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03/03/2009 | FRANCE | N°07-44145

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 mars 2009, 07-44145


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué, que M. X... engagé le 30 mars 1984 par la Société générale de surveillance France (SGS) devenue la société Holding France, a donné sa démission de cette société à compter du 1er septembre 1990 pour être rattaché à la société de droit suisse, SGS ; que par une lettre du 5 octobre 1990, la Société française a pris acte de cette démission et s'est engagée à lui procurer un nouvel emploi en son sein, ou au sein d'une société du groupe, s'il se retrouvait sans emploi

du fait de son nouvel employeur, sauf faute grave ou lourde ; que M. X... a été n...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué, que M. X... engagé le 30 mars 1984 par la Société générale de surveillance France (SGS) devenue la société Holding France, a donné sa démission de cette société à compter du 1er septembre 1990 pour être rattaché à la société de droit suisse, SGS ; que par une lettre du 5 octobre 1990, la Société française a pris acte de cette démission et s'est engagée à lui procurer un nouvel emploi en son sein, ou au sein d'une société du groupe, s'il se retrouvait sans emploi du fait de son nouvel employeur, sauf faute grave ou lourde ; que M. X... a été nommé directeur général des sociétés de droit togolais et béninois à qui il était lié par un contrat de travail signé le 25 mai 1990 ; que le 14 août 1995, la société de droit suisse l'a informé qu'il était mis fin à leur collaboration ;qu'il a saisi le tribunal du travail de Lomé au Togo de demandes à l'encontre de la société SGS ; que par jugement du 5 août 1997 le tribunal du travail de Lomé l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive, a homologué la transaction intervenue entre les parties et a condamné la société à lui payer les sommes en résultant ; que ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Lomé du 1er juillet 1999 ; que M. X... a saisi de nouveau le tribunal du travail de Lomé d'une demande de condamnation de la société SGS Togo à lui payer une indemnité en contrepartie de la clause de non-concurrence à laquelle il était tenu ; que le jugement rendu le 7 mai 2002 faisant droit à sa demande a été infirmé par un arrêt de la cour d'appel de Lomé du 6 mai 2004 ; que M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de Paris de demandes formées à l'encontre des sociétés Holding France et de la société de droit suisse SGS tendant à leur condamnation in solidum au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et à la contrepartie de la clause de non-concurrence ;

Sur le premier moyen :

vu l'article 1351 du code civil ;

Attendu qu'il résulte de ce texte, que l'autorité de la chose jugée attachée à une décision juridictionnelle, qu'elle émane d'une juridiction nationale ou d'une juridiction étrangère, suppose une identité des parties ;

Attendu que pour dire les demandes dirigées contre les societés française et suisse irrecevables, la cour d'appel a retenu que les demandes relatives à des indemnités de rupture et à la clause de non-concurrence sont irrecevables, puisqu'elles ont déjà été jugées, qu'il résulte en effet de l'article 37 du titre II de la convention judiciaire conclue entre la France et le Togo qu'en matière civile et commerciale, les décisions contentieuses ou gracieuses rendues par les juridictions siégeant en France ou au Togo ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre Etat si elles émanent d'une juridiction compétente selon les règles du droit international privé, que les décisions rendues par les juridictions togolaises sont passées en force de chose jugée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les demandes formées devant les juridictions togolaises étaient dirigées contre les societés de droit togolais et béninois, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour mettre hors de cause la société Holding France, l'arrêt retient que l'attestation Assedic ne suffit pas à démontrer que celle-ci est restée l'employeur de M. X... en l'absence de bulletin de paie et d'autre document ;

Qu'en se déterminant comme elle a fait, sans s'expliquer sur la demande formée à titre subsidiaire par le salarié, fondée sur l'engagement pris par la société Holding France dans sa lettre du 5 octobre 1990, la cour d'appel a méconnu les exigences du textes susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres branches du second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la Société générale de surveillance et la société Holding France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Société générale de surveillance et la société Holding France à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué, d'avoir déclaré irrecevables les demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour atteinte à la liberté du travail en raison de l'obligation de non-concurrence formées par Monsieur X... à l'encontre de la SGS de droit suisse et de la SGS de droit français ;

Aux motifs que, sur la recevabilité des demandes de Monsieur X..., la société Holding France et la société générale de surveillance soutiennent que les demandes de Monsieur X... sont irrecevables car elles se heurtent à l'autorité de la chose jugée ; qu'elles exposent que Monsieur X... a présenté les mêmes demandes devant les juridictions togolaises qui se sont déjà prononcées ; que Monsieur X... répond que ses demandes ont été dirigées contre la filiale de droit togolais et non contre les sociétés française et suisse et qu'en conséquence, les dispositions de l'article 1351 du Code civil ne peuvent pas s'appliquer puisqu'il n'y a pas identité de parties ; que par ailleurs, il soutient que les procédures ne se sont pas déroulées au Togo suivant les règles régissant un procès équitable et que ses avocats ont dû se « déconstituer » par un courrier du 12 mars 1997 ; que néanmoins la mise en cause par Monsieur X... des juridictions togolaises ne repose que sur ses seules affirmations et, postérieurement à cette lettre, il a saisi, à trois reprises et sans émettre de réserve, les juridictions togolaises ; qu'en outre, la société Holding France et la société générale de surveillance ne fondent pas leur irrecevabilité sur les dispositions de l'article 1351 du code civil mais sur celles de la convention judiciaire conclue entre la France et le Togo ; que l'article 37 du titre II de cette convention dispose qu'en matière civile et commerciale, les décisions contentieuses ou gracieuses rendues par les juridictions siégeant en France ou au Togo ont de plein droit l'autorité de la chose jugée sur le territoire de l'autre Etat si elles émanent d'une juridiction compétente selon les règles du droit international privé admises dans l'Etat où la décision doit être exécutée, si la décision est, d'après la loi de l'Etat où elle a été rendue, passée en force jugée et susceptible d'exécution, si les parties ont été régulièrement citées, représentées ou déclarées défaillantes et si la décision ne contient rien de contraire à l'ordre public ou aux principes de droit public applicables dans l'Etat où elle est invoquée ; qu'il n'est pas soutenu par les parties que les arrêts du 1er juillet 1999 de la cour d'appel de Lomé confirmant le jugement du 5 août 1997 du tribunal du travail de Lomé et du 6 mai 2004 de cette Cour annulant le jugement du 7 mai 2002 du tribunal du travail de Lomé ne seraient pas définitifs et auraient fait l'objet d'un pourvoi en cassation ; que ces décisions sont donc passées en force de chose jugée ; que par ailleurs, il n'est ni soutenu ni établi que les juridictions togolaises n'auraient pas été compétentes selon les règles du droit international privé admises en France, que les parties n'auraient pas été régulièrement citées ou n'auraient pas été représentées ou déclarées défaillantes et que la décision serait contraire, en partie ou en totalité, à l'ordre public ou aux principes de droit public applicables en France ; que les décisions précitées sont donc applicables de plein droit en France ; que Monsieur X..., représenté par ses avocats, Me Y... et Me Z..., avait saisi les juridictions togolaises de demandes en paiement d'indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement abusif, de règlement financier de ses « conditions de départ » et de l'indemnité représentant 75 % de son salaire de base prévue par l'article 7 de son contrat de travail concernant la clause de non-concurrence ; que les demandes de Monsieur X... relatives à des indemnités de rupture et à la clause de non-concurrence sont donc irrecevables puisqu'elles ont déjà été jugées ; que le jugement sera infirmé de ces chefs de demandes ;

Alors qu'au soutien de ses demandes indemnitaires à l'encontre des sociétés SGS de droit suisse et de droit français, Monsieur X... faisait valoir que ces sociétés ne pouvaient lui opposer l'irrecevabilité de ses demandes, comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée, dans la mesure où les procédures prud'homales intentées en Afrique avaient été dirigées à l'encontre de la seule filiale togolaise et que les sociétés suisse et française n'étaient pas parties à ces instances, de sorte que la condition d'identité de parties n'était pas remplie ; qu'au soutien de cette prétention, il versait aux débats spécialement les décisions rendues par les juridictions togolaises le 7 mai 2002 et 6 mai 2004, dont il résultait, sans ambiguïté, que seule la SGS Togo SA avait été partie à ces instances ; que dès lors, en déclarant irrecevables les demandes indemnitaires formées par Monsieur X... à l'encontre des sociétés de droit suisse et français, motif pris qu'elles se heurtaient à l'autorité de la chose jugée par la juridiction togolaise, qui n'avait pourtant statué que sur l'instance entre Monsieur X... et la société de droit togolais, la Cour d'appel a dénaturé les décisions togolaises précitées et ainsi violé l'article 1134 du Code civil ;

Et alors, subsidiairement et en toute hypothèse, que pour invoquer l'autorité que la loi attribue à la chose jugée, il faut, entre autres conditions, que la demande soit entre les mêmes parties et formée pour elles ou contre elles en la même qualité ; que dès lors, en déclarant irrecevables les demandes formées par Monsieur X... à l'encontre de la SGS, société mère de droit suisse, et de la société Holding France, sa filiale de droit français, motifs pris que ses demandes avaient déjà été jugées par les juridictions togolaises, sans vérifier que les demandes formées par Monsieur X... devant ces juridictions concernaient effectivement les sociétés suisse et française, soit sans s'assurer de l'identité des parties aux instances togolaises et française, avant de conclure à l'autorité de la chose jugée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale à l'égard de l'article 1351 du Code civil ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir mis hors de cause la société Holding France et débouté Monsieur X... de ses demandes indemnitaires à l'encontre de la SGS, société mère de droit suisse ;

Aux motifs que, sur la mise hors de cause de la société Holding France, la société Holding France soutient qu'elle n'a plus été l'employeur de Monsieur X... à compter du 1er octobre 1990 et demande sa mise hors de cause ; qu'en effet, Monsieur X... a démissionné de la société SGS Qualitest, devenue la société Holding France, « dans le cadre de (son) rattachement au siège de Genève » par un courrier du 28 septembre 1990 ; que l'attestation Assedic du 16 janvier 1996 établie par la société SGS Qualitest et donc la société Holding France reconnaît, dans ses écritures, qu'il s'agit d'une attestation de complaisance destinée à permettre à Monsieur X... de percevoir les allocations de chômage, ne suffit pas, en l'absence de bulletin de salaire ou de document établissant l'existence d'un lien de subordination, de démontrer que la société Holding France est restée son employeur ; qu'enfin le jugement définitif du 15 novembre 2005 d'un conseil de prud'hommes qui aurait, selon Monsieur X..., reconnu « l'existence formelle du contrat de travail avec la société française, même si ce contrat se trouvait suspendu pendant la période de détachement » n'est pas produit aux débats et ne figure pas dans le bordereau des pièces communiquées par le salarié ; qu'en outre, contrairement à ce que prétend Monsieur X..., ce jugement, dont il est fait mention dans les motifs du jugement déféré à la Cour et qui serait daté du 15 novembre 2004, n'aurait, selon la société Holding France et la société générale de surveillance, que rejeté dans son dispositif l'exception d'incompétence qu'elles avaient soulevée ; qu'or l'autorité de la chose jugée d'une décision de justice s'attache uniquement au dispositif et non aux motifs et ne vaut que relativement à la contestation tranchée qui ne concernait pas, en l'espèce, le point de savoir si la société SGS Qualitest France était restée l'employeur de Monsieur X... ; que la société Holding France sera donc mise hors de cause et le jugement infirmé de ce chef de demande ;

Alors de première part que dans ses écritures d'appel, Monsieur X..., embauché par la SGS de droit français, faisait valoir que son détachement auprès de la société mère à Genève, puis auprès de la filiale africaine, avait seulement entraîné la suspension de son contrat de travail vis-à-vis de la société de droit français, société initiale, pendant son expatriation, que la rupture de son contrat avec la filiale togolaise avait fait renaître ce contrat français jusqu'à ce que la société de droit français lui remette l'attestation Assedic avec la mention de la rupture de son contrat, qualifié à tort « d'un commun accord » et qu'il résultait, sans aucune ambiguïté, de cette attestation que la société de droit français était demeurée son employeur jusqu'au 30 novembre 1995 et qu'elle avait continué à verser les cotisations sociales pendant toute la durée de l'expatriation ; que dès lors, en déboutant Monsieur X... de ses demandes indemnitaires et en mettant hors de cause la société de droit français, au motif inopérant que la société de droit français reconnaissait dans ses écritures que cette attestation Assedic était de pure complaisance, sans répondre à ce moyen déterminant de Monsieur X..., la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs et ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Alors, de deuxième part, que dans ses écritures d'appel, Monsieur X... faisait valoir que la société suisse était l'auteur de la lettre de licenciement, ce dont il résultait que la qualité d'employeur était démembrée entre cette société mère et sa filiale française, employeur d'origine, et qui avait établi l'attestation destinée aux Assedic ; que dès lors en déboutant Monsieur X... de ses demandes indemnitaires dirigées à l'encontre de la société suisse, qui avait pourtant la qualité d'employeur, sans répondre à ce moyen déterminant dont il résultait que cette société mère avait la qualité d'employeur, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs et ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Alors, de troisième part, que l'autorité de chose jugée s'étend aux motifs de fond d'une décision se prononçant sur la compétence lorsqu'ils en sont le soutien nécessaire ; que la Cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître l'article 95 du nouveau Code de procédure civile, refuser toute autorité aux motifs, relatifs à l'existence d'un contrat de travail entre Monsieur X... et la société de droit français, du jugement avant-dire droit du Conseil des prud'hommes du 15 novembre 2004, qui figurait nécessairement dans le dossier de la procédure, au seul motif que ce jugement n'avait en son dispositif que tranché la quesiton de la compétence de la juridiction prud'homale ;

Alors, enfin, et en toute hypothèse, que dans ses écritures d'appel, Monsieur X... faisait valoir que quand bien même il conviendrait de retenir que le contrat initial français avait été rompu, la responsabilité contractuelle de la société française n'en demeurait pas moins établie dans la mesure où cette société s'était engagée par écrit, le 5 octobre 1990, à lui procurer un nouvel emploi s'il s'en trouvait privé sans faute grave ou lourde de sa part, pendant les 5 années écoulées à compter du 1er septembre 1990, et qu'elle n'avait pas respecté cet engagement en le licenciant le 14 août 1995, soit avant le 1er septembre 1995, terme de son engagement contractuel de lui procurer un nouvel emploi ; que dès lors, en mettant hors de cause la société Holding France, sans répondre à ce moyen déterminant des conclusions de Monsieur X..., la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs et ainsi violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-44145
Date de la décision : 03/03/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 juin 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 mar. 2009, pourvoi n°07-44145


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Roger et Sevaux, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.44145
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