LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1315 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Etablissements Lejeune (Lejeune), qui dispose, pour les besoins de son activité, d'une flotte de véhicules, a signé le 23 novembre 2004 avec la société Négociations services (Négociations), spécialisée en réduction des coûts d'assurance, un contrat demandant à cette dernière une "prise en charge" pour "l'obtention de réductions de primes d'assurances sur les contrats d'assurance de ses véhicules", moyennant paiement d'honoraires correspondant à un pourcentage du montant de l'économie réalisée ; que le 4 mars 2005, la société Négociations a communiqué à la société Lejeune une analyse des meilleurs offres d'assurance du marché ; qu'à la suite de la résiliation des contrats d'assurance automobile de la société Lejeune à leur échéance du 20 février 2006, la société Négociations a sollicité paiement de ses honoraires ;
Attendu que pour rejeter les demandes de la société Négociations, l'arrêt retient que cette société, qui n'a pas exécuté le contrat du 23 novembre 2004 avant le mois de mars 2005, s'est privée de tout droit à rémunération faute pour elle de justifier avoir mis la société Lejeune en demeure de lui fournir tous les renseignements dont elle estimait avoir besoin, avant la date permettant la résiliation des contrats d'assurance à leur échéance la plus proche du 28 février 2005 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans constater que les parties avaient convenu d'un délai pour l'exécution de la mission de la société Négociations, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne la société Etablissements Lejeune aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Négocations services la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevalier, avocat aux Conseils pour la société Négocations services.
IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE d'avoir débouté la SARL NEGOCIATIONS SERVICES de sa demande en paiement de la somme de 6.884,77 uros en principal au titre des honoraires qui lui sont dus par la société LEJEUNE,
AUX MOTIFS QUE « (…) le contrat d'étude tarifaire a pour cause déterminante la substitution de contrats de services par d'autres, considérés comme plus avantageux ; Que le cabinet d'études qui se charge d'établir un comparatif doit donc tenir compte des modalités juridiques et de l'époque propice de la résiliation des contrats anciens ; Qu'il en est ainsi même si le client, l'assuré ou l'abonné conserve la maîtrise de la résiliation, tant pour garder le bénéfice du contrat ancien aussi longtemps que possible, que pour satisfaire à des règles de droit pour la résiliation ou pour exercer le choix entre ses contrats anciens et les solutions suggérées par le cabinet d'études ; (…) Que devant cette contrainte forte qui pèse sur le lui, le cabinet d'études ne saurait effectuer sa tâche à toutes fins utiles, même après la plus proche échéance des contrats anciens, au motif très improbable que ses renseignements resteront longtemps valables ; (…) Que du tout, il résulte que le cabinet de services doit, dès qu'il contracte, requérir tous les renseignements dont il estime avoir besoin ; Qu'il doit, si le temps passe sans qu'il ait satisfaction à ce sujet, mettre en demeure son cocontractant et, au pire, se dégager de la convention dont il considère qu'il n'y pourra plus satisfaire ; (…) Qu'en l'espèce, NEGOCIATIONS SERVICES ne fait pas la preuve d'une telle démarche ; Qu'elle a contraire gardé le silence entre novembre 2004 et mars 2005, rendant ainsi sa prestation sans valeur pour LEJEUNE et se privant par suite de tout droit à une rémunération ; »
ALORS D'UNE PART QUE, dans le silence de la convention des parties en ce qui concerne le délai à respecter par l'exposante pour accomplir sa mission, c'était à la société LEJEUNE, qui, pour opposer l'exception d'inexécution à la demande en paiement de l'exposante, prétendait que cette dernière s'était contractuellement engagée à lui remettre ses propositions avant l'échéance des contrats anciens, ce qu'elle n'avait pas fait, qu'il appartenait d'en justifier ; Qu'en énonçant que l'exposante s'était privée de tout droit à rémunération faute par elle de démontrer avoir mis sa cocontractante en demeure de lui fournir tous les renseignements dont elle avait besoin avant la date d'échéance des contrats anciens sans constater qu'il était justifié qu'elle devait accomplir sa mission avant ladite date, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE le juge, tenu de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur un moyen qu'il a relevé d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; Qu'il n'est que de se reporter aux conclusions signifiées par la société LEJEUNE le 28 février 2008 (prod.) pour constater qu'elle n'y a jamais prétendu que, dès lors que le contrat d'étude tarifaire a pour cause déterminante la substitution de contrats de service par d'autres considérés comme plus avantageux, le cabinet d'étude qui se charge d'établir un comparatif doit tenir compte des modalités juridiques et de l'époque propice pour la résiliation des contrats anciens de sorte qu'il doit, dès qu'il contracte, requérir tous les renseignements dont il estime avoir besoin, si nécessaire en mettant son cocontractant en demeure ; Qu'en relevant ce moyen d'office et sans provoquer les observations contradictoires des parties pour débouter l'exposante de sa demande en paiement de sa prestation, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.