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18/02/2009 | FRANCE | N°08-88099

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 février 2009, 08-88099


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Louis,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de REIMS, en date du 14 octobre 2008, qui, dans l'information suivie contre lui, pour tentative d'assassinat, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur les premier et deuxième moyens de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'h

omme, 114, 137, 145, 145-2, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradic...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Louis,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de REIMS, en date du 14 octobre 2008, qui, dans l'information suivie contre lui, pour tentative d'assassinat, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur les premier et deuxième moyens de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 114, 137, 145, 145-2, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a prolongé la détention provisoire de Louis X... ;

"aux motifs que, selon le demandeur, il fût convoqué le 18 août 2008, par le cabinet du juge des libertés, en vue d'un débat contradictoire fixé au 17 septembre alors que, saisi par une ordonnance du juge d'instruction, datée du 15 septembre, ce juge des libertés aurait été incompétent, en l'absence de saisine, pour délivrer la convocation et, ce faisant néanmoins, aurait commis un excès de pouvoir tout en manquant à l'impartialité en agissant d'initiative, violant ainsi les dispositions des articles 145 et 145-2 du code de procédure pénale et 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que, cependant, il a été statué sur la prolongation de la détention par le juge compétent et l'avocat a été convoqué dans le délai prévu par la loi ; qu'en se déterminant après un débat contradictoire tenu sur une convocation dont l'initiative ne préjugeait point de l'issue, le magistrat des libertés n'a pas manqué à son devoir d'impartialité ; qu'il est également articulé en faveur du demandeur qu'en l'absence de saisine du juge des libertés avant le 15 septembre 2008, date à laquelle il fût saisi par ordonnance du magistrat instructeur, le dossier de la procédure, qui, jusqu'alors, ne renfermait donc pas cette ordonnance, n'avait pas été mis en son entier à la disposition de l'avocat quatre jours ouvrables avant le débat qui s'est tenu le 17 septembre suivant, en sorte qu'il y aurait là une violation de l'article 114 du code de procédure pénale ; que, cependant, ainsi que le premier juge l'a retenu à bon droit, l'article 145-2 dudit code relatif à la prolongation de la détention en matière criminelle ne renvoyant pas au troisième alinéa de l'article 114 qui prévoit la mise à disposition de la procédure quatre jours ouvrables avant chaque interrogatoire, ce dernier texte n'est pas applicable en l'espèce ; que, pour invoquer la violation des articles 145-2 du code de procédure pénale et 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, le mémoire fait grief au premier juge de n'avoir pas sanctionné l'atteinte portée aux droits de la défense par l'absence au dossier du mandat de dépôt alors que, gardien de la liberté individuelle, il se devait de vérifier ce titre de détention ; que, cependant, saisi d'une demande en prolongation de la détention, le juge des libertés, habilité à connaître du sort futur de l'incarcération, ne pouvait rétroactivement apprécier le bien-fondé de la mesure d'enfermement dont il n'était pas le juge d'appel, même à supposer que ce recours fût encore ouvert, ce qui n'était pas le cas ; qu'au demeurant, quel que fût l'état du dossier en possession du premier juge qui a effectivement regretté l'absence de cette pièce qu'il a expliquée par la transmission du dossier à la cour de céans, celle-ci est en mesure de constater que le mandat de dépôt décerné contre Louis X... le 26 mars 2007 figure parmi les documents de la cause sous la cote C VI 16 ; qu'ainsi désormais le moyen manque en fait ; qu'au fond, la détention provisoire de Louis X... reste l'unique moyen d'abord d'empêcher une concertation frauduleuse entre lui-même, qui conteste sa participation aux faits poursuivis et ses complices, puis d'empêcher le demandeur de se soustraire à la justice comme il avait cherché à le faire précédemment en ne réintégrant pas la prison après une permission de sortir, enfin de ne pas aviver le trouble exceptionnel et persistant, malgré le temps écoulé, porté à l'ordre public par la tentative d'assassinat dont s'agit commise à l'intérieur même d'une enceinte pénitentiaire et dont la victime a subi l'important préjudice lié aux lésions ci-avant décrites ; qu'un contrôle judiciaire ne suffirait pas à assurer les objectifs précités ; que le premier juge, en considération des investigations qui restent à mener, a sagement estimé à trois mois le délai prévisible d'achèvement de la procédure, avant de prolonger pour 6 mois la détention provisoire dudit Louis X... ;

"1°) alors que le juge des libertés et de la détention ne peut légalement convoquer un mis en examen pour décider de la prolongation de sa détention provisoire que s'il est saisi à cette fin par le juge d'instruction au moyen d'une ordonnance motivée ; que Louis X... soulevait, dans son mémoire régulièrement déposé, qu'il avait été convoqué par le juge des libertés et de la détention le 18 août 2008, alors que l'ordonnance du juge d'instruction le saisissant n'a été prise que postérieurement, le 15 septembre 2008 ; qu'en convoquant Louis X... alors qu'il n'était pas saisi par le juge d'instruction et n'avait dès lors pas compétence pour le faire, le juge des libertés et de la détention a empiété sur les attributions du juge d'instruction, seul compétent pour décider de la saisine du juge des libertés et de la détention ; qu'en se bornant à énoncer qu'il a été statué sur la prolongation de la détention provisoire par un juge compétent sans répondre à l'argument du mis en examen relative à l'irrégularité de la convocation, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;

"2°) alors que le juge des libertés et de la détention institué en vue d'assurer la séparation des fonctions d'instruction et de placement ou prolongation de la détention provisoire est indépendant du juge d'instruction ; que le fait que le juge des libertés et de la détention ait émis une convocation en vue d'un débat contradictoire pour une prolongation de la détention provisoire avant d'avoir été saisi par le juge d'instruction suppose nécessairement que le juge des libertés et de la détention envisageait de prolonger la détention provisoire et qu'il savait que le juge d'instruction souhaitait cette prolongation ; qu'en énonçant que l'initiative de la convocation ne préjugeait en rien de l'issue, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision" ;

"3°) alors que le respect des droits de la défense implique que, devant le juge des libertés et de la détention, l'intégralité des pièces communiquées à ce magistrat aient été préalablement communiquées à la défense ; que l'avocat soulevait, dans son mémoire régulièrement déposé, qu'à la consultation du dossier de l'information, le 14 septembre, en vue de la préparation de la défense pour le débat du 17 septembre, il n'avait pas pu prendre connaissance d'une quelconque ordonnance de saisine du juge d'instruction ; que la chambre de l'instruction, qui a constaté l'absence de cette pièce au dossier de la procédure à cette date, ne pouvait pas écarter la nullité sans constater que l'avocat avait eu connaissance de cette pièce ;

"4°) alors que la chambre de l'instruction, qui a constaté que le dossier de la procédure n'était pas complet devant le juge des libertés et de la détention, ne pouvait pas justifier l'absence de la pièce en énonçant que la pièce était cependant présente dans le dossier versé devant elle" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Louis X..., mis en examen pour tentative d'assassinat et placé en détention provisoire le 26 mars 2007, a été convoqué, le 18 août 2008, par le juge des libertés et de la détention pour participer au débat contradictoire, fixé au 17 septembre suivant, aux fins de statuer sur la prolongation de sa détention provisoire ; qu'il a soutenu que, le juge d'instruction n'ayant saisi le juge des libertés et de la détention que par ordonnance datée du 15 septembre 2008, il avait été convoqué par un juge incompétent qui aurait commis un excès de pouvoir mettant en cause son impartialité ; qu'au surplus, la mise à la disposition de l'avocat du dossier alors que, quatre jours ouvrables avant le débat, il ne renfermait pas cette ordonnance, aurait été faite en violation de l'article 114 du code de procédure pénale ; qu'enfin il aurait été porté atteinte aux droits de la défense du fait de l'absence au dossier du mandat de dépôt dont les juges se devaient de vérifier la régularité ;que Louis X... a demandé l'annulation de sa convocation et, par voie de conséquence, celle de l'ordonnance prolongeant sa détention provisoire ;

Attendu que, pour refuser de faire droit à ces demandes, l'arrêt attaqué énonce qu'il a été statué sur la prolongation de la détention provisoire par le juge compétent, que l'avocat du mis en examen a été convoqué dans le délai légal et qu'en se déterminant après un débat contradictoire tenu sur une convocation dont l'initiative ne préjugeait pas de l'issue, le juge des libertés et de la détention n'a pas manqué à son devoir d'impartialité ; que les juges retiennent que l'article 114 du code de procédure pénale n'est pas applicable en l'espèce, et que le moyen pris de l'absence au dossier du mandat de dépôt manque en fait puisque ce titre de détention figure parmi les documents de la cause, le juge des libertés et de la détention ne pouvant au demeurant rétroactivement apprécier le bien fondé de la mesure d'enfermement ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, abstraction faite du motif erroné mais surabondant relatif à l'article 114 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 145-3, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a prolongé la détention provisoire de Louis X... ;

"aux motifs que, selon le demandeur, il fût convoqué le 18 août 2008 par le cabinet du juge des libertés en vue d'un débat contradictoire fixé au 17 septembre alors que, saisi par une ordonnance du juge d'instruction datée du 15 septembre, ce juge des libertés aurait été incompétent, en l'absence de saisine, pour délivrer la convocation et, ce faisant néanmoins, aurait commis un excès de pouvoir tout en manquant à l'impartialité en agissant d'initiative, violant ainsi les dispositions des articles 145 et 145-2 du code de procédure pénale et 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que, cependant, il a été statué sur la prolongation de la détention par le juge compétent et l'avocat a été convoqué dans le délai prévu par la loi ; qu'en se déterminant après un débat contradictoire tenu sur une convocation dont l'initiative ne préjugeait point de l'issue, le magistrat des libertés n'a pas manqué à son devoir d'impartialité ; qu'il est également articulé en faveur du demandeur qu'en l'absence de saisine du juge des libertés avant le 15 septembre 2008, date à laquelle il fût saisi par ordonnance du magistrat instructeur, le dossier de la procédure, qui jusqu'alors ne renfermait donc pas cette ordonnance, n'avait pas été mis en son entier à la disposition de l'avocat quatre jours ouvrables avant le débat qui s'est tenu le 17 septembre suivant, en sorte qu'il y aurait là une violation de l'article 114 du code de procédure pénale ; que, cependant, ainsi que le premier juge l'a retenu à bon droit, l'article 145-2 dudit code relatif à la prolongation de la détention en matière criminelle ne renvoyant pas au troisième alinéa de l'article 114 qui prévoit la mise à disposition de la procédure quatre jours ouvrables avant chaque interrogatoire, ce dernier texte n'est pas applicable en l'espèce ; que, pour invoquer la violation des articles 145-2 du code de procédure pénale et 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, le mémoire fait grief au premier juge de n'avoir pas sanctionné l'atteinte portée aux droits de la défense par l'absence au dossier du mandat de dépôt alors que, gardien de la liberté individuelle, il se devait de vérifier ce titre de détention ; que, cependant, saisi d'une demande en prolongation de la détention, le juge des libertés, habilité à connaître du sort futur de l'incarcération, ne pouvait rétroactivement apprécier le bien-fondé de la mesure d'enfermement dont il n'était pas le juge d'appel, même à supposer que ce recours fût encore ouvert, ce qui n'était pas le cas ; qu'au demeurant, quel que fût l'état du dossier en possession du premier juge qui a effectivement regretté l'absence de cette pièce qu'il a expliquée par la transmission du dossier à la cour de céans, celle-ci est en mesure de constater que le mandat de dépôt décerné contre Louis X... le 26 mars 2007 figure parmi les documents de la cause sous la cote C VI 16 ; qu'ainsi désormais le moyen manque en fait ; qu'au fond, la détention provisoire de X... reste l'unique moyen d'abord d'empêcher une concertation frauduleuse entre lui-même, qui conteste sa participation aux faits poursuivis et ses complices, puis d'empêcher le demandeur de se soustraire à la justice comme il avait cherché à le faire précédemment en ne réintégrant pas la prison après une permission de sortir, enfin de ne pas aviver le trouble exceptionnel et persistant, malgré le temps écoulé, porté à l'ordre public par la tentative d'assassinat dont s'agit commise à l'intérieur même d'une enceinte pénitentiaire et dont la victime a subi l'important préjudice lié aux lésions ci-avant décrites ; qu'un contrôle judiciaire ne suffirait pas à assurer les objectifs précités ; que le premier juge, en considération des investigations qui restent à mener, a sagement estimé à 3 mois le délai prévisible d'achèvement de la procédure, avant de prolonger pour 6 mois la détention provisoire dudit Louis X... ;

"alors que, lorsque la détention provisoire excède un an en matière criminelle, les décisions ordonnant la prolongation de cette mesure doivent comporter les indications particulières qui justifient, en l'espèce, la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure ; qu'en se bornant à énoncer que des « investigations restent à mener », sans donner les raisons particulières nécessitant en l'espèce des investigations ni en précisant ces investigations, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés" ;

Attendu qu'en confirmant, par les motifs reproduits au moyen, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention énonçant qu'en considération des investigations restant à mener, le délai prévisible d'achèvement de la procédure pouvait être fixé à trois mois, la chambre de l'instruction a satisfait aux exigences de l'article 145-3 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme Chanet conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Foulquié conseiller rapporteur, Mme Ponroy conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-88099
Date de la décision : 18/02/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Reims, 14 octobre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 fév. 2009, pourvoi n°08-88099


Composition du Tribunal
Président : Mme Chanet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.88099
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