LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à Mme X... du désistement de son pourvoi en tant que formé contre M. Y... et la société Tropic Hall ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... s'est rendue caution solidaire envers la Banque populaire du Midi, devenue la Banque populaire du Sud, (la banque) à concurrence de la moitié d'un prêt de 15 000 euros accordé le 15 avril 2002 à la société Tropic Hall (la société), dont elle était la gérante ; que la banque a assigné Mme X... le 10 novembre 2004 en exécution de son engagement ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé sa condamnation à payer à la banque les sommes dues par la société, solidairement avec celle-ci et M. Y..., à concurrence de la somme de 4 338,75 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement, sauf à en déduire la somme de 875,88 euros correspondant aux intérêts entre la date du contrat et le 19 novembre 2004, alors, selon le moyen :
1°/ qu'engage sa responsabilité le banquier qui fait souscrire, à plus forte raison sans la mettre en garde, à une caution non avertie un engagement sans proportion avec ses biens et ressources ; que la cour d'appel ne pouvait déduire le caractère non profane de Mme X... de son implication dans la société sans s'expliquer sur la connaissance et la conscience qu'elle pouvait avoir de la portée de ses engagements ; qu'en statuant par de tels motifs , la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
2°/ que le caractère disproportionné de l'engagement souscrit s'apprécie au regard des seuls biens et ressources de la caution à la date de son engagement ; qu'en prétendant écarter celui-ci en tenant compte des possibilités de développement des activités de la société débitrice principale, la cour d'appel a à nouveau statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que Mme X..., fondatrice de la société et associée à concurrence de 40 % des parts sociales, en était la gérante à la date de l'octroi du prêt et en déduit qu'elle était une caution avertie ; qu'en l'état de ces seules constatations et appréciations, desquelles il résulte que la banque n'était tenue d'aucun devoir de mise en garde à l'égard de Mme X... qui n'a jamais prétendu que celle-ci aurait eu sur ses revenus , son patrimoine et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l'état du succès escompté de l'entreprise, des informations qu'elle-même aurait ignorées, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 2024 devenu 2301 du code civil ;
Attendu que pour la rejeter, l'arrêt retient que la demande de Mme X... fondée sur l'article 2024 du code civil repose sur un texte abrogé par l'ordonnance du 23 mars 2006 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'ordonnance du 23 mars 2006 s'est bornée à transférer la teneur de l'article 2024 du code civil dans l'article 2301 du même code, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné Mme X... à payer à la Banque populaire du Sud, dans la limite de 4 338,75 euros, en principal, intérêts au taux légal à compter des présentes jusqu'à parfait paiement, sur la somme de 8 677,45 euros avec intérêts au taux de 5,75 % du 1er novembre 2004 jusqu'à parfait paiement, sur la somme de 7 985,08 euros et au taux légal à compter des présentes jusqu'à parfait paiement sur la somme de 638,81 euros, sauf à en déduire la somme de 875,88 euros, l'arrêt rendu le 13 février 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne la Banque populaire du Sud aux dépens ;
Vu les articles 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la SCP Roger et Sevaux la somme de 2 500 euros et à Mme X... la somme de 100 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mars deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils pour Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé la condamnation de Madame X..., en exécution de son engagement de caution, à lui payer les sommes dues par la société Tropical Hall solidairement avec celle-ci et Monsieur Christian Y... à hauteur de la somme de 4.338,75 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement, sauf à en déduire la somme de 875,88 euros correspondant aux intérêts entre la date du contrat et le 19 novembre 2004, outre la somme de 800 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et d'avoir condamné Madame X... à payer à la Banque Populaire du Sud la somme supplémentaire de 700 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Aux motifs que la disposition de l'article L.341-4 du Code de la consommation issue de la loi du 1er août 2003, selon lequel un créancier ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement souscrit par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné par rapport à ses biens et à ses revenus, n'est pas applicable aux contrats souscrits antérieurement à son entrée en vigueur ; qu'en l'espèce, le cautionnement souscrit le 15 avril 2002, avant la mise en application de cette disposition, échappe à cette disposition ; que Vanessa X... a été gérante de la société à compter de sa création le 2 avril 2002, jusqu'au 10 mai 2003, qu'elle a été fondatrice de la société, avec Monsieur Y..., et associée à hauteur de 40% ; qu'elle ne peut être qualifiée de caution profane alors qu'elle participait à la vie sociale et à l'activité ; qu'en tant que telle, elle est infondée à invoquer la responsabilité de la Banque en soutenant qu'elle lui a fait souscrire un engagement qu'elle n'était pas en mesure de comprendre ; que sa qualité de mère de famille, originaire de Côte d'Ivoire, n'implique pas son inaptitude à comprendre ce qu'elle faisait ; que le fait d'avoir cessé d'être gérante pour être remplacée par Monsieur Y... n'a pas eu pour effet de priver de cause son engagement, alors que celle-ci s'apprécie au moment de la conclusion du contrat et que la cause d'un cautionnement consiste dans la considération apportée au prêt d'argent, accordé à la débitrice principale ; que la circonstance selon laquelle elle ne faisait qu'obéir aux ordres de Monsieur Y..., et ne comprenait rien au rôle de gérante, n'est pas de nature à justifier d'un vice de son consentement, ou d'un dol, alors que la Banque est étrangère à de telles situations et qu'aucun reproche ne lui est adressé dans ses relations avec la caution ; que Madame X... ne peut tirer de la disproportion entre le montant de son engagement et ses ressources limitées au RMI l'existence d'une faute de la Banque alors que sa décision de créer une société et d'exploiter un fonds était de nature à la faire échapper à une telle situation financière et que le montant de l'engagement était proportionnel à l'envergure de la société et aux résultats qu'elle pouvait en retirer ; que Madame X... a été informée par la Banque, dès le 19 octobre 2004, de l'incident de paiement du mois d'août ; qu'elle y était tenue dès le premier incident mais devait toutefois s'assurer qu'il ne serait pas régularisé dans le délai d'un mois à compter de l'exigibilité de l'échéance ; que le bref délai s'étant écoulé entre les deux évènements pouvant être considéré comme un juste délai, nécessaire pour effectuer une formalité d'information, ne saurait être retenu contre la Banque et faire échapper la caution au paiement des pénalités ou intérêts de retard encourus ; que la Banque ne contestait pas ne pas avoir respecté l'obligation qui lui était faite par l'article L.313-22 du Code monétaire et financier d'informer la caution, avant le 31 mars de chaque année, de l'état de la dette, au 31 décembre de l'année précédente ; qu'elle encourt donc, en application de cette disposition, la déchéance des intérêts entre la date du contrat et le 19 novembre 2004, date de l'information donnée par l'assignation, chiffrée à la somme de 875,88 euros par la Banque ; que la décision sera émendée sur ce point, étant précisé que la demande en garantie formée par Madame X..., à l'encontre de Monsieur Y..., ne repose sur aucun fondement, mais seulement sur des allégations, et que celle fondée sur l'article 2024 du Code civil, repose sur un texte abrogé par l'ordonnance du 23 mars 2006 ;
Alors, de première part, qu'engage sa responsabilité le banquier qui fait souscrire, a fortiori sans la mettre en garde, à une caution non avertie un engagement sans proportion avec ses biens et ressources ; que la Cour d'appel ne pouvait déduire le caractère de caution non profane de Mademoiselle X... de son implication dans la société sans s'expliquer sur la connaissance et la conscience qu'elle pouvait avoir de la portée de ses engagements ; qu'en statuant par de tels motifs inopérants, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
Alors, d'autre part, que le caractère disproportionné de l'engagement souscrit s'apprécie au regard des seuls biens et ressources de la caution à la date de son engagement ; qu'en prétendant écarter celui-ci en tenant compte des possibilités de développement des activités de la société débitrice principale, la Cour d'appel a à nouveau statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
Alors, de troisième part, qu'en soulevant d'office, sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer, le moyen déduit de l'abrogation de l'article 2024 du Code civil par l'effet de l'ordonnance du 23 mars 2006, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
Alors, enfin, qu'en toute hypothèse, l'ordonnance du 23 mars 2006 s'étant bornée à transférer la teneur de l'article 2024 du Code civil dans l'article 2301 nouveau de ce même Code, la Cour d'appel ne pouvait affirmer que ces dispositions s'étaient trouvées purement et simplement abrogées et n'étaient plus applicables sans méconnaître la portée de ce texte, ensemble l'article 2301 du Code civil ;