LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X..., employé à compter de 1973 en dernier lieu en qualité de technicien principal, a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, la cour d'appel a retenu que les agissements constitutifs d'un harcèlement moral ne pouvaient simplement résulter d'un stress, d'une anxiété, d'un surmenage, d'un conflit personnel, de contraintes de gestion, du pouvoir disciplinaire ou d'organisation de l'employeur mais devaient être la conséquence d'une volonté réitérée de l'employeur se manifestant par des éléments identifiables par le juge et portant atteinte à la dignité de la personne en créant un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant, offensant et que tel n'était pas le cas en l'espèce ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié dans lesquelles il faisait valoir qu'à son retour de congé maladie, il avait retrouvé, sans en avoir été prévenu, son bureau vidé, ses dossiers mélangés et qu'il s'était vu affecté dans un local isolé en compagnie de deux autres agents également classés agents inadaptés, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société Electricité de France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Electricité de France à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils pour M. X...
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que les agissements allégués par Monsieur X... à l'encontre de la société EDF ne caractérisaient pas des faits de harcèlement moral, et d'AVOIR en conséquence débouté ce dernier de ses demandes de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... se prétend victime d'un harcèlement moral de la part de son employeur, la société EDF ; qu'il soutient notamment que sa qualification en PERS 268 lui confère la classification de travailleur handicapé alors qu'il s'agit de la notion de salarié inadapté et nullement de celle de travailleur handicapé qui seule résulte de l'article L323-10 alinéa 2 du Code du travail ; qu'il prétend avoir été muté quatre fois en dix années de service ; que cependant, il est démontré que les changements d'affectation d'octobre 1990 et mars 1992 résultaient d'une décision, en raison des préconisations du médecin du travail, afin de lui confier un emploi correspondant à ses aptitudes physiques conformément à l'obligation de sécurité qui pèse sur l'employeur ; que celle d'avril 1998 correspondait à une affectation d'office du poste de technicien principal dans un « poste d'assistant contrôle essai » qu'il a expressément demandée notamment dans un entretien d'orientation en février 1998 et qu'il a acceptée dans une lettre du 6 mars 1998 adressée au directeur du CPT d'Aramon ; et que celle de décembre 2000 résultait d'un changement d'appellation de l'unité n'apportant aucune modification de son contrat de travail ; qu'il soutient ne pas avoir bénéficié de formations professionnelles alors qu'il résulte de l'enquête annuelle de l'année 2000 qu'il a refusé volontairement des stages au niveau national d'une durée supérieure à une semaine pour raisons familiales ne voulant pas s'éloigner de son domicile ; que les organismes de l'entreprise auxquels il s'est plaint n'ont jamais corroboré ses affirmations qui ne sont étayées par d'autres que lui ; que le harcèlement se caractérise par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié, et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de comportement ou de compromettre son avenir professionnel ; que ces agissements ne peuvent simplement résulter d'un stress, d'une anxiété, d'un surmenage, d'un conflit personnel, de contrainte de gestion, du pouvoir disciplinaire ou d'organisation de l'employeur mais doivent être la conséquence d'une volonté réitérée de l'employeur se manifestant par des éléments identifiables par le juge et portant atteinte à la dignité de la personne humaine en créant un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ; que les faits invoqués par Monsieur X..., éléments objectifs étrangers à toute discrimination, ne présentent pas de tels caractères en sorte que le jugement doit être infirmé et les demandes rejetées ;
1°) ALORS QU'en se bornant à énoncer que les changements d'affectation d'octobre 1990 et mars 1992 résultaient d'une décision de l'employeur prise en raison des préconisations du médecin du travail et afin de satisfaire à son obligation de sécurité, sans répondre aux conclusions de Monsieur X... par lesquelles celui-ci faisait valoir que le médecin du travail ne l'avait pas déclaré inapte à son poste mais qu'il avait seulement considéré celui-ci comme contre-indiqué, d'où il résultait que ces avis du médecin du travail ne pouvaient entraîner son classement dans la catégorie des salariés inadaptés, la circulaire PERS 268 qui définit cette catégorie, évoquant, non pas une simple contre-indication mais une véritable incapacité à tenir son poste, et qu'en le classant néanmoins dans cette catégorie, la société EDF avait adopté un comportement caractéristique d'un harcèlement moral, la cour a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en se bornant à énoncer que les changements d'affectation d'octobre 1990 et mars 1992 résultaient d'une décision de l'employeur prise en raison des préconisations du médecin du travail et afin de satisfaire à son obligation de sécurité, sans répondre aux conclusions de Monsieur X... par lesquelles celui-ci faisait valoir qu'il n'avait pas même été informé de la possibilité de former un recours à l'encontre de l'avis du médecin du travail, d'où résultait encore l'existence d'un comportement de la société EDF caractéristique d'un harcèlement moral, la cour a de nouveau méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
3°) ALORS QU'en se bornant à énoncer que les changements d'affectation d'octobre 1990 et mars 1992 résultaient d'une décision de l'employeur prise en raison des préconisations du médecin du travail et afin de satisfaire à son obligation de sécurité, sans répondre aux conclusions de Monsieur X... par lesquelles celui-ci invoquait comme constitutif d'un comportement de harcèlement moral de la société EDF, le retrait, lors des mutations de 1990 et 1992, du bénéfice du classement en service actif, et le classement désormais en service sédentaire, la cour a encore violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
4°) ALORS QU'en relevant que la mutation de décembre 2000 résultait d'un changement d'appellation de l'unité n'apportant aucune modification du contrat de travail de Monsieur X..., sans préciser davantage, comme elle y était invitée, en quoi elle ne constituait justement pas une modification du contrat de travail qui nécessitait l'acceptation de ce dernier, la cour a mis la Cour de cassation dans l'impossibilité d'effectuer son contrôle sur la réalité d'une modification du contrat de travail et a ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
5°) ALORS QU'en se bornant à énoncer que les faits invoqués par Monsieur X... ne présentaient pas les caractéristiques d'un harcèlement moral, sans répondre aux conclusions par lesquelles ce dernier faisait valoir qu'à un retour de congé maladie, il avait retrouvé, sans en avoir été prévenu, son bureau vidé, ses dossiers mélangés, et qu'il s'était vu affecté dans un local isolé en compagnie de deux autres agents également classés agents inadaptés, d'où résultait encore l'existence d'un comportement de harcèlement moral de la part de la société EDF, la cour a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
6°) ALORS QU'en se bornant à énoncer que les faits invoqués par Monsieur X... ne présentaient pas les caractéristiques d'un harcèlement moral, sans répondre aux conclusions par lesquelles ce dernier faisait valoir qu'en décembre 1995, la société EDF avait volontairement donné à l'huissier de justice, en vue de la signification de l'ordonnance de référé rendue à l'encontre des agents grévistes, une mauvaise adresse le concernant, d'où résultait à nouveau l'existence d'un comportement de harcèlement moral de la part de la société EDF, la cour a une nouvelle fois violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
7°) ALORS QU'en se bornant à énoncer que les faits invoqués par Monsieur X... ne présentaient pas les caractéristiques d'un harcèlement moral, sans répondre aux conclusions par lesquelles ce dernier faisait valoir que ses nombreuses demandes de mutation faites en vue d'échapper au comportement de son employeur sur le site d'Aramon n'avaient reçu, sans raison objective, que des réponses négatives, ce qui caractérisait une volonté délibérée de la société EDF de nuire à Monsieur X... et constituait donc un fait de harcèlement moral à l'encontre de ce dernier, la cour a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
8°) ALORS QUE la dénaturation par le juge du sens d'un écrit clair et précis fait encourir la censure à sa décision ; qu'en l'espèce, pour appuyer la thèse du harcèlement moral de la société EDF à son encontre, Monsieur X... a invoqué les écrits des 11 et 12 septembre 1997, 20 octobre et 1er décembre 1998, par lesquels le CHSCT du site EDF d'Aramon a usé de ses droits d'alerte et de retrait ; que ces écrits mentionnaient notamment « les pressions psychologiques, professionnelles, et familiales exercées par la Direction du CPT d'Aramon sur plusieurs de ses agents », le « comportement "dictatorial et caractériel" d'un chef de service donnant l'impression d'avoir dépassé ses "compétences managériales" », et « le comportement oppressif du chef de pôle et de l'ingénieur production » dont Monsieur X... était victime ; qu'en évoquant les organismes de l'entreprise auxquels Monsieur X... s'était plaint, la cour a notamment visé le CHSCT et les droits d'alerte et de retrait qu'il a mis en oeuvre, mais en considérant que celui-ci n'avait jamais corroboré les affirmations de Monsieur X... qui n'étaient étayées par d'autres que par lui, la cour a dénaturé les écrits du CHSCT de 1997 et 1998, et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ;