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30/04/2009 | FRANCE | N°07-43945

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 avril 2009, 07-43945


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1132-1 du code du travail, interprété à la lumière de la directive n° 2000/78 CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, ensemble l'article 12 de la convention collective d'entreprise du 13 juin 1991 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'article 12 de la convention collective d'entreprise du 13 juin 1991 de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles

(FDSEA) prévoit que l'indemnité de licenciement ne peut être supérieure à un...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1132-1 du code du travail, interprété à la lumière de la directive n° 2000/78 CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, ensemble l'article 12 de la convention collective d'entreprise du 13 juin 1991 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'article 12 de la convention collective d'entreprise du 13 juin 1991 de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA) prévoit que l'indemnité de licenciement ne peut être supérieure à un plafond correspondant au montant alloué à un salarié ayant douze années d'ancienneté ; que M. X..., engagé par la FDSEA de la Marne le 21 janvier 1974 a été licencié le 17 octobre 2003 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes en soutenant notamment que le plafonnement du montant de l'indemnité de licenciement constituait une discrimination indirecte préjudiciable aux salariés les plus âgés ;
Attendu que pour juger que le plafonnement de l'indemnité de licenciement n'était pas opposable au salarié, l'arrêt retient qu'il est admis que les stipulations d'accords collectifs qui bien qu'accordant des avantages supérieurs à ceux de la loi présentent un caractère discriminatoire au regard de certaines catégories de personnel doivent être réputées non écrites ; qu'en l'espèce, le plafonnement à douze années d'ancienneté est constitutif d'une discrimination à l'égard de tous les salariés auxquels l'accord collectif est applicable et justifiant d'une ancienneté supérieure à douze ans ; qu'il s'ensuit que la règle de l'égalité doit être rétablie ;

Attendu cependant qu'il n'y a de discrimination indirecte en raison de l'âge que lorsqu'une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d'entraîner un désavantage particulier pour des personnes d'un âge donné par rapport à d'autres personnes à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors, d'une part, qu'elle avait relevé que les salariés ayant au moins douze ans d'ancienneté percevaient une indemnité de licenciement supérieure au montant légal, et, d'autre part, qu'il ne résultait pas de ses constatations que le plafonnement de l'indemnité de licenciement avait pour effet de désavantager les salariés du fait de leur âge, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit et jugé que le plafonnement de l'indemnité de licenciement n'était pas opposable au salarié et condamné la FDSEA à payer la somme de 75 322,26 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 13 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile, et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de la Marne (FDSEA).
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit et jugé que le plafonnement de l'indemnité de licenciement n'était pas opposable à Monsieur Gilbert X... et d'avoir en conséquence condamné la FDSEA à verser à Monsieur X... la somme de 75 322,26 à titre de complément d'indemnité de licenciement correspondant à son ancienneté effective, outre une indemnité de 1 500 en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE «Monsieur Gilbert X... a reçu 50 214,84 au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, soit 12 fois le salaire brut mensuel perçu par l'appelant au cours des douze derniers mois (4 484,57 ) ; que ce calcul résulte de l'application des stipulations de l'article 12 de la convention d'entreprise applicable ; que Monsieur Gilbert X... soutient que le plafonnement de l'indemnité conventionnelle de licenciement ne lui est pas opposable en ce qu'il crée une discrimination indirecte portant atteinte au principe de l'article L. 122-45 du Code du travail ; que la FDSEA fait observer que l'indemnité conventionnelle est plus favorable que l'indemnité légale dont l'application n'aurait permis à Monsieur Gilbert X... de ne percevoir que 18 133,13 ; que les premiers juges ont rejeté ce chef de prétention de l'appelant au motif que le plafonnement prévu par la convention d'entreprise ne repose pas sur un critère d'âge mais d'ancienneté et n'est donc pas discriminatoire ; qu'il est toutefois désormais admis que les stipulations d'accords collectifs qui bien qu'accordant des avantages supérieurs à ceux de la loi présentent un caractère discriminatoire au regard de certaines catégories de personnels doivent être réputées non écrites ; qu'en l'espèce, le plafonnement à douze années d'ancienneté est constitutif d'une discrimination à l'égard de tous les salariés auxquels l'accord collectif est applicable et justifiant d'une ancienneté supérieure à douze ans ; qu'il s'ensuit que la règle de l'égalité doit être rétablie et que la FDSEA sera condamnée à verser à Monsieur Gilbert X... le différentiel entre l'indemnité qu'il aurait dû percevoir (125 537,10 ) représentant trente mois de salaire brut et celle qu'il a effectivement perçue (50 214,84 ), ce qui détermine une somme de 75 322,26 » ;
ALORS D'UNE PART QU'une convention collective détermine librement et limite éventuellement l'assiette de calcul de l'indemnité de licenciement qu'elle prévoit ; que cette indemnité conventionnelle s'applique si elle reste supérieure à l'indemnité légale ; qu'il en résulte que la disposition la plus favorable s'applique dans son intégralité, même si l'une de ses composantes est moins avantageuse que celle prévue par la loi ; qu'en jugeant que le plafonnement de l'indemnité de licenciement n'était pas opposable à Monsieur Gilbert X... pour condamner la FDSEA à lui verser la somme de 75 322,26 à titre de complément d'indemnité de licenciement correspondant à son ancienneté effective, la Cour d'appel a violé l'article 12 de la convention d'entreprise du 13 juin 1991, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE le plafonnement d'une indemnité conventionnelle de licenciement ne constitue pas une disparité de traitement engendrant une discrimination prohibée ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article L. 122-45 du Code du travail ;
ALORS ENFIN QUE l'indemnité conventionnelle de licenciement étant fixée par application de la convention collective, le juge ne peut exercer les pouvoir modérateur que lui confère l'article 1152 du Code civil ; qu'en allouant une indemnité d'un montant supérieur à celui qui était fixé par la convention collective, la Cour d'appel a violé l'article 1152 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-43945
Date de la décision : 30/04/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Discrimination entre salariés - Discrimination fondée sur l'âge - Discrimination indirecte - Définition - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Discrimination entre salariés - Discrimination fondée sur l'âge - Discrimination indirecte - Défaut - Cas - Plafonnement de l'indemnité conventionnelle de licenciement au-delà d'une certaine ancienneté - Condition

Une discrimination indirecte en raison de l'âge n'est constituée que dans le cas où une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre, est susceptible d'entraîner un désavantage particulier pour des personnes d'un âge donné par rapport à d'autres personnes à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires. Encourt dès lors la cassation l'arrêt qui relève l'existence d'une discrimination indirecte en raison de l'âge au détriment du salarié du fait du plafonnement du montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement à partir de 12 ans d'ancienneté, alors que le montant versé est supérieur au montant légal et qu'il ne résulte pas de ses constations que le plafonnement de l'indemnité de licenciement avait pour effet de désavantager les salariés du fait de leur âge


Références :

article 12 de la convention collective d'entreprise de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du 13 juin 1991
article L. 1132-1 du code du travail

Directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 13 juin 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 avr. 2009, pourvoi n°07-43945, Bull. civ. 2009, V, n° 118
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 118

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Aldigé
Rapporteur ?: M. Gosselin
Avocat(s) : SCP Peignot et Garreau, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.43945
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