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06/05/2009 | FRANCE | N°08-40048

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 mai 2009, 08-40048


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 14 novembre 2007), que M. X...
Y... a été engagé à compter du 1er novembre 1987 au sein du laboratoire de prothèse dentaire de M. Ligério Y..., devenu ensuite l'EURL
X...
; que le salarié a été licencié pour faute grave par lettre du 9 décembre 2005 ; qu'estimant ne pas avoir été rempli de ses droits et contestant la mesure de licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y

a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 14 novembre 2007), que M. X...
Y... a été engagé à compter du 1er novembre 1987 au sein du laboratoire de prothèse dentaire de M. Ligério Y..., devenu ensuite l'EURL
X...
; que le salarié a été licencié pour faute grave par lettre du 9 décembre 2005 ; qu'estimant ne pas avoir été rempli de ses droits et contestant la mesure de licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamné au paiement de dommages-intérêts, d'une indemnité de préavis et des congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1° / que le refus du salarié de se soumettre aux directives de l'employeur constitue une faute grave lorsqu'il nuit au bon fonctionnement de l'entreprise ; qu'en se bornant à relever que la mauvaise qualité du travail du salarié n'était pas établie, au lieu de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par la lettre de licenciement, si celui-ci n'avait pas refusé d'obtempérer, tant le 3 novembre 2005 que le 22 novembre suivant, à l'injonction de l'employeur lui ayant demandé de rectifier son ouvrage, et si ce comportement, réitéré, n'avait pas nui au bon fonctionnement de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du code du travail ;
2 / que nul ne peut se constituer une preuve à lui-même ; qu'en se fondant exclusivement sur une lettre du salarié adressée à l'employeur, pour retenir que ce dernier avait tenu des propos provocateurs justifiant les insultes et menaces proférées à son encontre par le salarié, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
3 / que la lettre de licenciement reprochait au salarié d'avoir, à deux reprises en l'espace de trois semaines, insulté et menacé l'employeur devant le personnel de l'entreprise ; qu'en se bornant à imputer à l'employeur des propos provocateurs à l'égard du salarié, sans constater qu'ils avaient provoqué, en les précédant, les insultes et menaces proférées par ce dernier les 3 et 24 novembre 2005, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement l'ensemble des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu d'une part, que la preuve de la mauvaise qualité du travail alléguée dans la lettre de licenciement n'était pas rapportée et, d'autre part, que les propos reprochés au salarié répondaient au comportement agressif et blessant de l'employeur à son égard, de sorte que la faute grave n'était pas établie ; qu'exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 122-14-4, alinéa 1 phrase 1 et alinéa 2, devenu l'article L. 1235-1 du code du travail, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer la recherche prétendument omise, a décidé que le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société X... à payer à M. X...
Y... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'EURL au paiement des sommes de 30. 012, 38 euros à titre d'heures supplémentaires et 3. 001, 23 euros à titre de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE le principe de ces heures supplémentaires n'et pas sérieusement discutable dans la mesure où dans ses courriers des 16 septembre et 15 novembre 2005, en réponse aux réclamations de l'intimé, l'employeur admet avoir compensé financièrement par le biais de primes « les surplus de production » ou « les dépassements d'horaires » de Gabriel X...
Y... ; que par ailleurs le salarié produit de nombreuses attestations et notamment celles de David Z..., Gilles A..., Vinent C... et Lionel B... qui confirment qu'il arrivait tôt le matin et restait souvent tard le soir ; que face à ces éléments, l'EURL
X...
produit des feuilles de temps pour la période du 3 septembre 2001 au 25 mai 2002 sur lesquelles n'apparaissent aucune heure supplémentaire ; que ces feuilles sont cosignées par l'employeur et Gabriel X...
Y... ; que la cour constate que la signature du demandeur correspond bien à celle qui figure sur les courriers dont il revendique la paternité et que selon les jours cette signature est plus ou moins haute ou large ce qui exclut une apposition par manipulation informatique comme il le suggère ; qu'outre la contradiction entre ces feuilles de temps et les mentions figurant sur les calendriers de la poste sur lesquels Gabriel X...
Y... affirme avoir mentionné au jour le jour ses horaires de travail, l'expertise de ces calendriers à l'initiative de l'employeur, tend à démontrer qu'ils ont vraisemblablement tous été remplis le même jour ; que la cour ne peut donc se fonder sur cet unique élément comme l'a fait le conseil de prud'hommes ; qu'il s'évince des témoignages produits que Gabriel X...
Y... arrivait tôt le matin et qu'il restait souvent tard le soir et revenait parfois après le dîner ; qu'au vu des éléments suffisants dont dispose la cour il y a lieu de retenir qu'il effectuait en moyenne deux heures supplémentaires par jour, ce qui, déduction faite des périodes de congé telles qu'elles apparaissent sur les calendriers, doit conduire à réduire de moitié les sommes demandées à ce titre ;
ALORS QUE le salarié qui appose sa signature sur des feuilles de présence ne mentionnant aucune heure supplémentaire, renonce de manière expresse et non équivoque au paiement de celles-ci ; qu'ayant relevé que les feuilles de présence signées par le salarié ne mentionnaient aucune heure supplémentaire, ce dont il résultait qu'il y avait renoncé de manière expresse et non équivoque, a posteriori, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et a, ainsi, violé les articles 1134 du code civil et L. 212-1-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'avoir, en conséquence, condamné l'employeur au paiement de dommages-intérêts, d'une indemnité de préavis, avec congés payés y afférents, et d'une d'indemnité de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige est rédigée dans les termes suivants : «... tout d'abord, le 03 / 11 / 2005, je vous ai fait une observation concernant votre travail sur un « appareil de résine du bas » prêt à livrer. Il y avait à l'intérieur du montage plein de plâtre, avec une mise à dépouille trop importante au niveau des canines. Cela donnait un vide trop important entre les dents naturelles et les dents ajoutées. De plus, le praticien avait demandé 3 dents et vous en aviez placé 4. « Suite à ces remarques, vous êtes allé laver l'appareil, puis je vous ai fait observer que le problème de « contre dépouille » n'était pas résolu. Vous m'avez repris avec une attitude déplacée et agressive devant le personnel en me disant : " regarde ton travail dégueulasse avant de regarder le mien. Je suis là jusqu'à la fin de mes jours pour te nuire, je sais des choses sur le labo et je ne pense qu'à te nuire jour et nuit. Je boufferai ma maison s'il le faut mais je te détruirai. » Vous avez reposé le travail prêt à livrer sans les rectifications nécessaire et demandées. Aussi j'ai dû les effectuer moi-même, avant la finition. Cette attitude agressive et déplacée s'inscrit dans un comportement général chaque fois que je vous fais des observations quant à l'exécution de votre travail. De plus, le 22 / 11 / 2005, le « stellite du haut » que vous avez préparé pour un praticien dentiste présentait de gros défauts de finition au niveau du polissage et des malfaçons concernant les « crochets sur canines ». Je vous ai demandé de reprendre ce travail, et encore une fois, vous vous êtes emporté. Vous m'avez dit que votre travail était parfait et que vous ne le retoucheriez pas. Vous avez rajouté que je devrais regarder le mien ainsi que celui de autres. Enfin, le 24 / 1 / 2005, suite à un montage à refaire (essayage haut et bas) retourné par un autre praticien, vous m'avez dit : « comment se fait-il que mon articulateur soit mal préparé ? » Je vous ai répondu que le ne savais pas, et que si tel était le cas, vous aviez toutes les qualifications et les éléments nécessaires pour remédier à ce problème. Vous m'avez répondu que l'on vous sabotait le travail ; en quoi je vous ai rappelé l'incident du 22 / 11 / 2005 relatif la qualité de votre travail sur un « stellite ». A ce moment là je me suis permis de vous indiquer que personne d'autre que vous n'avait pu toucher ce stellite et qu'il présentait tout de même des malfaçons. Une nouvelle fois, vous m'avez insulté et menacé, et cela devant l'ensemble du personnel, très choqué par vos propos violents lorsque vous m'avez dit : « si tu as des couilles tu n'as qu'à me licencier. Je n'attends que ça. Licencie-moi, de toute façon tu n'es qu'un enculé (répété plusieurs fois) je vais t'en mettre une, de toute façon je vais te choper sans témoin, le labo je vais te le couler ». Nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise où, d'une part, vos manquements professionnels nuisent à l'entreprise et, d'autre part, vos insultes et menaces à mon encontre sont intolérables et gênent la bonne marche de l'entreprise » ; qu'en l'espèce, force est de constater que l'EURL
X...
n'apporte aucune preuve en faveur de la mauvaise qualité du travail de Gabriel X...
Y... ; que ce grief, vigoureusement contesté par l'intéressé est par ailleurs incompatible avec la durée de la relation contractuelle qui s'était déroulée sans aucun incident entre les deux frères X... jusqu'à ce que ce que l'intimé commence à réclamer le paiement de ses heures supplémentaires ; qu'en revanche, Gabriel X...
Y... reconnaît avoir tenu les propos qui lui sont reprochés mais soutient qu'ils n'étaient qu'une réponse aux provocations de son employeur qui voulait le faire sortir de ses gongs en lui tenant des propos blessant devant les autres salariés ; qu'il convient de souligner que ce moyen de défense était déjà connu dans la lettre de contestation du licenciement que l'intimé a envoyée à son frère le 2 janvier 2006 en reprenant certains des propos proférés par lui devant tous les membres du laboratoire, en substance " quand je t'ai embauché tu n'étais qu'un clochard, sans moi tu n'es rien je t'enverrai pleurer à l'assistance sociale pour bouffer ; pourquoi tu ne pars pas toi-même, tu t'accroches aux branches " ; que par ailleurs, le salarié démontre que cette provocation correspond bien au comportement habituel de Ligério X... dont le caractère agressif et colérique est décrit par plusieurs témoins, comme Vincent C... sur qui il criait, ou, Bernadette D..., qui venait faire le ménage la peur au ventre, ou encore sa propre soeur Christine qu'il avait agressée physiquement en l'étranglant de ses mains jusqu'à ce qu'elle perde connaissance et qui n'a dû son salut qu'à l'intervention de l'intimé ; que force est de constater que l'employeur reste taisant sur ces témoignages et sur la provocation alléguée par Gabriel X...
Y... ; que le doute devant profiter au salarié, il y a lieu de considérer que le comportement de celui-ci n'était qu'une réponse à celui de son employeur, ce qui prive ce second grief de toute pertinence ;
1°) ALORS QUE le refus du salarié de se soumettre aux directives de l'employeur constitue une faute grave lorsqu'il nuit au bon fonctionnement de l'entreprise ; qu'en se bornant à relever que la mauvaise qualité du travail du salarié n'était pas établie, au lieu de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par la lettre de licenciement, si celui-ci n'avait pas refusé d'obtempérer, tant le 3 novembre 2005 que le 22 novembre suivant, à l'injonction de l'employeur lui ayant demandé de rectifier son ouvrage, et si ce comportement, réitéré, n'avait pas nui au bon fonctionnement de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du code du travail ;
2°) ALORS QUE nul ne peut se constituer une preuve à lui-même ; qu'en se fondant exclusivement sur une lettre du salarié adressée à l'employeur, pour retenir que ce dernier avait tenu des propos provocateurs justifiant les insultes et menaces proférées à son encontre par le salarié, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
3°) ALORS QUE la lettre de licenciement reprochait au salarié d'avoir, à deux reprises en l'espace de trois semaines, insulté et menacé l'employeur devant le personnel de l'entreprise ; qu'en se bornant à imputer à l'employeur des propos provocateurs à l'égard du salarié, sans constater qu'ils avaient provoqué, en les précédant, les insultes et menaces proférées par ce dernier les 3 et 24 novembre 2005, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-40048
Date de la décision : 06/05/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 14 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 mai. 2009, pourvoi n°08-40048


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.40048
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