La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/03/2009 | FRANCE | N°08-10326

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 mars 2009, 08-10326


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Félix X... est décédé le 8 mai 1969, laissant pour lui succéder son épouse, Louise Y..., commune en biens meubles et acquêts et bénéficiaire d'une donation entre époux, et leurs trois enfants, M. X..., Mmes Z... et A... ; que, par acte authentique des 26 et 27 février 1971, M. X... a vendu à ses soeurs pour la somme de 103 000 francs, quittancés dans l'acte, tous ses droits dans la succession de leur père ; que, par acte authentique du 20 octobre 1971, il a donné procuration à Mme Z..

. pour accepter, d'une part, la donation à titre de partage anticipé d'...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Félix X... est décédé le 8 mai 1969, laissant pour lui succéder son épouse, Louise Y..., commune en biens meubles et acquêts et bénéficiaire d'une donation entre époux, et leurs trois enfants, M. X..., Mmes Z... et A... ; que, par acte authentique des 26 et 27 février 1971, M. X... a vendu à ses soeurs pour la somme de 103 000 francs, quittancés dans l'acte, tous ses droits dans la succession de leur père ; que, par acte authentique du 20 octobre 1971, il a donné procuration à Mme Z... pour accepter, d'une part, la donation à titre de partage anticipé d'une propriété immobilière dépendant de la communauté ayant existé entre leurs parents, que leur mère se proposait de faire à ses trois enfants, d'autre part, le lot lui revenant composé de la somme de 61 834 francs ; que, par acte authentique du 10 juin 1972, Louise Y... a fait donation de ses droits dans cet immeuble à ses trois enfants, M. X... recevant la somme de 61 833, 33 francs de Mme A... à titre de soulte ; que, par acte authentique du 15 septembre 1972, M. X... a encore donné pouvoir à Mme Z... pour accepter, d'une part, la donation à titre de partage anticipé d'une autre propriété, que leur mère proposait de faire, d'autre part, le lot lui revenant composé de la somme de 51 333, 34 francs ; que, par acte authentique du 15 mars 1974, Louise Y... a fait donation de ses droits dans cet immeuble à ses enfants, M. X... recevant la somme de 51 333, 34 francs à titre de soulte par moitié de Mmes Z... et A... ; que Louise Y... est décédée le 20 juillet 2003 ; que M. X... a, selon actes des 2 et 3 mars 2004, fait assigner Mme A... ainsi que M. Pascal Z... et M. Charles Z..., ès qualités d'héritiers de leur mère Mme Z... (les consorts A...-Z...) aux fins de voir déclarer nul ce partage et ordonner les opérations de compte, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre Louise Y... et Félix X... et de leurs successions respectives ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, ci-après annexé :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Rennes, 30 octobre 2007) d'avoir déclaré irrecevable comme étant prescrite sa demande tendant à l'annulation pour insanité d'esprit des actes authentiques des 26 et 27 février 1971, 20 octobre 1971, 10 juin 1972, 15 septembre 1972 et 15 mars 1974 ;

Attendu qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que les documents produits par M. X... n'établissent pas que les troubles dont ce dernier a souffert ont persisté au-delà du 29 septembre 1986, qu'il affirme dans son assignation qu'il a vu ses troubles s'apaiser en 1988, que, prouvant uniquement avoir été dans l'incapacité d'agir jusqu'en 1988, M. X... devait le faire dans un délai de cinq ans à compter de cette date, ce qu'il n'a pas fait, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a à bon droit déclaré irrecevable comme prescrite l'action tendant à l'annulation des actes authentiques susmentionnés ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir dit que l'acte de donation-partage du 15 mars 1974 était non rescindable pour lésion ;

Attendu qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que l'article 1077-2 du code civil ne vise pas la rescision pour lésion et que le partage, même cumulatif, fait par un ascendant ne peut être attaqué pour lésion conformément aux dispositions de l'article 1075-1 du code civil, la cour d'appel a, à juste titre, dit que l'acte de donation-partage n'était pas rescindable pour lésion ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir dit qu'il ne rapportait pas la preuve du non-paiement des sommes quittancées dans les actes susvisés ;

Attendu qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que M. X..., auquel il appartenait d'établir que les quittances données n'avaient pas la valeur libératoire qu'impliquait leur libellé, ne démontrait pas n'avoir pas reçu paiement du prix de la cession de ses droits dans la succession de son père ni des soultes mises à la charge de ses soeurs dans les donations-partages, quittancées dans les actes, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable sa demande d'expertise destinée à établir une atteinte à la réserve, faute pour lui de diligenter une telle action ;

Attendu qu'ayant relevé qu'elle n'était pas saisie d'une action en réduction, la cour d'appel a à bon droit déclaré irrecevable la demande d'expertise de M. X... destinée à établir une atteinte à la réserve ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. René X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. René X... et le condamne à payer à Mme A... et à MM. Z... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me BALAT, avocat aux Conseils pour M. René X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme étant prescrite la demande de Monsieur René X... tendant à l'annulation pour insanité d'esprit des actes authentiques des 26 et 27 février 1971, 20 octobre 1971, 10 juin 1972, 15 septembre 1972 et 15 mars 1974 ;

AUX MOTIFS QU'à l'égard du majeur non protégé, le délai de prescription de l'action en nullité prévue par l'article 489 du Code civil, d'une durée de cinq ans, court du jour de l'acte contesté, l'auteur de l'acte pouvant cependant prouver que la prescription a été suspendue en raison d'une impossibilité d'agir ; que si Monsieur X... soutient qu'il n'était pas sain d'esprit au moment de la passation des actes litigieux, il ne prétend pas que cet état, le mettant dans l'impossibilité d'agir, ait subsisté au-delà de 1988 puisqu'au contraire, il indiquait dans son assignation qu'à compter de cette date, il avait vu ses troubles s'apaiser ; que même en admettant que postérieurement à cette date, il se soit trouvé dans l'impossibilité d'agir du fait qu'il n'avait conservé aucun souvenir de ces actes en raison de son état d'insanité d'esprit, il n'établit pas pour autant n'en avoir appris l'existence qu'en 2003, au décès de sa mère, comme il l'affirme, c'est-à-dire moins de cinq ans avant la délivrance des assignations ;

ALORS, D'UNE PART, QUE si, à l'égard du majeur non protégé, le délai de prescription de l'action en nullité de l'article 489 du Code civil court du jour de l'acte contesté, l'auteur de l'acte peut cependant prouver que la prescription a été suspendue en raison d'une impossibilité d'agir ; que dans ses conclusions d'appel (signifiées le 20 juin 2006, p. 7 et 8), Monsieur X... indiquait qu'il s'était trouvé dans l'impossibilité d'agir en annulation pour insanité d'esprit des actes qu'il avait conclus entre 1971 et 1974, en raison du fait qu'il était resté psychologiquement inapte jusqu'en 1988, et que par la suite, et de ce fait, il avait oublié jusqu'à l'existence de ces actes jusqu'au décès de sa mère survenu en 2003 ; qu'en admettant que Monsieur X... avait effectivement pu se trouver dans l'impossibilité d'agir postérieurement à l'année 1988 " du fait qu'il n'avait conservé aucun souvenir de ces actes en raison de son insanité d'esprit ", puis en déclarant cependant irrecevable son action en annulation desdits actes au motif qu'il " n'établit pas pour autant n'en avoir appris l'existence qu'en 2003 au décès de sa mère, comme il l'affirme, c'est-à-dire moins de cinq ans avant la délivrance des assignations " (arrêt attaqué, p. 3 § 4), ce qui revenait à exiger de Monsieur X... qu'il rapporte une preuve négative, autrement dit qu'il démontre n'avoir pas appris l'existence des actes litigieux avant l'année 2003, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du Code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en admettant que Monsieur X... s'était trouvé dans l'impossibilité d'agir en annulation des actes litigieux, d'abord en raison de son insanité mentale jusqu'en 1988 puis en raison du fait qu'il n'avait conservé aucun soutenir desdits actes après cette date, puis en déclarant cependant prescrite l'action en annulation de l'intéressé (arrêt attaqué, p. 3 § 3 et 4), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 489 et 1304 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit l'acte de donation partage du 15 mars 1974 non rescindable pour cause de lésion, en application des dispositions des articles 1075-1 et 1077-2 du Code civil ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'en application des dispositions de l'article 1075-1 du Code civil et par des motifs pertinents que la cour adopte, le tribunal a débouté Monsieur X... de sa demande en nullité de la donation-partage du 15 mars 1974 pour lésion ;

ET AUX MOTIFS AINSI ADOPTES QUE la donationpartage faite par un ascendant est soumise aux règles qui gouvernent les partages d'ascendants qu'elle soit cumulative ou non ; que l'article 1077-2 du Code civil qui renvoie pour ces partages aux règles des donations entre vifs pour ce qui concerne l'imputation, le calcul de la réserve et la réduction, ne vise pas la rescision pour lésion prévue par l'article 887 du même code ; que le partage, même cumulatif, fait par un ascendant ne peut donc être attaqué pour lésion conformément aux dispositions de l'article 1075-1 du Code civil ; que la discussion développée sur le caractère cumulatif ou non de la donation-partage intervenue le 15 mars 1974 est dès lors inopérante puisqu'elle est sans incidence sur l'impossibilité d'attaquer l'acte pour cause de lésion posée par ce dernier texte ; que Monsieur X... sera par conséquent débouté de ses demandes tendant à faire reconnaître le caractère lésionnaire de la donation-partage en cause et à ce qu'elle soit déclarée " par suite nul et de nul effet … avec toutes conséquences de droit " ;

ALORS QU'en déclarant que l'acte de donation-partage cumulative du 15 mars 1974 n'était pas rescindable pour cause de lésion en application des articles 1075-1 et 1077-2 du Code civil, la cour d'appel a violé ces textes par fausse application.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Monsieur René X... ne rapportait pas la preuve du non paiement des sommes quittancées par sa mandataire dans les actes susvisés ;

AUX MOTIFS QUE pas plus que devant le tribunal, Monsieur X... ne démontre devant la cour n'avoir pas reçu paiement du prix de la cession de ses droits dans la succession de son père ni des soultes mises à la charge de ses soeurs dans les donations-partages, quittancées dans les actes ;

ALORS QUE celui qui se prétend libéré doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; que dans ses conclusions d'appel (signifiées le 20 juin 2006, p. 16 et 17), Monsieur X... faisait valoir qu'il n'avait pas reçu l'intégralité des prix et soultes qui devaient lui revenir aux termes des actes conclus entre 1971 et 1974, à les supposer valables ; qu'en déboutant Monsieur X... de ses demandes tendant au versement de ces sommes, au motif qu'il ne démontrait pas n'en avoir pas reçu paiement, cependant que c'était aux parties défenderesses, qui se prétendaient libérées de toute obligation, qu'il incombait de rapporter la preuve des paiements, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du Code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande d'expertise de Monsieur X... destinée à établir une atteinte à la réserve, faute pour lui de diligenter une telle action ;

AUX MOTIFS QUE devant la cour, Monsieur X... fait valoir que compte tenu des éléments qu'il a développés concernant l'action en rescision pour lésion, il est fondé à croire qu'il y a eu atteinte à la réserve et avant dire droit sur l'action en réduction qu'il se réserve de diligenter, il sollicite l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de sa mère et l'instauration d'une expertise pour évaluer les biens lui ayant appartenu, déterminer la quotité disponible, donner son avis sur l'atteinte à la réserve et évaluer la donation rémunératoire et compensatoire dont fait état le testament du 27 septembre 2000 ; qu'au soutien de son action en rescision pour lésion, Monsieur X... avait soutenu que les biens objets des donations partages avaient été sous estimés en invoquant notamment, s'agissant de la première, un rapport de Monsieur D..., chiffrant respectivement la valeur de la maison de la rue des Dunes et la maison de la rue de l'Océan à 280. 000 F et 180. 000 F alors que les biens donnés avaient été évalués dans l'acte à 243. 175 F et 15. 000 F et s'agissant de la seconde, d'un rapport de Monsieur DE E...estimant la propriété à 640. 000 F alors qu'elle avait été évaluée dans l'acte à 220. 000 F ; que cependant, faute pour lui de justifier qu'il dépende encore de la succession de Louise X... des biens à partager, le tribunal a considéré à bon droit qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage ; que par ailleurs, il n'y a pas lieu de donner acte à Monsieur X... de ses futures et éventuelles initiatives procédurales concernant une action en réduction ; qu'en définitive, la cour, qui n'en est pas saisie, ne peut que déclarer irrecevable sa demande d'expertise ;

ALORS QUE les mesures d'instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer ; que dans ses conclusions d'appel (signifiées le 20 juin 2006, p. 20 in fine et p. 21 § 1 à 3), Monsieur X..., qui faisait valoir qu'il " était fondé à croire qu'il y a eu atteinte à la réserve ", sollicitait la désignation d'un expert aux fins de déterminer la réserve disponible ; qu'en déclarant d'emblée irrecevable cette demande d'expertise, au motif qu'elle n'était pas formellement saisie d'une action en réduction, cependant que la demande d'expertise s'inscrivait nécessairement dans le cadre d'une telle demande, la cour d'appel a violé par refus d'application les articles 144 et 146 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-10326
Date de la décision : 11/03/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 30 octobre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 mar. 2009, pourvoi n°08-10326


Composition du Tribunal
Président : M. Bargue (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.10326
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award