LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen pris en sa première branche :
Vu la loi des 16-24 août 1790, ensemble l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;
Attendu que l'association Port de plaisance de Saint-Aubin les Elbeuf, gestionnaire du port de plaisance par convention de gestion signée le 10 septembre 2002 avec la commune de Saint-Aubin les Elbeuf, a assigné M. X... devant le tribunal d'instance d'Elbeuf en paiement d'arriérés de cotisations ; que M. X... a soulevé l'incompétence de la juridiction saisie au profit de la juridiction administrative ;
Attendu que pour infirmer le jugement qui avait accueilli cette exception, au motif que le contrat comportait occupation du domaine public, l'arrêt retient que le litige porte sur l'application d'un contrat entre deux personnes privées et que les litiges entre les concessionnaires privés de service publics et les tiers relèvent de la juridiction judiciaire ;
Qu'en statuant ainsi sans dire en quoi la convention de gestion comportait ou non occupation du domaine public et constituait ou non une concession de service public, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen, autrement composée ;
Condamne l'association Port de plaisance de Saint-Aubin les Elbeuf aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Choucroy-Gadiou-Chevallier, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir débouté Monsieur X... de son exception d'incompétence au profit de la juridiction administrative,
AUX MOTIFS QUE «(...) Il résulte des termes de la Convention de gestion du port de SAINT AUBIN LES ELBEUF signée le 10 septembre 2002 entre la Commune et l'Association Port de Plaisance de SAINT AUBIN LES ELBEUF que celle-ci est une personne morale de droit privé qui, en sa qualité de concessionnaire et de gestionnaire de l'espace portuaire, est habilitée à conclure des contrats sous-seing privé avec des personnes privées (usagers, plaisanciers). Par ces contrats, et moyennant paiement d'une cotisation fixée annuellement par l'Association, l'usager bénéficie d'un droit de mouillage incluant la fourniture notamment d'énergie et d'un droit d'accès aux installations du port selon les dispositions du règlement intérieur. Or il est de principe que les litiges entre les concessionnaires privés de services publics et les tiers relèvent de la juridiction judiciaire. En lespèce, il est constant que le litige porte sur l'application d'un contrat sous-seing privé conclu entre l'Association Port de Plaisance de SAINT AUBIN LES ELBEUF, personne de droit privé, et Messieurs X... et Y..., également personnes privées, et plus particulièrement sur le paiement par les intéressés des cotisations dont il est allégué par l'Association qu'elles lui sont dues au regard dudit contrat, de telle sorte que le présent litige ressortit effectivement à la compétence de la juridiction judiciaire. L'exception dincompétence soulevée par Messieurs X... et Y... est donc infondée et le jugement sera infirmé de ce chef »
ALORS D'UNE PART QUE dès lors qu'une association, concessionnaire d'un port de plaisance comportant occupation du domaine public maritime, a accordé à un particulier un droit de mouillage sur ledit domaine, le litige intervenu entre les deux parties concernant le paiement des cotisations incluant notamment ce droit de mouillage concerne l'occupation du domaine public et relève par conséquent de la compétence du Tribunal administratif ; Qu'en en jugeant autrement aux motifs qu'il est de principe que les litiges entre les concessionnaires privés de services publics et les tiers relèvent de la juridiction judiciaire et que le litige porte sur l'application d'un contrat sous-seing privé conclu entre l'Association, personne de droit privé, et l'exposant, également personne privée, et plus particulièrement sur le paiement par ce dernier des cotisations dues au regard dudit contrat, la Cour d'appel a violé l'article L.84 du Code du domaine de l'État ;
ALORS D'AUTRE PART QUE dès lors qu'elle constatait elle-même que le bateau de l'exposant se trouve implanté hors du périmètre de l'Association, sur un terrain jouxtant ce périmètre et appartenant à VOIES NAVIGABLES DE FRANCE, organisme public, que l'Association, et l'exposant de son chef, occupent donc sans titre, la Cour d'appel ne pouvait, sans refuser de tirer de ses propres constatations les conclusions qui s'en évinçaient nécessairement, retenir la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; Qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.84 du Code du domaine de l'État.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir condamné Monsieur X... à payer à l'Association la somme de 3.527,86 uros au titre des cotisations arrêtées au 15 décembre 2006 avec intérêts au taux légal à compter de la première mise en demeure,
AUX MOTIFS QUE «(..) l'inexécution dont se prévalent Messieurs X... et Y... n'est nullement établie par les documents versés aux débats, et en particulier par les procès-verbaux de constat dhuissier de justice, qui montrent des installations normalement entretenues et qui ne sont nullement démonstratifs de griefs allégués à l'encontre de l'Association du Port de Plaisance de SAINT AUBIN LES ELBEUF qui, par ailleurs, justifie par les factures et les rapports d'activité versés aux débats d'un entretien régulier des installations et équipements portuaires mis à la disposition des plaisanciers adhérents. En outre, s'agissant de la délivrance des services, il ressort des éléments pro-duits aux débats qu'ils sont effectués en conformité avec le règlement intérieur et les nécessités des usagers, étant souligné que ceux-ci n'ont aucun droit de résider habituellement dans leur bateau ce qui, au vu des procès-verbaux de constat versés aux débats et des photographies annexées, n'apparaît pas être le cas de Messieurs X... et Y... dont les bateaux sont au sec et plus ou moins transformés en résidences fixes par des ajouts, appendices et autres constructions dont les effluents s'écoulent directement sur le sol. Par ailleurs, l'AUPSAE, association extérieure à la convention de gestion du port de SAINT AUBIN LES ELBEUF du 10 septembre 2002 et dont l'objet est limité, au vu des pièces versées aux débats, à la défense des intérêts des usagers du port n'a pas qualité à se substituer à l'Association du Port de Plaisance de SAINT AUBIN LES ELBEUF et, partant, à percevoir des cotisations pour la mise à disposition d'emplacements, même sous la forme de consignations. Enfin si, concernant Monsieur X..., son bateau se trouve bien implanté hors du périmètre de l'Association, sur un terrain jouxtant ce périmètre, il résulte de courriers adressés par VOIES NAVIGABLES DE FRANCE (VNF), organisme public chargé de la gestion des fleuves et rivières navigables de France, à l'Association du Port de Plaisance de SAINT AUBIN LES ELBEUF que cette occupation allait donner lieu à fixation d'une redevance à la charge de celle-ci. Au surplus, il résulte de ce qui précède que Monsieur X... bénéficie des services fournis par l'Association et qu à ce titre, il ne peut être dispensé du paiement des cotisations qui en constitue la contrepartie. »
ALORS D'UNE PART QUE ne satisfait pas aux exigences des articles 455 et 458 du Nouveau Code de procédure civile le jugement qui se dé-termine au simple visa d'éléments de preuve non précisément identifiés et n'ayant fait l'objet d'aucune analyse sommaire ; Qu'en se contentant d'énoncer, pour rejeter le moyen de défense de l'exposant pris de l'inexécution de ses obligations contractuelles par l'Association, que celle-ci n'est nullement établie par « les documents versés aux débats et en particulier par les procès-verbaux de constat d'huissier de justice », que l'appelante justifie « par les factures et rapports d'activité versés aux débats d'un entretien régulier des installations et équipements portuaires » et qu'il « ressort des éléments produits aux débats » que la délivrance des services est effectuée en conformité avec le règlement intérieur et les nécessités des usagers, la Cour d'appel, qui n'a procédé à aucune analyse sommaire des pièces sur lesquelles elle fondait sa conviction, a violé les articles 455 et 458 du Nouveau Code de procédure civile ;
ALORS D'AUTRE PART QUE le défaut de réponse aux conclusions équivaut au défaut de motifs ; Que l'exposant soulignait en pages 9 in fine et 10 de ses conclusions du 9 mars 2007 (prod.3) que, contrairement aux assertions de l'appelante selon laquelle elle justifierait parfaitement des entre-tiens et travaux effectués et de ceux projetés au regard des bilans financiers, il résultait de la pièce adverse n°21 que tel n'était absolument pas le cas ; Qu'en énonçant, sans répondre à ce moyen fondé sur une des propres pièces de l'appelante, que cette dernière justifie par les factures et rapports d'activité versés aux débats d'un entretien régulier des installations et équipements portuaires mis à la disposition des plaisanciers adhérents, la Cour d'appel a encore violé les articles 455 et 458 du Nouveau Code de procédure civile ;
ALORS ENFIN QUE le juge, tenu de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur un moyen qu'il a relevé d'office sans avoir préalablement recueilli les observations des parties ; Qu'en la présente espèce, si l'Association appelante faisait bien va-loir en page 7 de ses conclusions signifiées le 6 mars 2007 (prod.4) que certains plaisanciers utilisent leur emplacement de façon non-conforme au règlement intérieur, elle n'a cependant jamais soutenu que tel était le cas de l'exposant ; Qu'en relevant d'office et sans provoquer les observations des parties le moyen pris de ce que le bateau de l'exposant est au sec et plus ou moins transformé en résidence fixe par des ajouts, appendices et autres constructions dont les effluents s'écoulent directement dans le sol alors qu'il n'a aucun droit de résider habituellement dans son bateau, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Nouveau Code de procédure civile.