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17/06/2009 | FRANCE | N°07-21589

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 17 juin 2009, 07-21589


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 septembre 2007) que, par acte sous seing privé du 25 juillet 1973, certains propriétaires indivis d'un terrain appartenant aux consorts X... ont, sans avoir recueilli l'accord des autres indivisaires, promis de céder ce terrain à la commune de Marseille ; que la promesse précisait que le terrain était nécessaire à la construction d'une rocade prévue au plan directeur d'aménagement et qu'un arrêté préfectoral avait prescrit l'ouverture de ce proj

et de construction ; que la commune a accepté cette cession par décisi...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 septembre 2007) que, par acte sous seing privé du 25 juillet 1973, certains propriétaires indivis d'un terrain appartenant aux consorts X... ont, sans avoir recueilli l'accord des autres indivisaires, promis de céder ce terrain à la commune de Marseille ; que la promesse précisait que le terrain était nécessaire à la construction d'une rocade prévue au plan directeur d'aménagement et qu'un arrêté préfectoral avait prescrit l'ouverture de ce projet de construction ; que la commune a accepté cette cession par décision du 13 octobre 1973 ; que, par arrêté du 7 novembre 1973, le préfet des Bouches-du-Rhône a, au visa de l'article 1042 du code général des impôts, déclaré d'utilité publique l'acquisition de ce terrain ; que l'acte authentique a été signé les 31 janvier, 1er et 18 février 1974 par tous les indivisaires ; qu'en 2003, ceux-ci, soutenant qu'une partie du terrain vendu n'avait pas eu la destination prévue, en ont demandé la rétrocession partielle ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que l'arrêt ayant exposé succinctement les prétentions de l'une et l'autre des parties, et aucun défaut de réponse à un moyen n'étant invoqué, le visa des conclusions de la commune de Marseille en date du 31 janvier 2007 caractérise une erreur matérielle qui, pouvant être réparée suivant la procédure de l'article 462 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le second moyen :
Attendu que la commune de Marseille fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de rétrocession partielle formée par les consorts X..., alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque, avant même l'engagement d'une procédure de déclaration d'utilité publique, une personne privée a consenti à une collectivité publique une promesse de vente portant sur un bien immobilier, qui révèle son accord sur la chose et sur le prix, le contrat de vente passé par la suite reste étranger à la procédure d'expropriation engagée entre temps et n'est donc pas soumis aux dispositions du code de l'expropriation ; qu'en considérant que les consorts X... jouissaient d'un droit de rétrocession, cependant qu'il s'évinçait de ses propres constatations que l'immeuble concerné avait fait l'objet d'une promesse de vente, engageant les vendeurs, antérieurement à la déclaration d'utilité publique, la cour d'appel a violé l'article L. 12-6 du code de l'expropriation, ensemble les articles 1134 et 1589 du code civil ;
2°/ que le juge, doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office le moyen de droit tiré de l'absence de signature de la promesse de cession par tous les indivisaires de l'immeuble cédé, sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3°/ que la promesse de vente d'un immeuble indivis consentie par un seul des indivisaires est valable pour la portion indivise qui lui appartient ; qu'en se fondant, pour dénier toute portée à la promesse de vente consentie courant juillet 1973, sur la circonstance qu'elle n'avait pas été signée par tous les indivisaires, la cour d'appel a violé l'article 815-3 du code civil ;
4°/ que la déclaration d'utilité publique prise en application de l'ancien article 1042 du code général des impôts constitue une décision administrative étrangère aux formalités de la procédure d'expropriation et dont les incidences sont exclusivement fiscales ; qu'en assimilant un tel acte à la déclaration d'utilité publique prévue par le code de l'expropriation, pour en déduire l'existence d'un droit de rétrocession au profit des vendeurs d'une parcelle ayant fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique purement fiscale, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble les articles L. 11-1 et L. 12-6 du code de l'expropriation ;
5°/ que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ; qu'en assimilant un transfert de propriété de nature contractuelle résultant d'un accord de volontés à une expropriation, aux fins d'y attacher un droit de rétrocession, la cour d'appel a dénaturé le sens et la portée de l'acte de cession des 31 janvier, 1er et 18 février 1974, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que le vendeur d'un bien immobilier qui a fait l'objet d'une cession amiable précédée d'une déclaration d'utilité publique prise en application de l'article 1042 du code général des impôts bénéficie du droit à rétrocession ; qu'ayant relevé que l'acte du 25 juillet 1973 n'avait été signé que par certains indivisaires sans qu'ait été recueilli l'accord des autres, ce dont il résulte que le transfert de propriété du terrain nécessaire à la commune pour réaliser le projet prévu n'est intervenu que lors de la signature de l'acte authentique par tous les indivisaires, postérieure à la déclaration d'utilité publique de ce projet, la cour d'appel, qui a constaté que l'affectation prévue du terrain n'avait pas été respectée dans les cinq ans de la vente, en a exactement déduit, sans violer le principe de la contradiction, ni dénaturer l'acte de cession des 31 janvier, 1er et 18 février 1974 que la demande de rétrocession formée par les consorts X... était fondée en son principe ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la commune de Marseille aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la commune de Marseille, la condamne à payer aux consorts X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils pour la commune de Marseille.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

II est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré fondée en son principe la demande des consorts X... portant sur la rétrocession d'une partie des biens immobiliers ayant fait l'objet d'une cession à la ville de Marseille par acte notarié des 31 janvier, 1er et 18 février 1974 ;
ALORS QUE dans les affaires où la représentation est obligatoire, la cour d'appel ne statue que sur les dernières conclusions déposées ; qu'en se prononçant au visa des conclusions déposées par la ville de Marseille le 31 janvier 2007, et non sur les conclusions que cette même partie avait régulièrement produites le 16 mai 2007, cinq jours avant la clôture de l'instruction, notamment pour répliquer aux écritures déposées ses adversaires entre temps (cf. p. 9), la cour d'appel a violé l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré fondée en son principe la demande des consorts X... portant sur la rétrocession d'une partie des biens immobiliers ayant fait l'objet d'une cession à la ville de Marseille par acte notarié des 31 janvier, 1er et 18 février 1974 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les pièces produites aux débats, notamment la proposition faite aux consorts X... pour l'acquisition du terrain moyennant le prix de 4.300.000 francs avec rétrocession d'une maison d'habitation établissent que les consorts X... ont été dans les faits contraints de céder leur bien à des conditions moins avantageuses, en raison de l'utilité publique dont a excipé la ville de Marseille ; que l'acte du 25 juillet 1973 indique : - que le terrain est « nécessaire à la construction de la deuxième rocade prévue au plan directeur d'aménagement », - que le préfet des Bouches-du-Rhône, suivant arrêté du 1er août 1971, a prescrit l'ouverture du projet de construction de la deuxième rocade qui intéresse cette propriété ; que s'il n'y a pas eu de procédure d'expropriation au sens traditionnel du terme, il s'est bien agi d'une vente amiable assimilée à une mesure d'expropriation dont la réalisation notariée est intervenue les 31 janvier, 1er et 18 février 1974 après arrêté d'utilité publique du 7 novembre 1973 ; que l'acte authentique de vente précité indique que l'acquisition, préalablement déclarée d'utilité publique, était nécessaire à la « constitution d'une réserve foncière, en vue de la construction de la deuxième rocade prévue au plan d'aménagement » ; que l'acte du 25 juillet 1973 n'a été signé que par M. et Mme de Z..., Mme A... et Mme B... sans qu'ait été recueilli l'accord des autres indivisaires ; qu'il n'est pas contesté que l'affectation prévue n'a pas été respectée dans les cinq années de la vente soit avant le 18 février 1979 ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il ressort clairement du contenu des actes produits, notamment l'engagement de cession daté du 25 juillet 1973 intitulé « Mairie de Marseille Acquisition de terrain » qui fait référence à l'enquête préalable, de l'arrêté du 7 novembre 1973 portant déclaration d'utilité publique, de l'acte notarié du 18 février 1974, et de leur chronologie, que la déclaration d'utilité publique en date du 7 novembre 1973 correspond à celle désormais définie aux articles L. 11-1 et L.11-2 du code de l'expropriation ;
ALORS, en premier lieu, QUE lorsque, avant même l'engagement d'une procédure de déclaration d'utilité publique, une personne privée a consenti à une collectivité publique une promesse de vente portant sur un bien immobilier, qui révèle son accord sur la chose et sur le prix, le contrat de vente passé par la suite reste étranger à la procédure d'expropriation engagée entre temps et n'est donc pas soumis aux dispositions du code de l'expropriation ; qu'en considérant que les consorts X... jouissaient d'un droit de rétrocession, cependant qu'il s'évinçait de ses propres constatations que l'immeuble concerné avait fait l'objet d'une promesse de vente, engageant les vendeurs, antérieurement à la déclaration d'utilité publique, la cour d'appel a violé l'article L.12-6 du code de l'expropriation, ensemble les articles 1134 et 1589 du code civil ;
ALORS, en deuxième lieu, QUE le juge, doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office le moyen de droit tiré de l'absence de signature de la promesse de cession par tous les indivisaires de l'immeuble cédé, sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS, en troisième lieu, QUE la promesse de vente d'un immeuble indivis consentie par un seul des indivisaires est valable pour la portion indivise qui lui appartient ; qu'en se fondant, pour dénier toute portée à la promesse de vente consentie courant juillet 1973, sur la circonstance qu'elle n'avait pas été signée par tous les indivisaires, la cour d'appel a violé l'article 815-3 du code civil ;
ALORS, en quatrième lieu, QUE la déclaration d'utilité publique prise en application de l'ancien article 1042 du code général des impôts constitue une décision administrative étrangère aux formalités de la procédure d'expropriation et dont les incidences sont exclusivement fiscales ; qu'en assimilant un tel acte à la déclaration d'utilité publique prévue par I code de l'expropriation, pour en déduire l'existence d'un droit de rétrocession au profit des vendeurs d'une parcelle ayant fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique purement fiscale, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble les articles L.11-1 et L.12-6 du code de l'expropriation ;
ALORS, en cinquième lieu, QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ; qu'en assimilant un transfert de propriété de nature contractuelle résultant d'un accord de volontés à une expropriation, aux fins d'y attacher un droit de rétrocession, la cour d'appel a dénaturé le sens et la portée de l'acte de cession des 31 janvier, 1er et 18 février 1974, en violation de l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07-21589
Date de la décision : 17/06/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - Objet - Bien indivis - Cession amiable - Cession postérieure à la déclaration d'utilité publique - Transfert de propriété - Moment - Détermination

INDIVISION - Vente - Vente de biens indivis - Promesse consentie par certains indivisaires - Effets - Détermination

Ayant relevé que la promesse de vente d'un terrain appartenant à plusieurs indivisaires n'avait été signée que par certains d'entre eux, une cour d'appel retient à bon droit que le transfert de propriété de ce terrain à la commune, nécessaire à la réalisation d'un projet de construction, n'a été réalisé que lors de la signature de l'acte authentique par tous les indivisaires


Références :

articles L. 12-1 et L. 12-2 du code de l'expropriation

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 septembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 17 jui. 2009, pourvoi n°07-21589, Bull. civ. 2009, III, n° 146
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, III, n° 146

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Cuinat
Rapporteur ?: M. Cachelot
Avocat(s) : Me Haas, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.21589
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