependant que la question de la nature du litige né du défaut de paiement des prestations commandées par la société F.C.M., a été définitivement tranchée par les arrêts de la Cour de cassation et par celui de cette cour, prononcé le 9 février 2005, étant du ressort de la juridiction judiciaire ;
Considérant, que la société FCM est, par jugement du 31 janvier 1996 du tribunal de commerce de Nanterre, en liquidation judiciaire, M. Z... étant désigné en qualité de liquidateur; que celui-ci a déposé le 28 novembre 1996 auprès du greffe de cette juridiction la liste des créanciers comprenant les sociétés Régie 1 et EPR TV, qui ont respectivement perçu les sommes de 39 101,05 F et de 71 854,18 F ;
Considérant, sans qu'il soit utile de s'aventurer plus avant dans le détail de l'argumentation des parties, qu'en sollicitant et en obtenant du juge commissaire de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société FCM paiement partiel de leurs créances, inscrites pour la totalité, les sociétés demanderesses à l'action, ignorant la DDE et le mandat donné à FCM, ont délibérément choisi d'être exclusivement régies par les règles de droit commun applicables au cas de liquidation judiciaire du débiteur, alors qu'au surplus, il est constant, et définitivement jugé, que la cession des espaces publicitaires ne participait pas à l'exécution du service public géré par la DDE ;
Considérant qu'il suit de là qu'il y a lieu de débouter les sociétés Régie 1 et la société IP France de toutes leurs demandes »;
ALORS QUE toute décision doit être motivée ; que la Cour d'appel a affirmé purement et simplement, sans se fonder sur aucun texte ni principe jurisprudentiel, que le créancier qui déclare sa créance à la procédure de liquidation judiciaire et accepte un paiement partiel perd le droit de poursuivre les autres codébiteurs pour le reste de la créance ; qu'en statuant comme elle l'a fait la Cour d'appel a statué par un motif inopérant impropre à justifier la solution et à permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.
ALORS QUE la renonciation a un droit ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; que le créancier qui déclare sa créance à la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'encontre d'un coobligé et accepte un paiement partiel ne renonce pas à poursuivre l'autre coobligé à la dette ; qu'en jugeant que la société Régie 1 avait, en sollicitant et en obtenant du juge commissaire de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société FCM et Associés paiement partiel de sa créance, inscrite pour la totalité, délibérément choisi d'ignorer le mandat donné par la direction départementale de l'équipement de la seine-saint-denis et d'être exclusivement régie par les règles de droit commun applicables au cas de la liquidation judiciaire du débiteur, la Cour d'appel a présumé une renonciation de la part du créancier et a violé l'article 1234 du Code civil ;
ALORS QU'ainsi que le faisait valoir la société Régie 1 dans ses conclusions demeurées sans réponse, ses conditions générales de vente acceptées prévoyaient que le paiement effectué au mandataire par l'annonceur ne libère pas ce dernier ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions et a ainsi violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné ; que la Cour d'appel, tout en constatant l'existence du mandat, a refusé son application ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 1998 du Code civil,
ALORS QU'ainsi que le faisait valoir la société Régie 1 dans ses conclusions demeurées sans réponse, la société FCM et Associés était intervenue en qualité de mandataire de l'annonceur, en application des dispositions de l'article 20 alinéa 1er de la loi n°93-122 du 29 janvier 1993 dite « loi Sapin », et qu'ainsi l'annonceur était engagé ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a de plus fort violé l'article 455 du Code de procédure civile.Moyen produit au pourvoi n° K 08-16.118 par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société IP France.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société IP FRANCE des demandes présentées contre l'Agent Judiciaire du Trésor ;
AUX MOTIFS QU'"en sollicitant et en obtenant du juge-commissaire de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société FCM paiement partiel de leurs créances, inscrites pour la totalité, les sociétés demanderesses à l'action, ignorant la DDE et le mandat donné à FCM, ont délibérément choisi d'être exclusivement régies par les règles de droit commun applicables au cas de liquidation judiciaire du débiteur, alors qu'au surplus, il est constant, et définitivement jugé, que la cession des espaces publicitaires ne participait pas à l'exécution du service public géré par la DDE" ;
1°) ALORS QUE le mandant étant tenu d'exécuter les engagements contractés pour son compte par son mandataire dans la limite de ses pouvoirs, le tiers cocontractant du mandataire dispose à l'encontre de ce mandant d'une action directe ; que la renonciation du tiers à cette action ne peut se déduire du seul fait qu'il a primitivement choisi d'exercer un recours contre le mandataire qui s'est avéré inefficace ; qu'en jugeant que la circonstance que la société IPRTV, régie publicitaire, ait déclaré sa créance au passif de la société FCM, mandataire de la Direction Départementale de l'Équipement, la privait de toute possibilité d'agir à l'encontre de cette Direction pour obtenir le paiement du solde de sa créance, la Cour d'appel a violé l'article 1998 du Code civil ;
2°) ALORS QUE la circonstance que la cession des espaces publicitaires ne participait pas à l'exécution du service public géré par la D.D.E. avait pour seule conséquence d'exclure la compétence du juge administratif pour connaître du litige, et non d'exonérer la D.D.E. de l'exécution des engagements contractuels qu'elle avait souscrits ; en sorte qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article 1134 du Code Civil.