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10/03/2009 | FRANCE | N°08-11445

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 mars 2009, 08-11445


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X..., titulaires chacun d'un PEA ainsi que d'un compte titre ouverts à la banque BNP Paribas (la banque), ont confié la gestion de leur patrimoine à cette dernière le 16 septembre 1998 ; que constatant la baisse de valeur de leur portefeuille, ils ont assigné la banque en responsabilité ;

Attendu que pour rejeter les demandes indemnitaires

de M. et Mme X... dirigées contre la banque, l'arrêt retient que M. et Mme X... ne...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X..., titulaires chacun d'un PEA ainsi que d'un compte titre ouverts à la banque BNP Paribas (la banque), ont confié la gestion de leur patrimoine à cette dernière le 16 septembre 1998 ; que constatant la baisse de valeur de leur portefeuille, ils ont assigné la banque en responsabilité ;

Attendu que pour rejeter les demandes indemnitaires de M. et Mme X... dirigées contre la banque, l'arrêt retient que M. et Mme X... ne rapportent pas la preuve qu'il était d'ores et déjà acquis, en 2001 et 2002, que la tendance à la baisse de certains titres était irréversible, que le mode de gestion choisi impliquait des placements pour une période nécessairement longue aux fins de protection d'éventuelles tendances défavorables à court terme, et qu'en toute hypothèse dès lors que les intéressés ne démontrent pas avoir subi, sur le long terme, une perte dans leur patrimoine, ils ne justifient pas d'un préjudice résultant de ce qu'ils auraient perdu une chance de choisir un mode de gestion différent ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. et Mme X... qui faisaient valoir que la banque, tandis qu'elle en avait l'obligation contractuelle, ne les avait pas tenus régulièrement informés de l'évolution de leur portefeuille, les privant ainsi d'une chance de prendre les dispositions nécessaires lors de l'effondrement des marchés, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 septembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée ;

Condamne la société BNP Paribas aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils pour M. et Mme X....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR déclaré débouté les époux X... de leurs demandes indemnitaires dirigées contre la société BNP PARIBAS;

AUX MOTIFS QU'il ressort clairement des contrats signés par les époux X... que trois options de gestion du patrimoine étaient offertes : une "gestion prudente" orientée vers la recherche d'une valorisation régulière des avoirs par capitalisation ou distribution avec une faible exposition aux fluctuations des marchés des actions, une "gestion équilibrée" orientée vers la recherche d'une valorisation du capital n'excluant pas une exposition au demeurant modérée aux fluctuations des marchés des actions, le revenu n'étant pas un critère de choix exclusif et les positions prises sur les actions présentant un niveau de risque considéré, à priori, comme mesuré et une "gestion dynamique" donnant la priorité à la recherche d'une valorisation du capital par une forte exposition à l'évolution des différents marchés boursiers, les placements étant effectués pour une période nécessairement longue aux fins de protection d'éventuelles tendances défavorables à court terme, la part des actions pouvant être prépondérante selon l'appréciation portée sur les marchés au moment des achats et le niveau de risque encouru sur les valeurs ou le type d'opérations pouvant être élevé, les valeurs choisies étant à fort potentiel de croissance mais à niveau de risque plus élevé ; que les époux X... qui, parmi ces trois modes de gestion, ont choisi "gestion dynamique" ne pouvaient donc ignorer le risque qu'ils prenaient, étant observé que si les références à une "forte exposition à l'évolution des différents marchés boursiers" à un "niveau de risque encouru sur les valeurs ou le type d'opérations pouvant être élevé", et à des "valeurs choisies à fort potentiel de croissance mais à niveau de risque plus élevé"
n'était pas assez claires pour eux, elles le devenaient suffisamment après la lecture de la description des modes de gestion "prudente" et "équilibrée" et leur comparaison nécessaire à l'exercice du choix proposé ; que les époux X... ne peuvent reprocher à la société BNP PARIBAS son inaction, en 2001 et 2002, alors qu'ils ne rapportent pas la preuve qu'il était alors d'ores et déjà acquis que la tendance à la baisse de certains titres était irréversible, une telle preuve ne résultant nullement du seul effondrement du marché pendant cette période, étant observé qu'ainsi qu'il vient d'être rappelé le mode de gestion choisi impliquait des placements "pour une période nécessairement longue aux fins de protection d'éventuelles tendances défavorables à court terme" ; que s'ils affirment qu'une gestion active aurait pu, pendant la même période limiter leur perte, il n'en font aucunement la démonstration ; qu'ils ne rapportent donc pas la preuve d'une faute de gestion imputable à la société BNP PARIBAS qui n'avait pas une obligation de résultat, étant encore ajouté qu'aucun élément de preuve ne peut être trouvé dans le fait que postérieurement le nouveau gestionnaire chargé de leur compte ait vendu certains titres pour en acquérir d'autres, dès lors que, d'une part, ils avaient entre temps opéré un autre choix de mode de gestion et que d'autre part, la baisse à très long terme de certaines actions était alors avérée ce qui n'était pas le cas dès la fin de l'année 2001 ; qu'il convient d'observer en outre que s'il ressort des pièces produites qu'entre le 31 décembre 2000 et le 31 décembre 2001 les avoirs des époux X... sont passés de 334 771 à 198 745 et n'étaient plus que de 162 984 au 31 décembre 2004, il ressort également des relevés produits qu'entre 1999, les sommes placées par les époux X... ont obtenu des plus values de 60 et 47,90 % et en 2000 des plus values de 41,10 et 4,10 %, qu'en 2005 la plus value obtenue est de 16,24 % et du 1er janvier 2006 au 12 avril 2006 de 4,94 %; que dès lors sur la longue durée il n'est pas établi que les moins values des années 2000, 2001 et 2003 ait entraîné une moins value du patrimoine des époux X..., ceux-ci ne pouvant caractériser leur éventuel préjudice à partir des seules années pendant lesquelles la bourse a connu une chute importante sans tenir compte ni des très importantes plus values antérieures, ni des plus values postérieures ; que si ce n'est qu'en avril 2001 que les époux X... ont souscrit auprès de la société BNP PARIBAS une convention de conseil patrimonial, l'absence d'une telle convention ne dispensait pas la société BNP PARIBAS, en sa qualité de professionnelle, de les conseiller sur le choix de gestion qui convenait le mieux à leur âge et à leur situation ; que cependant en 1998 les époux X... n'étaient respectivement âgés que de 61 et 60 ans et exerçaient leur activité de marchands de biens qui leur assurait des revenus substantiels ; qu'en outre, ceux-ci ainsi qu'il ressort de leur déclaration des revenus de 2004 disposent de revenus immobiliers et de salaires ou retraites ; qu'en toute hypothèse, dès lors qu'ils ne démontrent pas, sur le long terme, avoir subi une perte dans leur patrimoine ceux-ci ne justifient pas d'un préjudice résultant de ce qu'ils auraient perdu une chance de choisir un mode de gestion différent;

1°) ALORS QU'en considérant que la BNP n'avait pas manqué à son devoir de conseil, s'agissant du choix du type de gestion adapté à la situation des époux X..., au simple motif que ces derniers étaient âgés de 61 et 60 ans en 1998 et exerçaient leur activité de marchands de biens qui leur assurait des revenus substantiels, outre qu'ils avaient disposé de revenus immobiliers et de salaires ou retraites en 2004, sans répondre au moyen des époux X... qui faisaient valoir que la banque était informée de ce qu'ils cherchaient à se procurer un complément de revenus au cours de leur retraite, désir incompatible avec le mode de gestion choisi, particulièrement risqué, la Cour a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'en estimant que la BNP n'avait pas commis de faute dans le gestion du portefeuille des époux X... au motif que le mode gestion choisi impliquait des placements pour une période nécessairement longue aux fins de protection d'éventuelles tendances défavorables à « court terme », tout en ayant constaté que la Banque était demeurée inactive en 2001 et 2002, soit deux années entières pendant lesquelles les marchés n'avaient cessé de s'effondrer, la Cour, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1992 du Code civil;

3°) ALORS QU'en ne répondant pas au moyen des époux X... qui faisaient valoir que la BNP, alors qu'elle en avait l'obligation contractuelle, ne les avait pas tenus régulièrement informés de l'évolution de leur portefeuille, les privant ainsi d'une chance de prendre les dispositions nécessaires lors de l'effondrement des marchés, la Cour a violé l'article 455 du Code de procédure civile;

4°) ALORS QUE ce faisant, la Cour a au surplus privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1993 du Code civil;

5°) ALORS QUE les dommages et intérêts dus au créancier sont non seulement de la perte qu'il a faite mais aussi du gain dont il a été privé ; que les époux X... faisaient valoir que s'ils avaient été informés en temps et en heure de la baisse drastique de leurs titres ou si la banque n'était pas restée passive pendant deux ans et avait pris les mesures nécessaires, ils auraient pu éviter de voir leurs plus values réalisées le 31 décembre 2000 disparaître ; que les époux X... ne se prévalaient donc pas d'une perte qui aurait affecté les avoirs confiés à la banque en 1999 mais d'un manque à gagner compte tenu du fait qu'ils n'avaient pu appréhender les plus values réalisées au 31 décembre 2000 et il était donc inopérant de relever que leur patrimoine n'avait pas baissé depuis qu'ils avaient confié leurs avoirs à la banque ; qu'en déboutant les époux X... au motif inopérant qu'ils ne démontraient pas que leur patrimoine avait baissé depuis qu'ils avaient confié leurs avoirs à la banque, la Cour a violé l'article 1149 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-11445
Date de la décision : 10/03/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 06 septembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 mar. 2009, pourvoi n°08-11445


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle, Hannotin, SCP Tiffreau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.11445
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