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03/03/2009 | FRANCE | N°07-45641;07-45642

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 mars 2009, 07-45641 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° E 07-45.641 et F 07-45.652 ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Lyon, 25 octobre 2007) que la société Clinique Trenel (la clinique) ayant décidé de fermer à la fin de l'année 2005 le service de maternité de l'établissement qu'elle exploitait, le centre hospitalier de cette ville a proposé aux huit salariées relevant de ce service de les employer à compter du 1er janvier 2006 ; que reprochant à la clinique d'avoir cessé de le

ur fournir du travail et de les rémunérer à compter de cette date, alors qu'elles a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° E 07-45.641 et F 07-45.652 ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Lyon, 25 octobre 2007) que la société Clinique Trenel (la clinique) ayant décidé de fermer à la fin de l'année 2005 le service de maternité de l'établissement qu'elle exploitait, le centre hospitalier de cette ville a proposé aux huit salariées relevant de ce service de les employer à compter du 1er janvier 2006 ; que reprochant à la clinique d'avoir cessé de leur fournir du travail et de les rémunérer à compter de cette date, alors qu'elles avaient refusé l'offre du centre hospitalier, Mmes X... et Y... ont saisi le juge prud'homal d'une demande en résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur et en paiement d'indemnités ; que la clinique a fait appeler à la procédure le centre hospitalier de Vienne ;

Attendu que la clinique Trenel fait grief aux arrêts d'avoir fait droit à ces demandes et d'avoir mis le centre hospitalier hors de cause alors, selon le moyen :

1°/ qu'un service de maternité constitue au sein d'une clinique une entité économique autonome individualisée, dotée de moyens propres, ayant son identité, auquel est affecté un personnel soignantspécialisé qui ne concerne qu'une clientèle déterminée, et qui, de la sorte, ne participe pas à la prise en charge globale du malade ; qu'en cas de fermeture d'un tel service, le transfert organisé du personnel de ce service et de ses lits et places au sein d'un centre hospitalier public relève du champ d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail ; qu'en considérant que le service de maternité ne faisait que participer à la prise en charge globale du malade par la clinique Trenel et ne pouvait, de ce fait, être considéré comme constituant une entité économique, autonome, seul l'établissement de santé dans sa globalité constituant une telle entité, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;

2°/ qu'une entité économique autonome est un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre ; qu'en énonçant qu'aucun des éléments corporels ou incorporels du service maternité de la clinique Trenel n'avait été transféré au Centre hospitalier Lucien Hussel sans rechercher, ainsi qu'il était soutenu et justifié, si la reprise du personnel affecté au service maternité ne s'était pas accompagné du transfert au moins partiel des lits et places de la Clinique et des moyens financiers y afférents, ce qui traduisait le transfert d'éléments incorporels, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a constaté qu'aucun des moyens nécessaires à l'exploitation de la maternité de la clinique n'avait été repris par le centre hospitalier et que l'activité de ce service avait été répartie entre plusieurs établissements de santé, publics ou privés, de la région ; qu'elle a pu en déduire qu'aucune entité économique autonome conservant son identité n'avait été transférée au centre hospitalier de Vienne ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Clinique Trenel aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mmes Y... et X... la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit aux pourvois n° E 07-45.641 et F 07-45.642 par Me Hemery, avocat aux Conseils pour la Clinique Trenel.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que la rupture du contrat de travail de Mme Nicole Y... à effet du 1er janvier 2006 est imputable à la CLINIQUE TRENEL et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'avoir, en conséquence, condamné cette dernière à verser à Mme Y... les sommes de 10.028,23 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 4.737,76 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 473,77 euros bruts au titre des congés payés y afférents, 30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile, d'avoir condamné la SA CLINIQUE TRENEL à délivrer à Mme Y... les documents afférents à la rupture sous astreinte, d'avoir condamné la SA CLINIQUE TRENEL à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage servies à Mme Y... dans la limite de six mois, d'avoir mis le Centre Hospitalier De VIENNE Lucien Hussel hors de cause et d'avoir condamné la CLINIQUE TRENEL à verser à ce dernier la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile,

AUX MOTIFS QUE « l'article L. 122-12 du Code du Travail dispose que s'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ; l'application de cette disposition est subordonnée au transfert d'une entité économique autonome, conservant son identité et dont l'activité est reprise ou continuée ; une entité économique autonome est constituée par un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre ; il résulte des dispositions combinées des articles L 710-4 et L 711-2 du Code de la Santé Publique, repris par l'article L 6113-2 du même code, que les établissements de santé, publics ou privés, ont pour objet de dispenser des soins, avec ou sans hébergement et qu'ils doivent développer toute action concourant à une prise en charge globale du malade ; les établissements de santé constituent donc en euxmêmes des entités économiques dont aucun service particulier participant à la prise en charge globale du malade, même s'il peut être confié à un tiers, ne peut constituer une entité économique autonome ; dès lors, un service à vocation médicale comme une maternité, ne peut jamais constituer une entité économique autonome, seul l'établissement de santé dans sa globalité pouvant constituer une telle entité ; en l'espèce, il ressort des explications constantes des parties que la CLINIQUE TRENEL est un établissement de soins offrant une réponse médicale variée (chirurgie, anesthésie réanimation, urgences, gastroentérologie, pneumologie, cardiologie, gynécologie obstétrique, oncologie, stomatologie, angiologie, neurologie, dermatologie, rhumatologie, radiologie, scanner, échographie, analyses médicales, kinésithérapie) ; qu'elle concourait donc à une prise en charge globale du malade selon l'objectif défini par les dispositions légales susvisées, son service maternité ne faisant que participer à cette prise en charge sans représenter lui-même une entité économique autonome ; il n'est d'ailleurs pas indifférent de constater au surplus qu'aucun des éléments corporels (lits, étriers, forceps, appareils échographes, couveuses, moniteurs,…) ou incorporels ne furent transférés par la CLINIQUE TRENEL à l'HÔPITAL LUCIEN HUSSEL, la clientèle étant adressée dans les différents établissements de soins publics ou privés de la région, ainsi qu'il ressort d'un document d'information édité à l'intention des usagers pour l'année 2006 (pièce n°6 du CENTRE HOSPITALIER DE VIENNE LUCIEN HUSSEL) ; les dispositions de l'article L. 122-12 du Code du Travail ne devaient pas recevoir application en l'espèce, le contrat de travail de Mme Y... Nicole n'ayant donc pas été transféré de plein droit au sein du CENTRE HOSPITALIER DE VIENNE LUCIEN HUSSEL ; il appartenait alors à la CLINIQUE TRENEL, suite à la réorganisation et réorientation de ses activités, ayant consisté dans la cessation de son activité maternité, de mettre en place une procédure de licenciement économique ; l'agence régionale de l'hospitalisation soucieuse de ne pas désorganiser la continuité des soins dans le secteur géographique par l'évanouissement d'un personnel qualifié, a alors incité le CENTRE HOSPITALIER DE VIENNE LUCIEN HUSSEL à proposer un poste à un maximum de salariés participant au service maternité de la clinique, l'existence même de ces propositions confirmant encore qu'aucun transfert automatique n'était envisagé par les parties ; même si les conditions d'application de l'article L 122-12 ne sont pas réunies, il reste loisible à deux employeurs de décider du transfert conventionnel des contrats de travail sous la condition de l'accord du salarié dans la mesure où le transfert n'est pas d'ordre public et ne s'impose pas à ce dernier, qui peut donc refuser ou non la modification ainsi apportée à son contrat de travail, au titre d'un changement d'employeur ; l'accord du salarié doit être exprès et ne peut résulter de la seule poursuite de son contrat de travail chez le nouvel employeur ; il est manifeste en l'espèce que Mme Y... Nicole a refusé le poste que lui offrait le CENTRE HOSPITALIER DE VIENNE LUCIEN HUSSEL, l'intéressée n'ayant jamais signé le contrat de travail qui lui fut soumis dès le 1er janvier 2006 ; en l'absence d'accord sur le transfert de son contrat de travail, la CLINIQUE TRENEL restait donc l'employeur de Mme Y... Nicole ; en ne fournissant aucun travail ni salaire à sa salariée à compter du 1er janvier 2006, la CLINIQUE TRENEL a pris alors l'initiative de la rupture des relations contractuelles, laquelle s'analyse nécessairement en un licenciement dépourvu de toute cause réelle et sérieuse ; il convient donc de condamner la CLINIQUE TRENEL à payer à Mme Y... Nicole, bénéficiant d'une ancienneté de 15 années, 5 mois et 15 jours dans l'entreprise et d'un salaire de 2.368,88 par mois au dernier état de sa collaboration, les indemnités de rupture suivantes, non contestées dans leur quantum, ne serait-ce qu'à titre subsidiaire :
- 10.028,23 à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 4.737,76 bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis représentant deux mois de salaire, outre 473,77 bruts au titre des congés payés y afférents,
- 30.000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la salariée n'ayant pu prétendre au versement d'indemnités ASSEDIC qu'à compter du mois de juillet 2006 alors même qu'aucun salaire ne lui avait été versé depuis le 1er janvier 2006 ;
Un certificat de travail mentionnant la date du 1er janvier 2006 comme date du rupture, une attestation ASSEDIC régulièrement remplie devront en outre être remis à Mme Y... Nicole, la délivrance d'une lettre de licenciement n'ayant pas lieu d'être ordonnée dans la mesure où le présent arrêt statue sur la rupture du contrat de travail, sous astreinte de 50 par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de 15 jours après la notification du présent arrêt ; l'équité et la situation économique des parties commandent l'octroi à Mme Y... Nicole d'une indemnité de 1.500 au titre de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile, à la charge de la CLINIQUE TRENEL qui, succombant, ne peut qu'être déboutée en sa demande de ce chef ; le CENTRE HOSPITALIER LUCIEN HUSSEL doit enfin être mis hors de cause et la CLINIQUE TRENEL condamnée à lui payer une indemnité de 3.000 en remboursement des frais irrépétibles qu'il a dû engager ; » (arrêt p.3,4,5)

1°) ALORS QU' un service de maternité constitue au sein d'une clinique une entité économique autonome individualisée, dotée de moyens propres, ayant son identité, auquel est affecté un personnel soignant spécialisé, qui ne concerne qu'une clientèle déterminée, et qui, de la sorte, ne participe pas à la prise en charge globale du malade ; qu'en cas de fermeture d'un tel service, le transfert organisé du personnel de ce service et de ses lits et places au sein d'un centre hospitalier public relève du champ d'application de l'article L 1224-1 du Code du Travail ; qu'en considérant que le service de maternité ne faisait que participer à la prise en charge globale du malade par la Clinique TRENEL et ne pouvait, de ce fait, être considéré comme constituant une entité économique autonome, seul l'établissement de santé dans sa globalité constituant une telle entité, la Cour d'Appel a violé l'article L 1224-1 du Code du Travail ;

2°) ALORS QU'entité économique autonome est un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité qui poursuit un objectif propre ; qu'en énonçant qu'aucun des éléments corporels ou incorporels du service maternité de la Clinique TRENEL n'avait été transféré au Centre Hospitalier Lucien HUSSEL sans rechercher, ainsi qu'il était soutenu et justifié, si la reprise du personnel affecté au service maternité ne s'était pas accompagné du transfert au moins partiel des lits et places de la Clinique et des moyens financiers y afférents, ce qui traduisait le transfert d'éléments incorporels, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1224-1 du Code du Travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-45641;07-45642
Date de la décision : 03/03/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 25 octobre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 mar. 2009, pourvoi n°07-45641;07-45642


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Hémery, SCP Didier et Pinet, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.45641
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