LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ondul'Yonne, qui commercialise des emballages, reprochant à la société MD Packaging (MD), créée par deux de ses anciens salariés, M. X... et M. Y..., pour exercer la même activité, d'avoir commis des actes de concurrence déloyale, l'a assignée en paiement de dommages-intérêts ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que, pour écarter le grief de la société Ondul'Yonne fondé sur le fait que M. X..., salarié de cette société jusqu'à l'expiration de son préavis le 12 avril 2005, avait, avant de signer avec M. Y... les statuts de la société MD, co-signé pour le compte de la société MD un contrat d'agence commerciale avec la société Bouzerot Perrier emballages, fournisseur de la société Ondul'Yonne, l'arrêt retient que la société MD n'a pas débauché M. X... qui a démissionné de la société Ondul'Yonne le 30 mars 2005 avant la constitution de la société MD le 6 avril 2005 et que la circonstance selon laquelle M. X... et M. Y... ont signé un contrat d'agence commerciale le 5 avril 2005 ne caractérise pas une manoeuvre déloyale ;
Attendu qu'en statuant ainsi, tout en constatant que la société MD avait bénéficié pour commencer ses activités avant l'expiration du préavis de M. X... au sein de la société Ondul'Yonne, d'un contrat conclu par celui-ci alors qu'il était encore salarié de cette dernière, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu qu'en rejetant la demande de la société Ondul'Yonne fondée sur le fait que la société MD avait passé commande le 12 avril 2005 à la société Bouzerot Perrier emballages de caisses d'emballage pour le compte des champagnes Moutard, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la date à laquelle avait été passée cette commande n'impliquait pas nécessairement que les champagnes Moutard avaient été démarchés pour le compte de la société MD par MM. Y... et Doit avant l'expiration les 25 mars et 12 avril 2005 de leurs contrats de travail respectifs avec la société Ondul'Yonne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives à l'exercice d'une activité par la société MD avant l'expiration du contrat de travail de M. X..., et au démarchage des champagnes Moutard, l'arrêt rendu le 31 mars 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne la société MD Packaging aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils pour la société Ondul'Yonne.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société ONDUL'YONNE de son action en concurrence déloyale et parasitaire à l'encontre de la société MD PACKAGING ;
AUX MOTIFS QU' « à l'appui de ses prétentions tendant à la réformation du jugement déféré, la SAS ONDUL'YONNE fait valoir que la SARL MD PACKAGING s'est rendue coupable de tentatives de débauchage de son personnel, de manoeuvres déloyales de copie et de confusion, d'une campagne de dénigrement et de prospection systématique de sa clientèle et de manoeuvres de déstabilisation ; que l'appelante rappelle tout d'abord que M. X..., associé fondateur, a signé le contrat d'exclusivité avec la société BOUZEROT PERRIER EMBALLAGES et les statuts de la SARL MD PACKAGING à une époque où il était encore salarié de la SAS ONDUL'YONNE dans la mesure où son contrat de travail n'a pas été rompu le 31 mars 2005 et que le salarié n'a été libéré de l'exécution de son préavis que le 12 avril 2005 ; qu'elle en conclut que M. X... A été débauché par la SARL MD PACKAGING qui a ainsi commis un acte délibéré de concurrence déloyale à son encontre ; que la SAS ONDUL'YONNE se fonde également sur une attestation de M. Franck Z... a qui M. Y... aurait fait part, au début de l'année 2004, de son intention de quitter son employeur pour monter une entreprise concurrente, aurait proposé de faire partie de l'aventure et aurait essayé de le convaincre ; qu'elle se prévaut également d'une attestation de Mme Sandrine A... qui fait état d'une tentative de débauchage par M. X... le 11 avril 2005, soit la veille de son départ de l'entreprise qu'il aurait de surcroît dénigrée ; qu'enfin, elle excipe du témoignage de M. Christian B... qui indique que M. Y... l'a appelé à plusieurs reprises de début avril à mi-mai 2005 pour lui demander des informations sur la situation de la SAS ONDUL'YONNE ; mais que la SAS ONDUL'YONNE ne rapporte pas la preuve des tentatives de débauchage de son personnel dont elle se prévaut au soutien de ses allégations ; que la démission de Monsieur X... le 30 mars 2005, lequel allait constituer quelques jours plus tard avec son ancien collègue de travail, M. Y..., la SARL MD PACKAGING, ne saurait s'analyser en un débauchage de salarié ; que l'appelante ne peut pas, en effet, valablement soutenir que la société intimée aurait débauché M. X... alors que ce dernier a démissionné à une date où la SARL MD PACKAGING n'était pas encore constituée et où il est un des deux associés fondateurs de cette société ; que la circonstance selon laquelle MM. Y... et DOIT ont signé le 5 avril 2005 avec la SAS BOUZEROT PERRIER EMBALLAGES un contrat d'agence commerciale avec une clause d'exclusivité pour trois départements, ne caractérise pas une manoeuvre déloyale dont la SAS ONDUL'YONNE pourrait se prévaloir alors que cette dernière n'était pas liée par un contrat d'exclusivité avec ce fournisseur ; qu'il existe dans ce domaine de nombreux autres fournisseurs et que la SAS BOUZEROT PERRIER EMBALLAGES s'était réservée, dans l'annexe 2 du contrat d'agence commerciale, la clientèle de la SAS ONDUL'YONNE ;
ALORS QUE, D'UNE PART, si les principes de la liberté du travail et du commerce n'interdisent pas au salarié démissionnaire de créer une entreprise concurrente, encore faut-il que celui-ci s'abstienne de tous agissements déloyaux à l'égard de son ancien employeur et notamment qu'il ne viole pas l'obligation de fidélité à laquelle il est tenu envers celui-ci jusqu'à l'expiration de son délai de préavis ; que caractérise un tel comportement déloyal le fait pour un salarié, durant le cours de son préavis, de créer une entreprise concurrente de celle de son employeur et de démarcher la clientèle de celui-ci pour le compte de la société nouvellement créée ; qu'en déboutant cependant la société ONDUL'YONNE de son action en concurrence déloyale tout en constatant que le préavis de Monsieur X... au sein de celle-ci s'achevait le 12 avril 2005 mais qu'il avait néanmoins créé la société MD PACKAGING le 6 avril et signé le 5 avril, pour le compte de cette nouvelle société, un contrat avec le fournisseur principal de la société ONDUL'YONNE cependant qu'il était toujours lié par un contrat de travail avec cette dernière – comportements déloyaux dont la société MD PACKAGING était la nécessaire complice – la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 1382 du code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, en s'abstenant en outre de rechercher, comme elle y était expressément invitée, si la date de signature du contrat d'exclusivité entre la société MD PACKAGING et le principal fournisseur de la société ONDUL'YONNE, la SAS BOUZEROT PERRIER, le 5 avril 2005, ainsi que l'importante commande passée à cette dernière le 12 avril, n'impliquaient pas nécessairement que les anciens salariés de la société ONDUL'YONNE eussent déjà noué des contacts, durant le cours de leur contrat de travail et bien avant l'expiration de celui-ci, avec la clientèle de leur employeur pour le compte de la société à créer, la Cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regarde de l'article 1382 du Code civil.