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28/01/2009 | FRANCE | N°07-42809

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 janvier 2009, 07-42809


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu la loi des 16-24 août 1790 et l'article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux de droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française, modifié par la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par arrêté du 19 novembre 2003 le président du gouvernement de la Polynésie française a nommé M. X... en qualité de directe

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu la loi des 16-24 août 1790 et l'article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux de droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française, modifié par la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par arrêté du 19 novembre 2003 le président du gouvernement de la Polynésie française a nommé M. X... en qualité de directeur du Fonds d'entraide aux îles ; que le 19 décembre suivant, un contrat de travail a été signé ; que par arrêté du 29 mars 2005, le président de la Polynésie française a mis fin aux fonctions de l'intéressé, lequel, estimant que son licenciement était intervenu sans cause réelle et sérieuse, a saisi le tribunal du travail ;

Attendu que pour dire les juridictions de l'ordre judiciaire incompétentes pour statuer sur ces demandes, l'arrêt retient que les parties ont entendu soumettre leur relation à un statut de droit public, et que M. X..., étant chargé de la direction d'un établissement public à caractère industriel et commercial, le litige opposant les parties relève de la compétence du juge administratif ;

Attendu, cependant, que selon l'article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986, modifié par la loi du 21 juillet 2003, ladite loi ne s'applique pas, sauf dispositions contraires, aux personnes relevant d'un statut de droit public, y compris les fonctionnaires et les agents non titulaires relevant du statut de droit public adopté par délibération de l'assemblée de la Polynésie française ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que les parties ne peuvent déroger aux dispositions d'ordre public régissant la répartition des compétences entre les juridictions administratives et judiciaires et que la qualité de directeur d'un établissement public à caractère industriel et commercial de M. X... n'avait pas pour effet de le soumettre à un statut de droit public au sens de l'article 1er de la loi précitée, la cour d'appel a violé les dispositions susvisés ;

Vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mars 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef de la compétence ;

Dit que le juge judiciaire est compétent ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Papeete, autrement composée, pour qu'il soit statué sur les points restants en litige ;

Condamne le Fonds d'entraide aux îles aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Fonds d'entraide aux îles à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils pour M. X....

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré les tribunaux judiciaires incompétents pour statuer sur les demandes de Monsieur Patrick X... et de l'avoir condamné à verser la somme de 200 000 francs Pacifiques au Fonds d'entraide aux îles ;

AUX MOTIFS QUE l'article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 dispose que "la présente loi ne s'applique pas aux personnes relevant d'un statut de droit public" ; qu'en l'espèce, les parties ont eu l'intention de soumettre leurs relations professionnelles à un tel statut puisque le contrat de travail vise la délibération n° 96-177 APF du 19 décembre 1996 relative aux agents publics occupant des emplois fonctionnels ou rémunérés par rapport à la grille des emplois fonctionnels et notamment son titre III relatif au régime des agents non titulaires nommés à des emplois fonctionnels qui, lui-même, fait référence à la délibération n° 95-215 AT du 14 décembre 1995 portant statut général de la fonction publique du territoire de la Polynésie française ; que par ailleurs, peu importe de rechercher, non pas si le poste de directeur du Fonds d'entraide aux îles est un emploi fonctionnel, mais si les fonctions auxquelles a été nommé Patrick X... permettent de lui attribuer la qualité d'agent public, une telle qualité n'étant pas obligatoirement liées à l'application de la délibération du 19 décembre 1986 et pouvant résulter de la nature ainsi que de l'importance des activités exercées ; qu'or, la lecture de la délibération n° 2001-54 APF du 7 juin 2001 relative au Fonds d'entraide aux îles et l'arrêté n° 1162/CM du 12 septembre 2001 portant organisation et fonctionnement du Fonds d'entraide aux îles fait ressortir que :

- le directeur de l'établissement public à caractère industriel et commercial dénommé "Fonds d'entraide aux îles" "met en oeuvre les orientations arrêtées par le conseil d'administration" uniquement composé de ministres et de conseillers territoriaux ;

- il "assure la marche de l'établissement et dispose à cet égard des pouvoirs les plus étendus" ;

-"il est ordonnateur des recettes et des dépenses de l'établissement" et "peut créer des régies d'avances et des régies de recettes, sur avis conforme de l'agent comptable" ;

-"l'agent comptable du Fonds d'entraide aux îles est le trésorier des établissements publics" ;

- les opérations relatives à la gestion et comptable de l'établissement sont effectuées par le directeur, en sa qualité d'ordonnateur, et par le comptable habilité par le Trésor. Elles sont constatées... dans des écritures tenues selon les règles de la comptabilité publique applicables aux établissements publics à caractère industriel et commercial..." ; que le directeur du Fonds d'entraide aux îles est, en conséquence, chargé d'appliquer les décisions de dirigeants de la Polynésie française ; qu'il a sous ses ordres la totalité de l'établissement et il applique, en matière budgétaire, financière et comptable des règles de droit public ; qu'en outre, il est rémunéré en fonction de la grille indiciaire de la fonction publique ; qu'en outre, il est rémunéré en fonction de la grille indiciaire de la fonction publique ; qu'il doit donc être qualifié d'agent de droit public, qualification accordée de façon constante par le Conseil d'Etat et le Tribunal des conflits à l'agent chargé de la direction de l'ensemble d'un établissement public à caractère industriel et commercial ; qu'il convient, dans ces conditions, d'infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions et de déclarer incompétents les tribunaux judiciaires pour statuer sur les demandes de Patrick X..., le litige relevant de la compétence du juge administratif ; qu'il serait inéquitable de laisser à la charge du Fonds d'entraide aux îles la totalité de ses frais irrépétibles et il doit donc lui être alloué la somme de 200 000 FCP sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

ALORS QUE, D'UNE PART, les stipulations d'un contrat de travail ne peuvent déroger à une disposition d'ordre public régissant la répartition des compétences entre les juridictions administratives et judiciaires ; qu'en l'espèce, pour déclarer que le litige opposant Monsieur X... au Fonds d'entraide aux îles relevait de la compétence du juge administratif, la Cour affirme qu'il résulte du contrat de travail que les parties ont eu l'intention de soumettre leurs relations professionnelles à un statut de droit public ; qu'en statuant ainsi, la Cour viole la loi du 16-24 août 1690 ;

ALORS QUE, D'AUTRE PART, et en tout état de cause, aux termes de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1986, modifié par la loi du 21 juillet 2003, relative aux principes généraux du droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du Travail et des tribunaux du travail en Polynésie française, sauf dispositions contraires de la présente loi, elle ne s'applique pas aux personnes relevant d'un statut de droit public y compris les fonctionnaires et les agents non titulaires relevant du statut de droit public adopté par délibération de l'assemblée de la Polynésie française ; que la réserve relative au statut de droit public prévu par cet article concerne les personnes régies par le titre premier du statut général des fonctionnaires de l'Etat et des Collectivités territoriales, les fonctionnaires de la Polynésie française ainsi que les agents contractuels de droit public recruté en application d'une délibération de l'assemblée de la Polynésie française postérieure à la loi du 21 juillet 2003 ; qu'en l'espèce, pour déclarer le juge administratif compétent pour statuer sur les demandes de Monsieur X..., la Cour considère que l'intéressé, directeur d'un établissement public à caractère industriel et commercial, entre dans la catégorie des agents publics ; qu'en statuant ainsi, sans constater que Monsieur X... relève d'un statut de droit public au sens de la loi du 17 juillet 1986 modifiée, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard dudit texte, violé.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-42809
Date de la décision : 28/01/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partiellement sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Code du travail d'Outre-mer - Tribunal du travail en Polynésie française - Compétence - Compétence matérielle - Personnes ne relevant pas d'un statut de droit public - Domaine d'application

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Domaine d'application - Litige opposant un établissement à caractère industriel et commercial à ses agents de droit privé - Applications diverses - Agent contractuel chargé de la direction d'un établissement en Polynésie française

Selon l'article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986, relative aux principes généraux du droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française, modifié par la loi du 21 juillet 2003, ladite loi ne s'applique pas, sauf dispositions contraires, aux personnes relevant d'un statut de droit public, y compris les fonctionnaires et les agents non titulaires relevant du statut de droit public adopté par délibération de l'assemblée de la Polynésie française. La qualité de directeur d'un établissement public à caractère industriel et commercial de l'intéressé n'ayant pas pour effet de le soumettre à un statut de droit public au sens de ce texte, doit être cassé l'arrêt qui retient que le litige l'opposant à cet établissement relève de la compétence du juge administratif


Références :

loi des 16-24 août 1790

article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux de droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française
loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003

Décision attaquée : Cour d'appel de Papeete, 15 mars 2007

Sur le domaine d'application de l'article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986, relative aux principes généraux du droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française, à rapprocher :Soc., 10 février 2004, pourvois n° 01-45.089 et 01-45.090, Bull. 2004, V, n° 43 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 jan. 2009, pourvoi n°07-42809, Bull. civ. 2009, V, n° 23
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 23

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Duplat (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Bobin-Bertrand
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.42809
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