LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à l'institution nationale publique Pôle emploi de sa reprise d'instance ;
Sur le moyen unique du pourvoi provoqué de la société Brake France services :
Vu l'article 1376 du code civil, ensemble l'article L. 351-3, alinéa 1, du code du travail, devenu L. 5422-1 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (Soc. 21 septembre 2005, n° C 03-45.025), que Mme X..., salariée de la société Jarny glaces aux droits de laquelle vient la société Brake France services, a été licenciée le 21 décembre 1994 ; que l'assedic de Lorraine lui a versé l'allocation d'assurance du 1er février 1995 au 31 décembre 1997 ; que, par un arrêt du 24 septembre 2001, la cour d'appel de Nancy a annulé le licenciement et ordonné la réintégration de la salariée, l'employeur étant condamné à lui payer les salaires pour la période comprise entre le licenciement et la réintégration sous déduction des sommes perçues à d'autres titres pendant cette période ;
Attendu que pour faire droit à la tierce opposition formée par l'assedic de Lorraine à l'arrêt du 24 septembre 2001 en condamnant, d'une part, Mme X... à rembourser à l'assedic de Lorraine une somme représentant l'allocation d'assurance perçue entre le licenciement et la réintégration et, d'autre part, la société Brake France services à verser à Mme X... la même somme en complément de l'indemnité réparant le préjudice résultant de la nullité de son licenciement, l'arrêt retient que, dès lors que le licenciement de Mme X... a été jugé nul, celle-ci ne remplit pas les conditions requises pour bénéficier de l'allocation d'assurance pendant la période comprise entre son éviction et sa réintégration ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la nullité du licenciement n'a pas pour effet de priver rétroactivement un travailleur du droit à l'allocation d'assurance que l'assedic lui a servie pendant la période comprise entre son licenciement et sa réintégration où il était involontairement privé d'emploi, apte au travail et à la recherche d'un emploi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le pourvoi principal de Mme X... :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 avril 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Rejette la demande du Pôle emploi de restitution des sommes versées à Mme X... au titre de l'allocation d'assurance entre le licenciement et la réintégration ;
Rejette en conséquence la demande de Mme X... de condamnation de la société Brake France services à lui payer un complément d'indemnité pour licenciement nul d'un montant égal à la somme dont le Pôle emploi demande la restitution ;
Condamne le Pôle emploi aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Pôle emploi à verser la somme de 750 euros à Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme X....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame X... à rembourser à l'ASSEDIC de LORRAINE la somme de 13.553,39 euros avec intérêts au taux légal à compter de la demande, à titre de remboursement des allocations chômage versées entre son licenciement et sa réintégration ;
AUX MOTIFS QUE l'action de l'ASSEDIC tend également à récupérer auprès de Madame X... les indemnités ASSEDIC qui lui ont été versées entre son licenciement et sa réintégration dans l'entreprise après annulation du licenciement ; qu'elle justifie cette demande en exposant que le versement des allocations chômage opéré en faveur de Madame X... dans les conditions sus énoncées est dépourvu de cause dès lors que le licenciement justifiant la situation de chômage et par suite l'allocation des indemnités a été annulé ; que ce n'est qu'à compter de la date de l'annulation du licenciement que l'ASSEDIC était en droit d'agir en répétition de l'indu à l'égard de la salariée de sorte qu'ayant introduit son action de tierce opposition à l'arrêt du 24 septembre 2001 le 25 avril 2002, celle-ci n'était pas prescrite dès lors qu'un délai inférieur à trois ans s'était écoulé entre la date du jugement annulant le licenciement (28 février 2000) et celle de l'introduction de la procédure de tierce opposition (25 avril 2002), ce en application des articles L 351-6-2 alinéa 3 du code du travail, 2252 et 2257 du Code civil ; que l'ASSEDIC est fondée à réclamer à Madame X... le montant des allocations de chômage versées à cette dernière après son licenciement et jusqu'à sa réintégration dès lors que le droit de la salariée à obtenir des allocations chômage est devenu sans fondement du fait de la nullité de son licenciement ;
ALORS QU'aux termes de l'article L 351-6-2 alinéa 3 du Code du travail l'action en répétition de l'allocation d'assurance indûment versée se prescrit, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, par trois ans à compter du versement de ladite allocation; que si cette prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement quelconque résultant de la force majeure celui-ci ne peut obtenir, lorsque cet empêchement prend fin, que la répétition des sommes versées plus de trois ans avant l' évènement ayant mis fin audit empêchement ; que dès lors, si l'ASSEDIC de LORRAINE s'est trouvée dans l'impossibilité d'agir en remboursement des allocations de chômage versées à Madame X... jusqu'à la date du jugement du Conseil de prud'hommes du 28 février 2000 qui a prononcé la nullité du licenciement elle ne pouvait toutefois que réclamer les seules allocations perçues par la salariée du 1er mars 1997 au 28 février 2000 ; qu'en décidant néanmoins que l'ASSEDIC était fondée à réclamer à Madame X... les allocations versées du 17 janvier 1995 au 24 janvier 1998, la Cour d'appel a violé l'article L 351-6-2 alinéa 3 du Code du travail.
Moyen produit au pourvoi provoqué par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Brake France services.
Il est fait à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré l'ASSEDIC de LORRAINE recevable en sa tierce opposition et d'AVOIR, en conséquence, condamné la Société BRAKE à payer à Madame X... la somme de 13.553,39 à titre de rappel de salaire ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la recevabilité et le bien fondé de la rétractation sollicitée : que la tierce opposition de l'ASSEDIC tend à voir rétracter l'arrêt du 24 septembre 2001 qui a confirmé le jugement du Conseil des Prud'hommes ayant condamné la société S.A. JARNY au règlement des salaires impayés depuis le licenciement, sous déduction notamment des allocations de chômage ; qu'en effet l'ASSEDIC sollicite précisément le versement par la société BRAKE FRANCE SERVICES d'un complément de salaire à Madame X... correspondant au montant des indemnités ASSEDIC déduites du règlement des salaires impayés depuis le licenciement ; que l'action de l'ASSEDIC tend également à récupérer auprès de Madame X... les indemnités ASSEDIC qui lui ont été versées entre son licenciement et sa réintégration dans l'entreprise après annulation du licenciement ; qu'elle justifie cette demande en exposant que le versement des allocations chômage opéré en faveur de Madame X... dans les conditions sus énoncées est dépourvu de cause dès lors que le licenciement justifiant la situation de chômage et par suite l'allocation des indemnités a été annulé ; que ce n'est qu'à compter de la date de l'annulation du licenciement que l'ASSEDIC était en droit d'agir en répétition de l'indu à l'égard de la salariée de sorte qu'ayant introduit son action de tierce opposition à l'arrêt du 24 septembre 2001 le 25 avril 2002, celle-ci n'était pas prescrite dès lors qu'un délai inférieur à trois ans s'était écoulé entre la date du jugement annulant le licenciement (28 février 2000), ce en application des articles L 351-6 alinéa 3 du Code du Travail, 2252 et 2257 du Code civil ; que l'ASSEDIC est fondée à réclamer à Madame X... le montant des allocations chômage versées à cette dernière après son licenciement et jusqu'à sa réintégration dès lors que le droit de la salariée à obtenir des allocations chômage est devenu sans fondement du fait de la nullité de son licenciement ; que si la salariée a droit à la réparation par l'employeur de la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration dans la limite du montant des salaires dont elle a été privée, ce qui implique ainsi que le soutient de la société BRAKE FRANCE SERVICES que doivent être déduits de cette réparation les revenus tirés d'un revenu de remplacement, encore faut-il qu'un tel revenu soit définitivement acquis à la salariée en cause ; que l'exercice de l'action de l'ASSEDIC en remboursement des allocations chômage litigieuses, à laquelle il est fait droit prive la salariée de ce revenu de remplacement qui n'a plus lieu d'être déduit de la réparation du préjudice qu'elle a subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, dans la limite du montant des salaires dont elle a été privée ; qu'il n'est pas contesté par l'employeur que les allocations chômage perçues par la salariée ont été déduites des salaires qui lui ont été versés en réparation du préjudice subi entre son licenciement et sa réintégration ; que si, aux termes de l'article 591 du Nouveau Code de Procédure Civile la décision qui fait droit à la tierce opposition ne rétracte ou ne réforme le jugement attaqué que sur les chefs préjudiciables au tiers opposant et que le jugement primitif conserve ses effets entre les parties, même sur les chefs annulés, en cas d'indivisibilité résultant de l'impossibilité d'exécuter deux décisions contraires, les dispositions rétractées doivent avoir effet à l'égard de toutes les parties ; qu'il s'évince des précédentes énonciations que l'employeur doit être condamné au paiement des salaires impayés depuis le licenciement jusqu'à la réintégration sans qu'en soient déduites les allocations de chômage perçues par Madame X... durant cette période, dès lors que cette dernière doit être condamnée à rembourser à l'ASSEDIC ces mêmes allocations chômage ; qu'il résulte d'une attestation de l'ASSEDIC DE NANCY du 15 novembre 2001 et de deux décomptes dressés par cet organisme, que consécutivement à son licenciement, Madame X... a été indemnisée du 17 janvier 1995 au 24 janvier 1998 et qu'au titre de cette période elle a perçu une somme totale de 88.904,41 francs, soit 13.553,39 euros ; que l'ASSEDIC ne justifie par aucune pièce avoir servi à Madame X... la somme de 19.912,00 euros dont elle sollicite le remboursement et la salariée ne démontre pas davantage que son ancien employeur a amputé les salaires qu'il lui a versés en exécution de l'arrêt de la Cour d'Appel de NANCY du 24 septembre 2001, d'un montant de 19.912,00 euros ; qu'en conséquence Madame X... sera condamnée à rembourser à l'ASSEDIC la seule somme de 13.553,39 euros et non celle de 19.912 euros ; qu'il s'ensuit que l'arrêt de la Cour d'Appel de NANCY du 24 septembre 2001 devra être rétracté en ce sens et que cette rétractation dont les effets rendraient impossible l'exécution des deux décisions contraires doit avoir effet à l'égard de toutes les parties » ;
ALORS, DE PREMIÈRE PART QUE le salarié dont le licenciement est nul et qui demande sa réintégration a droit au paiement par l'employeur d'une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et sa réintégration dans la limite du montant des salaires dont il a été privé, c'est-à-dire les salaires qu'il aurait dû percevoir durant cette période sous déduction des revenus perçus au titre d'une autre activité professionnelle, et du revenu de remplacement qui a pu lui être servi pendant la même période, notamment les allocations chômage versées par les ASSEDIC ; qu'en condamnant néanmoins la Société BRAKE FRANCE à verser à Madame X... un rappel de salaires correspondant aux indemnités de chômage perçues par elles entre son licenciement et sa réintégration, la cour d'appel a violé les articles L.1132-1, L.1132-4 L.122-45 ancien du Code du travail et 1376 du Code Civil ;
ALORS, DE DEUXIÈME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE la voie de la tierce opposition contre une décision de justice n'est ouverte qu'aux personnes qui y ont un intérêt, c'est-à-dire celles à qui la décision frappée de tierce opposition cause un préjudice ; que tel n'est pas le cas des ASSEDIC à l'égard d'une décision ayant condamné l'employeur, à la suite de la déclaration de nullité d'un licenciement, à payer à la salariée les salaires qu'elle aurait dû percevoir entre le licenciement et sa réintégration sous déduction des allocations de chômage perçues durant cette période, dès lors que cette décision ne préjudicie pas à la possibilité pour les ASSEDIC, à supposer que l'action en répétition des sommes versées leur soit ouverte en cette hypothèse, d'agir à cette fin contre la salariée devant la juridiction de droit commun à charge pour cette dernière de se retourner contre l'employeur ; qu'en déclarant néanmoins recevable la tierce opposition de l'ASSEDIC de LORRAINE, la cour d'appel a violé l'article 583 du Code de procédure civile ;
QU'À TOUT LE MOINS, en ne s'expliquant pas sur le préjudice causé par l'arrêt frappé de tierce opposition à l'ASSEDIC de LORRAINE, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 583 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE QUATRIÈME PART QUE les ASSEDIC n'ont ni intérêt ni qualité pour demander, par la voie de la tierce opposition, la condamnation de l'employeur à payer au salarié une somme plus élevée que celle octroyée par la décision frappée de tierce opposition ; qu'en recevant néanmoins la demande de l'ASSEDIC de LORRAINE en ce qu'elle sollicitait la condamnation de la Société BRAKE FRANCE à payer à Madame X... des sommes supplémentaires par rapport à celles allouées par la décision frappée de tierce opposition, la cour d'appel a violé les articles 31 et 32 du Code de procédure civile ;
QU'IL EN VA D'AUTANT PLUS AINSI QUE la décision qui fait droit à la tierce opposition ne rétracte ou ne réforme la décision attaquée que sur les chefs préjudiciables au tiers opposant, le jugement primitif conservant ses effets entre les parties même sur les chefs annulés sauf cas d'indivisibilité qui doit s'entendre de l'impossibilité d'exécuter simultanément la décision primitive et celle rendue sur tierce opposition ; que rien ne s'opposait en l'espèce à l'exécution simultanée, d'une part de la décision ordonnant la répétition des sommes versées par l'ASSEDIC de LORRAINE à Madame X..., et d'autre part de la décision primitive aux termes de laquelle ces sommes devaient venir en déduction des sommes que la Société BRAKE FRANCE était condamnée à payer à cette dernière ; qu'en jugeant néanmoins, pour dire que ce dernier chef de la décision primitive devait être réformé, qu'il s'agissait de questions indivisibles, la cour d'appel a violé les articles 582, 584 et 591 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN ET ENCORE PLUS SUBSIDIAIREMENT QUE si le pourvoi principal de Madame X... fondé sur la violation de l'article L. 351-6-2 du Code du travail devait être accueilli en ce qu'il fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à rembourser à l'ASSEDIC de LORRAINE la somme de 13.553,39 à titre d'allocations de chômage indues, la cassation à intervenir devrait nécessairement s'étendre, par application des articles 624 et 625 du Code de Procédure Civile, au chef de l'arrêt ayant condamné la Société BRAKE FRANCE à lui payer la même somme à titre d'indemnité pour le préjudice subi entre le licenciement annulé et sa réintégration, cette condamnation n'étant que la conséquence de la condamnation de la salariée à rembourser les sommes correspondantes à l'ASSEDIC de LORRAINE.