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20/05/2009 | FRANCE | N°08-41178

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 mai 2009, 08-41178


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 15 janvier 2008), que M. X... a été engagé à compter du 15 décembre 1965 par le Crédit industriel de Normandie devenu la Banque Scalbert Dupont-CIN (CIC Banque BSD CIN) pour occuper des fonctions administratives et en dernier lieu celles d'organisateur ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ;

Attendu que la société CIC Banque BSD-

CIN fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 15 janvier 2008), que M. X... a été engagé à compter du 15 décembre 1965 par le Crédit industriel de Normandie devenu la Banque Scalbert Dupont-CIN (CIC Banque BSD CIN) pour occuper des fonctions administratives et en dernier lieu celles d'organisateur ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ;

Attendu que la société CIC Banque BSD-CIN fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts et de l'avoir condamnée à payer à M. X... des sommes à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents et à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1°/ que l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, peut changer les conditions de travail d'un salarié, la circonstance que la tâche confiée à ce dernier soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement, dès l'instant où elle correspond à sa qualification, ne caractérise pas une modification du contrat de travail ; qu'en s'abstenant d'opérer une comparaison précise et concrète du poste administratif d' "organisateur" qui était initialement occupé par M. X... et de celui, également administratif d' "animateur organisation logistique" qui lui était proposé, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle quant au point de savoir si le nouveau poste proposé à M. X... ne constituait qu'une simple modification de ses conditions de travail et non une modification de son contrat de travail, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 1221-3, L. 1231-1 (L. 121-1 et L. 122-4 anciens) du code du travail et 1184 du code civil ;

2°/ qu'elle avait versé aux débats de nombreux éléments précis et notamment des descriptifs des fonctions de chacun des deux postes concernés, dont il ressortait qu'il s'agissait de postes uniquement administratifs et que les tâches à accomplir étaient très proches, la seule différence résidant dans le rattachement hiérarchique ; qu'en s'abstenant de s'expliquer comme elle y était expressément invitée, sur ces éléments de comparaison objectifs qui étaient de nature à établir que la nouvelle affectation de M. X... ne constituait qu'une simple modification de ses conditions de travail, la cour d'appel a, là encore, privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 1221-3, L. 1231-1 (L. 121-1 et L. 122-4 anciens) du code du travail et 1184 du code civil ;

3°/ qu'il résulte des articles L. 6111-1 et L. 6321-1 (L. 900-1 et L. 930-1 anciens) du code du travail que l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail ; que le fait de faire suivre au salarié une formation, fût-ce pendant plusieurs mois, ne constitue pas en soi une modification du contrat de travail dès lors qu'à l'issue de cette formation la nature des tâches confiées au salarié n'est pas modifiée mais seulement adaptée à une nouvelle organisation de l'entreprise ; qu'en considérant que la formation suivie pendant sept mois par M. X... permettait à elle seule et par voie de conséquence de déduire l'existence d'une modification de son contrat de travail, la cour d'appel a statué d'après des motifs inopérants, en violation des textes susvisés, ainsi que des articles L. 1221-1, L. 1221-3, L. 1231-1 (L. 121-1 et L. 122-4 anciens) du code du travail et 1184 du code civil ;

4°/ que dans ses écritures d'appel, elle insistait sur le fait que la formation litigieuse avait été dispensée avec l'accord initial de M. X... et que, dès l'instant où celui-ci avait manifesté son refus d'occuper un poste commercial, la formation avait été modifiée en conséquence pour ne concerner que les seuls aspects nécessaires à l'exercice de fonctions administratives au sein de la nouvelle entité née de la fusion entre les sociétés Scalbert Dupont-CIN et Crédit Fecampoix ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen qui était de nature à établir que l'employeur n'avait pas modifié le contrat de travail du salarié, mais avait au contraire pris en compte son souhait de n'occuper qu'un poste administratif conforme à celui qu'il occupait auparavant, de telle sorte que la formation qui lui a été dispensée tendait uniquement à préparer M. X... à ses nouvelles fonctions administratives et non plus à l'affecter à un poste intégrant une dimension commerciale, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur avait imposé au salarié, qui occupait depuis son engagement des tâches exclusivement de nature administrative, une formation censée donner une dimension commerciale à son contrat de travail en méconnaissance du dispositif d'accompagnement qui prévoit l'accord du salarié sur son projet individuel d'évolution destinée à l'apprentissage de nouvelles compétences en vue d'une nouvelle affectation a, par ces seuls motifs, caractérisé une modification de son contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Banque Scalbert Dupont-CIN aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Banque Scalbert Dupont-Cin à payer à M. Christian X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Banque Scalbert Dupont-CIN.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la BANQUE SCALBERT DUPONT et, en conséquence, d'AVOIR condamné cette dernière à payer à Monsieur X... les sommes de 67.350,25 à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 9.390,18 à titre d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, et 70.000 à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE « depuis son embauche en 1965, M. X... n'a occupé que des postes administratifs. La fusion de la société CIN avec d'autres banques a entraîné la suppression de son poste d'organisateur, situé au siège social à Rouen, à la suite d'une réorganisation destinée à accroître les gains de productivités (pièce 19) ; un départ négocié a, dans un premier temps, été envisagé. Il résulte du courriel du 13 juillet 2006 de M. X... à M. Y..., que lors d'un entretien du 14 avril 2006, les conditions proposées pour un départ au 31 août 2006 étaient les suivantes :
- licenciement pour motif disciplinaire mais sans faute grave ni lourde,

- versement des indemnités légales de licenciement,

- versement d'une indemnité transactionnelle en cas d'engagement de ne pas ester en justice avec, dans cette hypothèse, un calcul des indemnités sur le salaire net.

Le montant de la transaction s'élevait à 39.931 .

M. X... a refusé cette proposition, qui a été réitérée en vue d'un départ au 31 octobre 2006, avec des modalités financières revues à la hausse, le montant total de la transaction étant porté à 43.735 . Le 13 juillet 2006, M. X... a décliné l'offre, l'estimant insuffisante compte tenu de son ancienneté et de son engagement dans la société. Par courriel du 4 août 2006 adressé à M. Y..., la société a proposé à M. X... de rejoindre le réseau commercial et l'a placé en formation à compter du 4 septembre 2006, dans le cadre d'un « parcours formation chargé d'affaires professionnelles » (pièce 21 du salarié). Dès le 5 septembre 2006, tout en s'exécutant, M. X... a émis les plus grandes réserves sur cette formation censée donner une dimension commerciale à son contrat de travail, réserves qu'il a réitérées le 6 décembre 2006. L'employeur a maintenu M. X... en formation en méconnaissance du dispositif d'accompagnement qui prévoyait l'accord du salarié sur le projet individuel d'évolution, puis lui a notifié le 12 mars 2007, « au terme de cette période d'immersion et d'apprentissage des nouvelles compétences », son affectation au pôle organisation-logistique, avec effet au 2 mai 2007, en qualité d'animateur-organisation-logistique. Le 11 avril 2007, il l'a en outre averti de la nécessité d'un complément de formation sur les aspects logistique, sécurité, et travaux. Ainsi, sous couvert d'une obligation d'adaptation, la société BANQUE SCALBERT DUPONT-CIN a imposé à M. X..., une formation d'une durée supérieure à 7 mois Par ailleurs, elle ne peut, sans se contredire, soutenir que la fonction d'animateur-organisation-logistique était très voisine de celle, administrative, d'organisateur en raison de la longueur de la formation commerciale suivie par le salarié, et du fait que dans sa lettre du 12 mars 2007 précitée elle évoquait de nouvelles compétences et une nouvelle affectation. Ayant imposé à M. X... une modification de son contrat de travail, l'employeur a manqué à ses obligations contractuelles, ce qui justifie la résiliation du contrat de travail à ses torts laquelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;

ALORS, DE PREMIÈRE PART QUE l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, peut changer les conditions de travail d'un salarié, la circonstance que la tâche confiée à ce dernier soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement, dès l'instant où elle correspond à sa qualification, ne caractérise pas une modification du contrat de travail ; qu'en s'abstenant d'opérer une comparaison précise et concrète du poste administratif « d'organisateur » qui était initialement occupé par Monsieur X... et de celui, également administratif, « d'animateur organisation logistique » qui lui était proposé, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle quant au point de savoir si le nouveau poste proposé à Monsieur X... ne constituait qu'une simple modification de ses conditions de travail et non une modification de son contrat de travail, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles L.1221-1, L.1221-3, 1231-1 L.121-1 et L.122-4 anciens du Code du travail et 1184 du Code civil ;

QU' il en va d'autant plus ainsi que la BANQUE SCALBERT DUPONT avait versé aux débats de nombreux éléments précis et notamment des descriptifs des fonctions de chacun des deux postes concernés, dont il ressortait qu'il s'agissait de postes uniquement administratifs et que les tâches à accomplir étaient très proches, la seule différence résidant dans le rattachement hiérarchique ; qu'en s'abstenant de s'expliquer, comme elle y était expressément invitée, sur ces éléments de comparaison objectifs qui étaient de nature à établir que la nouvelle affectation de Monsieur X... ne constituait qu'une simple modification de ses conditions de travail, la cour d'appel a, là encore, privé sa décision de toute base légale au regard des articles L.1221-1, L.1221-3, 1231-1 L.121-1 et L.122-4 anciens du Code du travail et 1184 du Code civil ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QU' il résulte des articles L.6111-1 et L.6321-1 L.900-1 et L.930-1 anciens du Code du travail que l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail ; que le fait de faire suivre au salarié une formation, fût-ce pendant plusieurs mois, ne constitue pas en soi une modification du contrat de travail dès lors qu'à l'issue de cette formation la nature des tâches confiées au salarié n'est pas modifiée mais seulement adaptée à une nouvelle organisation de l'entreprise ; qu'en considérant que la formation suivie pendant 7 mois par Monsieur X... permettait à elle seule et par voie de conséquence de déduire l'existence d'une modification de son contrat de travail, la cour d'appel a statué d'après des motifs inopérants, en violation des textes susvisés, ainsi que des articles L.1221-1, L.1221-3, 1231-1 L.121-1 et L.122-4 anciens du Code du travail et 1184 du Code Civil ;

ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE dans ses écritures d'appel, la BANQUE SCALBERT DUPONT insistait sur le fait que la formation litigieuse avait été dispensée avec l'accord initial de Monsieur X... et que, dès l'instant où celui-ci avait manifesté son refus d'occuper un poste commercial, la formation avait été modifiée en conséquence pour ne concerner que les seuls aspects nécessaires à l'exercice de fonctions administratives au sein de la nouvelle entité née de la fusion entre les sociétés SCALBERT DUPONT, CIN et CREDIT FECAMPOIX ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen qui était de nature à établir que l'employeur n'avait pas modifié le contrat de travail du salarié, mais avait au contraire pris en compte son souhait de n'occuper qu'un poste administratif conforme à celui qu'il occupait auparavant, de telle sorte que la formation qui lui a été dispensée tendait uniquement à préparer Monsieur X... à ses nouvelles fonctions administratives et non plus à l'affecter à un poste intégrant une dimension commerciale, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-41178
Date de la décision : 20/05/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 15 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 mai. 2009, pourvoi n°08-41178


Composition du Tribunal
Président : M. Texier (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.41178
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