La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/01/2009 | FRANCE | N°08-81434

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 janvier 2009, 08-81434


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Patrick,
- Y... Colette, épouse X...,
- X... Martine, épouse Z...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS , 9e chambre, en date du 8 janvier 2008, qui, dans la procédure suivie contre le premier du chef d'abus de biens sociaux et contre les deux derniers du chef de recel, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le troisième moyen de casstion, pris de la violation des

articles 8 et 10 du code de procédure pénale, L. 223-23 et L. 225-254 du code de commerce, ense...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Patrick,
- Y... Colette, épouse X...,
- X... Martine, épouse Z...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS , 9e chambre, en date du 8 janvier 2008, qui, dans la procédure suivie contre le premier du chef d'abus de biens sociaux et contre les deux derniers du chef de recel, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le troisième moyen de casstion, pris de la violation des articles 8 et 10 du code de procédure pénale, L. 223-23 et L. 225-254 du code de commerce, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, infirmatif à cet égard, a jugé que la prescription des faits d'abus de biens sociaux n'était pas acquise pour les faits antérieurs au 22 juillet 1999, en ce qui concerne les emplois fictifs ;

"aux motifs que l'imputation comptable des emplois litigieux sur la masse salariale importante concernant les trente-cinq salariés de la société, l'inscription de Colette Y..., épouse X..., et de Martine X..., épouse Z..., parmi les effectifs de la société, les déclarations à l'administration fiscale et aux organismes sociaux, les fiches de paie délivrées à Colette Y..., épouse X..., et à Martine X..., épouse Z..., sont autant d'artifices qui ont permis de dissimuler le caractère indu des paiements effectués au profit des deux susnommées ; que le point de départ de la prescription doit donc, en l'espèce, être fixé à la date à laquelle les faits ont pu être révélés dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; que ce n'est qu'au cours de l'enquête diligentée sur les instructions du parquet, datée du 9 juillet 2001, que le caractère fictif des emplois de Colette Y..., épouse X..., et de Martine X..., épouse Z..., est apparu et que des poursuites ont pu être engagées ; que les premiers actes de poursuite, constitués par les instructions aux fins d'enquête données par le procureur de la République, étant intervenus le 22 juillet 2002, la prescription n'est pas acquise ;

"1°) alors que la prescription de l'action publique du chef d'abus de biens sociaux court, sauf dissimulation, à compter de la présentation des comptes annuels par lesquels les dépenses litigieuses sont mises à la charge de la société ; qu'à cet égard, les demandeurs avaient invoqué l'absence de toute dissimulation, en faisant valoir que l'ensemble des dirigeants et actionnaires de la société PSE, qui appartenaient à deux familles qui avaient la maîtrise de la société, étaient au courant, dès l'origine, des emplois consentis à des membres d'une de ces familles et les avaient acceptés ; qu'effectivement, au moins en ce qui concerne Martine X..., la cour d'appel a constaté la connaissance et l'acceptation par le président du conseil d'administration de l'emploi ; qu'en jugeant pourtant qu'il importait peu de s'expliquer sur la connaissance par le président du conseil d'administration, son épouse et les actionnaires, du caractère fictif des embauches, ce qui était de nature à exclure toute dissimulation, et ainsi à fixer le point de départ de la prescription au jour de la présentation de l'imputation comptable des emplois litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale ;

"2°) alors que la prescription de l'action publique du chef d'abus de biens sociaux court, sauf dissimulation, à compter de la présentation des comptes annuels par lesquels les dépenses litigieuses sont mises à la charge de la société ; qu'à cet égard, les demandeurs avaient invoqué l'absence de toute dissimulation, en faisant valoir que l'ensemble des dirigeants et actionnaires de la société PSE, qui appartenaient à deux familles qui avaient la maîtrise de la société, étaient au courant dès l'origine des emplois consentis à des membres d'une de ces familles, et les avaient acceptés ; que, pour ce qui concernait Colette X..., les demandeurs avaient fait valoir que celle-ci avait été embauchée en 1994 sur proposition de Prosper A... et que le contrôleur fiscal avait attesté que Prosper A... lors du contrôle fiscal de 1997 lui avait présenté « Mme Colette X..., responsable administratif » ; qu'en jugeant pourtant qu'il importait peu de s'expliquer sur la connaissance par le président du conseil d'administration, son épouse et les actionnaires, du caractère fictif des embauches, ce qui était de nature à exclure toute dissimulation, et ainsi à fixer le point de départ de la prescription au jour de la présentation de l'imputation comptable des emplois litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale" ;

Attendu que, pour dire non prescrits les faits d'abus de biens sociaux commis par Patrick X... de 1995 au 21 juillet 1999, au préjudice de la société Paris sud électronique composants, dont il était directeur général, et les faits de recel commis par Colette X..., son épouse, de fin 1994 au 21 juillet 1999 et par Martine Z..., sa soeur, de 1995 au 21 juillet 1999, l'arrêt énonce que les paiements de salaires fictifs, constitutifs des délits d'abus de biens sociaux et de recel, ont été dissimulés par divers artifices ; que les juges ajoutent que ce n'est qu'au cours de l'enquête diligentée à la demande du procureur de la République, le 9 juillet 2001, que ces faits sont apparus dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique et que le premier acte interruptif de prescription est intervenu le 22 juillet 2002 ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui caractérisent la dissimulation, et d'où il résulte que la prescription n'est pas acquise la cour d' appel a justifié sa décision ;

Que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1 du code pénal, L. 241-3, L. 223-23 et L. 225-254 du code de commerce, ensemble les articles 8, 10 et 593 du code de procédure pénale, défaut de réponse aux conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a jugé que la prescription des faits d'abus de biens sociaux n'était pas acquise, en ce qui concerne les fausses casses, pour l'opération du 15 décembre 1998 ;

"aux motifs que ces faits poursuivis par le ministère public sous la qualification d'escroquerie caractérisent à l'encontre de Patrick X..., mandataire social de la société PSEC, le délit d'abus de biens sociaux ;

"1°) alors que, il résulte des propres constatations des juges du fond que la remise de la chose (à savoir la récupération du matériel mis à la casse par le dirigeant social) avait été provoquée par les manoeuvres frauduleuses, ayant consisté à simuler, devant huissier, une remise des objets à la casse, si bien que l'infraction devait recevoir la qualification d'escroquerie et non d'abus de biens sociaux ; qu'ainsi, en requalifiant les faits d'escroquerie en faits d'abus de biens sociaux, pour appliquer la prescription du délit d'abus de biens sociaux, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

"2°) alors que, en ne recherchant pas, en réfutation des conclusions des demandeurs, si, en l'absence de toute dissimulation des faits de « fausse casse » aux dirigeants et actionnaires de la société PSEC, la prescription n'avait pas commencé à courir à compter de la commission de l'acte, soit le 15 décembre 1998, ou à tout le moins à compter de l'approbation des comptes de l'exercice 1998 lors de l'assemblée générale du 20 mai 1999, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt que Patrick X... a été poursuivi du chef d'escroquerie, au préjudice de la société Paris sud électronique composants, pour avoir, courant 1998 et 1999, effectué de fausses opérations de destruction de matériels informatiques et électroniques qui, en définitive, étaient vendus sans facture ;

Attendu que, pour requalifier ces faits et dire qu'ils constituaient le délit d'abus de biens sociaux, l'arrêt énonce, notamment, qu'ils ont été dissimulés par de fausses opérations de destruction constatées par huissier et qu'ils ne sont apparus, dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique, qu'en 2001, lors de l'enquête diligentée sur les faits d'escroquerie à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les éléments constitutifs du délit d'abus de biens sociaux ont été caractérisés et que les faits ne sont pas prescrits, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Qu'ainsi, le moyen doit être écarté ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, L. 210-9 du code de commerce, dénaturation des termes du litige, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a jugé recevable la constitution de partie civile de la société Paris sud électronique, aux droits de la société Paris sud électronique composants ;

"aux motifs qu'à la suite du décès de Prosper A..., survenu le 4 janvier 2007, une assemblée générale extraordinaire du 15 janvier 2007, dont la validité n'est pas mise en cause, a nommé Dolly A... président du conseil d'administration en remplacement de son défunt mari ; que, contrairement aux allégations des prévenus, le fait que cette nomination n'ait pas fait l'objet d'une inscription au registre du commerce et n'ait pas été publiée, est sans incidence sur la recevabilité des demandes formées devant la cour par la société PSEC, dont la constitution de partie civile devant le tribunal et l'appel sont réguliers ;

"1°) alors que les demandeurs, dans leurs conclusions, avaient mis en cause la régularité de la nomination de Dolly A... au regard de la loi et des statuts, notamment sur le plan des conditions de convocation de l'assemblée générale, si bien qu'en énonçant que la validité de l'assemblée générale extraordinaire du 15 janvier 2007 n'aurait pas été mise en cause, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et les conclusions des parties ;

"2°) alors que la société ne peut se prévaloir, à l'égard des tiers, des nominations et cessation de fonctions des dirigeants, tant qu'elles n'ont pas été régulièrement publiées ; que la cour d'appel ne pouvait admettre la recevabilité des demandes présentées par une partie civile, personne morale, représentée par une personne physique dont la nomination alléguée n'avait fait l'objet d'aucune publication, sauf à violer les textes visés au moyen ;

"3°) alors que, en ne s'expliquant pas sur la validité de la désignation de Dolly A... comme président du conseil d'administration de la société PSE, et par conséquent sur la régularité de la représentation en justice de cette société au jour de l'audience, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 1134 du code civil, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale, dénaturation des documents de la cause, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a jugé recevable la constitution de partie civile de la société PSE, aux droits de la société PSEC ;

"aux motifs que le protocole, auquel la société PSEC n'est pas partie, ne peut avoir d'effet juridique à l'égard de cette dernière ; que, de surcroît, ce protocole comporte trois conventions qui ont pour objet respectif :
- de régler par voie de transaction, le contentieux prud'homal existant entre la société PSEC et Patrick X...,
- d'organiser la cession à Prosper A... des participations et créances détenues par Patrick X... et divers membres de sa famille dans les sociétés commerciales ou civiles appartenant ou reliées au groupe Paris sud électronique,
- de répondre, en prévoyant le rachat de la créance par la société PSEC, à la demande présentée par Patrick X... devant le tribunal de commerce, pour obtenir le remboursement du solde créditeur de son compte courant d'associé dans la société PSE ; que ce protocole ne vise à l'évidence ni les opérations de « fausses casses » ni les emplois fictifs ; qu'en conséquence, la constitution de partie civile de la société PSE et l'action engagée par elle pour voir déclarer les trois prévenus coupables d'abus de biens sociaux et recel, sont recevables ; qu'enfin, l'argument des prévenus selon lequel Prosper A... et la société PSEC auraient eux-mêmes participé aux faits incriminés et se trouveraient, pour ce motif donc, privés du droit de se constituer partie civile, est sans fondement juridique ;

"1°) alors que le protocole d'accord global du 26 février 2002 était signé par Prosper A..., agissant au nom des sociétés du groupe Paris sud électronique, si bien qu'en énonçant que la société PSEC n'aurait pas été partie à ce protocole, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette convention ;

"2°) alors que le protocole d'accord global comprenait non seulement les trois conventions indiquées, mais constituait un accord global, visant à mettre un terme définitif à leurs différends au sein des sociétés commerciales ou civiles appartenant au groupe Paris sud électronique et emportant renonciation à tous droits, actions ou prétentions de quelque nature que ce soit, particulièrement concernant les faits allégués par l'administration pour justifier les redressements notifiés le 11 juin 2002 à Paris sud électronique composants et contestés par la société, faits faisant par ailleurs l'objet d'une enquête judiciaire, ne rien faire sur le plan d'éventuelles responsabilités pénales ou fiscales, sauf s'il s'agit d'obéir à des prescriptions légales, qui puisse nuire aux intérêts ou à la défense de l'autre partie, en outre, informer l'autre partie pour avis de tout développement en la matière, dans les quatorze jours de l'événement ; qu'en refusant de faire application à l'égard de la société PSE et des signataires du protocole de la renonciation claire et non équivoque à tous droits, actions et prétentions et de l'engagement de ne rien faire sur le plan d'éventuelles responsabilités pénales et fiscales au regard des faits allégués par l'administration faisant l'objet de l'enquête judiciaire, la cour d'appel a méconnu la volonté claire et précise des parties ;

"3°) alors que, en ne s'expliquant pas sur le moyen tiré de la connaissance et de la participation de tous les dirigeants et actionnaires de la société PSEC aux faits poursuivis, ce qui était de nature, en application de la règle « nemo auditur », à faire obstacle à l'action civile, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour dire recevable la constitution de partie civile de la société Paris sud électronique et inapplicable le protocole d'accord signé le 26 février 2002, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que la constitution de partie civile de la société est régulière et que le protocole d'accord ne concerne pas les faits objet de la poursuite, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Qu'ainsi, les moyens, le deuxième en sa troisième branche inopérant en ce qu'il soutient que tous les dirigeants et actionnaires connaissaient et participaient aux faits poursuivis, doivent être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

DONNE ACTE à la société Paris sud électronique de ce que Me B..., mandataire judiciaire, et Me C..., administrateur, désignés par jugement du tribunal de commerce d'Evry, en date du 21 juillet 2008, ouvrant une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société susmentionnée, interviennent volontairement à l'instance ;

FIXE à 1 000 euros la somme que Patrick X..., Martine X..., épouse Z..., et Colette Y..., épouse X..., devront payer, chacun, à la société Paris sud électronique, au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Ract-Madoux conseiller rapporteur, M. Rognon conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-81434
Date de la décision : 28/01/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 08 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 jan. 2009, pourvoi n°08-81434


Composition du Tribunal
Président : M. Dulin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.81434
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award