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29/04/2009 | FRANCE | N°07-44117;07-44118;07-44119;07-44120;07-44121;07-44122

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 avril 2009, 07-44117 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° Y 07-44.117, Z 07-44.118, A 07-44.119, B 07-44.120, C 07-44.121 et D 07-44.122 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Lyon, 26 juin 2007), que la société Kennamétal France qui appartient au groupe Kennamétal, a, au cours du second semestre 2003, transféré une partie de l'activité de son établissement d'Andrézieux à une filiale allemande du groupe située à Essen ainsi que reconsidéré ses procédés de production ; que cette restructuration impliquant une r

éduction de ses effectifs, elle a établi un plan de sauvegarde de l'emploi qui p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° Y 07-44.117, Z 07-44.118, A 07-44.119, B 07-44.120, C 07-44.121 et D 07-44.122 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Lyon, 26 juin 2007), que la société Kennamétal France qui appartient au groupe Kennamétal, a, au cours du second semestre 2003, transféré une partie de l'activité de son établissement d'Andrézieux à une filiale allemande du groupe située à Essen ainsi que reconsidéré ses procédés de production ; que cette restructuration impliquant une réduction de ses effectifs, elle a établi un plan de sauvegarde de l'emploi qui prévoyait que les salariés qui se porteraient candidats à un départ bénéficieraient notamment d'avantages pécuniaires ; que M. X... et d'autres salariés qui avaient fait acte de candidature ont été licenciés, pour motif économique, le 10 octobre 2003 ;

Sur les premier et deuxième moyens réunis, qui sont communs aux pourvois :

Attendu que la société Kennamétal France fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en vertu de l'article 12, alinéa 2, du code de procédure civile, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux, sans s'en tenir à la dénomination que les parties en ont proposée ; qu'en s'en tenant, par adoption des motifs des premiers juges, aux termes de « licenciement économique » formellement énoncés dans la lettre de rupture du contrat de travail, sans rechercher si la candidature du salarié au départ volontaire, et l'acceptation de cette candidature par l'employeur, qu'elle a constatées, caractérisaient une rupture amiable du contrat de travail, la cour d'appel a méconnu son office en violation du texte précité ;

2°/ qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas légalement justifié son arrêt au regard des articles 1134 du code civil et L. 121-1 du code du travail, dont il résulte que l'employeur et le salarié sont autorisés à mettre fin au contrat de travail par la voie de leur consentement mutuel ;

3°/ que sans préjudice des dispositions de l'article L. 122-14-7 du code du travail, la rupture du contrat de travail pour motif économique peut résulter non seulement d'un licenciement, mais aussi d'un départ volontaire du salarié dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation des instances représentatives du personnel, cette rupture constituant une résiliation amiable du contrat de travail exclusive de l'application des règles du licenciement économique ; qu'en écartant le principe d'une résiliation amiable du contrat de travail au motif erroné que les dispositions du texte précité interdisent de renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles du licenciement, la cour d'appel a violé ce texte, ensemble les articles 1134 du code civil et L. 121-1 du code du travail ;

4°/ qu'en vertu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Kennamétal France soumis au comité central d'entreprise, et prévu par l'accord de méthode, les mesures « d'accompagnement » ont pour objet d'aider les salariés candidats à un départ volontaire, dont elles constituent la contrepartie ; que la cour d'appel a constaté que le courrier du salarié emportait adhésion de sa part à des mesures d'accompagnement, ce dont il résultait qu'il avait été mis fin à son contrat de travail par la voie de la résiliation amiable, exclusive de l'application des règles du licenciement ; qu'ainsi la cour d'appel, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé les articles 1134 du code civil, L. 121-1 et L. 321-1, alinéa 2, du code du travail ;

5°/ que la cour d'appel, à tout le moins, devait rechercher si les mesures d'accompagnement du plan de sauvegarde de l'emploi à l'égard desquelles elle a constaté l'adhésion des salariés, ne constituaient pas la contrepartie des départs volontaires ; qu'en se bornant à constater l'adhésion aux dites mesures, sans en examiner la portée, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 121-1 et L. 321-1, alinéa 2, du code du travail ;

6°/ que le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis d'un acte écrit soumis à son analyse ; que par sa lettre en date du 22 août 2003, M. X... a déclaré «Suite aux licenciements prévus en cette fin d'année et à la proposition de départ basé sur le volontariat, j'émets le souhait de ma démission au sein de l'entreprise Kennamétal France» ; que, par sa lettre du 13 septembre 2003, M. Y... a déclaré "Je vous informe par la présente lettre, de mon désir d'un départ volontaire du site d'Andrézieux" ; que, par lettre du 3 septembre 2003, M. Z... a déclaré "Par courrier avec AR, je vous informe de la décision que j'ai prise de me porter volontaire pour les licenciements économiques qui auront lieu dans les mois à venir" ; que, par lettre du 15 septembre 2003, Mme A... a déclaré "Je tiens à vous faire part par la présente de mon souhait de me porter volontaire dans le cadre des départs volontaires prévus dans le plan de restructuration. En effet, j'ai un projet personnel pour travailler dans le prêt à porter, ce qui constitue pour moi un objectif de longue date" ; que, par lettre du 10 septembre 2002, M. B... a déclaré "Un plan de restructuration étant actuellement mis en place dans l'entreprise, je vous informe que je suis candidat au départ dans le cadre de ce plan" ; que, par lettre du 2 septembre 2003, Mme C... a déclaré "Dans le cadre du plan de restructuration mis en place au sein de la société Kennamétal, dont je suis salariée, je vous prie de bien vouloir prendre en compte ma candidature au départ volontaire. Il ne s'agit pas là d'un coup de tête, mais d'un projet mûrement réfléchi, qui me tient à coeur puisque, comme vous le savez déjà je prépare actuellement le concours d'aide soignante, mon objectif étant à long terme l'obtention d'un diplôme d'infirmière" ; qu'en énonçant pour chacune de ces lettres qu'elle avait pour seule portée l'adhésion par le salarié à des mesures d'accompagnement figurant au plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel les a dénaturées en violation de l'article 1134 du code civil ;

7°/ que le juge est tenu de respecter l'objet du litige, tel qu'il est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que le salarié dans ses conclusions devant la cour d'appel, a admis sans ambiguïté s'être porté candidat à un départ volontaire ; qu'en retenant que le salarié s'était borné à adhérer à des mesures d'accompagnement, là où l'intéressé admettait avoir posé sa candidature pour un départ volontaire, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel qui, hors toute dénaturation et sans sortir des limites du litige, a retenu que le licenciement économique de salariés qui ont exprimé l'intention de quitter l'entreprise en bénéficiant des avantages prévus par le plan de sauvegarde de l'emploi ne constitue pas une rupture amiable du contrat de travail, a par ce seul motif légalement justifié sa décision ;

Sur le troisième moyen commun aux pourvois :

Attendu que la société Kennamétal France fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsqu'elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité dont elle relève, en prévenant des difficultés économiques et de leurs conséquences sur l'emploi, la réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique de licenciement non subordonné à l'existence de difficultés économiques à la date du licenciement ; qu'en écartant l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement en se référant à un rapport d'expertise portant sur des comptes clos au 30 juin 2003, dont elle a déduit l'absence de difficultés économiques à la date du licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1 du code du travail ;

2°/ que la cause économique de la réorganisation intervenue dans le cadre d'une gestion prévisionnelle de l'emploi, afin de prévenir des difficultés économiques et de leurs conséquences sur l'emploi, s'apprécie au regard d'éléments propres à établir une dégradation de la situation de l'entreprise, et les risques encourus ; que la société Kennamétal dans ses conclusions, a fait valoir pièces à l'appui, les prévisions d'évolution du marché et d'indices «témoins» de sa situation financière, comme de la concurrence ; qu'en s'abstenant de vérifier si l'évolution prévue et invoquée par l'employeur, était de nature à justifier la restructuration intervenue, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 321-1 du code du travail ;

3°/ que la nécessité de sauvegarder la compétitivité s'apprécie, lorsque l'entreprise fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité auquel elle appartient ; que si le premier juge s'est référé au secteur du travail du métal, la société Kennamétal France, dans ses conclusions, a fait valoir qu'elle appartenait au secteur plus réduit de la fabrication des outils de coupe, autrement dénommé «metal working» ; qu'en se bornant à se référer au «secteur d'activité du groupe», sans identifier celui auquel se rattachait la société Kennamétal France, au niveau duquel elle devait apprécier la nécessité de procéder à la restructuration, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 321-1 du code du travail ;

4°/ que le juge ne peut laisser sans réponse des moyens de nature à influer sur la solution du litige ; que la société Kennamétal France dans ses conclusions devant la cour d'appel, a contesté point par point les moyens du salarié, relatifs notamment au recours aux heures supplémentaires, au travail intérimaire et à la sous-traitance durant les mois qui ont suivi la réorganisation, et au choix de rationalisation de la production du site d'Andrézieux et du transfert parallèle d'une partie de son activité sur le site allemand d'Essen ; qu'en se déterminant par une simple énumération des moyens du salarié, sans répondre à ceux opposés par la société Kennamétal France, la cour d'appel a méconnu les exigences de motivation de l'article 455 du code de procédure civile, et a violé ce texte ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu, par motifs adoptés des premiers juges, que le secteur d'activité du groupe dont relevait l'entreprise était celui du travail du métal ; que, d'autre part, elle a constaté que le chiffre d'affaires de ce secteur d'activité au niveau duquel devait être appréciée la raison économique du licenciement était en progression et que les éléments invoqués pour justifier d'une menace sur sa compétitivité étaient la conséquence de la réorganisation décidée par l'employeur ; que, dès lors, elle a pu décider, sans encourir les griefs du moyen, que la réorganisation n'était pas nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité et que le licenciement des salariés était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Sur le quatrième moyen, commun aux pourvois :

Attendu que la société Kennamétal France fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de compensation entre les sommes perçues en exécution du plan de sauvegarde de l'emploi sous la dénomination « indemnités additionnelles PSE », et celle allouée au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que l'indemnité versée par l'employeur au salarié qui accepte de quitter volontairement l'entreprise dans le cadre d'un plan social établi en vue d'un projet de compression des effectifs pour motif économique, a la nature de dommages-intérêts compensant le préjudice subi par le salarié né de la rupture de son contrat de travail ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 121-1 du code du travail ;

2°/ que l'employeur ne peut être tenu d'indemniser deux fois le préjudice résultant de la rupture du contrat de travail ; que le salarié bénéficiaire d'une indemnité versée en exécution d'un plan social en contrepartie de l'acceptation de son départ volontaire, doit en restituer le montant lorsqu'il fait requalifier la rupture de son contrat de travail en un licenciement économique, et obtient l'allocation d'une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la cour d'appel qui a procédé à une telle requalification et a alloué au salarié une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans ordonner la restitution des sommes versées en exécution du plan de sauvegarde de l'emploi sous la dénomination « indemnités additionnelles PSE », ni opérer leur compensation avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, a violé les articles L. 122-14-4 et L. 121-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu que les indemnités complémentaires prévues par un plan de sauvegarde de l'emploi pour faciliter le reclassement des salariés licenciés n'ont pas le même objet que les dommages-intérêts qui réparent les irrégularités de forme et de fond du licenciement, de sorte qu'elles se cumulent avec l'indemnité allouée au titre de l'article L. 122-14-4, alinéa 1, phrases 2 et 3, devenu L. 1235-3 du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Kennamétal France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf avril deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens communs aux pourvois n° Y 07-44.117 à B 07-44.120, produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Kennamétal France.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'ancien employeur, la société Kennametal France, au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE Monsieur X..., par lettre, a fait part de sa candidature au départ volontaire dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi ; que par lettre RAR en date du 10 octobre 2003, la société Kennametal France a accepté le volontariat et a procédé à son licenciement sans qu'aucune tentative de reclassement ne soit requise ; que les termes de ce courrier émanant de l'employeur sont les suivants : « dans ce contexte et conformément aux dispositions du plan de sauvegarde de l'emploi, nous sommes amenés à vous notifier votre licenciement pour cause économique » ; que la société Kennametal France fait valoir que le départ volontaire pour motif économique échappe aux règles du licenciement inscrites aux articles L.122-14 et suivants du Code du travail et que ce type de rupture doit s'analyser comme une rupture amiable du contrat de travail ; que cependant cette société a bien notifié au salarié son licenciement, et a considéré que la notification du licenciement entraînait la rupture du contrat de travail ; que le licenciement ne peut être rétracté, sauf si le salarié y consent, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que la rupture du contrat de travail ayant pris la forme d'un licenciement, il y a lieu de dire que l'ancien salarié est bien fondé à contester son caractère réel et sérieux ;

ALORS D'UNE PART QU'en vertu de l'article 12 alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux, sans s'en tenir à la dénomination que les parties en ont proposée; qu'en s'en tenant, par adoption des motifs des premiers juges, aux termes de « licenciement économique » formellement énoncés dans la lettre de rupture du contrat de travail, sans rechercher si la candidature du salarié au départ volontaire, et l'acceptation de cette candidature par l'employeur, qu'elle a constatées, caractérisaient une rupture amiable du contrat de travail, la Cour d'appel a méconnu son office en violation du texte précité ;

ALORS D'AUTRE PART QU'en statuant ainsi, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié son arrêt au regard des articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail, dont il résulte que l'employeur et le salarié sont autorisés à mettre fin au contrat de travail par la voie de leur consentement mutuel ;

ET AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article L. 122-14-7 du Code du travail, les parties ne peuvent renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles posées par la loi en matière de licenciement ; que la société Kennametal a procédé au licenciement économique du salarié par courrier du 10 octobre 2003 ; que le moyen tiré d'une rupture amiable est donc contraire aux faits, le courrier du salarié du 26 août 2003 n'ayant pour portée dans les circonstances de l'espèce que l'adhésion par lui à des mesures d'accompagnement figurant au plan de sauvegarde de l'emploi, sans constituer une rupture amiable du contrat de travail par les parties ;

ALORS DE TROISIEME PART QUE sans préjudice des dispositions de l'article L. 122-14-7 du Code du travail, la rupture du contrat de travail pour motif économique peut résulter non seulement d'un licenciement, mais aussi d'un départ volontaire du salarié dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation des instances représentatives du personnel, cette rupture constituant une résiliation amiable du contrat de travail exclusive de l'application des règles du licenciement économique ; qu'en écartant le principe d'une résiliation amiable du contrat de travail au motif erroné que les dispositions du texte précité interdisent de renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles du licenciement, la Cour d'appel a violé ce texte, ensemble les articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ;

ALORS DE QUATRIEME PART QU'en vertu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Kennametal France soumis au comité central d'entreprise, et prévu par l'accord de méthode, les mesures « d'accompagnement » ont pour objet d'aider les salariés candidats à un départ volontaire, dont elles constituent la contrepartie ; que la Cour d'appel a constaté que le courrier du salarié emportait adhésion de sa part à des mesures d'accompagnement, ce dont il résultait qu'il avait été mis fin à son contrat de travail par la voie de la résiliation amiable, exclusive de l'application des règles du licenciement ; qu'ainsi la Cour d'appel, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a violé les articles 1134 du Code civil, L. 121-1 et L.321-1 al.2 du Code du travail ;

ALORS ENFIN QUE la Cour d'appel, à tout le moins, devait rechercher si les mesures d'accompagnement du plan de sauvegarde de l'emploi à l'égard desquelles elle a constaté l'adhésion des salariés, ne constituaient pas la contrepartie des départs volontaires; qu'en se bornant à constater l'adhésion aux dites mesures, sans en examiner la portée, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1134 du Code civil, L. 121-1 et L.321-1 al.2 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'ancien employeur, la société Kennametal France, au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE le moyen tiré d'une rupture amiable est contraire aux faits, le courrier du salarié du 26 août 2003 n'ayant pour portée dans les circonstances de l'espèce que l'adhésion par lui à des mesures d'accompagnement figurant au plan de sauvegarde de l'emploi, sans constituer une rupture amiable du contrat de travail par les parties ;

ALORS D'UNE PART QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis d'un acte écrit soumis à son analyse ; que par sa lettre en date du 22 août 2003 (production), le salarié a déclaré « Suite aux licenciements prévus en cette fin d'année et à la proposition de départ basé sur le volontariat, j'émets le souhait de ma démission au sein de l'entreprise Kennametal France » ; qu'en énonçant que cette lettre avait pour seule portée l'adhésion par le salarié à des mesures d'accompagnement figurant au plan de sauvegarde de l'emploi, la Cour d'appel l'a dénaturée en violation de l'article 1134 du Code civil ;

ALORS D'AUTRE PART QUE le juge est tenu de respecter l'objet du litige, tel qu'il est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que le salarié dans ses conclusions devant la Cour d'appel, a admis sans ambiguïté s'être porté candidat à un départ volontaire (conclusions p. 5 : production); qu'en retenant que le salarié s'était borné à adhérer à des mesures d'accompagnement, là où l'intéressé admettait avoir posé sa candidature pour un départ volontaire, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné l'ancien employeur, la société Kennametal France, au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE dans le cadre de la nécessaire sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, la baisse du chiffre d'affaires invoqué par l'employeur dans la lettre de licenciement doit être examinée, la dégradation des résultats constituant un des éléments permettant de distinguer la sauvegarde de la compétitivité de la seule recherche de profit ; qu'il ressort du rapport d'expertise sur les comptes annuels clos au 30 juin 2003 de la société Kennametal que la situation financière de la société Kennametal France est solide et présente un bon équilibre entre les emplois et les ressources ; qu'au niveau du groupe, Kennametal présente un bilan financier équilibré ; qu'au niveau du secteur d'activité du groupe « travail du métal », représentant 64 % du chiffre d'affaires du groupe Kennametal, il y a eu un recul du résultat opérationnel provenant de l'effet dilutif de l'intégration de WIDIA sur les marges, d'un mix-produit défavorable et d'une pression sur les prix mais qu'il a pu être constaté une croissance de l'activité liée à l'acquisition de WIDIA et les effets de marge favorables ; qu'est ainsi constatée une situation financière solide au niveau du groupe et de Kennametal France ; que dans ces conditions la seule baisse du chiffre d'affaires sur une année n'est pas de nature à établir que la compétitivité de l'entreprise est menacée ; qu'en outre le rapport du cabinet comptable montre que le recul des perspectives pour 2004 expliqué par une augmentation du coût des matières premières en raison de l'achat par le site d'Andrézieux des ébauches à la place de la poudre suite à l'arrêt des presses et par le recours à la sous-traitance en raison de la réorganisation et du transfert des presses, est lié à a restructuration elle-même ; que s'agissant du site d'Andrézieux, la baisse alléguée de la production a cessé en avril, mai et juin 2003, que le transfert des poudres ne justifiait pas automatiquement le transfert des activités de presse et de frittage ; qu'en outre l'argument selon lequel l'outillage d'Andrézieux était ancien et nécessitait des investissements importants n'est pas entièrement opérant puisque certaines machines sont utilisées ailleurs ; que de plus le transfert de la production des bases à Essen a généré un allongement des délais et une augmentation des coûts ; que la société a eu recours à la sous-traitance en 2004, essentiellement pour un motif d'accroissement temporaire d'activité, et a fait accomplir des heures supplémentaires par le personnel permanent ; que la restructuration décidée par la société Kennamétal France n'est donc justifiée ni au regard de la compétitivité de l'entreprise ni au regard de l'activité et du fonctionnement du site d'Andrézieux ;

ET AUX MOTIFS PROPRES QUE la société Kennametal France énonce comme cause de la restructuration une baisse du chiffre d'affaires à son niveau et à celui du groupe, l'aggravation de la baisse de production du site d'Andrézieux en 2003 et la nécessité de rationaliser l'outil de production au niveau européen comme de réorienter la politique d'investissement, et enfin l'augmentation du poids des charges de personnel dans la structure des coûts en 2001 et 2002 ; que les constats invoqués, à eux seuls, ne démontrent pas une menace sur la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe ; qu'en effet il ressort du rapport d'expertise comptable présenté au comité d'entreprise le 30 juin 2003 que si les perspectives 2004 étaient en recul, la situation de Kennametal France était solide et en bon équilibre entre les emplois et les ressources ; que le salarié pour sa part évoque notamment l'avantage procuré par la surproduction du site d'Andrézieux, les bons résultats de la société et du groupe, l'accroissement du nombre des heures supplémentaires, le recours à des intérimaires, l'accroissement de l'activité ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, la Cour a la conviction au sens de l'article L. 122-14-3 du Code du travail que le licenciement ne procède pas d'une cause réelle et sérieuse, les facteurs invoqués par la société Kennametal France étant liés à la réorganisation elle-même, dans un contexte en réalité de bonne santé économique tant au niveau de l'entreprise que du secteur d'activité du groupe ;

ALORS D'UNE PART QUE lorsqu'elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité dont elle relève, en prévenant des difficultés économiques et de leurs conséquences sur l'emploi, la réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique de licenciement non subordonné à l'existence de difficultés économiques à la date du licenciement ; qu'en écartant l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement en se référant à un rapport d'expertise portant sur des comptes clos au 30 juin 2003, dont elle a déduit l'absence de difficultés économiques à la date du licenciement, la Cour d'appel a violé l'article L. 321-1 du Code du travail ;

ALORS D'AUTRE PART QUE la cause économique de la réorganisation intervenue dans le cadre d'une gestion prévisionnelle de l'emploi, afin de prévenir des difficultés économiques et de leurs conséquences sur l'emploi, s'apprécie au regard d'éléments propres à établir une dégradation de la situation de l'entreprise, et les risques encourus ; que la société Kennametal dans ses conclusions, a fait valoir pièces à l'appui, les prévisions d'évolution du marché et d'indices « témoins » de sa situation financière, comme de la concurrence (conclusions p. 34 : production) ; qu'en s'abstenant de vérifier si l'évolution prévue et invoquée par l'employeur, était de nature à justifier la restructuration intervenue, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 321-1 du Code du travail ;

ALORS DE TROISIEME PART QUE la nécessité de sauvegarder la compétitivité s'apprécie, lorsque l'entreprise fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité auquel elle appartient ; que si le premier juge s'est référé au secteur du travail du métal, la société Kennametal France, dans ses conclusions, a fait valoir qu'elle appartenait au secteur plus réduit de la fabrication des outils de coupe, autrement dénommé « metal working » (conclusions p. 30 et 34) ; qu'en se bornant à se référer au « secteur d'activité du groupe », sans identifier celui auquel se rattachait la société Kennametal France, au niveau duquel elle devait apprécier la nécessité de procéder à la restructuration, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 321-1 du Code du travail ;

ALORS ENFIN QUE le juge ne peut laisser sans réponse des moyens de nature à influer sur la solution du litige ; que la société Kennametal France dans ses conclusions devant la Cour d'appel, a contesté point par point les moyens du salarié, relatifs notamment au recours aux heures supplémentaires, au travail intérimaire et à la sous-traitance durant les mois qui ont suivi la réorganisation, et au choix de rationalisation de la production du site d'Andrézieux et du transfert parallèle d'une partie de son activité sur le site allemand d'Essen (conclusions pour l'audience du 1er décembre 2006 p. 44 et s. ; conclusions pour l'audience du 4 mai 2007 : production) ; qu'en se déterminant par une simple énumération des moyens du salarié, sans répondre à ceux opposés par la société Kennametal France, la Cour d'appel a méconnu les exigences de motivation de l'article 455 nouveau Code de procédure civile, et a violé ce texte.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de compensation entre les sommes perçues en exécution du plan de sauvegarde de l'emploi sous la dénomination « indemnités additionnelles PSE », et celle allouée au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE l'octroi de dommages et intérêts résulte de l'article L. 122-14-4 du Code du travail et sanctionne le défaut de cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il ne peut donc y avoir de compensation entre ces dommages et intérêts et les sommes perçues dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi ;

ET AUX MOTIFS PROPRES QUE la mesure pécuniaire d'accompagnement servie en exécution du plan de sauvegarde pour l'emploi n'a pas pour objet l'indemnisation du préjudice résultant de la perte de l'emploi ;

ALORS D'UNE PART QUE l'indemnité versée par l'employeur au salarié qui accepte de quitter volontairement l'entreprise dans le cadre d'un plan social établi en vue d'un projet de compression des effectifs pour motif économique, a la nature de dommages et intérêts compensant le préjudice subi par le salarié né de la rupture de son contrat de travail ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ;

ALORS D'AUTRE PART QUE l'employeur ne peut être tenu d'indemniser deux fois le préjudice résultant de la rupture du contrat de travail ; que le salarié bénéficiaire d'une indemnité versée en exécution d'un plan social en contrepartie de l'acceptation de son départ volontaire, doit en restituer le montant lorsqu'il fait requalifier la rupture de son contrat de travail en un licenciement économique, et obtient l'allocation d'une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la Cour d'appel qui a procédé à une telle requalification et a alloué au salarié une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans ordonner la restitution des sommes versées en exécution du plan de sauvegarde de l'emploi sous la dénomination « indemnités additionnelles PSE », ni opérer leur compensation avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, a violé les articles L. 122-14-4 et L. 121-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-44117;07-44118;07-44119;07-44120;07-44121;07-44122
Date de la décision : 29/04/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 26 juin 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 avr. 2009, pourvoi n°07-44117;07-44118;07-44119;07-44120;07-44121;07-44122


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.44117
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