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17/03/2009 | FRANCE | N°08-84518

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 mars 2009, 08-84518


Statuant sur le pourvoi formé par :
-
X... ou X...- X... Hugues,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11e chambre, en date du 11 juin 2008 qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de discrimination syndicale, a prononcé sur l'action civile ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 481-3 et L. 412-2 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Hugues Y... coupable de discrimination syndicale ; >" aux motifs qu'il résulte des pièces de la procédure que le contrat de travail d'...

Statuant sur le pourvoi formé par :
-
X... ou X...- X... Hugues,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11e chambre, en date du 11 juin 2008 qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de discrimination syndicale, a prononcé sur l'action civile ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 481-3 et L. 412-2 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Hugues Y... coupable de discrimination syndicale ;
" aux motifs qu'il résulte des pièces de la procédure que le contrat de travail d'Hugues X... la société Altior a été transféré le 25 mars 2003 à la société Axiem qui regroupait une trentaine de salariés, comportant le personnel administratif, la direction et les « managers » des consultants salariés de la SA Genthec, société faisant partie du groupe Axiem ; qu'en fait, jusqu'à son licenciement pour faute grave, le 21 juin 2005, Hugues X... exercé, sous le titre « directeur opérationnel », les fonctions de directeur de la SA Genthec qui employait à l'époque des faits environ deux cents soixante-six salariés, consultants en informatique envoyés en mission dans des entreprises pour réaliser des projets relatifs aux systèmes d'information ; qu'au vu des débats et des pièces produites la cour relève que si Hugues X... effectivement reçu des délégations spéciales afin de représenter la société Axiem pour assurer les réunions du comité d'entreprise du groupe Axiem et des délégués du personnel d'Axiem du 5 novembre 2004, le procès-verbal du comité d'entreprise du 5 novembre 2004 indique qu'il était seul à représenter la SA Genthec et qu'il allait prendre la suite de Marie Z... pour présider les réunions du comité d'entreprise et des délégués du personnel ; qu'ainsi, à compter des réunions du comité d'entreprise du 18 novembre 2004 (3 et 10 décembre 2004, 7 janvier, 4 février, 16 mars et 11 mai 2005), il était le seul représentant d'Axiem-Genthec, sans mention d'une habilitation spéciale et s'est fait assister pour les dernières par Patricia A..., dénommée « collaboratrice direction » ; que c'est, lors du comité d'entreprise du 3 décembre 2004, que le licenciement de Gaëtan B..., ingénieur cadre, délégué du personnel titulaire de la SA Genthec, a été examiné et voté à la majorité ; qu'il en est de même pour les réunions des délégués du personnel à compter du novembre 2004 et c'est Hugues X..., après le départ de Marie Z..., convoquera et réunira les représentants du personnel le 3 décembre 2004, 7 janvier, 4 février, 16 mars, 13 avril, 11 mai et 5 juin 2005 ; que c'est lui qui a reçu Gaëtan B... lors de l'entretien de licenciement ; qu'Hugues X... écrit au syndicat FO, à l'inspection du travail ou a répondu aux demandes de celle-ci, sous la signature « le directeur » sans jamais indiquer qu'il s'agissait pour le compte d'une autre personne : qu'ainsi, au syndicat CGT-FO le 7 janvier 2005, au sujet de la désignation de leur délégué et le 30 mars 2005 pour inviter à participer à la négociation annuelle obligatoire en transmettant les documents nécessaires à la négociation ; qu'ainsi, à l'inspection du travail, le 12 décembre 2004 au sujet des inter contrats, le 21 octobre 2004, pour demander l'autorisation de licencier Yvan C..., délégué du personnel et le 13 décembre 2004 pour formuler la même demande à l'égard de Gaëtan B... ; qu'à aucun moment, Hugues X... réagi lorsque l'inspection du travail lui écrivait en tant que directeur mais au contraire a répondu à ses courriers ; qu'il était le manager des « managers » qui s'adressaient à lui en cas de difficultés avec les salariés de leur équipe de consultants ;

" qu'il résulte des constatations qui précédent, qu'Hugues X... présentait, à compter de novembre 2004, la société pour présider le comité d'entreprise et les réunions des délégués du personnel ; que bien plus, il est intervenu comme le dirigeant effectif de la SA Genthec dans la gestion du personnel, ainsi que dans ses rapports avec l'inspection du travail, en n'invoquant à aucun moment des consignes qu'il aurait reçues de ses supérieurs et en ne signant jamais au nom et pour le compte de quelqu'un d'autre ; qu'il bénéficiait ainsi d'une délégation tacite de direction du personnel de la SA Genthec, étant doté de la compétence de l'autorité et des moyens nécessaires pour remplir ces fonctions ; que, dès lors, qu'ayant agit comme employeur des salariés de la SA Genthec, sa responsabilité pénale peut être recherchée pour les faits de discrimination syndicale qui sont l'objet des présentes poursuites » ;
" alors que les dirigeants sociaux ne peuvent s'exonérer de leur responsabilité pénale que s'ils démontrent qu'ils ont délégué leurs pouvoirs à des préposés pourvus de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires ; que la responsabilité pénale du préposé n'est donc engagée que s'il a bénéficié d'une telle délégation dans le domaine dans lequel l'infraction a été commise ; qu'au cas d'espèce, pour déclarer Hugues Y..., directeur opérationnel de la société Gentech, coupable de discrimination syndicale, la cour s'est bornée à constater qu'il avait représenté la société Gentech lors de plusieurs réunions du comité d'entreprise et des délégués du personnel, qu'il avait reçu un salarié lors de son entretien de licenciement et avait rédigé plusieurs courriers signés " le directeur " ; qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à caractériser l'existence, au profit d'Hugues Y..., d'une délégation de pouvoirs donnée par les dirigeants de la société Gentech en matière de gestion des ressources humaines, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attend que le moyen revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause et des éléments de preuve contradictoirement débattus, dont ils ont déduit, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, l'existence d'une délégation de pouvoirs régulièrement donnée au prévenu ; qu'un tel moyen ne saurait être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 481-3 et L. 412-2 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Hugues Y... coupable de discrimination syndicale ;
" aux motifs que l'enquête diligentée par l'inspection du travail, alertée par plusieurs salariés de la SA Genthec a conduit celle-ci à dresser un procès-verbal daté du 16 septembre 2005 ; qu'il ressort de ce procès-verbal qu'en mai 2004, six représentants du personnel, élus sur la liste FO, sur trente trois salariés étaient en inter contrat, soit six sur sept des représentants de ce syndicat ; que l'examen du tableau pour ce mois de mai révèle que les représentants FO sont en situation d'inter contrat depuis plusieurs mois et ce pour une durée bien supérieure à la durée moyenne fournie par l'employeur et que sur les dix salariés qui subissent une durée d'inter contrat supérieure à douze mois, cinq sont ces représentants du personnel ; que la demande d'autorisation de licenciement d'Yves C..., sollicitée le 21 octobre 2004, a été, malgré des indices sérieux de discrimination syndicale, finalement acceptée en raison seulement du souhait finalement exprimé par l'intéressé, compte tenu de la situation qui lui était faite ; que la demande d'autorisation de licenciement de Gaëtan B... a été refusée le 10 février 2005 en raison des « sérieux indices permettant de considérer que la demande de licenciement est directement liée au mandat détenu par le salarié » et aucun recours hiérarchique n'a été formé par la SA Genthec ; qu'en mars 2005, les rémunérations de ces salariés étaient inférieures à celles de salariés embauchés à la même période au même coefficient ou parmi les plus faibles à l'exception de celle de Najatte D..., étant cependant observé pour cette dernière que contrairement à trois autres salariés, son coefficient n'avait pas évolué ; que, si Hugues X... n'a pas pu, compte tenu de son licenciement intervenu le 21 juin 2005, répondre à la note d'observation que l'inspection du travail avait transmis à la SA Genthec le 20 juin 2005, il y a lieu de relever qu'aucune réponse n'a été adressée, ce qui laisse présumer que ni le groupe Axiem ni la SA Genthec n'avaient d'observations particulières à formuler ; que l'enquête préliminaire a établi que Gaëtan B... et Josiane E..., épouse F... sont restés en période d'inter contrat au moins jusqu'en juin 2005, Yves C... jusqu'à son départ, Joseph G... jusqu'en août 2005 ; que l'un et / ou l'autre de ces salariés FO, entendus par les services de police et / ou par le tribunal, a déclaré qu'à partir des élections de 2003, il n'avait plus eu de contrat, n'avait plus été affecté à un « manager », n'avait plus été convoqué aux réunions de recherche de contrat, avait été interdit d'accès aux équipes administratives, avait subi des pressions de la part d'Hugues X..., n'avait pas reçu de mission alors qu'une autre consultante, qui avait moins d'expérience, avait obtenu une mission qui rentrait pourtant parfaitement dans ses compétences ou encore avait reçu une lettre d'objectifs signée du prévenu alors qu'une telle lettre était tout à fait inhabituelle ou avait fait l'objet d'un avertissement disciplinaire injustifié ou enfin avait subi des pressions de la part d'Hugues X... pour quitter la société ; que par ailleurs, Josiane E..., épouse F... et Yves C... ont fait part, sans être utilement contredits, de l'hostilité manifestée à leur égard par Hugues X... fois qu'ils ont été élus délégués du personnel, celui-ci n'admettant apparemment pas que des cadres soient syndiqués ; qu'il y a lieu de relever que, par décisions du conseil de prud'hommes de Paris, pendantes devant la cour d'appel de Paris, la société Axiem a été condamnée pour discrimination syndicale à l'égard de Gaëtan B... et de Josiane E... ; qu'en faisant valoir que la société Axiem, filiale du groupe Altran, a rencontré des difficultés économiques engendrant d'importantes perturbations ; que de façon générale, les périodes d'inter contrats constituaient une difficulté récurrente de l'organisation du travail au sein de la société et cette difficulté a été soulignée par l'expertise que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a fait diligenter par décision du 1er février 2006 ; que les périodes d'inter contrats existaient avant l'élection des délégués du personne FO et n'ont donc pas été créées pour discriminer les salariés en considération de leur appartenance au syndicat FO ; que ces périodes d'inter contrats ont également visé d'autres salariés, tels Dominique H..., Jérôme I..., Edouard J... pour une période respectivement de quinze mois, de douze mois, de dix-huit mois et de vingt-quatre mois ; que les salariés FO, qui se sont plaints, avaient subi, avant leur élection en qualité de représentant du personnel FO, des périodes en inter contrat ; qu'Hugues X... combat pas utilement les éléments objectifs relevés plus haut qui établissent qu'à compter de la création d'une section syndicale FO et de l'institution représentative des délégués du personne qui a abouti à l'élection de représentants FO, la majorité de ceux-ci a, notamment, été mise dans des situations d'inter contrat sur une période anormalement longue, n'a pas vu leur rémunération évoluer et a fait l'objet d'une discrimination syndicale ; qu'en conséquence, au vu de l'ensemble des constatations qui précèdent, Hugues X... bien commis une discrimination syndicale à l'égard des salariés FO pendant la période où il a agi comme employeur ;

" 1°) alors que les dispositions de l'article L. 412-2 du code du travail concernant le délit d'entrave à l'exercice du droit syndical n'instituent aucune dérogation à la charge de la preuve en matière pénale, qui incombe à l'accusation, de sorte que le juge qui statue sur une poursuite exercée contre un employeur en application de ce texte ne saurait se déterminer par référence au partage de la charge de la preuve institué par l'article L. 122-45 du code du travail, selon lequel lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la cour ne pouvait donc, pour juger Hugues Y... coupable de discrimination syndicale, se borner à constater qu'il ne combattait pas utilement les éléments apportés par la partie civile laissant supposer l'existence d'une discrimination au détriment des représentants du syndicat CGT-FO au sein de l'entreprise ;
" 2°) alors que l'appréciation de l'existence d'une discrimination supposant une étude comparative entre la situation du ou des salariés s'estimant lésés avec celle des autres salariés, n'a pas légalement justifié sa décision la Cour qui s'est abstenue de répondre à l'argument péremptoire des conclusions d'Hugues Y..., s'appuyant sur les conclusions d'une étude établie par un cabinet indépendant à la demande du CHSCT, faisant valoir que des salariés dépourvus de mandats syndicaux ou adhérents d'autres syndicats que CGT-FO étaient, comme les représentants de cette organisation, placés, souvent durablement, en situation d'inter contrat, cette situation étant exclusivement liée à la conjoncture économique " ;
Attendu que, pour déclarer constitué à l'encontre de Hugues X... délit de discrimination syndicale, l'arrêt relève, notamment, qu'à compter de la création d'une section syndicale Force-ouvrière et de la mise en place d'une délégation du personnel ayant abouti à l'élection de représentants de ce syndicat, la majorité d'entre eux a été mise en situation d'inter-contrat sur une période anormalement longue et supérieure à la moyenne ; que les juges énoncent qu'une procédure de licenciement a été engagée à l'encontre de deux d'entre eux, fondée sur des motifs discriminatoires ; qu'ils ajoutent que les rémunérations des représentants de ce syndicat étaient inférieures à celles des salariés embauchés à la même période et au même coefficient ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, exempts d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Straehli conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-84518
Date de la décision : 17/03/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 mar. 2009, pourvoi n°08-84518


Composition du Tribunal
Président : M. Joly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.84518
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