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28/01/2009 | FRANCE | N°08-40519;08-40520;08-40521;08-40522

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 janvier 2009, 08-40519 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° G 08-40.519 au n° M 08-40.522 ;
Sur le moyen unique, commun aux pourvois :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble l'article 1er de la loi n° 2004-105 du 3 février 2004 et l'article 2.11° du décret n° 2004-1466 du 23 décembre 2004 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'en 1989, les Charbonnages de France et les Houillères de Lorraine, du Nord-Pas-de-Calais et du Centre Midi ont créé l'Association nationale pour la gestio

n des retraités de Charbonnages de France et des Houillères de Bassin et de leu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° G 08-40.519 au n° M 08-40.522 ;
Sur le moyen unique, commun aux pourvois :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ensemble l'article 1er de la loi n° 2004-105 du 3 février 2004 et l'article 2.11° du décret n° 2004-1466 du 23 décembre 2004 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'en 1989, les Charbonnages de France et les Houillères de Lorraine, du Nord-Pas-de-Calais et du Centre Midi ont créé l'Association nationale pour la gestion des retraités de Charbonnages de France et des Houillères de Bassin et de leurs ayants droit, l'ANGR ; que la loi n° 2004-105 du 3 février 2004 a créé l'établissement public à caractère administratif Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) qui vient aux droits de l'ANGR ; que celle-ci s'est substituée au Centre national de gestion des retraités ; que MM. X..., Y..., Z... et A..., salariés des Houillères du Bassin du Centre et du Midi, avaient droit, en qualité de retraités, au versement d'une indemnité de logement et d'une indemnité de chauffage ; que le jour de leur départ en retraite, entre 1984 et 1987, ils ont conclu avec leur employeur un contrat par lequel ils recevaient un certain capital qu'ils remboursaient leur vie durant au moyen de l'indemnité de logement à laquelle ils avaient droit ; que faisant valoir que le montant du capital avait été intégralement remboursé, ils ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande à l'encontre de l'ANGDM pour obtenir la restitution de l'indemnité de logement que cet organisme avait continué à percevoir ;
Attendu que pour déclarer la juridiction prud'homale incompétente au profit de la juridiction administrative, les arrêts retiennent que l'objet de l'ANGDM est d'assurer au nom de l'Etat la permanence du service des pensions et des avantages annexes dus aux anciens mineurs alors même que les employeurs de ces agents ont disparu ; qu'en se substituant à ces entreprises ayant cessé leur activité, l'ANGDM assure une mission de service public social ; que ses ressources sont constituées par une subvention de l'Etat, des rémunérations pour service rendu et des dons et legs ; que ses règles de fonctionnement sont conformes au caractère administratif du service ; que la loi précitée qualifie elle-même l'ANGDM d'établissement public administratif ; que si les litiges ont trait notamment à un contrat conclu avec le représentant de l'employeur par lequel l'ancien agent d'une entreprise minière recevait un certain capital qu'il remboursait sa vie durant au moyen de l'indemnité de logement à laquelle il avait droit en application du statut des mineurs, un tel contrat relève nécessairement des prestations dues aux anciens agents des entreprises minières et ardoisières ayant définitivement cessé leur activité, c'est-à-dire à la mission de service public confiée par la loi à l'ANGDM ; que celle-ci n'est pas l'employeur des agents en cause et n'a pas succédé aux employeurs en application de l'article L. 122-12 du code du travail, les contrats de travail n'étant plus en cours dès lors que les agents en cause sont en retraite et faute de transfert d'une entité économique autonome, ni en application de l'article 7 de la loi qui vise les agents avec lesquels l'ANGR avait conclu un contrat de travail pour sa propre activité ;
Attendu, cependant, d'une part, qu'aux termes de l'article 2.11° du décret du 23 décembre 2004, l'ANGDM se substitue aux entreprises dans les contentieux relatifs aux droits et prestations relevant de sa compétence ainsi que dans ceux liés à la cessation d'activité des entreprises, d'autre part, que les contrats conclus entre les salariés et leur employeur étaient des contrats de droit privé, en sorte que les litiges relatifs à leur application relèvent de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 30 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef de la compétence ;
Déclare la juridiction judiciaire compétente ;
Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens pour qu'il soit statué sur le fond du litige ;
Condamne l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à MM. X..., Y..., Z... et A... la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit aux pourvois n° G 08-40.519 au n° J 08-40.522 par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour MM. X..., Y..., Z... et A....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la juridiction prud'homale incompétente au profit de la juridiction administrative et renvoyé les parties à mieux se pourvoir,
Aux motifs que le salarié a été engagé par les Houillères du Bassin du Centre et du Midi en qualité d'agent de maîtrise jusqu'à sa retraite; qu'en application du statut du mineur, il percevait une indemnité de logement et une indemnité de chauffage ; que le jour de son départ en retraite, il a conclu avec le Centre national de gestion des retraités un contrat par lequel il recevait un certain capital qu'il remboursait sa vie durant au moyen de l'indemnité de logement à laquelle il avait droit, ce capital lui permettant de se porter acquéreur de la maison qu'il occupait; que constatant que le montant du capital avait été intégralement remboursé, il saisissait le Conseil de prud'hommes à l'encontre de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs pour obtenir la restitution de l'indemnité de logement que cet organisme avait selon lui continué indûment à percevoir ; que l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs a été créée par la loi n° 2004-105 du 3 février 2004 qui dispose dans son article 1er : "Il est créé un établissement public de l'Etat à caractère administratif dénommé "Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs" qui a pour mission de garantir, au nom de l'Etat, en cas de cessation définitive d'activité d'une entreprise minière ou ardoisière, (..) l'application des droits sociaux des anciens agents de cette entreprise, des anciens agents de ses filiales relevant du régime spécial de la sécurité sociale dans les mines et de leurs ayant -droits"; qu'aux termes de l'article 2 alinéa 1er de la loi, l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs assume les obligations de l'employeur, en lieu et place des entreprises minières et ardoisières ayant définitivement cessé leur activité, envers leurs anciens agents et ceux de leurs filiales relevant du régime spécial de la sécurité sociale dans les mines, en congé charbonnier de fin de carrière, en dispense ou en suspension d'activité, en garantie de ressources ou mis à disposition d'autres entreprises; qu'aux termes de l'article 2 alinéa 2, l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs liquide, verse ou attribue l'ensemble des prestations dues aux anciens agents des entreprises minières et ardoisières ayant définitivement cessé leur activité ; que, dès lors, l'objet de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs est d'assurer au nom de l'Etat la permanence du service des pensions et des avantages annexes dus aux anciens mineurs en application du Statut alors même que les employeurs de ces agents ont disparu ; qu'en se substituant à ces entreprises ayant cessé leur activité, l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs assure une mission de service public social ; que ses ressources sont constituées, selon l'article 5 de la loi, par une subvention de l'Etat des rémunérations pour service rendu et des dons et legs ; que les règles de fonctionnement de l'agence sont conformes au caractère administratif du service ; que la loi précitée qualifie elle-même l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs d'établissement public administratif; que si le litige a trait notamment à un contrat conclu avec le Centre National de Gestion des Retraites par lequel l'ancien agent d'une entreprise minière recevait un certain capital qu'il remboursait sa vie durant au moyen de l'indemnité de logement à laquelle il avait droit en application du Statut des mineurs, un tel contrat relève nécessairement des prestations dues aux anciens agents des entreprises minières et ardoisières ayant définitivement cessé leur activité, c'est-à-dire à la mission de service public confiée par la loi à l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs ; que celle-ci n'est pas l'employeur des agents en cause et n'a pas succédé aux employeurs en application de l'article L 122-12 du code du travail, les contrats de travail n'étant plus en cours dès lors que les agents en cause sont en retraite et faute de transfert d'une entité économique autonome, ni en application de l'article 7 de la loi qui vise les agents avec lesquels l'Association nationale de gestion des retraités des Charbonnages de France et des Houillères de bassin avait conclu un contrat de travail pour sa propre activité ; que le litige relève dès lors de la compétence de la juridiction administrative ;
Alors que, d'une part, l'établissement public de l'Etat à caractère administratif dénommé « Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs » a pour mission de garantir, au nom de l'Etat, en cas de cessation définitive d'activité d'une entreprise minière ou ardoisière, quelle que soit sa forme juridique, d'une part, l'application des droits sociaux des anciens agents de cette entreprise, des anciens agents de ses filiales relevant du régime spécial de la sécurité sociale dans les mines et de leurs ayants droit tels qu'ils résultent des lois, règlements, conventions et accords en vigueur au jour de la cessation définitive d'activité de l'entreprise et, d'autre part, l'évolution de ces droits ; que lorsqu'un salarié est retraité à la date du transfert, le litige relatif aux conséquences de sa mise en retraite relève de la compétence judiciaire, dès lors que ledit salarié n'a jamais été lié à l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs par un rapport de droit public ; qu'en décidant que le litige relève de la compétence du juge administratif, la Cour d'appel a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs, violant ainsi la loi des 16 - 24 août 1790 et du décret du 16 fructidor AN III, ensemble l'article 1er de la loi n° 2004-105 portant création de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs et diverses dispositions relatives aux mines ;
Alors que, d'autre part, sauf disposition législative contraire, la nature juridique d'un contrat s'apprécie à la date de sa conclusion ; que constitue un contrat de droit privé celui conclu le jour de son départ à la retraite par un salarié avec son employeur représenté par l'organisme de gestion de sa retraite ayant le statut d'association loi de 1901 par lequel un capital d'un certain montant lui est versé à charge pour lui de le rembourser sa vie durant au moyen de l'indemnité de logement à laquelle il a droit en vertu des dispositions légales régissant son statut de mineur, dès lors qu'il ne comporte aucune clause exorbitante ; qu'en déclarant que ce contrat relève nécessairement des prestations dues aux anciens agents des entreprises minières et ardoisières ayant définitivement cessé leur activité, c'est-à-dire à la mission de service public confiée par la loi à l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, créée par une loi postérieure à sa conclusion, la Cour d'appel a derechef méconnu le principe de la séparation des pouvoirs, violant ainsi la loi des 16 - 24 août 1790 et du décret du 16 fructidor AN III.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-40519;08-40520;08-40521;08-40522
Date de la décision : 28/01/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partiellement sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Domaine d'application - Litige relatif à un contrat de droit privé - Contrat de droit privé - Caractérisation - Cas - Contrat de prêt entre salariés et employeur auquel se substitue un établissement public administratif - Applications diverses

Aux termes de l'article 2 11° du décret n° 2004-1466 du 23 décembre 2004, l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs se substitue aux entreprises dans les contentieux relatifs aux droits et prestations relevant de sa compétence ainsi que dans ceux liés à la cessation d'activité des entreprises. Relève de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire des litiges relatifs à l'application de contrats de prêt conclus entre des salariés et leur employeur, de droit privé


Références :

loi des 16-24 août 1790

décret du 16 fructidor an III

article 1er de la loi n° 2004-105 du 3 février 2004

article 2 11° du décret n° 2004-1466 du 23 décembre 2004

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 30 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 jan. 2009, pourvoi n°08-40519;08-40520;08-40521;08-40522, Bull. civ. 2009, V, n° 29
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 29

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Duplat (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Linden
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.40519
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